Histoire des Canadiens-français, Tome II/Chapitre 8

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Wilson & Cie (IIp. 107-122).

CHAPITRE VIII

1640 — 1642


Description de l’île de Montréal. — M. de la Dauversière. — Le baron de Fancamp. — M. Olier. — Société de Montréal. — M. de Maisonneuve. — Concession de l’île de Montréal et de la seigneurie de Saint-Sulpice. — Mademoiselle Mance. — Madame de Bullion. — Premier embarquement pour Montréal. — M. de Puyseaux. — Fondation de Montréal. — Guerre des Iroquois.



M
aintenant que la ville de Champlain est fondée, occupons-nous d’une autre création non moins importante, celle de la ville de Montréal. Le lecteur sait déjà que la sûreté de la colonie canadienne exigeait que l’on mît la main sans retard à cette nouvelle entreprise. La guerre des Iroquois rendait le fleuve dangereux sur tout son parcours : un poste au-delà du lac Saint-Pierre devenait indispensable. Était-ce aux Cent-Associés qu’il fallait le demander ? Oui, assurément ; mais la compagnie s’écartait bien souvent des traditions de Champlain. Nous en aurons plus d’une preuve pendant la période des temps héroïques. Voyons tout d’abord les actes qui concernent l’octroi de l’île de Montréal : « La compagnie de la Nouvelle-France… — le désir que nous avons d’accroître la colonie en la Nouvelle-France nous faisant recevoir ceux qui peuvent nous assister en cette louable entreprise… à messire Jacques Girard, chevalier, seigneur de la Chaussée… donnons… l’île de Montréal… en toute propriété, justice et seigneurie, tout ainsi et à pareil droit qu’il a plu à Sa Majesté donner le pays de la Nouvelle-France à la dite compagnie, à la réserve toutefois de la foi et hommage que le dit sieur de la Chaussée… seront tenus de porter au fort Saint-Louis de Québec… les dits lieux ressortiront par devant le prévost ou bailli qui sera établi par la compagnie en la rivière des Prairies[1] et par appel au parlement du dit lieu… Mandons au sieur de Montmagny[2], chevalier de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem, gouverneur pour la dite compagnie sous l’autorité du roi… de Québec… Fait en l’assemblée générale de la compagnie de la Nouvelle-France, tenue à Paris en l’hôtel de M. de Lauson, conseiller du roi en ses conseils, intendant de la dite compagnie, le quinzième jour de janvier 1636. »

Sous couleur de colonisation, l’intendant de la compagnie se faisait encore ici accorder un beau domaine, comme le montre l’acte suivant : « Aujourd’hui est comparu par devant les notaires… Jacques Girard, escuyer, sieur de la Chaussée et de la Callière, demeurant ordinairement à la Gilardie, pays de Poitou, lequel a reconnu… n’avoir prétendu… en la concession qui lui a été faite, le 15 janvier 1636, au dit pays de la Nouvelle-France, de l’île de Montréal… qui est et appartient à messire Jean de Lauson, conseiller du roi en ses conseils d’État et directeur de ses finances, n’ayant le dit sieur de la Chaussée accepté la dite concession que pour faire plaisir et prêter son nom seulement au dit sieur de Lauson, en la possession duquel elle est toujours demeurée… et en tant… il fait la présente déclaration et transport de la dite concession… au dit sieur de Lauson, et le subroge en son lieu… Et acceptant pour le dit sieur de Lauson, maître Nicolas Hardin, garde et juge de la Monnaie de Paris et demeurant à la dite Monnaie, paroisse Saint-Germain de l’Auxerrois… Fait et passé à Paris, en l’étude des notaires soussignés, l’an mil huit cent trente-huit, le trentième jour d’avril, et ont signé : Jacques Girard, Hardin, Huart et Haguenier, notaires[3]. »

Jusqu’à la date du 15 janvier 1636, les assemblées de la compagnie de la Nouvelle-France s’étaient tenues « en l’hôtel de M. de Lauzon » ; celles des 18 mars et 1er décembre 1637, et du 5 avril 1639, eurent lieu dans l’hôtel de M. Fouquet ; celle du 17 décembre 1640 se tint chez M. Bordier. Il faut donc croire que M. de Lauson s’était démis de la surintendance de la compagnie à la fin de l’année 1636 ou au commencement de 1637, pour se rendre dans le Dauphiné où l’appelait une charge importante.

Le père Le Jeune visita l’île de Montréal dans l’automne de 1637, avec M. de Montmagny. Après avoir passé le lac Saint-Pierre en montant, il explora la rivière Sorel, Chambly ou Richelieu. « Nous visitâmes, dit-il, le fleuve des Iroquois, ainsi nommé pour ce qu’il vient de leur pays. M. de Montmagny donna à la grande île qui fait face à ce fleuve le nom de Saint-Ignace. Le lac Saint-Pierre commence à se fermer en cet endroit ; et le Saint-Laurent reprend ses proportions ordinaires, ne conservant qu’un quart de lieue ou environ de largeur, jusqu’au saut Saint-Louis ou jusqu’à la rivière des Prairies. Là il s’élargit de nouveau et ses eaux se forment comme un autre lac par la rencontre de trois fleuves qui, joignant leurs eaux tous ensemble font une autre petite mer parsemée d’îles… Le grand fleuve Saint-Laurent baigne la terre d’un de nos messieurs[4] du côté du sud ; traversant au nord, il fait deux îles, l’une qui a peut-être une lieue et demie de long, mais elle est fort étroite ; l’autre c’est la grande île, nommée de Mont-Réal. Cette île paraît coupée par le milieu d’une double montagne qui semble la traverser… J’apprends que les sauvages de l’Île (l’île des Allumettes, en haut de l’Ottawa) ont autrefois défriché et tenu une bourgade vers cette montagne, mais ils l’ont quittée, étant trop molestés de leurs ennemis[5]. Ils nomment encore ce lieu l’île où il y avait une bourgade. Au côté du nord de l’île de Mont-Réal passe la rivière des Prairies, qui est bornée par une autre île, belle et grande, nommée l’île de Montmagny[6]. Au-delà de cette île est la rivière Saint-Jean qui touche aux terres fermes du côté du nord ; au milieu ou environ de cette île, il y a deux sauts ou chutes d’eau, correspondant au saut Saint-Louis ; l’un est dans la rivière des Prairies, l’autre dans la rivière Saint-Jean. Je dirai en passant d’où sont tirés les noms de ces fleuves. La rivière Saint-Jean tire sa dénomination du sieur Jean Nicolet, truchement et commis au magasin des Trois-Rivières : il a souvent passé par tous ces endroits. La rivière des Prairies fut ainsi appelée pour ce que un certain des Prairies[7], conduisant une barque et venant à cet affour ou rencontre de ces trois fleuves, s’égara dans les îles qu’on y rencontre, tirant à cette rivière, qu’on nomma puis après son nom, au lieu de monter dans le fleuve Saint-Laurent où on l’attendait… Nous descendîmes à terre en ces trois îles que nous trouvâmes toutes fort bonnes et agréables. Je célébrai le premier sacrifice de la messe qui ait jamais été dit, à ce qu’on me rapportait, en l’île de Montmagny[8], qui est au nord de l’île de Montréal[9]. »

Comment se forma la société qui prit le soin et la responsabilité d’établir Montréal ? Les mémoires du temps nous fournissent à ce sujet de longs récits que nous ne ferons que résumer.

