Histoire des églises et chapelles de Lyon/I-02

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H. Lardanchet (tome Ip. 13-21).
Sainte-Croix, au xviiie siècle.

SAINT-ÉTIENNE ET SAINTE-CROIX

Détruites depuis la Révolution, les deux églises Saint-Étienne et Sainte-Croix font partie intégrante de l’histoire de Saint-Jean.

Saint-Étienne, ancienne cathédrale, couvrait à peu près l’emplacement de la rue de ce nom. On la voit sur les plans scénographiques ou dessins anciens, toute petite au flanc nord de la basilique. Les églises de la Gaule romaine, comme les temples antiques, étaient de dimensions médiocres. Ce sont les architectes du Nord qui ont importé chez nous les vastes vaisseaux, et encore nos édifices de style ogival n’ont-ils pas les dimensions des cathédrales des bords de la Seine ou du Rhin.

Fondé au ve siècle, achevé et enrichi par Sigismond, fils de Gondebaud (517-523), mais soumis à des réfections nombreuses et reconstruit en totalité au xve siècle, Saint-Étienne offrait ceci de particulier qu’il avait conservé la disposition des églises primitives : le vestibule où se tenaient les pénitents et la partie réservée aux catéchumènes. De récents travaux de voirie ont mis à découvert des substructions qui indiquent encore cette distribution. Une partie de la première construction avait été faite avec des matériaux antiques. Il se trouvait dans la façade un bas-relief, figurant une divinité entourée de fruits et d’animaux. Les constructeurs l’avaient sans doute fixé là comme une sorte de trophée, mais il devint l’objet d’un culte particulier. La veille de la fête de Saint-Étienne, dit Paradin, « aucuns citoyens y venoient de nuit, en chemin rétrograde, adorer ladite image et lui offrir des chandelles ». Il fallut l’enlever en 1519 pour faire cesser ces singuliers pèlerinages. Depuis l’érection de Saint-Jean en cathédrale, le titre de baptistère avait passé à Saint-Étienne. En dernier lieu, on n’y baptisait plus que les Juifs et les infidèles. De tradition, il ne s’y faisait pas d’inhumation. Le même usage exista longtemps à Saint-Paul, mais le chapitre de cette église s’en départit au xvie siècle.

Sainte-Croix confinait à Saint-Étienne. Fondée au viie siècle par l’évêque Arigius et reconstruite vers 1450, c’était, peut-on dire, une grande bâtisse sans style, éclairée par des baies ogivales. L’église était précédée d’une cour à laquelle on accédait par la rue Saint-Jean. Au chevet, se trouvait une maison qui existe encore sur la rue des Estrées et qui servait d’habitation aux deux custodes ou curés. Le cimetière paroissial s’étendait derrière l’abside de Saint-Étienne.

Au Musée lapidaire de Lyon, en peut voir la pierre tombale de Ponce de Vaux, décédé en 1352, custode de Sainte-Croix et, en même temps, pénitencier ; il absout un pénitent en le touchant avec des verges. C’est en souvenir de ce mode d’absolution que l’on place à Saint-Jean, le dimanche de la Septuagésime, un petit faisceau de verges sur un prie-Dieu, au bas de la nef.

Quand les deux églises furent démolies, les matériaux trouvèrent leur emploi sur place, dans les habitations qu’on éleva. Des portions de murailles durent même être conservées et utilisées, ainsi qu’en témoigne un pilier de fenêtre avec fragment d’ogive, qui se voit encastré dans un mur, au fond de la seconde cour qui porte le numéro 6 sur la rue Saint-Étienne. Plusieurs portes d’allée à deux battants, qu’on rencontre dans le périmètre, proviennent certainement des deux églises ou de leurs dépendances. Des tableaux et des morceaux de sculpture décoraient les deux édifices ; mais tout a disparu dans la tourmente révolutionnaire, soit que les objets aient été détruits, soit qu’on les ait détournés.


le clergé


Les anciens chapitres étaient de véritables puissances sociales. Mais nés de la féodalité, adaptés au régime féodal, ils durent nécessairement disparaître lorsque les dernières traces de ce régime furent emportées par le temps.

