Histoire financière de la France/Chapitre IV
Règnes de Charles-le-Bel, de Philippe de Valois et de Jean II.
Élévation des droits à la sortie des marchandises. - Recherche des financiers à la demande des états généraux assemblés en 1332. - Consentement des trois ordres reconnu nécessaire pour l’établissement des subsides extraordinaires. - Plaintes d’une assemblée de prélats, barons, chapitres et bonnes villes, à l’occasion du monopole établi sur les sels. - Désordres, concussions, calamités. — Anglais en France. - Aide pour la guerre accordée par les états généraux de la Langue d’Oc et de la Langue d’Oyl, en 1350. - Insuffisance des revenus, et suspension du paiement des dépenses. — Assemblées provinciales. - Octroi des villes. - Dispense obtenue par les seigneurs de servir le roi hors de leurs terres. - Tarif pour la solde des troupes. - Opérations sur les monnaies. - Nouvelle aide pour l’armée accordée par les états généraux de 1355, en échange du droit de seigneuriage. - Règlements. - Substitution à l’aide d’une subvention générale ou impôt direct par les états généraux de 1356. — Usurpation par ces deux assemblées des prérogatives de la couronne. Le roi Jean fait prisonnier. - Grandes compagnies, Tard-venus, Jacquerie. - États généraux convoqués à Toulouse et à Paris, en 1356, par le dauphin, à l’effet de procurer la rançon du roi. - Dévouement des états de Toulouse. - Exigences des états de Paris sous l’influence de Marcel. - Conseil extraordinaire. - Opérations sur les monnaies. - Conditions du traité de Brétigny.- Rentrée du roi, et aide imposée pour le paiement de sa rançon. - Provinces rachetées des aides, et origine des douanes intérieures.
1322.— Charles-le-Bel suivit à plusieurs égards les errements de son prédécesseur. Ne pouvant triompher de l’opposition des seigneurs à l’établissement de poids, de mesures et de monnaies uniformes dans tout le royaume, il adopta l’unité d’espèces pour les provinces qui relevaient directement de la couronne[1].
Au mépris des ordonnances de Philippe V, les financiers, receveurs et fermiers des impôts, presque tous Italiens, s’abstenaient de rendre compte, et continuaient leurs « fraudes et malices. » Ils furent l’objet de recherches rigoureuses; on confisqua tous leurs biens, et on les renvoya en leur pays « aussi gueux qu’ils en étaient venus. » Ces exemples étaient impuissants sur les maltôtiers ultramontains, habitués à exploiter le royaume à leur profit, puisque vingt ans plus tard Philippe-de-Valois, après avoir, pour les mêmes motifs, révoqué tous les receveurs et fermiers, et fait juger leurs comptes, déclara les Italiens et autres étrangers exclus de tout maniement de deniers en France.
Charles-le-Bel cependant ne négligeait pas les ressources habituelles du fisc : sous le nom de droit de rêve et de haut passage, on éleva le tarif des douanes sur toutes les marchandises exportées du royaume, et, par une funeste conséquence de l’ignorance du temps, les taxes portaient spécialement sur toutes espèces de grains et de légumes, sur les vins, les foins, les bestiaux, les draps, les cuirs, les sels, et sur les harengs de nos pêches[2].
1326. - Le roi s’était d’abord opposé à des levées de subsides que le pape Jean XXII avait ordonnées sur les églises du royaume, pour subvenir aux frais de la guerre qu’il soutenait en Lombardie contre les Gibelins; mais l’opposition cessa de la part de Charles aussitôt qu’il eut obtenu du souverain pontife la permission de lever pendant deux ans les décimes sur les revenus du clergé[3].
1328. — Philippe VI, le premier des Valois, trouva l'état chargé d’une forte dette, et toutes les classes mécontentes de l’excès des impôts. inquiété d’ailleurs par les prétentions qu’élevait à la couronne de France Édouard III, roi d'Angleterre, désirant se concilier la bienveillance de la nation, dont l’appui lui était nécessaire, il usa d’abord de ménagements envers les peuples.
1332.— A la demande d’une assemblée composée de prélats de barons et de députés des bonnes villes, qui, prirent le nom d’état-généraux, Pierre de Montigny, surintendant des finances, fut livré au parlement; et ses biens, confisqués après sa condamnation, produisirent douze cent mille livres, fortune immense pour le temps, dont l’accumulation est une preuve manifeste des déprédations qui ruinaient l’état, et des vices de l’administration. Des subsides avaient été levés à l’occasion d’hostilités qui menaçaient le midi; mais, la guerre n’ayant pas eu lieu, des ordres du roi firent restituer les deniers perçus, que les baillis retenaient pour leur propre compte[4].