Madame de Combalet, madame de la Peltrie, la mère de l’Incarnation, M. de Bernières, le commandeur de Sillery, le marquis de Gamache et quelques autres bienfaiteurs de Québec s’étaient sentis portés à cette œuvre par la lecture des lettres des missionnaires, si bien que ces personnes de mérite avaient conçu l’idée de travailler pour la Nouvelle-France sans se connaître mutuellement, et ignorant quel effet les Relations des pères jésuites produisaient dans l’esprit de plusieurs de leurs compatriotes. La chose se répéta, et d’une manière encore plus admirable, au moment de la fondation de Montréal.

Il y avait à la Flèche, en Anjou, un homme de piété éminente, appelé Jérôme Le Royer, sieur de la Dauversière, qui était receveur des tailles, et dont la femme (Jeanne de Beaugé) ainsi que leurs enfants s’étaient consacrés à la sainte Famille. Avec eux vivait le sieur Pierre Chevrier, baron de Fancamp, gentilhomme âgé, fort riche, retiré du monde et adonné avec ferveur aux pratiques de la vertu. Dans le cours des années 1635, 1636, M. de la Dauversière éprouva le désir de se rendre utile aux missions du Canada ; son imagination fut bientôt absorbée par ce dessein, et on rapporte qu’il eut en songe une vue de l’île de Montréal parfaitement conforme à la réalité. Le père Chauveau, jésuite, recteur du collège de la Flèche, frappé de cette circonstance, lui conseilla de « s’employer tout de bon » à la conversion des sauvages. Le baron de Fancamp offrit son aide. C’est le 2 février 1636, paraîtrait-il, que la décision finale fut prise. Ce jour-là, MM. de la Dauversière et de Fancamp se trouvaient à Paris en quête de renseignements ; ils y rencontrèrent un prêtre nommé Jean-Jacques Olier, missionnaire pour le peuple des campagnes, le même qui institua le séminaire de Saint Sulpice à Paris. La légende rapporte que M. de la Dauversière et M. Olier, qui ne s’étaient jamais vus et qui ignoraient les projets l’un de l’autre, se reconnurent spontanément. M. Olier avait été attiré à Paris par l’évêque de Châlons-sur-Marne, qui le pressait d’accepter son siège épiscopal ; c’étaient le père de Condren, général de l’Oratoire, et saint Vincent de Paul qui conduisaient les négociations à ce sujet. Le missionnaire hésitait, parce qu’il se croyait destiné plus particulièrement à contribuer à la conversion des sauvages. Il pencha tout-à-fait de ce côté lorsque le père de Condren, son directeur, lui dit qu’il fallait renoncer à l’épiscopat[10]. »

M. Olier regardait cette rencontre comme miraculeuse en quelque sorte, « et se tenait pour si assuré du succès du dessein de Montréal, qu’immédiatement après, et avant même d’avoir encore acquis un pouce de terre dans cette île, il songea à envoyer sans délai, en Canada, divers objets de première nécessité pour les hommes qu’il avait résolu d’y faire passer l’année suivante. » Cet envoi n’eut lieu que l’année 1640.

Nous empruntons à la Vie de M. Olier, par M. l’abbé Faillon, les notes qui suivent : D’une famille illustre dans la magistrature et dans la guerre, Jacques Olier de Verneuil, membre du parlement de Paris, avait été secrétaire du roi Henri iv, intendant à Lyon (vers 1625), puis promu à la charge de conseiller d’État, ce qui l’avait fait retourner à Paris. De sa femme, Marie Dolu d’Ivoi, était né dans cette ville, le 20 septembre 1608, son fils Jean-Jacques ci-dessus, qui eut pour guides spirituels d’abord saint François de Sales, ami de son père, ensuite saint Vincent de Paul. Après un voyage à Rome (1629), le jeune Olier reçut la prêtrise, à Paris, le 21 mars 1633, et, comme il avait été nommé abbé de Pébrac en Auvergne, il se livra, dans cette province, à des prédications qui eurent un immense succès. Une maladie le ramena dans sa famille. De 1642 à 1652, il fut curé de la paroisse Saint-Sulpice de Paris. Sa carrière, semée des plus nobles œuvres, fut couronnée par une sainte mort en 1657.

Le baron de Renty et deux autres personnes recommandables s’associèrent bientôt à M. de la Dauversière, de Fancamp et Olier. Nous en parlerons plus loin. « L’union n’aurait pas longtemps duré si elle n’avait été entre des personnes pieuses détachées du siècle et entièrement dans les intérêts de notre Seigneur, d’autant que cette association se devait faire sans espoir de profit. » Ce fut le noyau de la Société de Notre-Dame de Montréal[11].

Les associés ouvrirent des négociations avec le seigneur de l’île de Montréal ; mais avant que de les avoir vu réussir, ils expédièrent à Québec (printemps de 1640), aux soins du père Le Jeune, « vingt tonneaux de denrées, outils et autres choses, afin qu’il prît la peine de les leur faire conserver pour l’an suivant. » Ces vivres tinrent lieu du secours que la compagnie des Cent-Associés avait négligé de fournir à Québec, selon la déplorable coutume de toutes les compagnies marchandes[12].

Un premier voyage de MM. de la Dauversière et de Fancamp dans le Lyonnais, où se trouvait alors M. de Lauson, n’avait produit aucun résultat définitif ; car, sans avoir encore pris de mesures pour défricher l’île de Montréal, M. de Lauson conservait cette propriété en faveur de son fils François, à peine âgé de six ans à cette époque. De nouvelles démarches étant désirables, le père Charles Lalemant accompagna M. de la Dauversière auprès de M. de Lauson, qui ne sut point résister aux instances du missionnaire, et l’acte qui suit fut passé aux noms de la Dauversière et Fancamp — les autres associés ne voulant point publier leurs noms en ce moment pour des motifs d’humilité[13] :

« Par devant le notaire royal de la ville de Vienne… fut présent et personnellement messire Jean de Lauzon[14], conseiller du roi en ses conseils d’État et privé, intendant de la justice, police et finance en Dauphiné, lequel… a transporté purement et simplement… à Pierre Chevrier, écuyer, sieur de Fouancant, et à Jérôme le Royer, sieur de la Dauversière, demeurant en la ville de la Flèche, en Anjou (le dit sieur Chevrier absent, et le sieur le Royer, tant en son nom privé que comme procureur du dit sieur Chevrier, par acte passé au sujet des présentes par devant maîtres de la Fousse[15] et Jacques Guillier, notaires royaux et tabellions au dit la Flèche, le 12 juillet dernier, icelle procuration exhibée…)… à savoir : l’île de Montréal, toute ainsi qu’elle a été donnée par la compagnie de la Nouvelle-France à messire Jacques Girard, chevalier, seigneur de la Chaussée, par acte du 15 janvier 1636… duquel sieur Girard le dit sieur de Lauzon a droits à la dite île de Montréal par déclaration du treize (lisez le 30) avril 1638… aux charges et conditions… de l’acte du 15 janvier 1636… Fait et récité au dit Vienne, dans l’hôtel de Maugiron, où habite le dit sieur de Lauzon, le 7 août 1640 après-midi. Présents : sieur Polidor Duteil, secrétaire du sieur de Lauzon, et sieur Marc Justeau sieur de la Plaine, du pays d’Angers, habitant au dit Vienne… signé : De Lauzon, Le Royer, Duteil, Justeau[16]. » Le notaire se nommait Courdon.

