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Histoire de Rouyn/Tome 1

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ALBERT LEURY



HISTOIRE de ROUYN


TOME 1


RELIGION CATHOLIQUE


1. — PREMIERE MESSE à ROUYN
(M. l’abbé Fugère)
2. — SOUVENIR DE MISSION, au début de Rouyn
(M. l’abbé J-N Levesque)
3. — ÉGLISE ST-MICHEL ARCHANGE
(M. l’abbé A. Pelletier)
4. — PAROISSE DE L’IMMACULÉE CONCEPTION
(Rév. Père E. Richard O. M. I.)
5. — NOTRE DAME DE PROTECTION (NORANDA)
(MM. les abbés A. Pelletier et A. J. Arsenault

Ces documents ont été confiés à J. Omer Lamothe à la mort de Albert Leury, un grand ami, par le Rév. Père Leury S. M. M., neveu de feu Albert Leury lors de son décès.



ALBERT LEURY



HISTOIRE de ROUYN


TOME 1


RELIGION CATHOLIQUE


1. — PREMIERE MESSE à ROUYN
(M. l’abbé Fugère)
2. — SOUVENIR DE MISSION, au début de Rouyn
(M. l’abbé J-N Levesque)
3. — ÉGLISE ST-MICHEL ARCHANGE
(M. l’abbé A. Pelletier)
4. — PAROISSE DE L’IMMACULÉE CONCEPTION
(Rév. Père E. Richard O. M. I.)
5. — NOTRE DAME DE PROTECTION (NORANDA)
(MM. les abbés A. Pelletier et A. J. Arsenault

Première messe à Rouyn
Rév. Père Fugère . curé de

Le voyageur qui en 1929 arrive à Rouyn sur un train luxueux ou bien en auto sur de belles routes peut difficilement s’imaginer les difficultés qu’il fallait surmonter pour atteindre cette partie de la province il y a quinze ans. Le seul moyen de transport était le canot. Deux jours suffisaient à peine pour parcourir les cent cinquante milles qui séparaient Angliers sur le lac des Quinze du Canton Rouyn.

Prévoyant un développement considérable, deux frères, ⁁les messieurs de La Chevrotière de Ville-Marie, avaient organisé un système de transport bien rudimentaire. Un grand esquif de drave mu par un moteur transportait bagages et voyageurs d’Angliers jusqu’au rapide L’E⁁sturgeon sur la rivière Ottawa, et de là, après un portage d’un demi mille, deux canots terminaient le voyage.


Escale au rapide à l’Esturgeon : quai d’embarquement[1]

A la demande de son EminenceExcellence Monseigneur Rhéaume, je quittai Angliers un mardi d’octobre 1924. D’Angliers au rapide l’E⁁sturgeon, le voyage assez monotone surtout à cette saison, fut agrémenté par les récriminations amusantes d’une dame à la corpulence enconbrante qui trouvait indigne de se voir entassée avec les sacs les barils d’huile et tout le fret. Au rapide l’E⁁sturgeon, repas hatif, puis portage du bagage et du monument feminin. Les deux canots qui devaient terminer le voyage chargés à plein bord, s’engagèrent bientot dans la rivière Kinogévis et le soir nous étions au rapide Gendron ou une famille de Fabre nommée Desrochers y tenait une hotellerie. Le lendemain je célébrai la sainte messe à saint-? [à ?] laquellelaquelle assisterent les quelques voyageurs et les membres de la famille.

Du rapide Gendron au lac Rouyn il y avait encore six ou sept heures de navigation. Vu le bas niveau des eaux à cette saison, cette dernière étape était plus lente et très pénible surtout sur ⁁la crique Routier ou les guides durent plusieurs ⁁fois se mettre à l’eau pour pousser les embarcations qui s’enlisaient.

En⁁fin, vers les trois heures nous abordions sur la rive ouest du lac Rouyn. Du lac Rouyn au lac Trémoy il restait à parcourir trois milles à travers la forêt, dans un sentier à peine ébauché, véritable chemin « tortueux, raboteux », dont parle l’évangile. Bagages au dos, ce n’est qu’après deux heures d’unede marche que j’arrivai enfin à la ⁁Terre-⁁Promise.


Chemin « tortueux, raboteux » dont parle l’évangile.[2]

J’étais à Rouyn !… Nom magique qui commençait à atti⁁rer l’attention de l’univers par suite de découvertes qu’on disait fabuleuses. Vous décrire le Rouyn d’alors est facile, car il n’y en avait pas. C’était la foret… Sur une pointe avançant dans le lac, Monsieur Joseph Dumoulon de Ville Marie avait construit un grand camp qui servait de magasin, de bureau du poste et de demeure ⁁pour la famille. À l’est, à quelques acres, le camp des gardes-feux. En face du magasin dans une petite éclaircie un autre camp, c’était le bureau du syndicat qui vendait les emplacements de la future ville. Plus loin, vers l’ouest, en pleine foret, des ouvriers commençaient la construction d’une grande bâtisse : l’Hotel National, je crois. C’est là, au bord du lac, dans le magasin ⁁de Mr Dumoulon, sur le comptoir transformé en un autel pieusement décoré par Madame Dumoulon et ses jeunes filles, que le ⁁Créateur de l’or et du cuivre descendit pour la première fois sur cette terre fortunée. C’était jeudi 10 octobre 1924. Une cinquantaine de personnes, prospecteurs, trappeurs, garde forestiers et tous les membres de la famille Dumoulon assistèrent à la sainte messe. Plusieurs reçurent la sainte communion et firent en commun l’action de graces.

Dans une autre allocution, je commentai les paroles évangéliques de Saint Mathieu au chapitre cinquieme VI « Amma⁁ssez-vous des trésors dans le ciel où ni les vers ni la rouille ne ronge⁁nt et où les voleurs ne percent les murs ni ne dérobent. Car là où est ton trésor là aussi sera ton cœur. » C’était bien de circonstance il faut l’avouer, mais quel succès eut cette pièce d’éloquence sur ces chercheurs de trésors priéss par la fièvre de l’or ?

Je n’ose y penser. Un fait cependant demeure et bien consolant c’est l’acte même de foi de ces gens, puisque plusieurs étaient venus de deux, trois et même cinq milles pour assister à la mission.

Puis se déroula la scène que nous voyons chaque dimanche dans nos campagnes sur le perron ⁁de l’église après la messe. Groupés selon les liens d’amitié ou d’intérêt, ces rudes travailleurs se font part des nouvelles reçues (car la malle ne vient qu’une fois la semaine) de leurs espérances ou de leurs dilldésillusions. Quelques uns tirent du font de leurs poches ou ce petits sacs de toile des morceaux de roches qu’on examine attentivement à la loupe, indiquant du doigt les points brillants, le métal précieux si ardemment convoité. ⁁Voir à la fin pour 1 paragraphe

Dans l’après-midi, sur l’aimable invitation de Monsieur Fletcher gérant de la Horne Syndicate, je me rendis en compagnie de Monsieur Dumoulon visiter les travaux préliminaires de ce qu’est aujourd’hui la mine Noranda et dont le nom même n’était ⁁pas encore sorti de l’imagination des directeurs. voir à la fin

À travers les souches, les arbres calcinés et les corps-morts une dizaine de creuses, avec un bruit d’enfer, fouillaient les entrailles de la terre. Cinq ou six charpentes en bois rond indiquaient les puits qu’on creusait pour atteindre les richesses que les foreuses avaient repérées. Quelques camps servaient de demeures aux employés. Près du lac face à Rouyn, près de l’endroit où se trouve aujourd’hui la magnifique école catholique, des ouvriers commençaient la construction d’une grande bâtisse qui devait servir de cuisine ⁁et de refectoir pour les nombreux employés que la compagnie se proposait d’engager. ⁁C’est cette bâtisse ⁁qui devenue trop petite fut plu⁁s tard gracieusement donné⁁e par la compagnie et servit d’église pendant plusieurs années. Voilà le Noranda de 1924.


Campement Horne près du lac Osisko, de gauche à droite, le dortoir des mineurs, la cuisine et salle à manger, le bureau et le dortoir de la direction.[3]

« L’histoirelotoitoi du Canada c’est en trois mots l’exploration, la lutte, l’évangélisation ». Ces paroles de G. Hanotaux ne peuvent-elles pas s’appliquer, ⁁d’une manière frappante,en particulier à tous nos camps miniers ?

Exploration, lutte, évangélisation, n’est-ce pas l’histoire de Timmins, de Val d’Or, de Rouyn exploration, lutte, violence font du peuple, N. évangélisation voilà l’occasion de l’égliseet de toutes nos villes minières.

L’Église pour sa part fidèle à sa mission a présidé à la naissance des villes sœurs ⁁de Rouyn et Noranda comme elle avait présidé à la naissance de la nation. ⁁ajouter paragraphe 3 à la fin A côté M. M du nom des Horne des Timmins l’histoire devra placer les Pelletier, les Theriault curés Mission chez les indiens et les coureurs de bois. Mission dans les camps forestiers, fondateurs, Mission dans les camps miniers.

Nous sommes vraiment comme le dit Georges Goyau « En présence de réalités religieuses. »

Aujourd’hui, trois clochers, modestes sans doute à côté des gigantesques cheminées de l’usine, indiquent les foyers de vie religieuse où les ouvriers de la mine viennent entendre les paroles de l’évangile et amasser des trésors non alléatoirs, mais assurés pour la vie éternelle.

C’est la réalité religieuse en marche.

Tels sont, après quinze ans, les souvenirs qui me sont restés de cette première messe à Rouyn.

Puis-je en terminant émettre un souhait ?

Les Autorités civiles de Rouyn et Noranda ne feraient-elles pas œuvre de saine politique et ⁁de patriotiottesme éclairé si elles coordonnaient leurs efforts pour conserver le camp Dumulon si bien dégagé sur sa pointe etpour en faire un ⁁petit musée régional ou les souvenirs des premiers jours pourraient être conservés ? Une foule d’objets, de photographies, sans valeur maintenant, auraient dans cinquante ans, disons, un intérêt et une valeur insoupçonnés aujourd’hui.

Ce vœu est-il réalisable !


Sur ces faces cuivrées par la vie au grand air, les rayons du soleil et peut-être la bise de plusieurs hivers, on peut lire les sentiments dont leurs cœurs sont animés : espoir joie chez les uns : inquiétude, tristesse chez les moins heureux : angoisse et sombre envie chez ceux qui n’ont frappé.

La nature du prospecteur reprend ses droits. La course à l’or un instant interrompue, recommence.


Avec les noms des Timmens, des Horne, pionniers de l’exploration, l’histoire devra placer les noms des Thériault, des Pelletiers curés-fondations, hérauts de l’Évangile

À côté du nom de Horne, ⁁pionnier de l’exploration, l’histoire devra placer celui du curé fondateur, Mr L’Abbé Pelletier qui arriva à Rouyn en 1925. Mission passagère en 1924 — Évangélisation permanente l’année suivante.


Edmund Horne, prospecteur[4]
Le curé fondateur : Albert Pelletier[5]



Souvenirs de mission, au début de Rouyn-1925


En décembre 1924, quelques citoyens du village naissant de Rouyn, rencontrés à Ste-Rose de Poularies, me priaient d’aller faire une mission à Rouyn.