1338.- Plus tard, lorsque les prétentions rivales d’Édouard III et du roi de France eurent allumé les funestes guerres qui, pendant plus d’un siècle, couvrirent le royaume de dévastations, Philippe VI laissa arrêter en sa présence, dans une assemblée, « que les rois ne lèveraient aucuns deniers extraordinaires sur le peuple sans l’octroi et gré des trois états, et qu’ils en prêteraient le serment à leur sacre[5]. »
Cet engagement qui confirmait celui déjà pris par Louis X, n’empêcha pas Philippe de tirer parti des droits à l’exportation sur les produits du sol et de l’agriculture par l’extension et l’élévation du tarif renouvelé sous le règne précédent, et par l’établissement de bureaux de perception sur plusieurs frontières exemptes jusque alors du régime des douanes. D’où l’on peut conclure que les ordres puissants du clergé et de la noblesse, qui ne se prêtaient qu’avec peine aux impositions qui atteignaient directement les propriétés foncières ou la consommation, parce qu’elles portaient atteinte à leurs anciens privilèges, n’attachaient alors aucune importance au commerce avec l’étranger ni à l’industrie, puisqu’ils abandonnaient ces deux sources de prospérité publique à toutes les mesures dictées par le seul intérêt du fisc. Cette indifférence a autorisé nos rois, à considérer les droits de traite comme appartenant au domaine de la couronne.
Philippe de Valois se conforma d’abord à l’engagement pris par Louis X de fabriquer des monnaies semblables pour le poids et pour le titre à celles qui étaient faites du temps de Saint-Louis. Dans la suite, faisant revivre le funeste droit de seigneuriage, il eut, comme ses prédécesseurs, recours à l’altération des espèces ; mais, pensant ôter aux peuples la connaissance de cette mesure funeste au commerce, il exigea des officiers des monnaies le serment de tenir l’opération secrète.
Nos rois considéraient avec raison la décime des revenus ecclésiastiques comme une ressource habituelle ; mais l’assentiment du pape était devenu nécessaire. Philippe en obtint la levée pour trois années d’abord, l’occasion d’un projet d’expédition à la Terre Sainte, qui n’eut d’autres résultats que d’immenses préparatifs dans les ports de la Méditerranée, et l’autorisation s’étendit jusqu’à dix années.
Ces secours n'étaient pas suffisants pour repousser les armes d’Édouard III. Philippe en obtint de plus puissants des trois ordres, qu’il convoqua tantôt collectivement, tantôt séparément, en assemblées provinciales ou générales : ils lui accordèrent une imposition qui fut fixée par les uns à six, par les autres à quatre deniers pour livre des marchandises vendues, et sur les boissons dans les villes[6].
1343-1344. - Au produit de ces subsides consentis s’était joint. celui d’une taxe sur le sel, ou plutôt du monopole de cette denrée, nouvelle invention des juifs. Mais, à l'égard de ce dernier impôt, et sur les plaintes qui lui furent portées dans une assemblée des prélats, barons, chapitres et bonnes villes du royaume, le roi déclara, comme avait fait Philippe-le-Long, que la gabelle du sel, de même que les autres impositions; ne seraient ni réunies au domaine, ni perpétuelles. Cette déclaration calma le mécontentement général causé par cette innovation. Des monuments existants prouvent en effet que, deux ans avant la tenue des états-généraux dont il est question, Philippe de Valois avait établi des greniers pour y faire vendre le sel à son profit, « dont le roi acquit l’indignation et malgrâce, des grands comme des petits et de tout le peuple. » Ce fut à cette occasion qu’Édouard appela Philippe l'auteur de loi salique, par allusion à davantage que Valois avait tiré de la véritable loi salique, qui lui fit obtenir le trône, à l'exclusion des descendants de la branche féminine; Cette plaisanterie rappelle le surnom de salinator, que le peuple romain, mécontent, donna au censeur Livius, qui, à Rome, soumit le sel à un impôt. Ainsi, chez les Romains comme en France, un surnom caractéristique devait signaler à la postérité celui qui, le premier, osa frapper d’un tribut et soumettre au monopole une denrée dont la nature a été si prodigue envers les hommes[7].
Les tailles et les droits seigneuriaux, les dîmes ecclésiastiques, les fréquentes mutations des monnaies, les emprunts forcés, les exactions et maltôtes des receveurs et des traitants juifs ou italiens, accumulaient sur le peuple des charges qui rendaient les subsides publics insupportables, quoiqu’ils fussent peu profitables à l’état : conséquence naturelle du désordre qui régnait dans le maniement des deniers royaux, et que ne réprimaient pas les mesures dont les financiers devinrent l’objet. Philippe de Valois finit à leur égard comme il avait commencé, par des persécutions et des taxes dont le premier atteint fut le trésorier de la couronne, Pierre des Essarts.