À qui devait-on confier le commandement de l’expédition ? Il fallait un militaire, un bon chrétien, un homme dévoué et qui eût la vocation de ces sortes d’entreprises. Ici, de nouveau, la Providence servit à souhaits les amis du Canada. Paul de Chomedey, sieur de Maisonneuve, était fils unique d’un gentilhomme de la Champagne. Dès l’âge de treize ans, il avait commencé à se former au métier des armes dans la guerre de Hollande, et, au milieu des camps comme à la ville, conservait une vie pure qu’il devait en partie à l’influence qu’exerçait sur lui sa sœur, la mère Louise de Sainte-Marie, religieuse de la Congrégation de Troyes, en Champagne. Celle-ci manifestait le désir de se rendre dans la Nouvelle-France pour partager les travaux des ursulines et des hospitalières. Se trouvant à Paris, chez un avocat de sa connaissance, le digne officier y lut une Relation dans laquelle il était parlé du père Charles Lalemant, revenu depuis peu de Québec. Il alla visiter ce missionnaire, lui déclara son intention de servir Dieu dans ces pays lointains, et le père lui ménagea une entrevue avec M. de la Dauversière, mais sans le prévenir de ce qui devait se passer entre eux. L’un et l’autre ne tardèrent pas à s’apprécier, et bientôt il ne fut plus question que du départ de l’expédition. M. de Chomedey refusa d’abord son consentement au projet de son fils, mais il finit par céder lorsqu’on lui représenta la gloire militaire qui rejaillirait sur sa famille par le commandement d’un poste aussi exposé que Montréal[17].

Cependant, aux yeux de la compagnie des Cent-Associés, M. de Lauson était toujours le concessionnaire de l’île de Montréal. Pour faire cesser tout doute et régulariser la situation, l’acte qui suit fut passé le 17 décembre 1640 :