Je demandai donc l’autorisation à Son Exc. Mgr Louis Rhéaume, et, le 19 janvier 1925, M. le Curé J. Z. Tremblay, curé de Makamik m’embarquait dans sa voiture, et, « En route pour le pays de l’or ». A midi, nous prenions le dîner à la « cache Jutras » à la rivière Destor. Réfection prise, nous continuions notre voyage vers Rouyn où nous arrivions vers les 7 hrs du soir. Vus les jours très courts, à travers la forêt dense, dans un chemin de portage, l’obscurité était venue à « bon⁁ne heure » et la dernière partie du voyage nous parut longue. Arriverait-on, enfin ? Et ce fut une joie quand à travers la forêt brillèrent au loin les lumières de Rouyn. Nous y fûmes reçus avec empressement par M. Lucien Baril qui gérait pour le compte de son frère Donat, de Makamik, un étal de boucher.

Boucherie « Meat Market » tenue par Lucien Baril.[6]

La construction était un « schack » de 10 X 18 pieds. Il y avait là le comptoir, l’entrepôt et la cuisine servant également de dortoir. Cette bâtisse se trouvait à peu près en face du marché actuel. Le froid, la fatigue du voyage nous firent trouver bon la chaleur du poêle et nous dormîmes d’un profond sommeil. Le lendemain matin vers 7 hrs j’installai mon autel portatif sur la table et je dis la première messe à Rouyn, puis ce fut le tour de l’abbé Tremblay, M. Baril faisant fonction de servant de messe. — Il faut rappeler que l’hiver précédent, à l’endroit même où se trouvait à cette époque le campement de la mine Horne, à Noranda, M. l’abbé Fugère, curé de Mont-Carmel, Témiscamingue, faisant une tournée de missions dans les chantiers avait dit la messe à cet endroit, dans le chantier de l’international Paper Co.

Après le déjeuner servi par M. Baril, nous fîmes une première visite dans Rouyn, qui comptaient alors une quarantaine de campements en bois rond ou équarri, dispersés à travers la forêt. On allait par les sentiers d’une habitation à l’autre, puis l’abbé Tremble prit le chemin du retour. Moi, je restai encore trois jours. Durant cette première journée je nouai connaissance avec la population de Rouyn. Le 21, [mer?]cerdi, je célébrai cis [ai]s [?] la messe chez M.s [?] H.s [?] Juteau, boulanger-gendre du Dr Sa[?]er, d[ ]s Villa-Marie, si je me rappelle bien. Le 22, je disais la messe chez Dumulon, autrefois de Ville-Marie. Également le 23. Ce Mème jour je revenais à mon point de départ à Ste-Rose. La mission de Rouyn était inaugurée.


Bureau et prison de Rouyn (policiers Ephrem Bégin et Michael Tobin).[7]

Je devais faire une autre mission en mars suivant. Le 9 mars, de passage à Makamik, le curé de l’endroit éatant absent je recevais au presbytère la visite de deux messieurs, qui sollicitèrent des renseignements sur Rouynvi. Il faut dire qu’après mon premier passage à Rouyn j’avais adressé une lettre au Procureur Général de la province demandant avec instance qu’un poste de police provinciale fut installé à Rouyn, où n’existait encore aucun corps public. Le désordre, sous toutes ses formes, régnait en maître dans le camp minier [2 mots superposés] naissant. — Or ces deux messieurs étaient deux agents de la Sûreté provinciale, MM. Ephrem Bégin et Michael Tobin, qui étaient en route vers Rouyn où ils venaient établir le premier service d’ordre public. Je les renseignai le lendemain encadré de deux polices je reprenais le chemin de Rouyn. Le 11, conduit par le postillon, Conrad Luneau — actuellement marchand de Ste-Rose, nous arrivions à Rouyn, mettant pied à terre devant l’hôtel Osisko tenu par les cinq frères Green. Le tout Rouyn monté sur les bancs de neige assistait à l’arrivée. Je me suis toujours demandé comment la population de Rouyn était déjà au courant de la venue de la police provinciale, avant notre arrivée. Les uns étaient contents, les autres moins. Les « bootleggers », les « gamblers », les tenancières furent mécontents prévoyant qu’un frein serait vite mis à leur important commerce.


Hôtel Osisko tenu par les cinq frères Green[8]



Le souper était pris, accompagnant les deux policiers, nous fîmes la première ronde dans les sentiers de Rouyn. Puis je me retirai chez M. Dumulon. Je dois un hommage de gratitude tout particulier à cette famille généreuse qui me permit de faire à son foyer mon « chez nous ». Je me rappelle toujours la bonté de madame Bélanger, mère de Mme Dumulon, vénérable septuagénaire, excellente chrétienne, qui s’inquiétait toujours à mon sujet. Je lui donnai l’avantage d’assister à la sainte messe chez elle du jeudi au dimanche. Le vendredi, Mme Peppin une catholique irlandaise, âgée d’environ soixante ans me fit offrir comme chapelle temporaire un camp portant le nom pompeux d’Hôtel Rouyn au coin de la rue Perreault actuelle et exactement à l’endroit ou se trouvat l’hotel Rouanda incendié en 1938. Là il y avait un comptoir de liqueurs douces et on y dansait toute la nuit ; à 5 hrs du matin les habitués s’en allaient, on passait le balai et l’église était prête à recevoir les fidèles. Le dimanche et lundi j’y célébrai la sainte messe. Une grande partie de la population assista à la messe, ces deux jours. Le mardi 17 mars, fête de St-Patrice, la chapelle était remplie à déborder. Plusieurs protestants étaient présents. Je n’oublie pas M. Clarence Huenegard qui assistait au premier rang. J’avais fait sa connaissance le dimanche soir précédent chez Jos. Laporte où j’avais soupé, veillé et dormi sur un lit de planches. Le lendemain M. Huenegard envoyait pour mon usage personnel chez M. Laporte son propre lit, arrivé le samedi et qu’il n’avait pas encore développé. N’ayant pas revu M. Huenegard depuis, bien qu’il soit encore à Rouyn, je lui redis un cordial merci. Je rappelle ici un incident. Le samedi soir, je dormais chez mon ami Laporte, un peu tassé, sur les planches, quand, tout à coup, voilà mon compagnon de lit qui se lève en sursaut et en habits de nuit, pieds nus, file dehors par un froid de 50° sous zéro. Au bout de quelques secondes, il revenait. « Heureusement que j’ai entendu, me dit-il. — » « — Qu’y avait-il ? — » Un individu pas frileux et pas gêné était venu s’emparer de quelques planches appuyées sur le camp et fuyait les emportant quand la prompt intervention du propriétaire le força de les échapper. —

Le 15, je m’étais rendu à l’invitation de M. Henry Blake — un anglais converti en Afrique par le Cardinal Lavigerie et je dormis sous son toit hospitalier. Le 17 au soir je couchais au Lac Rouyn, à la « landing » chez M. Chénier et le 18 j’y faisais la mission. Le même jour je revenais à Rouyn. Là à l’hotel des frères Campbell, où j’étais allé plus d’une fois — l’amabilité des hôtes étant parfaite, il m’était permis de rencontrer de nombreux voyageurs allant et venant aux chantiers de German’s Point, Vue du puit no  1 de la mine Amulet.[9] — je fis la connaissance de M. Pilon, le découvreur et le gérant de la mine Amulet. Il m’invita d’aller faire la mission chez lui. Dans l’après-midi, je profitai du départ d’une voiture allant dans cette direction et je me rendis à l’intersection du chemin de Makamik et Amulet, au ruisseau Duprat. A pieds, la valise de mission sur le dos, je grimpai quelques milles à travers la montagne jusqu’au campement où je fus reçu très bien. Le lendemain matin je faisais la mission. M. Pilon me fit visiter les travaux en cours et gentiment chargea un de ses hommes, Pat Dessureault, (de Makamik), de me conduire sur un devant de sleigh jusqu’à la « cache » Cinq-mars à quelques milles de l’Amulet ou je devais, le lendemain, continuer mon travail de missionnaire.

Avant de quitter Rouyn, j’avais été victime d’un petit vol. On m’avait enlevé les courroies de ma valise de mission. Quelques semaines plus tard le détective Bégin me les faisait retourner. Maintenant j’étais sur le chemin du retour enchanté de mon voyage. Pendant mon voyage à Rouyn, j’avais visité toutes les familles catholiques et même je m’étais rendu à l’invitation de quelques protestants. Je dois dire que, partout, je fus reçu avec courtoisie, avec joie même. Aussi ai-je gardé de cette mission un excellent souvenir.

Jusqu’aux chiens qui pullulaient alors à Rouyn et qui m’escortaient par groupe chaque fois que je sortais dans le village. Seul un attelage de huskeys refusa de s’apprivoiser voiser et, à chaque rencontre, il fallait que le conducteur, un Indien, se servit de son fouet avec vigueur pour les apaiser.

A mon retour, à Ste Rose, une lettre m’attendait… L’abbé Albert Pelletier m’annonçait qu’il venait d’être nommé curé desservant de Rouyn. Je m’en réjouis, car c’était son pays, et, depuis lors, chaque fois que je suis retourné à Rouyn, et cela m’est arrivé souvent, il m’a toujours offert une hospitalité fraternelle, dont je lui suis reconnaissant.

Aux premiers citoyens de Rouyn, à ceux que j’ai rencontrés depuis, à ceux que je n’ai pas revus, j’adresse un cordial salut.

(Bons souvenirs, abbé J. N. Lévesque.)



-- EGLISE St MICHEL ARCHANGE --


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(Suite)

Les Missions par les Pères Fugère et Levesque n’étant qu’intermittentes, la population augmentant continuellement et la Mine Noranda faisant des travaux qui allaient demander une nombreuse main d’œuvre, les résidents de Rouyn décidèrent à la suite d’une assemblée publique de faire une demande à Mgr Rhéaume, évêque du diocèse, pour obtenir un prêtre ⁁résident. Une requête fut signée, et, le 15 Février 1925, remise à Mgr. A ce moment le diocèse n’était pas riche en prêtres et beaucoup de places réclamaient, eux aussi, des pasteurs. Cependant, Monseigneur prend en considération la requête et envoie Monsieur l’abbé Fernando Boisvert, curé de St Pierre de Taschereau, faire une enquête. La conclusion fut que, vu les développements progressifs de la communauté, un prêtre résident était une nécessité qui s’imposait. Mgr Rhéaume approuva alors la demande. Mais qui envoyer là ? Il fallait un prêtre jeune, au cœur ardent, que rebuteraient aucuns sacrifices matériel ou moral. Son choix se fixa sur son jeune Curé de New-Liskeard. Il le connaissait et savait que ses qualités le désignaient pour cette tâche. Comme jadis N. S. avant son Ascension, envoyait ses disciples prêcher son Evangile, il lui dit : « Je vous envoie là où vous n’aurez pas un toit pour vous abriter, là où les brebis du Seigneur ont sacrifié Dieu Mammon. Vous irez réconforter les bons, ramener au bercail les brebis égarées. Tout est à édifier, mais avec l’aide de Dieu vous ferez de grandes choses. » Et l’abbé Albert Pelletier, qui avait lui-même signé, le 25 Avril 1925, le décret canonnique érigeant la communauté de Rouyn en paroisse, se prépara à aller prendre possession de son nouveau poste. Bien des fatigues, bien des luttes l’attendaient là-bas, mais « fiat voluntas tus, Domine. » Placé à la tête d’une des paroisses les plus importantes du diocèse il aurait pu refuser ; mais il était prêtre et cela disait tout pour lui. Le 1er Juin 1925, à l’ouverture du beau mois du Sacré-Cœur, il disait au revoir à son Chef, Mgr Rhéaume, et à ses dévoués collaborateurs dans le ministère et il prenait le chemin de l’inconnu, la route de Rouyn.