Le chapitre de Saint-Jean, tel qu’il existe à la fin du xviiie siècle, se compose de trente-deux chanoines, dont huit dignités : doyen, archidiacre, précenteur ou grand-chantre, chantre, chamarier, grand sacristain, grand custode et prévôt de Fourvière. Tous ont dû faire preuve de quatre quartiers de noblesse, paternels et maternels. C’est ainsi que Camille de Villeroy, déjà pourvu des abbayes d’Ainay et de l’Île-Barbe, et qui devait être plus tard archevêque de Lyon, se vit refuser un canonicat parce que la noblesse de sa famille ne comportait pas quatre quartiers pleins. Il y a mieux. Le roi de France était, par naissance, premier chanoine de Saint-Jean et faisait son entrée à l’église, l’aumusse sur le bras : or, on prétend que certains membres du chapitre, lorsqu’il s’agit de recevoir Louis XIV, objectèrent qu’on trouvait une mésalliance dans sa lignée, par le mariage de son aïeul Henri IV avec une Médicis. Chaque chanoine est seigneur mansionnaire d’une des trente-deux baronnies de l’église. Quelques-uns sont même titulaires de deux seigneuries, parce que très souvent le chapitre admet au canonical de tout jeunes gens, qui, tant qu’ils étudient et n’ont point reçu les ordres, n’ont pas de part aux bénéfices.

« À la fin du xviie siècle, dit Mgr Forest, un comte en dignité, après vingt-cinq ou trente ans, pouvait avoir huit mille livres de rente, un comte simple, trois mille livres. » Ces chiffres, multipliés seulement par quatre, représenteraient aujourd’hui de beaux revenus. Mais il faut tenir compte des charges qui grèvent ces bénéfices, chaque chanoine devant, notamment, fournir la table à un plus ou moins grand nombre de prêtres auxiliaires et de clercs.

Après les chanoines, viennent les quatre custodes. Deux remplissent les fonctions de curés dans l’église paroissiale de Sainte-Croix : des deux autres, l’un est sacristain de Sainl-Étienne et le dernier, trésorier de Saint-Jean. Ceux-ci sont de condition plébéienne et forment, pour ainsi dire avec les chevaliers, un corps de chanoines de second ordre. Les chevaliers, au nombre de sept, doivent être gradués en droit : à eux est confiée la poursuite de toutes les affaires litigieuses de l’administration temporelle. Custodes et chevaliers se recrutent parmi les perpétuels.

On nomme ainsi les prêtres chargés de chanter l’office qui se récite presque en entier de mémoire. Ils ont aussi, dans les derniers siècles où nombre d’étrangers au diocèse obtiennent le canonicat, à maintenir le cérémonial propre à l’église de Lyon. On les aj)pelle les << douze » quoique depuis le xvie siècle leur nombre ait été porté à vingt.

La récitation de l’office par cœur nécessitait une préparation longue et spéciale. Aussi les perpétuels ont-ils presque toujours débuté comme petits clercs ou clergeons. À cet effet, l’école cathédrale, plus couramment désignée sous le nom de Manécanterie, reçoit deux catégories d’étudiants : les douze clergeons en titre soumis à l’internat, et des externes, assez souvent pensionnaires chez un chanoine.

À côté de ce clergé, se trouve encore une centaine de prébendiers et prêtres habitués, attachés au ministère des chapelles et de nombreux autels disparus, placés sous le jubé ou simplement accolés à un pilier. Chacun de ces oratoires était doté de fondations pour l’entretien de plusieurs prêtres. Ajoutez à cela les diacres et sous-diacres, en cours d’études : car le chapitre conserve sous sa direction le personnel parmi lequel se recruteront les serviteurs des trois églises. On comprendra qu’avec cette organisation, la liturgie s’accomplisse aux jours solennels, et simultanément dans les trois sanctuaires, avec toute la pompe imaginable.

Jusqu’au milieu du xviiie siècle, le costume des chanoines de Saint-Jean et des autres églises collégiales de Lyon consistait en une froche ou surplis, couvert, selon la saison, d’une aumusse fourrée d’hermine ou d’une chape de soie noire, bordée de rouge par devant. En 1748, sur les réclamations des chanoines qui déclaraient ce costume incommode et coûteux, le cardinal de Tencin approuva le port d’un costume qui est encore celui d’à présent : le surplis est remplacé par le rochet, et la chape par le camail bordé d’hermine. Depuis 1745, il s’y était ajouté une croix suspendue à un ruban couleur de feu et liseré de bleu.