« La compagnie de la Nouvelle-France, à tous présents et à venir, salut : Notre plus grand désir étant d’établir une forte colonie en la Nouvelle-France, afin d’instruire les peuples sauvages de ces lieux en la connaissance de Dieu et les attirer à une vie civile, nous avons reçu très volontiers ceux qui se sont présentés pour nous aider en cette louable entreprise, ne refusant point de leur distribuer quelques portions des terres à nous concédées par le roi notre souverain seigneur ; à ces causes étant bien informés des bonnes intentions de Pierre Chevrier, écuier, sieur de Fancamp et de Hiérosme le Royer sieur de la Dauversière, et de leur zèle à la religion catholique, apostolique et romaine et affection au service du roi, nous avons aux dits sieurs Chevrier et le Royer donné, concédé et octroyé, et en vertu du pouvoir à nous attribué par Sa Majesté donnons, concédons et octroyons par ces présentes les terres ci-après déclarées, c’est à savoir : une grande partie de l’île de Montréal, située dans le fleuve de Saint-Laurent, entre le lac Saint-Pierre et le lac Saint-Louis, à prendre la dite partie de l’île à la pointe qui regarde le nord-est, tirant en toute sa largeur vers le sud-ouest jusques à la montagne de Montréal qui a donné le nom à la dite île, et par-delà icelle montagne encore quatre lieues françaises ou environ et jusques à l’embouchure du petit ruisseau qui est dans la dite île à la dite espace de quatre lieues ou environ, se déchargeant dans le canal qui sépare la dite île de Montréal d’une autre île appelée l’île de Jésus, le reste de la dite île à prendre depuis l’embouchure du dit ruisseau jusques à la tête d’icelle, qui est vers le sud-ouest, réservé[18] à la dite compagnie, de l’embouchure duquel ruisseau sera tirée une ligne droite jusques à l’autre bord de la dite île qui est sur le dit lac Saint-Louis, comme elle a été présentement tirée sur la carte et plan de la dite île envoyée de la Nouvelle-France par M. de Montmagny, gouverneur du dit pays ; lequel plan a été paraphé par les directeurs de la dite compagnie et par le dit sieur le Royer en cet endroit pour faire foi des bornes de la présente concession et demeurer attaché à la minute des présentes entre les mains du secrétaire de la compagnie, afin d’y avoir recours si besoin est ; plus, une étendue de terre de deux lieues de large, le long du fleuve Saint-Laurent, sur six lieues de profondeur dans les dites terres[19], à prendre du côté du nord sur la même côte où se décharge la rivière de l’Assomption[20] dans le dit fleuve Saint-Laurent, et à commencer à une borne qui sera mise sur cette même côte à la distance de deux lieues de l’embouchure de la dite rivière de l’Assomption, le reste des dites deux lieues de face à prendre en descendant sur le dit fleuve Saint-Laurent[21] ; tout ce qui est de la rivière des Prairies jusques à la rivière l’Assomption et depuis la dite rivière de l’Assomption jusques à la borne ci-dessus, réservé à la dite compagnie se proposant d’y faire ci-après quelques forts et habitations. — Pour jouir par les dits sieurs Chevrier et le Royer, leurs successeurs et ayans cause, des dites choses à eux ci-dessus concédées en toute propriété, justice et seigneurie à perpétuité, ainsi qu’il a plu à Sa Majesté donner le pays à la compagnie, avec la permission de la pêche et navigation dans le grand fleuve Saint-Laurent et autres lacs de la Nouvelle-France, fors et excepté en ceux qui auraient été concédés en propriété aux particuliers, et tenir les choses ci-dessus à foi et hommage que les dits sieurs Chevrier et le Royer, leurs successeurs ou ayans cause, seront tenus de porter au fort Saint-Louis de Québec en la Nouvelle-France, ou autre lieu qui pourrait être ci-après désigné par la dite compagnie, lesquels foi et hommage ils seront tenus de porter à chaque mutation de possesseur et payer une pièce d’or du poids d’une once en laquelle sera gravée la figure de la Nouvelle-France telle qu’elle est empreinte au sceau dont la compagnie se sert en ses expéditions ; outre tels droits et redevances qui peuvent échoir pour les fiefs de cette qualité ; même de fournir leurs aveux et dénombrement, le tout suivant et conformément à la coutume de la prévôté et vicomté de Paris que la compagnie entend[22] être observée et gardée par toute la Nouvelle-France ; et à la charge que les appellations des juges qui seront établis par les dits sieurs Chevrier et le Royer, leurs successeurs ou ayans cause sur les lieux présentement concédés, ressortiront nuement au parlement ou cour souveraine qui sera ci-après établie au nom de ladite compagnie à Québec ou ailleurs en la Nouvelle-France, et en attendant ressortiront les dites appellations pardevant le gouverneur de Québec pour en connaître souverainement, suivant les commissions du roi et de monseigneur le cardinal duc de Richelieu ; en outre, ne pourront les dits sieurs Chevrier et le Royer, leurs successeurs ou ayans cause ni autres qui passeront pour eux au dit pays afin de cultiver ou habiter les terres concédées, traiter des peaux et pelleteries avec les sauvages ni autres en quelque manière que ce soit, si ce n’est pour leur usage et pour la nécessité de leur personne seulement, après lequel usage ils seront tenus de les remettre entre les mains des commis de la dite compagnie en leur payant le prix porté par l’édit de la compagnie : le tout à peine de confiscation et d’amende qui sera arbitrée par le gouverneur de Québec contre les contrevenans. — Et encore que la dite compagnie ait disposé par la concession ci-dessus de la dite partie de l’île de Montréal et terres sur le fleuve Saint-Laurent en pleine propriété, si est ce qu’elle n’entend point que les dits sieurs Chevrier, le Royer, leurs successeurs ou ayans cause ou autres qui passeront en la Nouvelle-France pour s’habituer sur les lieux concédés, y puissent bâtir aucune forteresse ou citadelle, et néanmoins se pourront retrancher ou munir autant qu’il est besoin pour se garantir des incursions des sauvages seulement ; se réservant la compagnie la faculté de faire bâtir des forts et citadelles quand elle jugera être à faire ci-après pour y loger ses capitaines et officiers, auquel cas et dès la première demande et sommation qui en sera faite aux dits sieurs Chevrier et le Royer ou leurs successeurs ou ayans cause, ils seront tenus de souffrir que la compagnie fasse construire et édifier les dits forts ou citadelles en telle place et endroit de la dite île et de la dite étendue sur le dit fleuve Saint-Laurent que bon lui semblera, soit sur les bords de la dite île ou places joignant le dit fleuve, soit au dedans d’icelle même sur la dite montagne de Montréal, si la compagnie le juge à propos, et à cet effet seront tenus de délivrer aux officiers de la dite compagnie autant de terre qu’il faudra pour les dits forts et pour la nourriture de ceux qui seront établis pour la conservation d’iceux ; et en cas qu’il fût jugé à propos par la dite compagnie de bâtir aucun fort sur la dite montagne de Montréal, leur sera fourni un espace suffisant en la dite montagne et jusques à cinq cents arpents de terre autour d’icelle pour la nourriture et entretien de ceux qui seront employés à la garde du dit fort, en telle sorte toutefois que les dits forts qui seront construits par la compagnie ailleurs que sur la dite montagne ne seront mis plus près de la principale habitation qui se fera sur les dits lieux concédés que d’une lieue française ; et encore, au cas qu’il fût avisé de construire les dits forts sur quelques terres qui auraient été défrichées, en ce cas les propriétaires en seront dédommagés[23] par la dite compagnie. — Ne pourront aussi les dits sieurs Chevrier et le Royer, ni leurs successeurs ou ayans cause, faire cession ou transport de tout ou de partie des choses ci-dessus concédées au profit de ceux qui seront déjà habitués sur les lieux, soit à Québec, aux Trois-Rivières ou ailleurs en la Nouvelle-France, mais seulement à ceux qui voudront passer exprès afin que la colonie en soit d’autant plus augmentée[24]. Entend la dite compagnie que la présente concession ne puisse préjudicier à la liberté de la navigation qui sera commune aux habitants de la Nouvelle-France et par tous les lieux ci-dessus concédés, et à cet effet qu’il soit laissé un grand chemin royal de vingt toises de large tout alentour de la dite île depuis la rive jusques aux terres, et pareille distance sur le fleuve Saint-Laurent depuis la rive d’icelui aussi aux terres concédées, le tout pour servir à la dite navigation et passage qui se fait par terre. — Pour commencer à faire valoir les terres ci-dessus concédées seront tenus, les dits sieurs Chevrier et le Royer, de faire passer nombre d’hommes en la Nouvelle-France par le prochain embarquement que fera la compagnie avec les provisions nécessaires pour leur nourriture et de continuer d’année en année afin que les dites terres ne demeurent incultes, ainsi que la colonie en puisse être augmentée[25]. Et afin que la compagnie soit certifiée de la diligence qu’ils y feront et que cela lui serve à la décharge de ceux qu’elle doit faire passer pour la colonie, les dits sieurs Chevrier, le Royer ou autres qui y conduiront les hommes aux embarquements, en tel nombre toutefois que la compagnie sera disposée de les recevoir, seront tenus d’en remettre les rôles entre les mains du secrétaire de la dite compagnie, le tout conformément aux règlements d’icelle compagnie. Et en cas que les dits sieurs Chevrier et le Royer veuillent faire porter aux dites terres concédées quelque nom ou titre plus honorable, la compagnie leur en fera expédier lettres, pour sur icelles se pourvoir par devers monseigneur le cardinal duc de Richelieu, pair de France, grand maître, chef et surintendant général de la navigation et commerce du royaume, et sur sa présentation obtenir la confirmation de Sa Majesté suivant l’édit de l’établissement de la compagnie, sans que cela toutefois puisse déroger aux droits et devoirs réservés par la présente concession, et sans que les dits sieurs Chevrier et le Royer, leurs successeurs ou ayans cause, se puissent aucunement prévaloir de ce qui fut accordé en l’assemblée générale du quinze janvier mil six cent trente-six au sieur de la Chaussée ni des concessions et transports qui ont été faits ensuite de ces mêmes prétendus droits d’icelui sieur de la Chaussée, le tout étant demeuré nul et révoqué faute d’exécution dans le temps ordonné par les règlements de la compagnie[26]. Mandons au sieur de Montmagny, chevalier de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem, gouverneur pour la dite compagnie sous l’autorité du roi, et de mon dit seigneur le cardinal duc de Richelieu à Québec et en l’étendue du fleuve de Saint-Laurent, que la présente concession il fasse et souffre jouir les dits sieurs Chevrier et le Royer, leur assignant les bornes et limites des lieux et terres ci-dessus concédées, en leur faisant assigner par son lieutenant ou autres officiers de la dite compagnie qui seront par lui commis à cet effet, dont et de quoi il enverra, les procès verbaux pour être remis pardevant le secrétaire de la compagnie. — Fait et concédé en l’assemblée générale des associés de la Nouvelle-France tenue en l’hôtel de M. Bordier, conseiller et secrétaire des conseils de Sa Majesté, ancien directeur de la dite compagnie, à Paris le lundi dix-septième jour du mois de décembre mil six cent quarante. — En témoin de quoi les directeurs de la dite compagnie ont signé la minute des présentes avec le dit sieur le Royer, acceptant, et icelles fait expédier et sceller du sceau de la dite compagnie. — Signé, par la Compagnie de la Nouvelle-France, Lamy, avec paraphe. — Et scellé en cire rouge du sceau de la compagnie. — Collationné par nous Henry Daguesseau, conseiller du roi en ses conseils, maître de requêtes ordinaires de son hôtel, commissaire en cette partie, la copie ci-dessus à son original en parchemin, suivant l’arrêt du conseil du vingt-quatrième du présent mois de mars, ce requérant M. Jean-Baptiste de Falentin, avocat et conseil de messire Alexandre Le Rageois de Bretonvilliers, prêtre, supérieur du séminaire de Saint-Sulpice à Paris ; et par vertu du défaut ce jourd’hui donné à l’encontre de M. Jean Bourdon, procureur du roi du conseil souverain de la Nouvelle-France, étant de présent en cette ville de Paris, assigné pour voir faire la présente collation, en vertu de notre ordonnance du vingt-huitième du présent mois par exploit de Tourte, huissier du conseil, du même jour pour servir au dit sieur de Bretonvilliers d’original ainsi qu’il est porté par le dit arrêt. — Fait en notre hôtel le trentième jour de mars mil six cent soixante-cinq. Signé : Daguesseau[27]. »