Nous allons laisser à Monsieur l’abbé Pelletier le soin de nous conter avec sa verve coutumière les incidents de ce voyage.


--- « VERS LA CONQUETE » ---


1er Juin 1925.

« Treize, quatorze, c’est bien ça, toutes les caisses y sont et la chapelle portative aussi. Le camion démarre derrière l’évéché de New-Liskeard et en route pour Angliers. La pluie tombe à torrent et la route devient dangereuse. Mon chauffeur veut fermer un volet, mais mal lui en prend, sa voiture laisse le chemin et reste en suspend sur le bord du fossé retenue seulement par une forte bille consolidant les approches du ponceau. A terre les 14 caisses et tout le bagage. Une paire de chevaux s’amène et nous tire d’embarras. Diner à Notre Dame du Nord et nous voilà glissant dans le fameux ravin de Nédélec. La descente s’effectue sans incident, mais la montée s’annonce moins facile. Le moteur chauffe et étouffe à chaque tournant. Armé d’un gros pieux je suis la charge que les freins refusent de retenir. Quand le moteur est à bout de souffle, je pose le pieu en travers des roues et… comme la mouche de La Fontaine, nous respirons. »

« Au bruit sourd des rapides nous devinons le barrage d’Angliers que nous franchirons bientôt sur la digue. L’énorme masse d’eau tombe avec fracas sur le roc et une épaisse buée monte jusqu’à nous. »

« Le Département des Terres et Forêts a établi à Angliers une base d’opération pour le service de la protection des forêts. L’établissement comprend une résidence spacieuse et confortable et un immense hangar pour l’outillage des garde-feux ; j’y laisse mon bagage et je passe la nuit chez M. Turcotte qui occupe présentement la résidence avec quelques employés. »…


2 Juin 1925.--

« Messe dans le hangar à laquelle assistent un groupe de garde-feux et quelques personnes du village qui compte à peine une vingtaine de maisons. L’autel improvisé est installé sur des caisses d’emballage. Le pilote fait son plein d’essence pendant que les gars entassent sur le pointer tous mes effets, auxquels l’Hon. H. Mercier veut bien ajouter une moto-godille, une tente de toile, deux lits d’acier garnis de couvertures. Pendant six heures, nous voguons sur l’imposant lac des Quinze. Il fait chaud et pas la moindre brise ne vient rider cette immense nappe d’eau. Grâce au barrage, l’eau atteint maintenant des têtes d’arbres et naviguer dans pareil décor me rappelle les exploits de chasse-galerie illustrés dans l’Almanach du Peuple. »

« Vers 11 heures nous doublons la « pointe des Sauvages  » , où s’élève une modeste chapelle. C’est à cet endroit que le Père Evain, O. M. I. vient rencontrer ses ouailles chaque printemps. Un poste de garde-feux à gauche, l’Ile de Brown, à droite et le bateau s’engage dans l’Ottawa. A douze milles en amont de la rivière se trouve le rapide de l’Esturgeon qu’il est impossible de franchir. On décharge le contenu du bateau que des voitures transportent à la tête du rapide et où attend un autre bateau. Le portage mesure 3/4 de mille et la journée est fort avancée, lorsque le transbordement est terminé. En compagnie du pilote, Monsieur Gaston Barras, je passe la nuit dans un camp de gardes-feux bâti à quelques pieds de la rive. Les cousins nous acclament, insistent à nous tenir compagnie et ne nous laissent point de répit. Mes compagnons plus habitués aux mœurs de ces insectes se sont protégés de moustiquaires et je dois faire face à l’orchestre. Jusques aux souris qui veulent être de la partie. A l’aide d’une torche électrique je les aperçois en frais de grignoter mon goûter.

Carte officielle Témiscamingue et Abitibi montrant la route Angliers-Rouyn empruntée par les pionniers.[10]


3 Juin 1925.--

Le Camp des Gardes-Feux à Rouyn. ⁁1er Presbytère et chapelle

« L’ennui naquit un jour de l’uniformité. Sur une distance de 65 milles nous suivons l’Ottawa, puis la Kinojévis qui sillonnent une forêt vierge. Le paysage d’enchanteur au début, devient monotone après quelques heures. A 3 heures, arrêt au poste des gardes-feux à la pointe aux allemands, (German’s Point). Le temps de casser une croûte et nous démarrons. A 18 milles du poste, nous laissons la Kinojévis pour nous engager dans un étroit ruisseau. Les roseaux nous cachent le chenal, mais de longues baguettes nous guident vers la décharge. Bordé de gros trembles et d’aulnes touffus, ce méandre offre un spectacle ravissant, surtout à la tombée du jour. Il nous reste à franchir le lac de Rouyn, deux milles environ, et nous arrivons à destination. M. Martial Dumulon m’accompagne jusqu’au village de Rouyn, pendant que M. Léon Doyon s’occupe du bagage. Le chemin de portage est tortueux et à une longueur de un mille et demi ponté de troncs. Sur le côté du lac Osisko, une vingtaine de chantiers en bois rond et quelques habitations en planche sont disséminés sur une superficie d’une dizaine d’âcres. Les premiers arrivés prospecteurs pour la plupart, ont construit leur hutte au petit bonheur, aussi près du lac que possible. La Cie Smellie & Blake a acquis les droits miniers du terrain ainsi occupé, mais, devant l’élan de progrès, le lottissement s’impose et les arpenteurs se mettent à l’œuvre. Les lignes sont tirées et les lots à bâtir s’enlèvent comme des petits pains chauds. Les Poste du garde-feux en bois rond : premier presbytère et chapelle.[11] acquéreurs s’empressent de couper les arbres dont les plus beaux formeront les murs de l’habitation. Les rues n’existent que sur le plan. Les charretiers restent parfois en panne dans les ornières ou coincés entre les arbres tronqués. Quant aux piétons, les bottes à hautes tiges semblent avoir gagné leurs faveurs. C’est dans un camp de 16 X 20, construit en bois rond que je passai la première nuit en compagnie du garde-feux Doyon qui devint, par la suite, ma ménagère. J’avais bien apporté avec moi une tente, mais le sol détrempé et les pluies qui suivirent mon arrivée n’avaient rien d’invitant pour ce genre d’habitation. Le poste des gardes-feux fut, à vrai dire, mon premier presbytère et ma première chapelle, puisque c’est là que je célébrai ma première messe et continuai de célébrer ensuite sur semaine. »--


7 Juin 1925.--

Le voilà donc parvenu dans le champ d’action que le Bon Dieu lui a désigné. Le blé qui y pousse a de très beaux épis chargés de grain, mais combien il y a d’ivraie qui cherche à étouffer le bon grain. Son cœur d’apôtre souffre, misereor super turbam (j’ai pitié de la foule), mais ce n’est pas le temps de se lamenter. Son premier souci est de s’occuper des enfants et ensuite de trouver un logis pour les exercices religieux. Aussi, dès le dimanche suivant, 7 juin 1925, au prône de la Messe, il demanda aux parents de vouloir bien inscrire leurs noms, ceux de leurs enfants, leur nombre, leur âge pour dresser la liste de ceux qui seront admis aux classes en septembre, ou à faire leur première communion. Ces renseignements pourront être déposés au Bureau de poste. Point nécessaire de prétexter que l’on n’a pas ce qu’il faut. J’ai du papier à écrire à la disposition de tous. Pour la question du logement pour les exercices religieux, il avait obtenu de la générosité de la famille Peppin, blind-pigger et brasseur de cartes, l’usage de leur salle de danse située à l’angle des Rues Perreault et Galipaut, lorsqu’elle ne serait pas louée. A ces moments là il faudra chercher gîte ailleurs. Le mobilier ne fut pas long à trouver. Une large tablette servit d’autel, dans un coin une chaise dissimulée par un rideau fit office de confessional. Quelques madriers sur des biles-de bois de chauffage remplacèrent les bancs. Les personnes plus aisées se firent apporter une chaise. Maintenant, il fallait édicter quelques règlements. D’abord pour les communions. Ceux qui voulaient communier et n’avaient pas besoin de se confesser furent prié de vouloir bien avertir avant chaque messe, afin de permettre de consacrer le nombre d’hosties suffisantes, le Saint-Sacrement n’étant pas gardé continuellement. Le deuxième réglement était pour l’heure des offices. L’on n’avait pas de cloche, donc il fallait régler les horloges sur le sifflet de la Mine Horne et surtout ne pas arriver en retard. ⁁Monsieur Nil Larivière, au nom de la population, présenta les vœux de bienvenue de tous, à M. l’abbé Pelletier et lui souhaita un long et fructueux ministère.


Le 14 Juillet, il annonça le nom du titulaire sous la protection de qui la paroisse avait été mise. C’était St Michel Archange. Ce jour-la il leur parla du désordre qui régnait dans la communauté. Il ne s’en dit pas surpris, mais alarmé… Nous ne pouvons prendre de moyens violents, mais nous avons une arme : la prière et surtout, le bon exemple. Dans cette fête du Bon Pasteur, souvenons-nous que N. S. est venu pour sauver les brebis égarés. Sa mansuétude a été très grande pour les pécheurs, nous en avons la preuve dans le pardon qu’il acorda à la Samaritaine dont il fit une grande sainte.

Pendant ces jours il avait cherché un terrain pour ériger une église temporaire. C’est sous les bouleaux, en bordure du lac qu’il voulut placer le premier sanctuaire. Le 21 Juin il annonçait les travaux de nettoyage du terrain et demandait que chaque homme, dès le mardi suivant, vint donner quelques heures de leur temps.à ce travail. Malheureusement le Dimanche, 28 Juin, il devait se plaindre du peu d’empressement apporté à la corvée. Il leur dit qu’il fallait profiter du xx temps humide pour finir ce nettoyage. Bientôt il y aura du travail au contrat ou à la journée et il saurait se souvenir de ceux qui se sont fait tirer l’oreille ou qui n’assistent pas à la Messe.

Se souvenant des catastrophes qui ont marqué l’établissement des grands centres miniers de l’Ontario et voulant éviter semblable désastre, il demanda à la population de vouloir bien construire un abri flottant à l’aide de corps d’arbres afin de permettre à xx tous de s’y réfugier en cas de danger.

Mais ce qui réjouit le plus le cœur des paroissiens fut d’apprendre la venue de son Excellence Mgr Rhéaume. Laissons ⁁encore la parole à M. le Curé pour conter cet événement.