Lorsqu’ils officiaient, les trois célébrants, prêtre, diacre et sous-diacre, portaient la mître ; les pierres tombales représentent toujours les chanoines coiffés ainsi. C’est un privilège qui n’a pas été rendu à leurs successeurs après la Révolution. Jusqu’au concordat de 1516, qui réserva au roi seul l’élection des évêques et abbés, l’ancien chapitre était en possession du droit d’élire l’archevêque. Ce droit n’était presque toujours qu’un vain mot, le prélat étant habituellement choisi par le Souverain Pontife.

Les archevêques de Lyon ne paraissaient guère dans leur cathédrale qu’aux fêtes solennelles où ils officiaient. Lorsqu’ils y venaient en dehors de cette circonstance, ils revêtaient le camail des chanoines et occupaient la stalle du doyen, qui, lui, prenait la stalle suivante. Pour les fonctions épiscopales, ordination des clercs et confirmation des fidèles, il y avait un évêque suffragant, généralement choisi dans un ordre monastique et résidant non dans le cloître, mais sur la rive gauche de la Saône.

Avec les temps nouveaux, tout a changé. Le domaine féodal de l’église n’est plus ; l’autorité seigneuriale de l’archevêque et du chapitre a disparu, les fondations et prébendes ont été englouties dans le cataclysme social de 1789 ; le titre de primat des Gaules que porte l’archevêque ne lui confère plus aucune juridiction sur les autres métropoles de la Gaule lyonnaise : du reste, les archevêques ne sont, en fait, aujourd’hui, que des évêques de première classe.

Néanmoins, le siège de Lyon reste environné comme d’une auréole, à raison de sa haute antiquité, de son origine quasi apostolique et de la place considérable qu’a toujours tenue Lyon entre les églises des Gaules. Le chapitre, très attaché aux traditions, conserve avec fidélité les rites propres à notre église ; c’est le seul qui ait maintenu la récitation intégrale de l’office quotidien, n’ayant jamais confié à des mercenaires ni le chant, ni aucune des fonctions du chœur.

Il est peu de fidèles qui n’aient assisté, un jour de fête solennelle, à cette pompe majestueuse qui accompagne la messe ; chaque ordre d’officiants est représenté par sept personnes ; l’archevêque lui-même, ou, à son défaut, le doyen est entouré à l’autel de six concélébrants. Et combien sont émouvantes les cérémonies de la Semaine Sainte, avec
Saint-Jean
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les lamentations récitées sur un rythme oriental et tout un rituel qui, n’étant pas soumis à un usage commun et quotidien, a gardé ses formes primitives !

La sonnerie même des cloches conserve encore quelque chose de particulier. Pas de carillon tapageur, pas d’air d’hymne ou de cantique, mais un chant, pourrait-on dire, spécialement composé pour des cloches. Dans ce concert, la grosse cloche, appelée improprement bourdon, tient le premier rôle avec sa voix harmonieuse en la bémol.

La plupart des anciens édifices, surtout des édifices religieux, ne nous apparaissent phis dans leur cadre naturel. Contrairement à une opinion trop répandue, nos vieilles basiliques perdent complètement à être dégagées et isolées. Elles n’ont pas été conçues pour l’isolement. Jaillissant au milieu d’un lacis de rues étroites, entourées de constructions dont quelques-unes s’accrochaient à leurs flancs, leur physionomie dominatrice s’accusait d’autant plus et leurs beautés architecturales, plus vivantes, captivaient davantage le regard surpris.

Saint-Jean se présentait dans un cadre particulièrement favorable. Une muraille, le cloître, dont il reste un fragment rue Tramassac, enfermait le quartier environnant dans une sorte de quadrilatère. Cette muraille, parlant de la rivière, suivait au nord la direction de la rue actuelle de la Bombarde, épousait la rangée orientale des maisons de la rue Tramassac, puis revenait par l’ancienne rue des Deux-Cousins, aujourd’hui Jean Garriès, enfin, à mi-chemin, faisant un angle brusque vers le midi, elle enveloppait jusqu’à la Saône la partie limitée par l’actuelle rue Bellièvre.