Le poste militaire que l’on voulait former à Montréal, en raison de la guerre des Iroquois, n’aurait pu se passer d’un hôpital. Où trouverait-on la femme qui voulût se charger de cette lourde tâche ? Parmi celles qui, ayant eu connaissance des missions du Canada, se sentaient appelées à y sacrifier leur vie au service de leurs semblables, il y avait une pieuse fille, de vertus héroïques et d’un courage exceptionnel, toute préparée à ces travaux. Elle se nommait Jeanne Mance, était née, vers 1606, à Nogent-le-Roi, à quatre lieues de Langres, en Champagne, d’une des plus honorables familles du pays ; et, vers l’âge de dix-huit ans, s’était consacrée à Dieu. Sa santé, très faible depuis cette époque, n’enlevait rien à l’énergie de son caractère. Au milieu du mois d’avril 1640, un chanoine de Langres lui fit lire les Relations des jésuites ; elle se prit d’enthousiasme pour l’œuvre de madame de la Peltrie et de la duchesse d’Aiguillon. Nul doute qu’elle ne sût déjà que la Mère de Chomedey et son frère le sieur de Maisonneuve, le sieur de Chavigny et quelques autres Champenois s’occupaient du Canada. Le 30 mai 1640, du consentement de sa famille, elle se rendit de Langres à Paris consulter le père Charles Lalemant, mais n’en reçut aucune réponse encourageante, à cause de l’incertitude où l’on était de voir réussir les négociations avec M. de Lauson. Le père Saint-Jure, recteur du noviciat des jésuites, ne lui donna ni encouragement ni conseil pour le moment ; toutefois, il fut loin de la repousser. « Comme le mérite de mademoiselle Mance était relevé en elle par un air de dignité et de noblesse qui prévenait en sa faveur, des dames de la première qualité désiraient de la voir et de l’interroger sur sa vocation. » C’est ainsi qu’elle fit la connaissance de madame de Villerchavin, et bientôt après de madame de Bullion, veuve, depuis quelques semaines, de Claude de Bullion, surintendant des finances, et que la mort de son mari laissait maîtresse de grands biens. Les dames de la cour s’étonnaient de la résolution de mademoiselle Mance ; elles en parlaient beaucoup entre elles ; la reine Anne d’Autriche voulut voir la future Canadienne, mais l’hiver de 1640-41 était déjà commencé, et rien ne se décidait. Enfin, la compagnie des Cent-Associés accorda (17 décembre 1640) la concession d’une partie de l’île de Montréal, comme on l’a vu. Le R. P. Rapin, provincial des récollets, s’intéressait auprès de madame de Bullion, et celle-ci, après trois ou quatre visites de mademoiselle Mance, se déclara prête à donner les fonds nécessaires à l’établissement d’un hôpital. « Elle mit cinquante ou soixante mille francs à la disposition de la compagnie de Montréal, et cachait avec tant de soin ses largesses aux associés eux-mêmes que la plupart d’entre eux ne savaient pas de quelle main venaient de si riches offrandes. » Le baron de Renty aida de son côté par une assez forte somme. Le printemps de 1641 arriva. MM. de la Dauversière, de Fancamp, de Maisonneuve et le père Jacques Delaplace étaient réunis à la Rochelle, où devait se faire l’embarquement. Mademoiselle Mance se rendit en cette ville. Elle connaissait le père Delaplace pour l’avoir vu à Paris. L’arrivée de cette courageuse femme complétait le personnel de l’expédition[28]. On peut dire que l’idée de M. de la Dauversière avait fait boule de neige en recrutant[29] de mois en mois, dans l’espace de quatre ou cinq années, les bailleurs de fonds et les missionnaires qui devaient soutenir l’œuvre si difficile de la colonie de Montréal.

Trois navires avaient été préparés ; l’un qui partit de Dieppe et arriva à Québec vers la fin de juillet ou au commencement d’août, était monté par dix hommes[30], qui se mirent « à bâtir un magasin sur le bord de l’eau, dans un lieu qui avait été donné par M. de Montmagny pour la compagnie de Montréal » ; les deux autres appareillaient à la Rochelle. Celui où était mademoiselle Mance, avec le père Delaplace et douze hommes, leva l’ancre le même jour que M. de Maisonneuve, M. Antoine Fauls, prêtre, chapelain des ursulines, et environ vingt-cinq hommes. Après huit jours de navigation, les deux vaisseaux furent séparés. Celui de mademoiselle Mance ne rencontra que du beau temps, et parut devant Québec le 8 août ; par contre, M. de Maisonneuve éprouva de furieuses tempêtes, perdit trois ou quatre hommes, dont un était son chirurgien, et n’arriva à destination que le 20 août. Les dépenses de cet armement s’élevaient à soixante et quinze mille livres, le tiers fourni par M. de Fancamp[31].

Par une décision en date du 17 décembre 1640, la compagnie de la Nouvelle-France s’était engagée à transporter à ses frais, sur ses propres vaisseaux, jusqu’à trente hommes de la compagnie de Montréal, au prochain embarquement, ainsi que trente tonneaux de provisions, et d’écrire à M. de Montmagny de livrer deux emplacements, l’un au port de Québec, l’autre aux Trois-Rivières, pour y construire des magasins. De son côté, la compagnie de Montréal avait soumis le mémoire suivant qui exprimait ses intentions : « Le dessein des associés de Montréal est de travailler purement à procurer la gloire de Dieu et le salut des sauvages. Pour atteindre ce but, ils ont arrêté entre eux d’envoyer, l’an prochain, à Montréal, quarante hommes bien conduits et équipés de toutes les choses nécessaires pour une habitation lointaine. Ils ont arrêté aussi de fournir deux chaloupes ou pinasses pour voiturer, de Québec à Montréal, les vivres et les équipages des colons. Ces quarante hommes, étant arrivés dans l’île, se logeront et se fortifieront, avant toute chose, contre les sauvages ; puis ils s’occuperont, pendant quatre ou cinq ans, à défricher la terre et à la mettre en état d’être cultivée. Pour avancer cet ouvrage, les associés de Montréal augmenteront, d’année en année, le nombre des ouvriers, selon leur pouvoir ; enverront des bœufs et des laboureurs, à proportion de ce qu’il y aura de terres défrichées, et un nombre suffisant de bestiaux pour en peupler l’île et engraisser les terres. Les cinq années étant expirées, ils feront construire une maison, sans interrompre le défrichement des terres, et la meubleront de toutes les choses nécessaires pour la commodité de ceux d’entre eux qui voudront aller en personne servir Dieu et les sauvages dans ce pays. Ils feront ensuite bâtir un séminaire, pour y instruire les enfants mâles des sauvages. On tâchera de conserver habituellement dans ce séminaire dix ou douze ecclésiastiques, dont trois ou quatre sauront les langues du pays, afin de les enseigner aux missionnaires qui viendront de France. Ceux-ci, en arrivant, se reposeront un an au séminaire pour apprendre ces langues et ensuite être dispersés parmi les nations voisines, selon qu’il sera jugé à propos. S’ils tombent malades, le séminaire leur servira de retraite. Les autres ecclésiastiques s’occuperont à l’instruction des enfants des sauvages, et des Français, habitants de la dite île. Il y faudra encore un séminaire de religieuses pour instruire les filles sauvages et les Françaises, et un hôpital pour y soigner les pauvres sauvages quand ils seront malades. »

Les pères jésuites avaient mis toute leur influence au service de l’association qui se formait au sujet de Montréal ; les directeurs des Cent-Associés paraissaient voir l’entreprise d’un œil favorable ; mais il n’en était pas ainsi de certains traiteurs, employés ou membres de la grande compagnie ; ceux-ci dénonçaient comme des abus les privilèges accordés à la société de Montréal. Il en résulta quelques froissements à Québec, et on alla jusqu’à proposer à M. de Maisonneuve d’établir son poste dans l’île d’Orléans, au lieu de monter jusqu’à Montréal. Sur le refus bien catégorique du brave officier, le gouverneur-général annonça qu’il se joindrait à lui avec grand plaisir et l’assisterait de ce qui serait en son pouvoir. Tous deux partirent avec le père Vimont « et plusieurs autres personnes bien versées dans la connaissance du pays, » et ils débarquèrent à Montréal le 14 octobre ; le lendemain, on prit possession de l’île selon les formes[32].