« Accompagné du Pére A. Bourassa, O. M. I., curé de Ville-Marie, Monseigneur suit la même route que je parcourais en juin dernier, cependant, au lieu de passer la nuit aux rapides de l’Esturgeon, il se rend avec une dizaine de gardes-feux jusqu’à la Pointe aux Allemands, où je vais le rencontrer avec ma chapelle portative. Le camp est en bois rond et divisé en trois piéces, deux chambres à coucher avec grabats que l’on offre gracieusement à Monseigneur et à ses compagnons et la cuisine où l’on s’entasse à qui mieux mieux. A cause des moustiques qui sont légion, chaque lit est garni d’une espéce de cage en coton à fromage qu’il faut secouer avant de se mettre au lit ; sans cette opération on risque d’emprisonner avec soi quantité de maringouins qui ont toujours le dessus, même quand c’est un évéque. Couché sous l’autel improvisé, je me levai d’assez grand matin pour m’acquitter de mes fonctions de sacristain ; de vieilles chaudiéres furent remplies de copeaux et de mousse et, de ces encensoirs nouveau genre, monta une épaisse fumée qui enveloppa l’autel et tout le sanctuaire, mais qui eut Arrivée de Mgr Rhéaume au landing de Rouyn.[12] pour effet de chasser les maringouins voire même quelques assistants. Quelques heures après le déjeuner, nous étions à Rouyn. L’arrivée du Chef du diocése fut sans apparat, quelques drapeaux et oriflammes garnissant les chantiers… et ce fut tout. Ma cuisiniére étant en vacances, je reçus Sa Grandeur dans mon chantier. Le lendemain, dimanche, messes à la salle Peppin, allocution au cours de laquelle la population toute heureuse apprend que l’on bâtira incessamment une école-chapelle. Dans la soirée feu d’artifice sur l’ile Gamble et promenade sur le lac. Le lendemain Monseigneur nous quitte pour Angliers avec son escorte. »

Cette visite de l’évéque eut pour conséquencerésultat de lui faire comprendre les possibilités futures de Rouyn et nous devons féléciter Son Excellence d’avoir su les comprendre, car il fallait avoir une foi forte et une grande vision pour lire l’avenir dans l’embryon qui existait alors. Aussi, Monsieur le Curé, en remerciant, le dimanche suivant, le 11 juinllet, les personnes qui avaient prêté leur concours pour la réception de Sa Grandeur, pouvait-il affirmer que Mgr Rhéaume avait été touché de l’accueil bienveillant de la population et qu’il était parti entièrement disposé à nous aider de tout son pouvoir.


Grande tente sur une charpente de bois.[13] En attendant les constructions promises, des tentes avaient été commandées. Elles furent dressées, (26 Juillet 1925), sur le terrain à coté du camp en bois ronds des gardes-feux. La grande tente, montée sur une charpente de bois rond écorcé et reposant sur un plancher de madriers, fait contraste avec le feuillage des bouleaux qui l’entourent ; les fidéles paraissent heureux sous ce toit de coton que la brise du lac fait onduler. Ce qui gâte le charme du nouveau temple, c’est le manque de portes ; chiens et chats suivent leurs maitres à la messe et il se produit entre ces animaux des altercations qui n’ont rien de liturgique. Pour donner plus de grandeur aux offices religieux il faut un harmonium. M. le Curé n’eut qu’à en exprimer le désir et deux jours aprés la somme de $122.05 fut amassée et cela grâce au généreux travail de Mesdames Dumulon : $75.75, Moffat : $15.50, Gagné : $16.00, Latulippe : $17.25, Carey : $35.00. L’on ne pouvait dire de grand’messe solemnelle, l’on manquait de bénitier, d’encensoir et de chape. Les choses s’arrangèrent sans difficulté, M. Olivier Burke donna le bénitier, M. R. Gagné l’encensoir. M. le Curé procura la chape. Maintenant, grâce à une chorale encore faible, mais bien entraînée, la grand’messe put être célébrée avec quelque pompe. Deuxiéme tente servant de sanctuaire.[14] Une deuxiéme tente fut adossée à la grande et servit de sanctuaire. Le mobilier était simple, signe des premiers temps de l’Eglise, mais le bon Pére avait dit à ses ouailles de réserver leur générosité pour la chapelle qui allait se construire. Une caisse d’emballage servit à construire l’autel, à gauche de l’autel fut placé le confessionnal formé d’une chaise et d’un rideau, sur une petite table à droite reposait la valise-chapelle. Deux bancs latéraux étaient occupés par les enfants des deux sexes. Avoir un harmonium était une belle chose, mais il fallait un organiste pour le faire résonner et Mme ⁁Augustin Chénier fut nommée titulaire de ce poste.


Vue extérieure de la tente-chapelle[15]


Le 22 Août 1925, avait lieu le baptême du premier enfant né dans la paroisse, quinzième enfant de Ludger Lafond, autrefois du canton Latulippe, comté du Témiscamingue. Il reçut les prénoms de joseph-arthur-marcel, le parrain fut Arthur Dumulon avec, comme maraine, une des grandes sœurs du bébé. Pour remplacer les cloches qui manquaient encore, Monsieur le Curé, faisant office de Sacristain, se mit à frapper à coups redoublés sur une barre d’acier suspendue à une branche d’arbre.


Essai de la nouvelle pompe à incendie.[16]


Bien que grandement occupé avec son installation, Monsieur l’abbé Pelletier n’oubliait pas cependant le bien-être matériel de ses ouailles. Aussi, le voyons-nous revenir souvent dans ses instructions sur des sujets comme la protection en cas de feu de forêts, conseils pour éviter les épidémies de typhoïde ou contre les incendies. Bâti en pleine forêt et avec la sécheresse et les vents qui soufflaient alors le 3 Juillet 1926, le village était en péril continuellement et le feu pouvait se déclarer à tout instant mettant en danger la survie de la population. Tous les chantiersxxx s’étaient bâtis le long du lac qui servait d’égout collecteur et la chaleur qui sévissait rendait l’eau de ce lac et même celle des puits non potable, (il n’y avait pas encore d’aqueduc, ni de filtreur,) et pouvait occasionner une épidémie de fièvre typhoïde. Aussi, conseillait-il de faire bouillir l’eau pour éviter tout danger. Le curé Pelletier, Mgr Rhéaume et deux autres personnes devant le camp de garde-feux, site du premier presbytère.[17] La propreté autour des bâtisses était loin d’être parfaite et le feu pouvait amener une conflagration. Le village avait été doté d’une pompe à incendie par le Comité de protection, mais à quoi servirait une pompe et des boyaux, si l’on ne savait s’en servir. Il fallait donc montrer à la population comment s’en servir et aussi former avec les jeunes un corps de pompiers volontaires.


Lors de sa visite, Mgr Rhéaume avait promis de bâtir une chapelle-école. La promesse n’avait pas été vaine et le 24 Juillet l’on pouvait annoncer le commencement des travaux. La firme Smillie and Blake, d’Ottawa, avait donné pour fins scolaires un terrain de 66 pieds de profondeur et 200 pieds de front à l’angle sud-ouest des Rues Perreault et Galipaut. La bâtisse devait avoir deux étages et contenir quatre classes pour commencer ; le deuxiéme, en plein pieds, était à l’usage de la chapelle. Le contrat de construction fut donné à Joseph Péloquin, entrepreneur de Bois pour la fondation de l’école Saint-Louis.[18] Ville-Marie. Pendant que l’on creusait les fondations, d’autres coupaient de l’autre coté du lac, les poteaux de cédre qui devaient servir à l’érection des fondations. Une moto-godille amenait ces bois sur le terrain. La charpente fut équarrie de même façon sur place, mais la planche, les ouvertures, le bois ouvragé devaient venir du sud du comté, (110 milles de distance et par eau). Enfin, après bien des journées, où, le soir, chacun travaillait à la lumiére des lampes à essence, la bâtisse fut terminée et, le 11 Octobre 1925, les paroissiens de Rouyn assistaient à la premiére grand’messe dans la Chapelle-école et, le 8 Novembre, les Sœurs Grises de la Croix ouvraient les classes.

Pour meubler cette chapelle il fallait des statues, un ostensoir, un chemin de Croix, une lampe pour le Sanctuaire. Monsieur le Curé n’eut qu’à en exprimer le désir et, le 23 Novembre, les objets étaient donnés, même en surcroit.

Dans le même temps un presbytère s’était élevé et, le 7 Décembre Monsieur le Curé y pendait la crémaillère.

Quand la Noel arriva quel ne fut pas leur contentement ⁁, des paroissiens d’assister à la Messe de minuit, comme dans les vieilles paroisses, avec toutes les cérémonies du culte et dans une température plus clémente que sous la tente.


La chapelle-école.--Rue Perreault.[19]


Que de changements s’étaient opérés depuis l’arrivée du prétre dans la paroisse en Juin 1925. A présent elle va marcher à pas de géants dans la voie du progrés.

Le 20 Septembre de cette même année, au prône de la Messe, M. le Curé publiait les premiéres promesses de mariage dans le village de Rouyn. C’était Philias Clermont, fils majeur de Napoléon Clermont et de Rosalie Guay, de la paroisse de Bourget qui voulait convoler en justes noces avec Mademoiselle Marie-Anne Marleau, fille majeure de Jos. Marleau et de feue Dame Rouleau de cette paroisse.

Le 3 Mars 1926, la gente écolière avait augmentée et l’on dut prendre de la place dans la chapelle pour deux autres classes. La Compagnie Smillie and Blake avait fait cadeau au profit de l’église de deux emplacements situés un dans Rouyn, l’autre prés de la mine Horne pour être mis en loterie.

Jusqu’ici, dans les soirées qui s’étaient données, la nécessité d’un piano s’était fait sentir grandement et les artistes souhaitaient avec ardeur d’en avoir un. La Providence se chargea d’y subvenir. Louis-Wilfrid Couture avait été l’heureux gagnant de cet instrument de musique dans une rafle qui s’était fait au long sault, aujourd’hui témiscamingue. Il ne savait que faire de cet objet encombrant et il le donna à la paroisse, à charge par elle de payer les frais de transport qui s’élevérent à une trentaine de piastres. L’argent fut vite réalisé et le piano arriva.

L’on avait à peu de choses prés ce qui était strictement nécessaire pour le culte, il manquait une cloche. L’on se mit à l’œuvre et, le 8 Juin 1926, M. le Curé pouvait annoncer que la somme de $180.00 avait été collecté, pour cet achat.

Voici le résultat du recensement fait par Monsieur l’abbé Pelletier lors de sa visite pastorale.

La population catholique est de 537.

Familles : 83, dont 8 de langue anglaise et de nationalité mixte. Dans ces familles ne sont pas compris les teneurs de maisons de désordre. Ce sont de vraies familles résidentes, bien que d’aucunes ne soient pas des modéles.

40 personnes n’ont pas fait leurs Pâques.

8 familles ont quitté le pays et 2 familles de plus sont venus s’y établir.

Il y a une moyenne de 72 enfants fréquentant la classe : sur ces 72, 18 sont protestants.