Vu de la ville, Saint-Jean se dressait au-dessus d’une série de constructions, de hauteur modeste, qui, sans le masquer, l’enchâssaient à sa base. C’étaient, le long de la Saône, en allant du midi au nord, la maison du trésorier, les prisons du chapitre, séparées par une cour de l’auditoire où se rendait la justice du comté de Lyon, la maison du grand sacristain et celle du grand custode. Ces dernières habitations, avec entrée sur la rue des Estrées, ont fait place à des constructions de rapport, offensantes pour la vue, tant par leur hauteur que par l’absence de style.

On pénétrait dans le cloître par six entrées. La principale était la porte Frau, porta fratrum, la porte des Frères, dite plus souvent porte Froe, qui s’ouvrait dans l’axe de la rue Saint-Jean. De ce côté la cathédrale revêt le caractère particulièrement sévère du xiiie siècle ; aux fenêtres de la tour du clocher, un simple meneau forme une double ogive, nul ornement ne couronne les contreforts d’angle, et les motifs placés sur les arcs-boutants de la nef sont des figures de peu d’importance. Le côté méridional, au contraire, s’épanouit dans le style du xve siècle. La tour de la Madeleine se termine par une balustrade aux fines découpures, de gracieux rinceaux serpentent sous l’ogive des fenêtres, d’élégants pinacles prolongent les contreforts et surmontent les arcs-boutants. Protégée par les constructions qui sont au-devant, cette façade a conservé plusieurs des anciennes statues.

Architectes et archéologues ont beaucoup discuté sur le couronnement que réservaient aux deux tours du chevet ceux qui les ont construites : d’aucuns estiment que ce devaient être des flèches ou, au moins des pyramidions ; d’autres, qu’elles auraient été, comme les tours de la façade, terminées en terrasse. En attendant, elles restent coiffées d’une simple toiture de préservation à quatre pentes, aussi peu décorative que possible.

Au flanc droit de l’église, sur la place Saint-Jean, on voit un vieux logis d’aspect romano-byzantin, contemporain de l’ancien baptistère et qui a gardé le nom de Manécanterie. C’est là que logeaient les clergeons et leur maître, le manécantant. L’étymologie du mot peut être ramenée à mane cantare, chanter matin, parce que les petits clercs assistaient à l’office des matines, chanté à trois heures ; en compensation, ils faisaient sieste après-midi. Le rez-de-chaussée de ce monument servait de grenier à blé. C’est là que se déposait le produit de la dîme du Comté, sur lequel des distributions en nature étaient faites aux perpétuels et habitués, contre remise de méreaux ou jetons de présence.

Jubé de la Primatiale, au xviiie siècle.

Ce respectable débris des âges anciens a plus souffert de la main des hommes que de l’action du temps. On l’a surchargé d’étages sans style et l’on a percé dans la façade des ouvertures qui en compromettent l’ordonnance magistrale et archaïque. La partie méridionale a été abattue lorsque le chapitre a commencé la construction de la nouvelle Manécanterie, demeurée inachevée. Ce dernier bâtiment, dont la maison qui porte le numéro 2 sur l’avenue de l’Archevêché, représente la portion construite, devait se prolonger jusqu’à la place et se rattacher à l’église même, en faisant disparaître ce qui reste de la vieille Manécanterie. Dans ce vaste palais, commencé en 1768, auraient été installés tous les services dépendant du chapitre : salle d’assemblée, prétoires pour l’officialité ecclésiastique et pour la justice seigneuriale, bureaux des officiers du comté, logement des prêtres habitués, école des clercs. Il est à présumer que le rez-de-chaussée sur rue aurait été, selon le vieil usage lyonnais, disposé en boutiques pour des commerçants.

Plan du quartier Saint-Jean au xvie siècle. (Restitution de M. R. Lenail.)

