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Guide de préparations organiques à l’usage des étudiants/Précautions

La bibliothèque libre.
Traduction par Georges Dunant et H. Decker.
Gauthiers-Villars (p. XI-XV).

PRÉCAUTIONS À PRENDRE POUR ÉVITER LES ACCIDENTS.



Comme ce sont avant tout les yeux qui risquent d’être atteints au cours des opérations chimiques, on ne saurait trop recommander l’emploi régulier de lunettes.


I. Danger de feu.

Il faut surtout prendre des précautions quand on travaille avec de l’éther, de l’éther de pétrole, du benzène, du sulfure de carbone et des alcools.

Pour prévenir tout danger d’incendie, il ne faudra jamais avoir sur sa table plus d’un litre de ces substances.

Lorsqu’on a à distiller des liquides inflammables, il faut se servir d’un réfrigérant et vérifier si l’eau coule réellement dans ce réfrigérant. On pourra placer un linge au-dessus du récipient dans lequel on reçoit le liquide distillé, de façon à disperser les vapeurs dans l’air.

Si le distillat venait à s’enflammer, il ne faudrait pas chercher à éteindre le feu avec des linges ou en soufflant, mais éloigner tranquillement la source de chaleur ; dans la plupart des cas, la flamme ne tarde pas à s’éteindre quand la distillation cesse.

Lorsqu’il s’agit de chauffer des substances avec des dissolvants facilement volatils, il faut toujours se servir d’un réfrigérant ascendant et du bain-marie. On prendra quelques précautions pour agiter le liquide qui peut se trouver à l’état surchauffé.

Il ne faut pas jeter de substances inflammables dans les pots qui sont destinés à recevoir le papier, les allumettes, etc. ; il faudra les jeter dans l’évier.


II. Empoisonnement par les gaz et les vapeurs.

Il faut surtout éviter de respirer du chlore, du brome, les vapeurs des acides nitreux, nitrique et cyanhydrique, l’hydrogène phosphoré, les chlorures de phosphore, les chlorures d’acides et les sulfates d’alcoyles. Avec ces substances et avec tous les acides fumants, il faudra travailler exclusivement sous des hottes à fort tirage.

Les substances qui ont une forte odeur, telles que les chlorures de benzoyle et de benzyle, l’anhydride acétique, les isonitriles, les thiocarbimides alcoylées, les mercaptans, etc., ne doivent pas être versées dans les lavabos ou les conduites qui débouchent dans le laboratoire.


III. Blessures et empoisonnements par des substances caustiques ou toxiques et par les acides concentrés.

Quand on pulvérise dans un mortier de la soude caustique, de la potasse caustique, de l’éthylate de sodium desséché, du cyanure de potassium, il faut éviter les éclats et les poussières ; il faudra donc entourer ces substances de papier ou les couvrir d’un linge.

Quand on fait une fonte avec un alcali à haute température, il faut protéger ses yeux avec des lunettes et ses mains avec des gants.

Pour la détermination des points de fusion, il faut placer le bain d’acide sulfurique et la flamme de telle façon que, si le ballon venait à sauter, on ne reçoive pas d’acide chaud sur les mains, les genoux ou les yeux. Il faudra surtout prendre garde en déterminant le point de fusion d’une substance explosive.

Quand on travaille avec des substances toxiques telles que l’acide cyanhydrique, le cyanure de potasse, l’acide arsénieux, le phosphore jaune, les alcaloïdes, etc., il faut toujours avoir les mains propres et une table de travail propre ; il faudra éventuellement nettoyer immédiatement et consciencieusement tout ce qui aurait été sali par une de ces substances.

L’amalgame de sodium ne doit se préparer que sous une hotte à fort tirage ; il faudra protéger ses yeux et ses mains contre les petites parcelles de métal qui peuvent être projetées.


IV. Dangers d’explosion.

Les substances qui passent pour explosives, telles que les sels de diazonium, certains dérivés nitrés, etc., ne doivent en aucun cas être préparées en grandes quantités.

D’autre part, même de petites quantités de ces substances explosives ne devront pas être renfermées dans des flacons en verre (tubes à produits, exsiccateurs) ; elles seront conservées dans des boîtes en carton.

En règle générale, il ne faut pas fermer un récipient dans lequel une réaction chimique a lieu.

Avant d’ouvrir un flacon dans lequel on présume l’existence d’une certaine pression (par exemple le chlorure d’aluminium), il faut l’entourer d’un linge.

Les règles qu’il faut observer en travaillant avec les tubes à canons sont les suivantes :

Il ne faut sortir les manchons en fer des fourneaux qu’après refroidissement complet et le faire de telle façon que l’ouverture du tube soit dirigée du côté du mur.

Le tube en verre doit être ouvert dans la chambre à canons ; on fera glisser le tube jusqu’à ce que son capillaire sorte du manchon de fer dont l’ouverture sera toujours dirigée du côté de la paroi. La pointe du capillaire sera introduite dans la flamme d’un bon bec et maintenue jusqu’à fusion. Au cas où il y a une forte pression dans le tube, cette pression fait éclater le capillaire amolli. On peut alors briser le capillaire ouvert, toutefois avec quelque précaution, car il peut y avoir encore un dégagement gazeux si le capillaire avait été bouché.

En aucun cas, même si l’on ne présumait aucune pression dans le tube, il ne faudrait sortir celui-ci de son manchon métallique sans l’avoir préalablement ouvert de la façon indiquée.

Les tubes scellés qui contiennent des gaz liquéfiés doivent être plongés dans de l’air liquide et ouverts ensuite. Cette opération exige un masque, des lunettes et des gants épais.

Il ne faut fixer à la trompe que des flacons à filtrer ou des exsiccateurs à parois épaisses, ou bien encore de bons ballons à distiller, mais jamais d’ustensiles en verre mince tels que les flacons d’Erlenmeyer ou les ballons ordinaires.

Avant de commencer une distillation dans le vide, il faut vérifier si l’appareil résiste à la pression atmosphérique ; il faut en outre protéger ses yeux avec une plaque de verre ou des lunettes ; il faut enfin s’assurer qu’il y a bien communication entre l’appareil où doit s’effectuer la distillation et la trompe.

Quand on travaille avec du sodium ou du potassium il y a certaines précautions qu’on ne doit pas négliger. Il ne faut pas laisser sur sa table des flacons renfermant plus de 5g de sodium ; ces flacons devront être conservés dans une armoire en fer spécialement destinée à cet usage. En travaillant avec le métal, par exemple en faisant une réduction avec du sodium et de l’alcool, il ne faut pas que le sodium soit simplement posé sur la table, mais il doit se trouver sous une couche de pétrole, de ligroïne ou d’éther desséché.

Les résidus de sodium ne doivent pas être jetés dans les lavabos ou les pots où l’on jette habituellement papiers, filtres, allumettes, etc. ; on aura un flacon spécial pour ces résidus.

Quand on s’est servi de la presse à sodium, il faut laver le cylindre métallique, d’abord avec de l’alcool jusqu’à dissolution du sodium et ensuite avec de l’eau.

Tous ces produits qui se préparent à l’aide du sodium, tels que l’éthylate de sodium, l’acétylacétate de sodium, contiennent encore de petites particules de métal non attaqué ; c’est pourquoi on fera bien, dans les opérations subséquentes (addition d’eau), de prendre les plus grandes précautions.

Parmi les substances inorganiques, le chlorate de potasse (Kalium chloricum) est une de celles auxquelles il faut prêter une attention spéciale. Il a été souvent cause de graves accidents parce qu’on l’avait confondu avec du chlorure de potassium (Kalium chloratum).