Le 14 juillet de la même année, la jeune communauté avait la douleur de perdre son maître de poste, un des pionniers de Rouyn et citoyen très estimé, en la personne de Jos Dumulon.

Par contre, elle avait le plaisir de souhaiter la bienvenue au notaire St Jacques, qui venait s’établir au milieu de nous.

La cloche venait d’arriver et se trouvait au quai du « landing ». Elle fut amenée, mise en place et le 4 septembre 1926, Mgr Rhéaume, qui était venu à Rouyn pour la confirmation, la baptisa et lui donna le nom de Louis-Alfred-Armand — en l’honneur de Son Excellence et de ceux qui s’étaient chargés de la collection. La population fit, à cette occasion, une réception magnifique à Mgr Rhéaume qui en fut grandement touché. A ce voyage, Monseigneur en profita pour choisir le site de la nouvelle église qui serait érigée. Les probabilités des premiers temps s’étaient converties en réalités et il devenait pressant de laisser l’espace occupé par la chapelle pour les enfants dont le nombre grossissait continuellement. Mais cependant, aucune décision définitive ne fut prise ce jour-là. Toutefois, après mure réflexion, Mr le Curé pouvait annoncer que la construction de l’église était imminente. (Déc. 5 1926) et le 13 mars 1927 il demandait des soumissions pour les épinettes qui serviraient à l’échafaudage. Entre temps il avait fallu laisser la place à la gente écolière et l’on trouva refuge au théâtre Régal (8 Décembre 1926). C’est là que, pendant près d’un an, grâce à la générosité du propriétaire, Mme Carey, eurent lieu les offices religieux.

A cette époque, une épidémie sévit parmi les enfants et l’on dût désinfecter les classes et fermer l’école temporairement.


Vue du théâtre Régal sur la rue Perreault à Rouyn.[20]
Vue de l’intérieur du théatre regal montrant l’autel sur la scène.[21]


Le 1er janvier 1927, en donnant le rapport financier de la paroisse, monsieur le Curé donnait également les statistiques de la population. Il y avait :

664 personnes,

121 familles,

21 baptêmes furent administrés,

8 sépultures et 3 mariages : soit une augmentation de 58 familles et de 127 âmes.

A ce moment, il n’y avait pas de police municipale et la population de Rouyn était celle de toutes les villes minières qui commencent, composée d’étrangers de toutes races et de tout acabit. La boisson pullulait et les chicanes, les coups de revolver s’entendaient le long du jour le jour et la nuit. Il n’était pas rare de voir une bande de ces énergumènes pénétrer dans les assemblées, les parties de cartes et les danses pour y jeter le « brandon » de la discorde. Aussi Mr. le Curé, connaissant son monde, mettait-il des hommes forts pour faire la police des salles, lorsqu’il faisait des parties de cartes ou des bazars au profit de son église. Ils avaient menottes et cadenas pour tenir leur prisonnier captif.

De retour de son voyage, le 13 mars, Mr le Curé présentait les plans de la nouvelle église et, comme toujours, il ne plut pas à tous. Voyant cela, il convoqua une assemblée pour que les dissidents puissent expliquer leur opposition. Deux seulement se présentèrent et les plans furent acceptés. assister aux offices dans cet accoutrement. Le long du lac Osisko derrière l’Hopital, baigneurs et baigneuses venaient prendre leurs ébats dans des costumes plus ou moins indécents. À ces maux il fallait réagir promptement et Mr le Curé le fit avec une grande fermeté.


le nouveau presbytere
et l’église St michel de Rouyn
— 25 Déc. 1927[22]

Durant tout ce temps les travaux marchaient rondement et le 15 août le presbytére était terminé.

Le développement de Rouyn avait attiré les yeux de la Province et du dehors vers ce nouveau centre minier. Nos gouvernants voulaient se renseigner par eux-mêmes sur ce qui se passait là, sur cette nouvelle industrie qui devait révolutionner la situation économique de la province et ils avaient décidé d’envoyer une délégation de 50 membres du Parlement et de l’Assemblée Législative. Quand ils arrivèrent les maisons étaient pavoisées et la population les accueillit avec acclamations.


Cérémonie de bénédiction de la pierre angulaire[23] Enfin, le 4 septembre 1928 à 4 heures de l’après-midi, Mgr Forbes, évêque de Joliette, entouré d’un nombreux clergé et en présence de toute la population assemblée, bénissait la pierre angulaire de l’église St Michel de Rouyn. La foule était délirante, l’on allait donc avoir un lieu saint digne de l’Hôte Sacré qui allait y résider. L’on se remit donc avec plus d’ardeur pour achever l’œuvre commencée. Le 3 novembre l’on inaugurait le soubassement qui allait servir d’église pendant la construction et le 27 suivant la messe se disait dans ce nouveau temple.

Au prône Mr. le Curé annonçait que $50.000.00 avaient été empruntés de la Corporation Épiscopale et qu’il espérait que cette somme serait payée en dix ans sans répartition. Cependant, il y avait le mobilier, les ornements sacrés qu’il fallait acheter, mais il comptait sur la générosité accoutumée de ses paroissiens. Pour gérer les affaires de la paroisse, il fallait créer un Conseil de Fabrique, dont la charge serait d’aviser aux moyens de payer les dettes de la dite Fabrique, d’émettre des debentures, de faire les démarches nécessaires pour solder les dites dettes par émission de débentures ou tout autre moyen légal de prélever des fonds pour cette fin. Furent élus (11 Déc. 1927).

Anciens Marguilliers les sieurs :

Lucien Grossinger

Olivier Burke

Noé Brouillard

Marguilliers en charge, les sieurs :

Jos. Phil. Côté

Eugène Desabrais

Romuald Gagné.


Enfin, le 25 Décembre, l’église ouvrait grandes ses portes pour la Messe de Minuit et N. S. prenait possession de son trône dans le Saint Tabernacle.

La paroisse était organisée ; l’on avait une église, un presbytère, un cimetière, un orgue et une chorale, une Congrégation de Dames de Ste Anne et d’Enfants de Marie. La routine régulière d’une paroisse allait commencer. La première procession de la Fête Dieu eut lieu, mais comme l’on manquait de ce qu’il fallait pour sa célébration (dais ou ombrellino, torches, etc) l’on dut avoir recours à la générosité des paroissiens pour l’achat de ces objets. La température fut idéale et la tenue vraiment édifiante. La première retraite également fut prêchée, cette année, 19 août 1928, par deux Pères Franciscains, qui furent émerveillés de l’assistance nombreuse et de l’esprit de piété des retraitants. Le 5 novembre, une autre retraite fut prêchée pour les paroissiens de langue anglaise par un Père Pauliste, le Rév. Père Robert.

Le mobilier s’accrut rapidement ; le 5 novembre Mr. Noé Timmins faisait un don de $360.00 pour l’autel ; les souscriptions pour l’orgue atteignaient $203.00 et la table de communion se trouvait payée par des concerts et des rafles.

Le mois d’avril montra un record sur les autres mois pour les statistiques : il y eut 18 naissances, 7 sépultures et 4  mariages.

La Mine Noranda marchait à plein rendement, la ville de Noranda grandissait rapidement et la charge de curé d’une paroisse aussi étendue devenait de jour en jour trop lourde. Monseigneur le comprit et se décida à diviser Rouyn en deux paroisses. Noranda fut remis aux soins de Mr. l’abbé Arsenault et la paroisse fut mise sous la garde de N. D. de la Protection.

Les années s’écoulant, la ruée se faisant toujours et Rouyn prenant rang de Métropole du Sud-Ouest Québécois, une autre division s’imposait, celle de Rouyn-Sud, sous le vocable de l’Immaculée-Conception et confiée aux Pères Oblats de Marie Immaculée.

La paroisse s’enorgueillit, à présent, d’un orphelinat où 100 enfants y sont élevés, d’un Foyer pour jeunes filles et d’un Pensionnat sous la Direction des Sœurs Grises de la Croix.

Quel honneur réserve l’avenir à la paroisse St Michel ? Dieu seul le sait, mais en devenant la métropole du Sud-Ouest du Québec, Rouyn peut s’attendre à de grandes choses et aussi à faire de grandes choses.

Notre cher Curé va fêter bientôt son 25ième anniversaire de prêtrise et son 15ième de ministère dans Rouyn. Il a fait de grandes choses durant ce temps ; son travail ardu et continuel laissera dans la mémoire de tous une reconnaissance durable. Puisse Dieu le conserver encore longtemps au milieu de nous.




PAROISSE DE L’IMMACULÉE CONCEPTION




ROUYN-SUD




Pendant les dix dernières années, au sud de la progressive ville de Rouyn, s’étaient groupés prés de deux cents familles venues des quatre coins du pays. Attirés par l’appât des salaires substantiels à gagner au travail des mines, elles avaient quitté leurs vieilles paroisses. Hélas pour plusieurs ce fut le chômage prolongé et quelques-uns goûteront à la misère. Incapables de payer des loyers dispendieux et pour n’avoir pas de taxes à payer, ces gens s’installèrent en dehors des limites de la ville, sur les terres de la Couronne, ou sur des propriétés minières et s’y construisirent, au petit bonheur, d’humbles logis.

On les appelait les « sqatters » des chemins de Mc Watters et de Granada. Leurs maisonnettes étaient construites sans aucun ordre, le goût ou le caprice était guide dans le choix du site de la maison ou du campement. Groupés sur un chemin aux courbes accentuées, on passait d’une chaumière à l’autre par des ruelles souvent boueuses et des sentiers tortueux.

Pour l’exercice de leur religion, ces gens étaient rattachés à la paroisse de Rouyn. En fait, la ferveur ne régnait pas dans le canton par la force des circonstances, on était devenu négligent. La fondation d’une paroisse s’imposait.

Aussi, au début de 1938, Son Excellence Mgr Louis Rhéaume, O. M. I., toujours soucieux du bien spirituel de ses ouailles, décidait d’organiser une paroisse à Rouyn-Sud et de la confier à la Congrégation des Missionnaires Oblats de Marie Immaculée.

La demande officielle fut faite au Rev. Pére Gilles Marchand, O. M. I., Provincial ; ce dernier vint à Rouyn pour préparer les voies de cette fondation, une véritable paroisse d’Oblats, où tout est à faire, au milieu d’une population qui n’a aucune organisation civile ou religieuse, heureusement, il y a de la bonne volonté chez tous et le Gouvernement coopère dans l’organisation matérielle. Le Ministère des Mines donne à Mgr Rhéaume un lopin de terre de 300 x 400 pieds, site de la future église, à droite de la fourche des chemins de Mc Watters et de Granada. L’endroit sera magnifique, mais il faudra, d’abord, couper les broussailles, arracher les souches et défricher. La question épineuse de la division et de la répartition des lots en inquiète beaucoup et crée du malaise chez plusieurs. Les Officiers du Gouvernement agissent avec prudence et tous ces sqatters régularisent leur situation, quittent les terrains de la Couronne qu’ils occupent illégalement et deviennent propriétaires d’un lot, où ils pourront transporter ou construire leurs demeures.