Dès son arrivée à Québec, M. de Maisonneuve avait compris que la saison était trop avancée pour s’établir à Montréal cette année, et qu’il faudrait attendre le printemps. C’était là une complication inattendue, mais il était écrit que la société de Montréal trouverait à point nommé les protecteurs dont elle aurait besoin. Chose assez curieuse, ce fut un homme riche, réfugié au Canada, qui mit à sa disposition des ressources en argent et en propriétés.

Pierre de Puyseaux[33], sieur de Montrenault, né vers 1566, avait amassé une fortune dans la Nouvelle-Espagne, et, du vivant de M. de Champlain, était venu au Canada, tant pour y vivre en repos que pour appliquer ses biens à des œuvres pieuses, principalement à la conversion des sauvages. On lui avait donné la seigneurie de Sainte-Foye et le fief Saint-Michel de Sillery, dont les titres, non plus que celui accordé au sieur Derré de Gand, n’ont été retrouvés. Dans l’anse Saint-Michel, il avait une maison « qui était alors le bijou du pays, » et où les religieuses hospitalières[34] avaient habité avant que d’aller prendre possession de leur maison de Sillery. Madame de la Peltrie était encore dans cette demeure l’automne de 1641. Par un acte du 14 février 1640, on voit que M. de Puyseaux est désigné comme « sieur de l’habitation de Sainte-Foy. »

Revenant de Montréal, vers la fin d’octobre 1641, M. de Maisonneuve rendit visite au seigneur de Sainte-Foye ; ce dernier le questionna sur son entreprise, et fut si content des réponses qu’il en reçut, qu’il le pressa de l’admettre au nombre des associés, disant qu’il travaillerait de sa personne et donnerait ses deux résidences, y compris les meubles et les bestiaux qui s’y trouvaient. « Venez ici avec tout votre monde, lui dit-il, vous y passerez l’hiver ; comme Sainte-Foye est un lieu abondant en chênes, vous y ferez construire des barques, tandis que, à Puyseaux, on préparera la menuiserie de vos bâtiments de Montréal. » C’était un cadeau de cent mille francs[35]. La maison de Sainte-Foye fut donc livrée au chirurgien[36] et aux charpentiers ; celle de Saint-Michel à M. de Maisonneuve et à mademoiselle Mance, qui y trouvèrent madame de la Peltrie. M. de Puyseaux ne se réserva strictement qu’une chambre pour lui-même. La plupart des employés se logèrent à Sillery. Nous avons les noms de six de ces hommes : Antoine Damiens déjà nommé, natif de Saens-Ville, près de Rouen ; Jean Gorry, également nommé plus haut, natif de la baie du Pontaven, en basse. Bretagne ; Jean Caillot[37], de Lyon ; Pierre Laimery ou Emery, du Havre-de-Grâce ; François Robelin, de Paris, et Augustin Hébert, natif de Caen, Normandie, qui se maria, vers 1646, avec Adriane Duvivier. Sa descendance est nombreuse dans le district de Montréal.

Deux barques, une pinasse et une gabare, portant la colonie de Montréal, partirent de l’anse Saint-Michel le 8 mai 1642, avec MM. de Montmagny et de Puyseaux, le père Vimont et madame de la Peltrie, avec Charlotte Barré, sa demoiselle de compagnie. Le 18, de grand matin, ayant mis le pied sur le rivage de la nouvelle patrie, les ouvriers assistèrent à la messe, puis, sans perdre un instant, construisirent un retranchement de pieux à l’endroit même où Champlain, trente et un ans auparavant, songeait à fonder un poste stable[38]. M. de Montmagny retourna à Québec lorsqu’il eut vu les colons en sûreté dans le fort[39].

C’est le moment de parler de la situation du Canada ; car nous entrons dans cette longue série de guerres contre les Iroquois (1640-1665) justement appelée « les temps héroïques » à cause du courage dont nos pères donnèrent tant de preuves, malgré l’inertie et le mauvais vouloir des autorités françaises.

Au printemps de 1640, quelques maraudeurs avaient été signalés aux environs du lac Saint-Pierre. L’automne suivant, près de cent Agniers se répandirent dans le voisinage des Trois-Rivières, et, avec une persévérance extraordinaire en cette saison, tinrent la campagne jusqu’au temps des hautes neiges, enlevant, de ci, de là, quelques Algonquins et inquiétant les chasseurs jusque dans le fond des bois où ils s’enfonçaient à la recherche des orignaux. Vers la fin de février 1641, Thomas Godefroy de Normanville et François Marguerie tombèrent entre leurs mains. Ce coup suffisait à l’ambition des barbares, et ils se retirèrent. Politiques adroits, leur plan consistait à se procurer des otages, afin d’obtenir en échange des armes à feu, et par ce moyen écraser les Algonquins. Le 5 juin, toute une armée iroquoise parut devant les Trois-Rivières, pillant et massacrant les sauvages attirés par la traite aux alentours de ce poste. Marguerie fut envoyé en embassade vers M. de Champflour, le commandant ; mais celui-ci déclara qu’il ne ferait rien sans la permission du gouverneur-général. En conséquence, M. de Montmagny monta de Québec et entra en pourparlers avec les chefs, qui offraient de rendre Godefroy et Marguerie à condition « qu’on leur donnât à manger des arquebuses. » Refusez, dit Marguerie au gouverneur — et il lui exposa les projets secrets des ennemis. Le brave interprète jouait sa tête. Le père Ragueneau et Jean Nicolet tentèrent de détourner les Iroquois de la guerre ; on leur répondit qu’il n’était pas question des Français, mais seulement des Algonquins. « Ouvrez-nous les chemins lorsque nous viendrons les tuer, s’écriaient-ils, nous serons toujours vos amis. » Godefroy ajouta tout bas : « En abandonnant nos alliés, nous marcherions à la mort ! » C’était bien là ce que voulaient les Iroquois. Après des conférences qui durèrent plusieurs jours, trente-six Agniers, armés de fusils, se portèrent à des attaques qui dégénérèrent en un combat de plusieurs heures. Marguerie et Godefroy étaient passés du côté des Français ; une escouade de soldats arrivaient de Québec — les barbares lâchèrent pied et couvrirent le lac Saint-Pierre de leurs patrouilles, gênant la traite et enlevant des Algonquins jusque sous les canons du fort des Trois-Rivières. Il était inutile de les poursuivre avec des chaloupes « trop lourdes de nage » ou même en canots d’écorce, parce qu’ils n’attendaient jamais leurs adversaires, et s’en tenaient à la « petite guerre » toute composée d’embuscades et de surprises, genre dans lequel ils excellaient. « D’en tuer beaucoup, dit une Relation, c’est ce que les Français ne doivent pas prétendre, d’autant plus qu’ils courent comme des cerfs, ils sautent comme des daims ; ils connaissent mieux les êtres de ces grandes et épouvantables forêts que les bêtes sauvages qui les ont pour demeure. »