1346. — On doit à ce prince l’agrandissement de la France vers le midi par l’acquisition du comté de Montpellier, qu’il fit moyennant des arrangements pécuniaires. Du reste, une guerre continuelle et malheureuse, que signalèrent la destruction de la marine française à l’Écluse, la perte de la bataille de Crécy, où l’infanterie des communes éprouva une déroute complète, et la prise de Calais par Édouard ; la peste, la famine, les ravages commis par les soldats, tous les fléaux réunis, avaient accablé les Français sous ce règne. Philippe. par son luxe et sa magnificence, avait ajouté aux besoins réels et nombreux de l’état. Sentant approcher sa dernière heure, il recommanda à son fils de soulager le peuple par la diminution des impôts. Vaine et tardive exhortation ! attribuée également à Philippe-le-Bel, qui, aussi bien que le premier des Valois, aurait pu s’appliquer la leçon.
1350. — À l’avènement du roi Jean au trône, les partisans de Charles-le-Mauvais de Navarre dévastaient la Normandie ; le roi Édouard était paisible possesseur de Calais ; et le prince de Galles, son fils, maître de la Guyenne, inquiétait, à la tête d’une armée d’Anglais et de Gascons, les autres pays situés au-delà de la Loire.
La première année du nouveau règne fut marquée par une assemblée générale de tous les états du royaume, sous la distinction de la langue d’Oc, pour la partie méridionale, et de la langue d’Oyl, pour la partie septentrionale. Quoique réunis à Paris, les membres de l’assemblée accordèrent séparément, ceux de la langue d’Oc un subside de cinquante mille florins pour un an ; ceux de la langue d’Oyl, et aussi pendant un an, une imposition de six deniers pour livre de toutes les marchandises vendues, payable même par les nobles dans leurs terres. Les députés de la noblesse et des communautés de la Picardie, de la Normandie et du Vermandois, ne se considérant pas comme munis de pouvoirs suffisants, ne consentirent point à l’aide accordée par l’assemblée générale ; mais des assemblées particulières convoquées plus tard dans chacune de ces provinces consentirent à l’imposition de la taxe sur les marchandises, que la Picardie fixa seulement à quatre deniers, dont moitié pour la ville d’Amiens, dans son ressort. Les impositions devaient être données à ferme, et perçues dans chaque province sous la surveillance de deux prud’hommes élus par les commissaires du roi, de concert avec le conseil des nobles et des grandes bonnes villes[8].
1351. — Soit insuffisance réelle de l’aide accordée, soit plutôt effet de la mauvaise administration de ses produits, la pénurie du trésor obligea le roi à une mesure extrême, qui probablement n’était pas nouvelle, mais dont, la première fois, on découvre la trace dans les annales de nos finances. L’année qui suivit l’obtention du subside vit suspendre le paiement des dettes, pour causes d’emprunts et à tous autres titres, qui avaient été contractées tant sous ce règne que sous les précédents, à l’exception seulement des rentes anciennes; mais plus tard ces dettes privilégiées ne furent pas exceptées[9].
1352-1353-1354. — Pendant quelques années encore, le roi Jean obtint le renouvellement de l’imposition sur la vente des marchandises, dans des assemblées des états de chaque province, au moyen de demandes partielles que portaient des commissaires royaux chargés de ces négociations. Lors de ces traités particuliers, les officiers municipaux obtenaient du monarque, à titre d’octroi, qu’une partie du produit des taxes resterait entre leurs mains, pour être employée aux nécessités de la communauté. De leur côté, les gens d’église et les nobles avaient grand soin d’y faire réserver l’exemption de l’imposition pour la vente qu’ils faisaient des denrées de leurs domaines, et quelquefois les seigneurs n’accordaient leur consentement qu’en stipulant qu’une portion du droit leur appartiendrait. Ce qui restait de ces ressources précaires, achetées par tant de concessions, n’était plus suffisant pour l’entretien des troupes, devenu un objet très considérable depuis que non seulement la solde des milices communales, mais encore celle des gens de guerre, faisait partie des dépenses de l’état[10].