Les Missionnaires Oblats n’étaient pas des inconnus dans la région. Tour à tour, les Péres de Ville Marie ou les desservants des Missions Indiennes étaient venus prêter main-forte aux dévoués Curés de Rouyn et de Noranda. Aussi, lorsque, le 17 Août, le Pére Alphége Richard, O. M. I., vient prendre possession du poste de dévouement que lui confiait l’obéissance, trouva-t-il chez tous un sympathique accueil.

Le Curé fondateur se mit immédiatement à l’œuvre. Les 22 et 23 Août, en deux petites journées de corvée, les aulnes, coudriers saules étaient coupés, les souches arrachées et tout le terrain de l’église déblayé. Quelques jours plus tard, le R. P. Eugène Guérin, O. M. I, vice-Provincial, apportait les plans de la future chapelle, bâtisse de 100 pieds par 48, avec sous-sol qui servira de salle paroissiale et étage supérieur qui pourra asseoir environ cinq cents personnes. La direction des travaux fut confiée à un entrepreneur compétent, M. Ch. Bujold, et, dés les premiers jours de septembre, on se mit résolument à l’œuvre en commençant le creusage de la cave. En dépit des longues journées pluvieuses de l’automne, les travaux furent poussés si activement que, le 30 Octobre, en la fête de Christ-Roi, on put y célébrer la première messe.

Pour le ministère paroissial, le Père Richard est assisté du R. P. D. Martineau, O. M. I., arrivé à Rouyn au milieu de septembre et où il fut vicaire adjoint en l’absence de M. le Curé. Le R. P. L.-P. Martel, desservant des réserves Indiennes de l’Abitibi et du Témiscamingue, prête son concours entre ses courses apostoliques. Deux Frères Convers se partagent les travaux de la cuisine, de la sacristie et de l’entretien général et complétent le personnel de la Communauté.

Le premier recensement paroissial, fait à l’automne de 1938, donne une population de 1 100 âmes, dont 796 communiants et 313 non-communiants, répartis dans 242 familles. Depuis, avec l’ouverture de nouvelles rues, la population a sensiblement augmenté.

Le 8 Décembre, fête patronnale de la paroisse, après la lecture du décret d’érection canonnique de la paroisse, Son Excellence Mgr Louis Rhéaume, 0. M. I. présida à la prise de possession de la cure et à l’intronisation du nouveau Curé, cérémonie impressionnante qui se déroule pour la premiére fois dans le diocèse et qui remplit d’émotion la nombreuse assistance parmi laquelle on remarquait le R. P. Eug. Guérin, O. M. I., vice-Provincial, le R. P. L. P. Jutras, O. M. I., Supérieur de Ville Marie, M. M. les abbés Albert Pelletier, curé de Rouyn, J. M. Pelchat, de Noranda, L. C. Côté, de Boischatel ; M. M. N. E. Larivière, M. P. P., Maurice Caouette, du Département de la Colonisation et plusieurs autres.

Le R. P. Eugène Villeneuve, O. M. I., a l’honneur de prêcher la premiére retraite paroissiale à l’Immaculée Conception de Rouyn-Sud. Du 13 au 20 Septembre sa parole chaude et convaincante remue les cœurs et ramène bien des âmes à Dieu. Afin de développer une plus grande piété, le Missionnaire jette les bases de plusieurs Congrégations pieuses et, dès les premiéres réceptions, soixante et un hommes et jeunes gens s’enrôlent sous le drapeau de la Ligue du Sacré-Cœur, pendant que leurs épouses, au nombre de quarante neuf, s’inscrivent dans la Congrégation des Dames de Ste Anne et que vingt cinq jeunes filles suivent la blanche bannière des Enfants de Marie. Quarante cinq petits garçons forment une couronne dans le chœur et soixante fillettes aussi ferventes s’enrégimentent dans la croisade eucharistique. Tous rivalisent de zèle pour orner l’église qui, bientôt, grâce à leur générosité, s’enrichit de diverses statues et d’un chemin de la Croix que Mgr. Rhéaume, O. M. I., bénit lui-même.

Si la vie paroissiale s’organise au point de vue religieux et spirituel, l’importante question de l’éducation n’est pas négligée. Un comité de citoyens dévoués et bien intentionnés, mais sans statut légal, voit à la vie matérielle de l’école qui subsiste pauvrement des contributions des parents et des octrois du Gouvernement. Systéme ennuyant pour tous qu’il faut régulariser. Aussi, à la demande des contribuables, le 4 Élèves devant l’École Rouyn-Sud[24] Mars 1939, le Département de l’Instruction Publique signait le décret d’érection de la Municipalité Scolaire de l’Immaculée Conception de Rouyn et le 24 Avril, M. M. Elzéar Lauzon, Président, Lucien Brisson, Joseph Blais, J. A. Roux et Delphis Bureau étaient élus commissaires d’école. Leur tâche sera ardue, car la population enfantine va sans cesse croissant et il faudra multiplier classes et écoles. En Juin 1938, 125 enfants fréquentaient trois classes ; pendant l’année scolaire 1938-1939, plus de deux cents enfants s’inscrivaient dans cinq classes et tout laisse prévoir qu’en septembre 1939, avec prés de trois cents enfants catholiques d’âge scolaire, il faudra ouvrir huit classes, dont trois seront confiées aux Religieuses de Notre Dame Auxiliatrice et les autres à des professeurs laïques compétents.

A leur arrivée à Rouyn, le Pére Curé et ses assistants reçurent une cordiale hospitalité à l’Orphelinat St Michel et au Presbytère de Rouyn. Puis, le 19 Octobre, on se tassait dans une modeste maisonnette, au carré en pièces, gracieusement mise à notre disposition par M. Ovide Jetté, un paroissien qui allait hiverner aux « Chantiers ». Au retour du propriétaire, le 17 Mars, on déménage chez M. Olivier Aubry, où on est un peu plus largement logé, mais qui a, comme l’autre, l’inconvénient d’être éloigné de l’église et en aucune façon adaptée pour un presbytére. Pour le bien de la paroisse, dés le printemps, la construction d’une habitation convenable est entreprise à proximité de l’église. Presbytére assez spacieux, en prévision de l’avenir pouvant abriter le personnel paroissial, des missionnaires et même recevoir des visiteurs et des retraitants.

Église Immaculée-Conception érigée en 1938 et son presbytère construit à l’arrière le printemps suivant.[25]


Avec cette construction, terminée en août, la paroisse de l’Immaculée Conception a son organisation presque compléte et elle peut aller de l’avant dans son développement matériel et spirituel.




NOTRE DAME DE PROTECTION




— Noranda —




Le nouveau site de la ville ouvert par la Mine Noranda venait d’être incorporé et avait pris le nom de « Ville de Noranda ». Les constructions s’élevaient, les magasins et les hotels ouvraient leurs portes, les rues se traçaient. Déjà quatre vingt familles étaient venues s’établir et la nécessité de donner une éducation convenable aux enfants se faisait sentir. L’on avait bâti une petite école, mais elle était devenue tout à fait insuffisante. En Juillet 1928, le notaire Hébert, au nom de la population catholique, faisait application auprès du Département de l’Education, à Québec, pour l’incorporation d’une municipalité scolaire catholique et, le 20 Août, les commissaires étaient élus. La premiére école fut érigée au printemps 1929, comprenant quatre classes et coûta la somme de $42.000.

De son côté, l’abbé Albert Pelletier, curé de Rouyn et Noranda, trouvait que les limites de sa paroisse s’étendaient un peu trop pour ses propres forces. Souvent il venait de l’autre coté du lac dire la messe et remplir les devoirs de son ministére aux résidents de Noranda, mais cela ne pouvait durer longtemps. Il s’en ouvrit à Mgr Louis Rhéaume, O. M. I., évéque de Haileybury, qui, plusieurs fois, s’était rendu au site de la ville de Noranda et avait pu constater par lui-même la croissance rapide de la nouvelle communauté. Aussi, à la suite de ce colloque, fut décidée la division du territoire de Rouyn et celui de Noranda, chacun conservant les limites que leur donnait leur incorporation civile et, le 1er Septembre 1929, la paroisse naissante de Noranda recevait son premier curé, M. l’abbé A. J. Arsenault. Tout était à édifier. La Mine de Noranda mit à la disposition des catholiques un établissement qu’ils occupèrent tant que leur église ne fut pas édifiée.

Voici le résumé des activités de la paroisse jusqu’en Août 1930, conté par l’abbé Arsenault.

La paroisse de N. D. de Protection de Noranda érigée le 1er Septembre 1929 par Sa Grandeur Mgr Ls Rhéaume, évéque de Haileybury, nommant M. l’abbé A. J. Arsenault, comme premier Curé, a raison de se réjouir de ses progrès tant spirituels que temporels.

Cette paroisse qui, il y a huit à dix mois, comptait à peine quatre vingt familles de langue française et anglaise, en compte aujourd’hui cent trente, sans compter soixante cinq familles de races étrangères.

L’état financier est encourageant et l’année qui s’ouvre verra probablement la construction d’une nouvelle église.

La mine Noranda a mis généreusement à la disposition des fidèles un établissement qu’ils occupent depuis la fondation de la paroisse.

L’accroissement exige maintenant un autre local.

La paroisse a, en ce moment, une magnifique école toute moderne, où 160 enfants reçoivent l’enseignement de deux religieuses et de deux institutrices laïques. Encore, ici, il y a un projet à l’étude qui pourvoira à l’agrandissement de l’école. L’activité n’a cessé de régner depuis la fondation. De nombreuses parties de cartes, bazars, loteries et concerts ont été le témoignage d’une population reconnaissante et enchantée.

Les enfants, avant la Noël, sous la direction des religieuses et des institutrices laïques, ont organisé une séance qui fut un vrai succés. A la messe de Minuit, la chorale, composée de 27 membres, a exécuté la Messe de Léonard en « fa », à quatre voix. M. Raymond en était le Directeur et Mlle A. Chamberland l’organiste. Le succès fut tel que tous furent enchantés et, en témoignage d’appréciation et de remerciement à la Chorale pour leur fidélité à la préparation de cette messe, M. le Curé a invité les membres à un souper, à l’Hotel Noranda, le 14 janvier. On s’est régalé et on a agrémenté la soirée de chants classiques et populaires. Le folklore cara de gitana et les chansons à répondre eurent un grand succès. Et une parodie de la « cantinière » par Mme Marcotte, qui passa les rhums à chaque membre, les anima beaucoup. Avant le départ, une suggestion fut faite que Jean M. Sabourin, appuyée par tous, que l’on organise une partie de cartes ou une représentation chorale pour l’achat d’un orgue. M. Raymond remercia M. le Curé de sa délicatesse en les invitant à ce souper, auquel répondit M. le Curé et l’on se sépara après trois heures et demi de plaisir, aux accords de « O Canada » et « Bonsoir, les amis, bonsoir ».