Le gouverneur-général demandait qu’on lui envoyât de France des secours et des hommes capables de protéger les colons ; mais les Cent-Associés, ou plutôt le bureau d’exploitation qui les représentait, n’avaient en vue que les bénéfices immédiats de la traite, encore très abondante dans le bas du fleuve, et ils ne s’occupaient nullement de la fondation d’une « Nouvelle-France » comme le comportaient les articles de leur charte. Louis XIII et Richelieu se mouraient. Les soldats de la mère-patrie se firent attendre trois ans, et encore ne vinrent-ils qu’en petit nombre, juste assez pour empêcher les Iroquois de consommer la ruine du Canada, et sans inspirer de la confiance aux pauvres habitants.

Au milieu de cette crise, deux guerriers, l’un algonquin, l’autre huron, se firent une renommée de vaillance : Piescaret et Ahatsistari. Malheureusement, ces races combattaient à la débandade, n’écoutant ni leurs chefs, ni les Français, ni la prudence la plus élémentaire. Simon Piescaret seul valait dix hommes ; à la tête de neuf Algonquins, il devenait inutile, ou à peu près. Nos annales célèbrent ses prouesses. Dans une course qu’il entreprit un jour pour fuir les gens de tout un canton iroquois qui le poursuivaient, il tourna ses raquettes bout pour bout, de sorte qu’il paraissait, à voir sa piste, marcher vers le sud, tandis qu’il se dirigeait au nord. Trompés par ce stratagème, les ennemis rebroussèrent chemin, croyant courir après lui. Il les suivit et assomma leurs traînards. Au milieu de ces guerres, où les privations demandaient une force physique supérieure, où l’adresse et la ruse remplaçaient l’art militaire, et où le talent de dresser des embuscades était si nécessaire, Piescaret n’avait pas de rivaux. Alerte et robuste, il prenait les orignaux à la course ; il s’attaquait à plusieurs hommes à la fois sans paraître en compter le nombre. Il partit seul, un jour, et alla se cacher dans un village iroquois, à plus de cinquante lieues des Trois-Rivières, sa demeure ordinaire. Le soir venu, il sortit de sa cachette et pénétra dans une cabane, cassa la tête à une famille entière, puis se retira dans une pile de bois de chauffage, non loin de là. L’émoi se répandit partout, mais impossible de découvrir le meurtrier. La nuit suivante, il en fît autant dans une autre cabane, n’oubliant pas de lever les chevelures ; il retourna dans la même retraite. La troisième nuit, tout le village était sur ses gardes ; pourtant, il sortit de nouveau et ouvrit la porte d’une maison où quelques hommes veillaient à demi pour prévenir une attaque. Avançant le bras, il fendit la tête du guerrier le plus proche et prit la fuite, ayant tous les autres sur les talons. Comme il était agile et dispos, il les devança pour les fatiguer, courut toute la journée, et, à la nuit tombante, trouvant un tronc d’arbre creux en bonne position, il s’y glissa. Ceux qui le poursuivaient commençaient à douter de pouvoir l’atteindre. Ils campèrent près de lui, firent du feu et s’endormirent. Profitant du bon moment de leur sommeil, Piescaret s’avance sans être vu ou entendu, leur casse la tête à tous, lève les chevelures, et s’en retourne tranquillement chez lui avec ces trophées. Dans une autre occasion, il chargea quinze fusils avec des balles ramées, c’est-à-dire enfilées d’un gros fil d’archal, et les déposa au fond d’un canot dans lequel il s’embarqua avec quatre compagnons. Ce canot isolé, monté par cinq hommes qui semblaient occupés à la pêche au milieu du fleuve, au large de l’embouchure de la rivière Richelieu, parut une proie facile à cinq canots iroquois embusqués dans le voisinage. En peu de temps, Piescaret se vit cerné et obligé de se rendre, ce qu’il exécuta prestement. À peine était-il à portée des canots qui l’enveloppaient que, saisissant ses armes, il fit feu de toutes parts avec ses hommes, et creva les frêles embarcations d’écorce de ses ennemis, qui n’eurent de ressource que de se sauver à la nage. On en assomma tant qu’on put, d’autres se noyèrent, et Piescaret amena le reste pour divertir son village. Ces actions extraordinaires, et plusieurs autres de même nature, dit Nicolas Perrot, le rendirent redoutable chez l’Iroquois. C’est sur cet homme que tombait la tâche de sauver la race algonquine, si elle eût pu être sauvée. Disons à sa louange que, malgré l’indiscipline dont ses compatriotes faisaient si souvent preuve, malgré la terreur du nom iroquois, enfin malgré l’insuffisance des secours fournis par les Français, il tint tête et fut la dernière digue qui s’opposa au torrent dévastateur des Cinq-Nations. Lui mort, toutes les issues furent ouvertes ; la destruction totale des fiers Algonquins et des puissants Hurons ne prit que deux années.

Presque en même temps que Piescaret était baptisé aux Trois-Rivières[40], un chef huron se faisait chrétien au Saut-Sainte-Marie. La conversion d’Eustache Ahatsistari avait eu un effet immense sur sa tribu, qui s’empressa d’imiter son exemple. Les Hurons le citaient comme le premier guerrier du Canada, mais Piescaret balançait sa gloire. Tous deux étaient aussi vaillants et devaient leur prestige à des prouesses personnelles, ce qui s’explique fort bien chez des nations où l’on faisait la guerre sans ordre, par petites bandes, ou plutôt chacun pour soi. Les capitaines iroquois, au contraire, pouvaient briller par leur vaillance et par leurs conseils, puisque leurs guerriers se soumettaient à une règle qui, sans être toujours suivie, avait du moins l’avantage de se faire sentir à certaines heures critiques. L’été de 1641, Ahatsistari se voyant en face d’une flotille iroquoise, sur le lac Ontario, ne voulut pas s’enfuir comme ses compagnons, mais ramena ceux-ci, et, tous ensemble, fondirent sur l’ennemi, stupéfait de tant d’audace, car ils étaient en petit nombre. Ahatsistari sautait d’un canot à l’autre, le faisait chavirer, menaçant de son casse-tête tout ce qui se présentait, et finit par mettre la plupart des Iroquois hors de leurs canots. Alors, nageant d’une main, il allait de l’un à l’autre, et le terrible casse-tête faisait son œuvre. Quand il eut terminé cette besogne, il monta dans son canot, poursuivit ceux qui s’étaient échappés et les fit prisonniers. En un mot, dit la Relation, la vie de cet homme n’est qu’une suite de combats, et depuis son enfance, ses pensées n’ont été qu’à la guerre.

M. de Montmagny, revenant de Montréal à la fin de mai ou au commencement de juin 1642, se voyait en face d’une situation difficile et même périlleuse. Il fallait occuper le lac Saint-Pierre, ou tout au moins l’entrée de la rivière des Iroquois. La force armée de la colonie, en y comprenant les habitants, ne dépassait pas cent hommes : c’est l’origine de nos fameuses milices.