Les grands vassaux, qui, dans les premiers temps de la monarchie, regardaient comme un de leurs plus beaux privilèges de suivre le roi à la guerre, avec les hommes d’armes, ne satisfaisaient plus à cette obligation avec la même exactitude et le même désintéressement. Mais si, d’une part, l’ambition et le désir de se rendre indépendants de la couronnée avaient fait oublier à des seigneurs puissants le premier devoir imposé par les anciennes lois du royaume, il est juste de reconnaître d’un autre côté que beaucoup d’autres possesseurs de fiefs se trouvaient réduits à l’impuissance de fournir le service militaire, par suite de la diminution qu’éprouvait la valeur de leurs revenus. Cette diminution résultait de la différence survenue dans l’évaluation des monnaies depuis que les terres inféodées avaient été concédées, au déclin de la seconde race, moyennant des cens ou rentes foncières dont le taux demeurait invariable nonobstant la révolution qui avait transformé la livre effective d’argent en une livre de compte dont les fractions conservaient les mêmes dénominations que celle de la livre de poids. Ce changement favorable aux censitaires et à l’agriculture, était, ainsi que l’affranchissement des serfs, tout entier au préjudice des seigneurs. C’est sans doute à cette circonstance d’entre eux avaient dû d'obtenir du premier fils de Philippe-le-Bel la promesse de ne pas servir malgré eux, hors de leurs domaines ; et lorsqu’ils servaient le roi. s’obligeait « à faire diligence de s’informer à, quels cousts et gages ils devaient le faire. » Cette promesse avait été bientôt suivie d’un engagement formel par l’adoption d’un tarif de solde pour les troupes que fournissaient les seigneurs[11].
Sous le règne du roi Jean on usa à l’excès du droit de seigneuriage, genre d’impôt non moins odieux au peuple que fatal au commerce, qui, comme on l'a vu, consistait à élever et à baisser tour à tour le taux des espèces, et surtout à en affaiblir à chaque refonte la valeur intrinsèque en altérant le degré de fin. Par ces opérations, le marc d’argent, qui, à l’avènement du roi, était à cinq livres cinq sols, fut porté alternativement en cinq années à onze livres, à quatre livres cinq sols, à douze livres, à quatre; et élevé jusqu'à dix-huit livres. Ces variations étaient si subites que « à grand peine estoit homme qui en juste payement des monnoyes de jour en jour se pust connoistre. »
1355. — Les droits à l’exportation des laines furent augmentés, puis étendus. aux toiles et aux fils fabriqués en France. Mais-il fallait à la couronne des ressources moins incertaines et plus abondantes pour opposer des armements aux entreprises de Charles-le-Mauvais, et aux attaques dirigées simultanément par Édouard d’Angleterre et par le prince de Galles son fils, sur plusieurs points du royaume. Déterminé par la nécessité, le roi Jean avait convoqué au château de Ruel une réunion de seigneurs, dans l’espoir d’en obtenir une aide. Mais cette tentative n’ayant pas obtenu le succès qu’il en attendait, le prince se détermina à « mander et assembler les bonnes gens du royaulme de la Langue d’Oyl et du pays coutumier de tous les trois estatz; c’est à sçavoir : archevesques, evesques, abbez et chapitres, nobles du sang royal et autres, ducs, comtes, barons, chevaliers et autres, et aussi des bourgeois et habitants des citez, chasteaux et bonnes villes du royaulme; et leur feist le roi exposer en sa présence, en la chambre du parlement, l’estat des guerres, par le chancelier de France, et leur requist que ils eussent sur ce advis ensemble que ayde ils pussent faire au dict roy de France qui feust suffisant pour le faict de la guerre. Et pour ce que le dict roy de France au roit entendu que les subjects du royaulme se tenoient fortement pour gesnez de la mutation des monnoyes, le dict roy de France offrit a faire forte monnoye et durable, mais que on lui feisse aultre ayde qui feust suffisant pour faire sa guerre. »
Après délibération, les états annoncèrent qu’ils entretiendraient, pendant un an, trente mille hommes d’armes, dont la dépense fut évaluée par l’assemblée à cinq millions de livres parisis. Pour faire les fonds, états ordonnèrent l’établissement « d’une imposition de huit, deniers pour livre de toutes denrées et marchandises vendues, à l’exception des héritages, payable par le vendeur, de quelque qualité qu’il feust, gens d’église, nobles et autres, et que gabelle du sel courroit parmy tout le royaulme de France[12]. »
L’aide était accordée pour une année seulement, et sans porter préjudice aux libertés, privilèges ou franchises des trois états ; pendant sa durée, le roi renonçait à la levée de tous autres subsides existants, et notamment bénéfice des monnaies, promettant, tant pour lui que pour ses successeurs, de faire une monnaie et stable, savoir : des deniers d’or fin, de la monnaie blanche ou d’argent, et, pour la commodité du même peuple, de la monnaie noire ou billon, et des deniers et mailles de cuivre. Si cependant avant la fin de l’année la paix, pouvait se conclure, la gabelle et les impositions devaient cesser aussitôt, et les fonds non employés rester à la disposition et être appliqués à l’utilité des pays où ils auraient été levés. En adoptant ces conditions, le monarque annonça que, dans le cas de continuation de la guerre actuelle, et pour toute autre guerre qui pourrait naître à l’avenir, les états-généraux auraient à lui accorder une aide proportionnée aux besoins, mais toujours du consentement unanime des trois ordres ; et que, « si tous les trois estatz n’estoient d’accort ensemble, la chose demourroit sans determination. Mais, ajoute l’ordonnance, en ce cas nous retournerions à notre domaine des monnoyes et à nos aultres droits, » c’est-à-dire que le roi rentrerait dans le droit alors attribué à la couronne d’augmenter et de diminuer les monnaies, afin de profiter de cette variation[13].