Cérémonies entourant l’ouverture de l’hôpital Youville.[26]


Le 14 Septembre 1930, une grandiose cérémonie se déroulait. Lorsque Rouyn s’était constitué l’on avait bâti un hôpital pour prendre soin des malades et des blessés, l’Hopital St Albert, mais la ruée dans les deux villes l’avait rendu complètement insuffisant et il avait fallu songer à bâtir de nouveau. La Mine Noranda donna le terrain en face du lac Trémoy et, par un arrêté en conseil daté du 8 mai 1929, approuvé par le Lieutenant Gouverneur le 11 mai, l’Hopital Youville de Noranda était reconnu comme institution d’assistance publique par le Gouvernement de la Province de Québec. Les religieuses avaient déménagé, pris possession de leur nouvel établissement et c’est la bénédiction de cet Hopital que l’on faisait ce jour-là. Avec Devant une nombreuse assistance, rehaussée par la présence des autorités de la Mine, civiles et religieuses des deux villes, Mgr Louis Rhéaume bénit le nouvel Hopital. Il y eut discours et visite de l’établissement, puis un banquet, le soir à l’Hotel Noranda, clotura la cérémonie.

Le 22 mars 1931, l’on fit la vérification de la dite lettre pour l’érection canonnique de la paroisse, le 15 avril suivant, M. le Curé lisait le décret épiscopal de l’érection cannonique sous le vocable de N. D. de Protection et le 1er Mai, l’on faisait l’élection des enf marguilliers.

La paroisse était formée, il fallait songer à bâtir une église et un presbytére. Le plus pressant était d’avoir une église. Le 14 Juin, les paroissiens étaient priés de signer une requête à cette fin. En septembre 1932, l’on en commença la construction et la touche finale fut donnée le 23 Décembre 1932. L’entrepreneurise fut financée par le profond intérêt de Sa Grandeur Mgr Rhéaume et du soncuré, le Rév. Père A. J. Arsenault.

Bâtie de briques vitrifiées, la nouvelle construction est de 100 pieds de longueur par 50 pieds en largeur et a une capacité de 500 personnes assises, nombre qui peut être porté à 700 par l’usage de chaises. Le soubassement de l’édifice fournit une salle paroissiale spacieuse, équipée avec une scéne pour donner des concerts. Elle mesure 50 pieds de largeur et a une profondeur de 75 pieds. De chaque coté se trouvent les coulisses et les magasins. Le soubassement comprend aussi une cuisine bien aménagée, une chambre pour le bedeau, la chambre des fournaises et du charbon.

Église Notre-Dame-de-Protection avec son escalier d’origine[27]

L’entrée de l’église se fait par un large escalier qui fournit ample espace pour l’entrée et la sortie des grandes foules dans des conditions confortables. Lorsque l’on a franchi un spacieux vestibule, le visiteur se trouve face à face avec un bel et ornemental maître-autel, le don à l’église de Edwin Horne, le découvreur de la Mine Horne.

Les bancs de chêne foncé s’harmonisent parfaitement avec l’intérieur qui est de « Fibretex » et qui a été posé par les soins de l’International Fibre Board Co. de Sudbury. L’effet est très agréable à la vue et donne le coup d’œil d’un intérieur en pierre avec des piliers de pierre s’élevant du plancher et s’unissant à la voute à des arches gracieuses.

De chaque coté du maitre-autel, vers le nord-est une reproduction grandeur naturelle de la descente de la Croix ; vers le sud-est la présentation de la scéne de la Nativité.

Le coût de la bâtisse fut de $30.000 et l’entrepreneur fut Fred. Levesque, de Sudbury. Les travaux furent sous la direction de feu Alfred Saumier, de Noranda.

La premiére messe fut dite à Noël. Le Rév. Père Arsenault officiait et la messe du Léonard en « F », à quatre voix, fut rendue par les Membres de la Chorale. Des soli en français, anglais et latin furent chantés. La chorale se composait de 30 voix mixtes, sous la conduite de T. L. Golden, Mme Charlebois accompagnait à l’orgue nouvellement installé et sortant des ateliers Estey.

Un deuil vint à cette époque obscurcir les ⁁dits adieux non seulement de la paroisse Noranda, mais aussi celle de Rouyn. La mort vint ravir à l’âge de 53 ans un des citoyens les plus en vue du camp minier, Alfred Saumier, membre du Conseil municipal de Noranda, marguillier, chevalier de Colomb et Kiwanien. Lors de la construction de l’église N. D. de Protection, il avait donné tout son temps et ses forces à la surveillance de la nouvelle église, projet dans lequel il avait mis tout son cœur.

Pâques de 1934 fut célébrée en grande pompe, dans la semaine du 25 mars, la chorale, sous la direction de M. Lucien Labelle, exécuta les « Sept paroles du Christ » et, avant chaque interprétation, M. le Curé en expliqua la signification.

Vu l’accroissement constant de la population, la population Commission Scolaire Catholique dut agrandir l’école de quatre autres classes au coût de $25.000.

Le 10 mai, le Rév. Père L. Gauthier, de Haileybury, venait remplacer pro tempore le Rév. Père Arsenault.

Le 28 juin 1934, une annonce de grand intérêt local fut faite à l’église N. D. de Protection de Noranda, aux deux messes du dimanche, sous forme d’une communication de Son Exc. Mgr Ls Rhéaume, évéque de Haileybury, nommant un nouveau porteur pour succéder à l’abbé A. J. Arsenault.

Le nouvel élu était le Rév. Père J. M. Pelchat, B. B., pendant plusieurs années recteur de la cathédrale de Haileybury et Chancelier du Diocése, qui, quoique encore un jeune homme, a déjà atteint une des premières places dans les rangs du clergé.

Le nouveau curé, qui est originaire de Montréal, où il reçut une éducation primaire, fit son cours classique à l’Université d’Ottawa et ses études théologiques au Grand Séminaire de cette ville. Ordonné prétre en 1924, il entra dans le diocése de Haileybury, comme vicaire à la cathédrale. Il partit ensuite pour Rome poursuivre pendant deux années ses études théologiques au Collège Canadien. À son retour, il reprit sa place à la cathédrale de Haileybury et, plus tard, fut nommé chancelier du diocése et curé de la cathédrale à la place de l’abbé Roulier, qui avait été transféré à Nédelec, remplissant ces deux fonctions avec fidélité et dévotion et gagnant l’estime et l’affection, non seulement de ses paroissiens, mais aussi de toute la population.

Un musicien de talents plus qu’ordinaires, le Rév. Père Pelchat prend un intérêt particulier dans la chorale et autres organisations musicales. C’est aussi un fervent de sports et de tout ce qui peut développer l’art athlétique.

Il est renommé comme orateur, parlant couramment le français et l’anglais et un ardent ouvrier pour le bien-être spirituel de ceux qui sont sous sa charge.

Le dimanche qui suivit son arrivée, aux deux messes, il parla à la congrégation, faisant ses débuts devant ses paroissiens et créant du même coup une impression des plus favorables. Relevant d’une sérieuse opération et pas encore complètement rétabli, il avertit que, pour quelque temps, il ne fera pas de longs sermons le dimanche. Dans ses remarques, il demanda à tous l’harmonie et la bonne entente parmi les différents éléments raciaux de la Congrégation, plaida pour la coopération avec les autres dénominations religieuses de la communauté, donna un aperçu des différents travaux à accomplir, embellissement des alentours de l’église, construction d’un presbytére, etc, et promit de faire sa part, non seulement dans la conduite spirituelle, mais aussi dans la construction matérielle de la paroisse.

Les Chevaliers de Colomb reçoivent leur nouveau curé, le Rév. Père Pelchat[28] Après la messe, les membres des Chevaliers de Colomb, au nombre de trente, firent une réception au Rév. Père Pelchat, au soubassement de l’église. Une adresse en français fut lue par Paul Germain, Grand Chevalier de Colomb du Conseil de Rouyn, et, en anglais, par B. A, Jones, assurant leur nouveau Pasteur de leur entière assistance et coopération dans toutes ses entreprises paroissiales, lui exprimant une cordiale bienvenue et un succés dans son travail pour la construction matérielle et spirituelle de la paroisse.

Le Rév. Père Pelchat, dans sa réponse, indiqua les projets en vue et assura les Chevaliers de son intention de demander leur support et assistance, ainsi que celle des dames de la ligue catholique. Il les remercia de leurs souhaits de bienvenue et leur dit qu’il serait toujours avec eux dans ce qu’ils entreprendraient.

Dès son arrivée, M. le Curé se mit au travail et profitant du passage de Monseigneur, en route pour Amos, avec l’assentiment des marguilliers, obtint l’autorisation de réaliser un programme ambitieux et très intéressant de construction, qui prouvait que les autorités ecclésiastiques étaient non seulement confiantes dans l’avenir de Noranda, mais aussi déterminées à marcher de pair avec sa croissance et son progrès.

Le nouveau pasteur, qui a déjà conquis une large place dans la confiance et dans les cœurs des paroissiens, fut présent à une assemblée des marguilliers et discuta avec eux nombre de matiéres connectées avec le développement de la paroisse et pour certaines améliorations à l’église et la construction d’un presbytére.

Ce sont ces propositions que Monseigneur non seulement approuva, mais consentit à financer avec des avances provenant des fonds diocésains. La présente dette paroissiale fut consolidée et le prêt nécessaire pour le travail projeté fut arrangé.

A part de la construction du presbytére, le projet comprenait certaines améliorations à l’intérieur de l’église, le remplacement de l’escalier en bois donnant accès à l’entrée du temple par un en ciment et une plateforme de même matériel pour permettre la sortie par les portes de côté.

Le nouveau prsbytére qui coûtera de $8.000 à 10.000, d’après les estimés, sera érigé en arrière de l’église avec façade sur la 7ième Rue et un passage unira les deux bâtisses.

Dans le même temps, les paroissiens dans une petition et à une assemblée des francs-tenanciers, approuvaient les dépenses et donnaient, le 26 août, la ratification finale aux plans.

Lorsque les soumissions furent demandées, il se trouva que toutes étaient supérieures au montant estimé et considérablement au-dessus des moyens financiers de la paroisse. Devant ces difficultés et la saison étant avancée, on se décida d’attendre au printemps pour faire des travaux. Cependant l’escalier en ciment et le trottoir permanent furent construits cette année-là.

L’église et l’école n’avaient pas encore été bénites. La dédicace avait été projetée pour le jour de Pâques, mais des circonstances incontrolables avaient empêché cette cérémonie. Aussi, ce fut un événement pour la paroisse de N. D. de Protection, événement longtemps attendu, lorsque Son Exc. Mgr Ls Rhéaume, O. M. I., Evéque de Haileybury, vint à Noranda faire sa première visite pastorale.

A son arrivée, samedi 20 octobre, à Noranda, accompagné de son Secrétaire, l’abbé Beaudoin, Son Excellence fut reçu à la gare par le Rév. Père Curé, les membres du clergé local, des adultes et des enfants de la paroisse, portant des drapeaux. Une procession d’une vingtaine d’automobiles décorées se forma et accompagna l’Evéque à la résidence du Pére Pelchat.

xxxx

A 7 heures 30 du soir, les cérémonies du bénédicité commencèrent avec l’entrée solennelle dans l’église, de l’évégue accompagné des membres du clergé et des enfants de chœur. Son Excellence adressa la parole en français et en anglais, puis il y eut bénédiction du Saint Sacrement.