La traite des pays d’en haut se termina cette année aux Trois-Rivières à la fin de juillet. Le 2 août, douze canots de Hurons se mirent en route avec le père Jogues, l’interprète Guillaume Couture et un jeune chirurgien, René Goupil[41] — en tout quarante personnes sous les ordres d’Ahatsistari. Le gouverneur-général, qui arrivait de Québec amenant une barque et des ouvriers ainsi que des soldats pour construire un fort au lac Saint-Pierre, et que le vent retenait aux Trois-Rivières, leur demandait de l’attendre ; mais ils n’écoutèrent que leur désir de se mettre en route. Parvenus aux îles du lac, ils eurent connaissance des Iroquois ; une lutte s’engagea ; Ahatsistari et les trois Français furent pris ; le reste s’enfuit. Cette nouvelle, apportée aux Trois-Rivières au moment où M. de Montmagny se disposait à lever l’ancre, sema la consternation dans la place.

Le mercredi 13 août, l’expédition du gouverneur s’arrêtait devant le lieu où est aujourd’hui la ville de Sorel, et l’on commençait les travaux d’un fort qui prit le nom de Richelieu en l’honneur du cardinal. Les Iroquois voulurent inquiéter les ouvriers (le 20), mais on les reçut si chaudement qu’ils se retirèrent. Il paraîtrait qu’ils ne savaient encore rien de l’établissement de Montréal.


  1. La maison seigneuriale des prêtres du séminaire de Saint-Sulpice fut établie à l’extrémité Est de l’île Jésus.
  2. C’est le quatrième acte, en date du 15 janvier 1636, qui donne à M. de Montmagny le titre de gouverneur.
  3. Société historique de Montréal, 1868, pp. 243-6.
  4. La seigneurie de la Citière, concédée à François de Lauson.
  5. Faut-il croire que, après la dispersion de la tribu huronne-iroquoise visitée par Cartier, une branche de la race algonquine s’établit au même endroit et en fut chassée vers 1590 ? Lescarbot, déjà cité, confirme en partie cette opinion.
  6. Peu d’années après, on lui donne le nom d’île Jésus. Édits et Ordonnances, I, 21 ; Relation, 1642, p. 36.
  7. Le même, peut-être, qui courut au secours de Champlain en 1610. Ce bras de rivière portait le nom des Prairies dès 1615.
  8. En 1615, une messe avait été dite à la sortie de la rivière des Prairies.
  9. Relation, 1637, pp. 74-5. Voir aussi Relations, 1640, p. 5 ; 1641, p. 57 ; 1642, p. 36.
  10. Dollier de Casson : Histoire du Montréal, 12, 13, 14 ; Faillon : Histoire de la colonie, I, 382-5, 391.
  11. Dollier de Casson : Histoire du Montréal, 10 ; Faillon : Histoire de la colonie, I, 392.
  12. Dollier de Casson : Histoire du Montréal, 16 ; Relation, 1642, p. 36 ; Faillon : Histoire de la colonie, I, 378, 391.
  13. Dollier de Casson : Histoire du Montréal, 15, 22 ; Faillon : Histoire de la colonie, 1, 393-5 ; Société historique de Montréal, 1859, pp. 68, 84-5.
  14. Les membres de cette famille signaient : Lauson, Lauzon, De Lauson, De Lauzon, Delauson.
  15. Pierre de la Forest.
  16. Société historique de Montréal, 1869, p. 247.
  17. Dollier de Casson : Histoire du Montréal, 16, 17, 46 ; Faillon : Histoire de la colonie, I, 406-8.
  18. L’acte de 1636 accordait toute l’île au sieur de la Chaussée.
  19. C’est la seigneurie de Saint-Sulpice. La compagnie de Montréal ne l’avait pas demandée. (Faillon : Histoire, I, 396-7.)
  20. Voir Relation, 1642, p, 36.
  21. Borné par les seigneuries de Lavaltrie et de l’Assomption (voir Bouchette : Dictionnaire, article « Saint-Sulpice ».)
  22. Ceci est à remarquer.
  23. Les défricheurs devaient donc être propriétaires ?
  24. Les Cent-Associés, qui ne remplissaient pas leur promesse de fournir des colons à la Nouvelle-France, commençaient à craindre que les seigneurs ne se fissent concurrence en recrutant les uns chez les autres.
  25. « C’est la compagnie elle-même qui parle ; c’est elle qui nous dit quels sont l’esprit et l’objet de sa charte, quelles sont ses obligations et celles de ses vassaux. Elle sait si bien que l’inexécution de ces concessions en fief doit en entraîner la révocation que, dans ce titre du 17 décembre 1640, elle en donne elle-même un exemple pour cette même île de Montréal, et en informe les nouveaux concessionnaires, par voie d’avertissement pour ainsi dire, afin de les mettre en garde contre le même danger. » (Sir Louis-H. Lafontaine : Documents de la Tenure seigneuriale) vol. A, p. 38.)
  26. Ceci montre une fois de plus que les seigneurs perdaient leurs droits s’ils n’établissaient pas d’habitants.
  27. Édits et Ordonnances, I, 20.
  28. Dollier de Casson : Histoire du Montréal, 20-25, 229-27 ; Faillon : Histoire de la colonie, I, 411, 415.
  29. Nous croyons que, en ce moment, la compagnie de Montréal était composée de MM. de la Dauversière, de Fancamp, Olier, de Renty et mesdames de Bullion et de Villerchavin.
  30. Deux des ouvriers amenaient leurs femmes ; de plus, une jeune fille.
  31. Dollier de Casson : Histoire du Montréal, 19, 25-30 ; Faillon : Histoire de la colonie, I, 415, 418, 421.
  32. Relation, 1641, p. 55 ; Dollier de Casson : Histoire du Montréal, 30-33 ; Faillon : Histoire de la colonie, I, 401-3, 419-20.
  33. Ce nom est orthographié de plus d’une manière. En 1621, un M. de Puisieux, secrétaire des commandements du roi, était en correspondance avec Champlain. (Œuvres de Champlain, 993-4, 1017.) Les familles Sillery et Puisieux étaient alliées.
  34. En arrivant de France, 1er août 1639, on les avait logées dans une maison neuve de la compagnie des Cent-Associés, près du fort Saint-Louis. De la fin de juin 1640 jusqu’au printemps de 1641, elles demeurèrent chez M. de Puyseaux, à l’anse Saint-Michel.
  35. La valeur du franc, à cette époque, était celle de notre piastre actuelle.
  36. M. de Courpon, amiral de la flotte du Canada, se trouvant à Tadoussac lorsque M. de Maisonneuve y passa (août 1641), lui avait donné son propre chirurgien. En 1642-4, Courpon était encore amiral de la flotte.
  37. Il était à Montréal en 1643.
  38. Voir le présent ouvrage, tome I, pp. 101, 104.
  39. Dollier de Casson : Histoire du Montréal, 33-40, 228-9 ; Faillon : Histoire de la colonie, I, 425-35, 439, 443 ; Relation, 1642, p. 37 ; Ferland : Cours d’histoire, I, 313-4 ; Ferland : Notes, 24-5.
  40. Par le père Buteux, le 30 janvier 1641. M. de Champflour fut son parrain.
  41. Il fut assommé à coup de hache dans un village iroquois.