Du consentement donné par les états-généraux à l’établissement d’un subside extraordinaire, et de la réserve que faisait la couronne, résultait une espèce de contrat dont l’accomplissement eût été utile à tous, puisque, en accordant au gouvernement les secours réclamés pour la défense du pays, au moyen d’impôts consentis, il devait épargner aux différentes classes les pertes fréquentes et les troubles occasionnés par l’abus du seigneuriage, ressource funeste que la nécessité du temps portait la royauté à revendiquer encore comme un droit domanial, nonobstant l’abandon que Saint-Louis en avait fait. Jusque là, les états-généraux n’avaient pas dépassé l’objet de leur convocation ; ils s’en écartèrent en s’attribuant le choix et la nomination des préposés à la perception de l’aide, par des commissaires pris dans le sein de l’assemblée, et qu’elle envoya dans les différentes provinces. Ces députés particuliers avaient le nom d’élus. L’assemblée choisit encore, dans chacun des trois ordres, trois généraux ou super-intendants des aides. Ces neuf généraux, dans lesquels on trouve l’origine de la cour des aides, étaient appelés à connaître des difficultés qui pourraient s’élever dans les rentrées, ou dans les moyens de contrainte; et leurs sentences, lorsqu’elles étaient rendues à l'unanimité devaient être exécutées sans appel, « comme arrests de parlement. » Ils n'étaient chargés d’aucune recette; et afin qu’ils ne fussent pas comptables, ils avaient sous leurs ordres deux receveurs généraux[14].
Il fut encore statué par l’assemblée que les deniers de l’aide seraient uniquement affectés au paiement des troupes, et aux autres frais de la guerre, sans qu’aucune autorité pût en appliquer même une partie à quelque autre destination. L'emploi et la répartition des produits appartenait exclusivement aux commissaires ou élus des états-généraux; et ces commissaires, ainsi que les receveurs qui leur étaient subordonnés, jurèrent de ne pas obéir aux lettres ou mandements contraires que l’importunité pourrait surprendre même au monarque.
En faveur de l’aide qui lui était accordé, et eu égard, aux plaintes et doléances présenté par les états, le roi ordonna quelques réformes qui, si elles avaient eu lieu, devaient faire supporter moins impatiemment le fardeau des impositions nouvellement établies. La nature des mesures adoptées fait connaître quels étaient les abus dont la classe laborieuse avait à souffrir.
Il fut défendu de traduire les Français devant les tribunaux autres que ceux de leur juridiction naturelle, pour le fait d’anciennes dettes envers les usuriers lombards dont les créances avaient été abandonnées à la reine; et, pour mettre un terme aux poursuites et aux vexations qui s’exerçaient à l’occasion de ces dettes, on prononça qu’elles seraient prescrites après dix années.
Le roi défendit encore la plantation à l’avenir, tant dans ses domaines que dans les fiefs, des garennes que les officiers de la couronne et les seigneurs augmentaient à l’envi pour multiplier le gibier, qui gênait les travaux du laboureur et ruinait ses récoltes ; il ordonna de détruire les garennes qui avaient été plantées sous son règne et pendant celui de son père, permettant à chacun d’y chasser sans qu’on pût être condamné à une amende.
Pour réprimer l’avidité et les vexations des sergents employés au recouvrement des droits du roi, on régla leur salaire et le nombre d’exécutions à faire par jour. Des peines très sévères furent prononcées contre ceux qui se livreraient à de nouvelles concussions, et tous furent obligés d’exercer leur emploi en personne, de même que les autres titulaires des offices royaux.
Il fut interdit aux membres du grand conseil, aux présidents et membres du parlement et de la cour des comptes, aux trésoriers, receveurs, collecteurs, aux maîtres des monnaies, aux juges des sénéchaussées et bailliages, et à tous officiers royaux, d’acheter ou faire acheter des marchandises et denrées, pour en augmenter le pris au détriment des consommateurs.