Le lendemain dimanche, aux messes, il prêcha dans les deux langues et, avant la grand’messe, officia aux cérémonies de la bénédiction de l’église. L’église était remplie à sa pleine capacité. La messe grégorienne du second ton fut rendue par un quatuor composé de Jules Cassé, Lucien Labelle, Dave Trudel et Wilfrid Sabourin. Léo Bureau était le soliste et Mme Charlebois touchait l’orgue.

Dans l’aprés-midi, la confirmation fut donnée administrée à deux cents enfants, les fillettes habillées de blanc et les garçonnets portant le brassard blanc.

Le lundi aprés-midi, Monseigneur se rendit bénir l’école, à la suite de laquelle cérémonie eut lieu une réception par les enfants au soubassement de l’église. Après lecture d’adresses en français et en anglais, il y eut investiture de six Boys Scouts et, comme remerciement, un jour de congé pour le lendemain.

Le soir, Son Excellence fut l’hôte d’honneur de la paroisse au soubassement paroissial. Le programme comprenait des numéros vocaux et instrumentaux, ainsi qu’une petite comédie. « Un mariage par téléphone ». P. A. Germain, au nom des catholiques canadiens français, lut une adresse en français et D. A. Jones une autre en anglais. Ils assurèrent Monseigneur de leurs hommages, de la loyauté et de l’entiére coopération des paroissiens avec la première autorité du diocèse. Un tribut fut payé au zéle de leur dévoué Curé, le Rév. Père Pelchat, qui, en si peu de temps, a su conquérir le cœur de tous. Puis Mlle Jeannine Raymond présenta le don de la paroisse, une magnifique corbeille de roses avec un chéque substantiel.

Son Excellence répondit en français et en anglais, remerciant les paroissiens de Noranda des sentiments d’estime et de bienvenue exprimée par eux. Il dit le plaisir que ce fut pour lui de venir à Noranda, la consolation et la satisfaction de voir la foule si nombreuse se presser à toutes les cérémonies. Il félicita les paroissiens de N. D. de Protection d’avoir une si belle salle et remercia ceux qui s’étaient dépensés pour faire de cette soirée un succès.


Église et presbytère Notre-Dame de Protection.[29] Au printemps de l’automne 1935, les difficultés pour la construction du presbytère étant aplanies, l’on en commença les travaux et, le 21 octobre 1935, M. l’abbé J. M. Pelchat penda la crémaillère dans sa nouvelle demeure, qui est une des plus belles résidences de Noranda.


Au point de vue matériel, la paroisse N. D. de Protection était organisée. Le travail du Rév. Père Curé était maintenant d’accroître l’harmonie entre les races formant la population de Noranda. Déjà, en mai 1935, une assemblée avait eu lieu au soubassement de l’église du « Conseil des Amitiés — Rouyn-Noranda », où, appelé à adresser la parole, le Pére Pelchat déclara que le but du Conseil était de promouvoir la bonne entente, l’harmonie et la compréhension parmi toutes les nationalités de ce district : « Quelle attitude avez-vous pris, Canadiens Français, envers ces peuples ? Une attitude contraire, je dirais. Ce sont des étrangers, ils ne parlent pas votre langue, ils occupent des positions que vous pourriez occupé, ont des coutumes différentes des vôtres, ne sont pas toujours respectueux de nos lois, de nos coutumes, de nos institutions, mais comme homme à homme, chrétien à chrétien, je dirai plus, catholique à catholique nous leur devons une attitude plus charitable. Cette région n’est-elle pas assez grande ni assez riche pour contenir plus que la présente population ? N’ont-ils pas droit au sol canadien, s’ils veulent se soumettre à nos lois ? Vous me direz qu’il y a du communisme parmi eux. Mais, n’est-ce pas un peu notre faute ? Pendant que les agents du communisme les travaillaient, avons-nous pris intérêt à eux et ne les avons-nous pas ostracisés ? Le Conseil les rapproche de nous et sera un agent d’anticommunisme. Tout homme et tout peuple ont des valeurs et des qualités. C’est en nous mêlant à eux que nous les trouverons. »

Ce discours reçut un applaudissement prolongé et laissa une impression profonde sur les auditeurs.

En 1938, avec le consentement de Monseigneur, le jubé fut agrandi, augmentant ainsi la capacité de l’église.

La paroisse sous la sage direction de son dévoué pasteur, est une des paroisses les plus prospères du diocèse. Il y a une Congrégation des Enfants de Marie, une Ligue Catholique Féminine, une xxx section de la Fédération des Femmes Canadiennes Françaises, un cercle des jeunes gens. L’harmonie et la bonne entente régnent envers toutes les races. Un chœur de chant sous l’habile direction de M. J. O. Leclerc, maître de chapelle et de Mlle Simard, comme organiste, interprète les offices religieux en chant grégorien.

Du 30 septembre dernier au 3 octobre’39, de grandes fêtes rehaussées par la présence de Son Excellence Mgr Ls Rhéaume, O. M. I. Evéque de Timmins, eurent lieu pour célébrer le 10ième anniversaire de la fondation de la paroisse.


Séparateur

  1. Quai d’embarquement au rapide à l’Esturgeon où l’esquif de drave en provenance d’Angliers a fait escale lors de ce voyage, 1927, Fonds Angliers, La Société d’Histoire du Témiscamingue ; NdÉ.
  2. Chemin de rondins reliant le lac Rouyn au lac Trémoy, Vavasour & Dick, vers 1930, Fonds Fonderie Horne, BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  3. Campement Horne construit en 1923, détruit vers 1930, Vavasour & Dick, vers 1926, Fonds Fonderie Horne, BAnQ de Rouyn-Noranda. ; NdÉ.
  4. Edmund Horne, prospecteur responsable de la découverte du gisement de la mine, lors d’un de ses voyages en canot dans le canton de Rouyn, Inconnu, entre 1911 et 1922, Fonds Fonderie Horne, BAnQ de Rouyn-Noranda. ; NdÉ.
  5. Le curé Pelletier à bord de son embarcation à moteur, Inconnu, vers 1940, Fonds Société d’histoire de Rouyn-Noranda, série Albert Pelletier, BAnQ de Rouyn-Noranda. ; NdÉ.
  6. Vue de la boucherie « Meat Market » tenue par Lucien Baril, Vavasour & Dick, vers 1925, Fonds Fonderie Horne, BAnQ de Rouyn-Noranda. ; NdÉ.
  7. Vue éloignée de la façades et du profil droit du bureau et de la prison de Rouyn sous la garde des policiers Ephrem Bégin et Michael Tobin, Canadian National, vers 1925, Fonds L’Action catholique, BAnQ de Québec. ; NdÉ.
  8. Hôtel Osisko, tenu par les cinq frères Green à l’arrière duquel se trouvait le magasin général de Jos Dumoulon, Photographe inconnu, 1924, Fonds Ministère des Richesses naturelles, BAnQ Québec ; NdÉ.
  9. Ce type de puit d’exploration, surmonté d’un chevalement de bois démontable, permettait au mineurs de prospecter le sous-sol par une ouverture d’à peine un mètre de diamètre, Vavasour & Dick, vers 1930, Fonds Fonderie Horne, BAnQ de Rouyn-Noranda.
  10. Carte officielle Témiscamingue et Abitibi avec ajout des portages, du chemin d’hiver et de la voie navigable utilisés par les pionniers pour se rendre à Rouyn à partir d’Angliers, Ministère des Terres et Forêts, 1924, Fonds Société du patrimoine Rivière-des-Quinze, BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  11. Abbé Albert Pelletier avec deux religieuses devant le premier presbytère de Rouyn, 1926-1927, Fonds Canadien National, BAnQ de Rouyn-Noranda. ; NdÉ.
  12. Arrivée de Mgr Rhéaume au landing de Rouyn, Inconnu, vers 1926, Fonds Comité du 50e anniversaire de Rouyn-Noranda, BAnQ de Rouyn-Noranda.
  13. Tente-chapelle où prennent place les fidèles, Inconnu, 1925, Fonds Comité du 50e anniversaire de Rouyn-Noranda, BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  14. Tente servant de sanctuaire, Inconnu, 1925, Fonds Comité du 50e anniversaire de Rouyn-Noranda, BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ
  15. Vue extérieure des deux tentes utilisées comme chapelle, Inconnu, 1925, Fonds Comité du 50e anniversaire de Rouyn-Noranda, BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  16. Essai de la nouvelle pompe à incendie, Inconnu, vers 1925, Rouyn-Noranda Old Timers (Nicole Bernier Caya), BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  17. Le curé Pelletier, M. Larivière, Mgr Rhéaume et non identifié devant le camp de garde-feux, premier presbytère, Inconnu, 1925, Rouyn et Noranda — Une Histoire En Photos (Félix Thériault), BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  18. Flottage du bois qui a servi à construire la fondation de l’école Saint-Louis, Inconnu, 1925, Fonds Société d’histoire de Rouyn-Noranda, série Albert Pelletier, BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  19. Vue de l’école St-Louis-de-Gonzague, vers 1927, créateur Vavasour & Dick, Fonds Fonderie Horne, BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  20. Construit en 1926, le théâtre Régal est l’un des plus vieux bâtiments de la rue Perreault à Rouyn. Il était tenu par une Mme Carey et contenait 325 places, Vavasour & Dick, vers 1927-1928, Fonds Fonderie Horne, BAnQ de Rouyn-Noranda. ; NdÉ.
  21. Le théâtre Régal servait aussi de lieu de culte pour les catholiques et les protestants, de salle de réunion pour le conseil municipal de Rouyn et de salle de classe pour les élèves de la commission scolaire, Vavasour & Dick, vers 1926-1927, Fonds Fonderie Horne, BAnQ de Rouyn-Noranda. ; NdÉ.
  22. Presbytère et église St-Michel inaugurés en 1927, Supreme Studio, vers 1927, Fonds Comité du 50e anniversaire de Rouyn-Noranda, BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  23. Cérémonie de bénédiction de la pierre angulaire de l’église St-Michel présidée par Mgr Forbes, évêque de Joliette, Vavasour & Dick, 1927-09-04, Fonds Fonderie Horne, BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  24. Élèves devant l’École Rouyn-Sud, Inconnu, juin 1938, Livre Paroisse Immaculée-Conception ; NdÉ.
  25. Église Immaculée-Conception érigée en 1938 et son presbytère construit à l’arrière le printemps suivant, Inconnu, vers 1939, Fonds Comité du 50e anniversaire de Rouyn-Noranda, BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  26. Cérémonies entourant l’ouverture de l’hôpital Youville à Rouyn-Noranda, Inconnu, 1930, Fonds Ministère des Ressources naturelles, BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  27. Vue de l’église Notre-Dame-de-Protection à Noranda, Vavasour & Dick, entre 1932 et 1935, Fonds Fonderie Horne, BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  28. Les Chevaliers de Colomb reçoivent leur nouveau curé, le Rév. Père Pelchat, Vavasour & Dick, 1934, Fonds Comité du 50e anniversaire de Rouyn-Noranda, BAnQ de Rouyn-Noranda ; NdÉ.
  29. Église et presbytère Notre-Dame de Protection à Noranda, R. H. Taschereau, 1947, Fonds Ministère de la Culture et des Communications, BAnQ de Québec ; NdÉ..