I. Hôtel d’Albon. — II. Sacristie Saint-Étienne. — III. Hôtel de Saint-Chamond ou de Chevrières. — IV et V. Chantrerie. — VI. Maison de Gaste. — VII. Maison de Fougères. — VIII. Précenterie. — IX. Maison de Beaujeu. — X. Maison de Saint-Romain. — XI. Maison d’Ars. — XII Prévôté. — XIII. Chamarerie. XIV. Petite custoderie. — XV. Sainte-Croix. — XVI. Saint-Étienne. — XVII. Saint-Jean. — XVIII. Manécanterie. — XIX. Petit cloître. — XX. Cour de l’archevêché. — XXI. Saint-Romain. — XII. Maison du Bâtonnier. — XXIII. Officialité. — XXIV. Archidiaconé. — XXV. Trésorerie. — XXVI. Maison de Rolin de Semur. — XXVII. Prisons. — XXVIII. Archevêché. — XXIX. Sacristie Saint-Jean. — XXX. Custoderie. — XXXI. Dépendances. — XXXII. Doyenné. — XXXIII. Maison du tire-corde. — XXXIV. Prébende Sainte-Catherine. — XXXV. Prébende Saint-Pierre. — A. Porte Frot. — B. Entrée des Estres. — C. Porte du Coter. — D. Porte de Savoye. — E. Maison canoniales. — F. Porte de Thyers. — G. Portes de la Bombarde.

Sans avoir proprement un caractère monumental, cette construction énorme aurait accusé davantage encore, par son importance, l’aspect chétif de la demeure du primat des Gaules. Pendant longtemps nos archevêques résidant à Pierre-Scize, dans l’ancien burg des comtes de Lyonnais et Forez, ne possédaient, auprès de leur cathédrale, qu’une sorte de pied-à-terre où ils descendaient quand ils présidaient aux solennités. C’est seulement en 1468 que le cardinal Charles de Bourbon entreprit la construction d’un hôtel. Il n en reste qu’une tour carrée qu’on aperçoit au milieu des bâtiments actuels et la petite tourelle qui est dans l’angle de l’ancienne place Montazet. Ce devait, d’ailleurs, être d’une importance médiocre comme ampleur et comme architecture. La résidence qui existe actuellement date du xviie siècle ; bien que restaurée et complétée par Soufflot, sous le cardinal de Tencin, les dehors en sont assez banals.

Le cloître renfermait vingt-deux maisons canoniales, portant les unes le nom du dignitaire qui l’habitait, les autres le nom de celui qui l’avait léguée au chapitre. Plusieurs sont encore debout : l’hôtel de Chevrières maintenant occupé par le petit séminaire ; la Chantrerie prenant son entrée place Saint-Jean, n° 4, mais située sur la rue Tramassac ; la maison de Gaste, place Saint-Jean, n° 5 ; la maison de Fougères, n° 6 ; la Précenterie à la suite ; la Prévôté de Fourvière, qui fait l’angle de la rue Saint-Jean ; enfin la Chamarerie, rue Saint-Jean, 37, charmant logis des premières années du xvie siècle, bâti par le chamarier François d’Estaing, sur l’emplacement d’une maison léguée en 1345 par un de ses prédécesseurs, Perceval de La Palud : c’est dans la cour de la Chamarerie que se trouvait le puits attribué à Philibert de L’Orme, transporté au Musée de la ville.

Les lieux ont changé, mais davantage encore la vie extérieure du quartier qu’enfermait le mur du cloître. Là se trouvait comme une cité ecclésiastique où le nombreux clergé des trois églises circulait en habit de chœur. Lorsqu’un prêtre ou un clerc sortait du cloître, il déposait sa froche ou surplis à la porte Frau ; un chanoine ne pouvait sortir qu’à cheval.

Les entrées solennelles des princes et des prélats, leur séjour à l’archevêché apportaient de temps à autre un redoublement de vie dans cette enceinte. Aux offices quotidiens, célébrés dans les trois sanctuaires, s’ajoutaient fréquemment des processions extérieures, majestueuses par la pompe des costumes et le nombre des officiants. En tête flottait la bannière au Lion, symbole héraldique du comté, avec cette fière devise : Ecce leo Juda. Maintenant, c’est le calme, le silence, presque la solitude. Mais à certains jours la vieille basilique reprend de sa vie d’autrefois. Dès la veille, la voix d’airain du bourdon, planant sur la cité, a entonné son hymne puissante ; les fidèles accourent et se pressent dans le temple ; les sombres arceaux s’étoilent de lumières, et parmi les vapeurs d’encens, monte la prière de tout un peuple réveillant sous ces voûtes plusieurs fois séculaires, l’écho des liturgies anciennes et l’âme de vingt générations d’aïeux !