L’honneur dispendieux de défrayer le roi et sa famille dans les voyages avait appartenu dans les premiers temps de la monarchie, comme on l’a vu, aux possesseurs de fiefs. Cette obligation avait été échangée dans la suite contre une redevance pécuniaire, nommée droit de gîte ; mais les frais occasionnés par la présence du monarque étaient devenus une servitude à charge à la population sous le titre de droit de saisine. Lorsque le prince, quelqu’un de sa famille ou l’un de ses officiers s’arrêtait dans un lieu, leurs gens enlevaient par force et sans paiement les denrées et tous les objets nécessaires dans la circonstance. Le roi prononça l’abolition du droit de saisine. En conséquence il renonça pour lui, pour la reine, pour ses enfants, pour les princes du sang et pour les officiers de sa maison à prendre sur les sujets « blé, vin, vivres, chevaux, charrettes ou toutes autres choses », ase réservant toutefois, lorsqu’il voyagerait, le droit de faire fournir par la justice des lieux à ses maîtres d’hôtels les « lits de plumes, fourrage et voitures, » en payant le plus juste prix, le jour même ou le lendemain au plus tard. Défenses furent faites à toutes personnes de rien prendre ou exiger par force ou par : mauvais traitements ; et, en cas de violence, les habitants étaient autorisés à ce réunir pour ce défendre.
Le roi s’engageait encore, pour lui et pour les siens, à ne plus convooquer que dans un cas de nécessité extrême l’arrière-ban, qui obligeait nobles à de grandes dépenses, et qui devait cesser, puisqu’ils contribuaient au paiement des troupes ; et aussi à ne jamais contraindre personne, clercs, bourgeois, marchands ou autres, à lui prêter de l’argent ou des denrées.
Comme il était douteux que les imposition établies pussent fournir à la levée et à l’entretien des trente mille hommes d’armes, les membres des trois ordres ajournèrent leur réunion à trois mois : l’assemblée devait alors juger du produit de l’aide, et, au ces d’insuffisance, pourvoir aux besoins, soit en élevant le taux de la gabelle, « soit par tout moyen que les estaz generaux ordonneroient d'un accort et consentement, senz ce que les deux estatz, si ils estoient d'un accort, puissent lier le tiers. »
1356. — La deuxième assemblée se réunit à l'époque déterminée, à l'exception de quelques députés de Picardie et de Normandie. Le précédent subside ayant été reconnu insuffisant et dispendieux, eu égard aux frais de recouvrement, elle prononça la suppression du droit de huit deniers pour livre et de la gabelle, à la réserve des arrérages exigibles, et les remplaça par un subside d'un nouveau genre. Ce fut une capitation ou contribution par personne, mais réglée proportionnellement aux revenus et ressources de toutes natures provenant soit de biens-fonds, de charges et offices, de pensions, rentes viagères et autres; soit du travail ou de l'exercice d'une profession, et portant également sur le mobilier. A l'exception des pauvres, des moines mendiants et des gens d'église payant décime, personne ne pouvait en être exempt, « feust du sang du roy ou autre, clerc ou lay, religieux ou religieuse, exempt ou non exempt, monnoyers et tous autres, de quelque estat, autorité ou privilège qu'ils usassent ou ussent usez au temps passé[15]. »
Une ordonnance détermina les bases de la répartition proportionnelle par classe de contribuables, depuis les nobles jusqu'aux « serfs taillables hault et bas à la volonté des seigneurs; » et, par des mandements dont étaient porteurs les commis qu’ils envoyaient dans les provinces, les commissaires-députés des états-généraux donnèrent des instructions pour appliquer l'imposition d'après la déclaration des contribuables, reçue en présence du curé et de quatre personnes par lui désignées. La perception de ce subside, comme celle de l’aide précédente, fut encore faite par des receveurs nommés et installés dans chaque localité par ces commissaires, et ceux-ci conservèrent pareillement la surveillance de la direction des moyens de contrainte et de l’application des deniers aux dépenses de la guerre.
Les états-généraux, en stipulant l’affectation exclusive aux frais de la guerre du produit des nouveaux impôts, avaient en évidemment pour objet de prévenir le retour des malversations reconnues dans l'emploi des subsides levés sous les règnes précédents. Cette mesure était judicieuse; elle dérivait des usages existants et du droit que doit posséder une nation de connaître la destination donnée aux tributs extraordinaires qu'elle s'impose pour l'utilité publique. Mais la disposition par laquelle l'assemblée se réserve le choix des personnes chargées de répartir et de recevoir les subsides, et d’en ordonner l’emploi à l'exclusion des officiers royaux, est une preuve de la confusion qui régnait au XIVe siècle, dans les idées des trois ordres, sur les attributions de chacune des parties constitutives du gouvernement, en matière économique. En effet, au droit de délibération que les états-généraux venaient d’exercer dans toute sa plénitude, à celui de contrôle supérieur qu’ils se réservaient, et qu’il était juste de leur accorder, ils voulurent réunir encore l’action du recouvrement et celle de la disposition des fonds qui ne peuvent appartenir qu’à l’autorité administrative, et n’être exercée utilement que par elle. Cet empiétement de la puissance législative, sur les prérogatives incontestables de la royauté, et l’abus que firent bientôt après les états-généraux d’un pouvoir dont ils avaient méconnu les limites, ne tardèrent pas à discréditer ces assemblées, et justifièrent, en quelque sorte, les efforts que fit la couronne pour se soustraire à leur influence.
Après la malheureuse journée de Poitiers, où le roi Jean fut fait prisonnier, les états-généraux s’assemblèrent de nouveau, à la demande du dauphin Charles[16].
L’objet de leur réunion devait être de procurer, de nouveaux secours pécuniaires à l’effet d’obtenir la liberté du monarque, pour laquelle dans le premier moment les Anglais ne demandaient que de l’argent. L’occupation de plusieurs provinces par les troupes ennemies ne permettant pas aux députés de toutes les parties du royaume de se réunir dans la capitale, les états des provinces méridionales s’assemblèrent à Toulouse, et ceux de la partie septentrionale à Paris. Dans le midi une aide fut accordée pour la levée et l’entretien de dix mille hommes d’armes ; et, non contents de témoigner leur dévouement par ce subside, qu’ils renouvelèrent plusieurs fois, les états ordonnèrent de leur propre mouvement que « hommes et femmes pendant l’année, si le roi n’estoit auparavant délivré, ne porteroient sur leurs habits or, argent, ne perles, et qu’aucuns menestriers ni jongleurs ne joueroient de leurs mestiers ou instruments[17]. »
À Paris, au contraire, les états, influencés par Marcel, prévôt des marchands, demandèrent compte des sommes qui avaient été levées dans le royaume pendant les temps précédents en décimes, maltôtes, subsides de tous genres, fabrication de monnaies, et autres exactions. Ils s’élevèrent contre les abus que l’on avait commis dans la solde des troupes, et annoncèrent que vingt-deux grands officiers et magistrats accusés de ces déprédations seraient révoqués, mis en jugement, et leurs biens confisqués et vendus, pour le produit en être appliqué à la rançon du roi prisonnier. Ils insistaient surtout contre le trafic des offices de judicature, et demandaient une fixation du salaire des gens de justice et l’abandon des transactions pécuniaires pour les crimes. Une nouvelle armée de trente mille hommes d’armes, et les fonds suffisants pour son entretien, devaient être le prix du consentement donné à ces exigences. Le dauphin, forcé d’y souscrire dans un acte public, en éluda l’exécution, et parvint, par adresse, à dissoudre l’assemblée. Avant leur séparation, les états avaient institué un conseil composé de douze prélats, douze chevaliers et douze bourgeois, élus par chacun des trois ordres. On lui attribua la surveillance de l’administration du royaume. Le premier acte de cette nouvelle autorité fut de faire saisir les coins d’une monnaie de bas aloi que le dauphin avait fait fabriquer et dont l’émission causait une sédition violente dans la capitale[18].
1358.- Les états cependant avaient autorisé la levée de ce qui était encore dû de la faire de huit deniers et de la gabelle, ainsi que du second subside qui avait remplacé ces impositions. Mais le conseil extraordinaire en employait le produit à soudoyer les troupes nécessaires pour l’accomplissement des complots de Marcel et des desseins criminels de Charles-le-Mauvais; desseins que favorisait le mécontentement excité dans tous les corps de l'état par les vices de l’administration précédente. La noblesse cherchait à s’allier avec les communes, dans l’intention de recouvrer leurs privilèges respectifs; mais le dauphin prévint les conséquences de cette union par des insinuations adroites qui jetèrent la défiance entre les seigneurs et les villes. Sur ces entrefaites ce prince, que des membres des états réunis au parlement de Paris avaient déclaré régent, se voyait réduit à solliciter des provinces ou des villes, par des commissaires ou par lui-même, des secours en hommes et en argent; et il trouva dans la fidélité de plusieurs états-provinciaux ce que les états-généraux lui avaient refusé[19].
Le clergé vint aussi au secours du régent ; Les contributions sur les biens de l’Église, qui étaient ordinairement d’un dixième des revenus, avaient été portées à une décime et demie. Dans ce moment de détresse les juifs donnèrent ausi leur contingent forcé, et le travail sur les monnaies reprit sa funeste activité[20].
1360. - Enfin le traité de Brétigny mit fin aux hostilités avec l'Angleterre. Par ce traité la France cédait en toute souveraineté le Poitou, la Saintonge, l’Agenois, le Limousin, le Périgord, l'Angoumois, le Rouergue, le Quercy, les pays de Gaurre et de Bigorre, celui de Montreuil-sur-Mer, la côte du Gravelines à Calais, et les comtés d’Oye, de Guignes et de Ponthieu. De son côté le roi Édouard, en conservant la Guyenne, renonçait aux villes et places dont il s’était emparé en Normandie, dans la Touraine, le Maine, l’Anjou, la Bretagne et la Flandre; mais on devait lui payez pour la rançon du roi trois millions d'écus d'or, acquittables quatre cent mille écus à Calais, deux cent mille en deux termes de la même année, et le reste dans les six années suivantes, à raison de quatre cent mille écus par an[21].
Au moment où le traité fut signé, « la France étoit à l'agonie, et pour si peu que son mal durât, elle alloit périr. » Son territoire, sillonné depuis six années par des armées indisciplinées, avait été ravagé par les gens de guerre anglais, français, navarrois, et par les aventuriers étrangers qui, suivant tour à tour les différentes bannières, n’avaient souvent pour solde que le pillage. Ces derniers, licenciés sans paiement à la paix, se formèrent en bandes sous la conduite de hardis capitaines qui distinguèrent leurs troupes par les noms de grandes compagnies, et de tard-venus. Tantôt courant isolément, tantôt réunis en corps de quinze à vingt mille hommes, pendant quatre ans encore ils commirent dans les villes et dans les campagnes toutes sortes de rapines et de brigandages. De tous côtés, des péages, des redevances, des prestations de tout genre, établis et exigés à la faveur des troubles inséparables des dissensions publiques et de l’invasion étrangère, opprimaient le commerce et les paysans vassaux des seigneurs. Ces malheureux, dépouillés, poussés au désespoir par l’excès des subsides et par les violences de la féodalité, s’étaient révoltés. Sous le nom de Jacquiers, ils se répandirent en troupes ou en corps d’armées dans la Picardie, la Champagne et l'Ile-de-France, dévastant les terres, brûlant les châteaux des nobles, et massacrant ceux des propriétaires qui tombaient entre leurs mains. Ces crimes ne cessèrent que par l’anéantissement de leurs auteurs. Une peste devenue endémique décimait la population : un grand nombre de familles abandonnèrent la France pour fuir ce fléau, non moins que les vexations excessives que commettaient les gens préposés par les états à la perception, des impôts ou de la gabelle, et qui dans leur emploi n’apportaient pas moins d’avidité que les juifs auxquels ils avaient succédé.
A son retour, cependant, le roi Jean dut s’occuper de satisfaire à la dette qu’il avait contractée.
Les juifs, toujours à la portée du fisc, obtinrent leur rappel pour vingt ans, avec promesse de protection, privilèges et franchises, moyennant une forte finance à leur arrivée, et une redevance annuelle[22].
On prononça la réduction et probablement la restitution des gages excessifs accordés par les états-généraux aux députés qu’ils avaient élus pour la levée des subsides de guerre; et l'on exigeait le paiement de ces mêmes subsides précédemment accordés tant au roi qu’au régent[23].
En même temps les roi prononçait l’abolition des taxes et péages récemment établis sur les routes de terre et d’eau, et sur les ponts; il ramenait les autres redevances aux anciennes coutumes, et promettait de porter la réforme dans les différentes parties de l'administration. Ensuite, ayant exposé aux peuples, dans le préambule d’une ordonnance,que des impositions auraient moins d’inconvénient pour eux que l’altération des monnaies, il annonça qu'il serait fait payé par forme d’aide, pour l’acquittement de sa rançon, le cinquième sur le prix du sel, et, durant les six années fixées pour l'entier accomplissement des conditions de la paix, le treizième du prix des vins ou autres boissons, et douze deniers pour livre de toutes marchandises et denrées qui seraient vendues et revendues dans l’intérieur du royaume[24].
Un autre droit, aussi de douze deniers pour livre, sous la dénomination d'imposition foraine, fut ajouté à ceux de rêve et de haut passage, qui se percevaient déjà sur les denrées et marchandises exportées du royaume.
L'imposition de douze deniers sur les marchandises et denrées fut donnée à ferme, et les cautions prises et les deniers reçus de mois en mois par les élus ou députés de chaque ville.
On rétablit les greniers royaux pour la vente du sel. Le droit sur les vins et les boissons dut être perçu à l’entrée des villes et autres lieux de destination, d’après un tarif estimatif du prix des liquides.
Les états-généraux n’eurent point de part à ces mesures. Les courses et les pillages des brigands, en ôtant toute sûreté aux voyageurs, opposaient des difficultés réelles à la réunion d’une grande assemblée; en outre, dans l’état de confusion où se trouvait le royaume, chacun était plus occupé du soin de sa propre conservation que du maintien des droits publics. Ces circonstances habilement saisies favorisaient donc l’établissement des impositions générales par la seule volonté du trône. Toutes les parties de la France cependant ne se soumirent pas avec une égale docilité aux ordres de la couronne.
1361.- Quelques provinces, le Languedoc, la Flandre et l'Artois entre autres, se rachetèrent des droits mis dans l’intérieur sur les boissons, au moyen d’une certaine somme payée comptant. Ces espèces d’abonnements, renouvelés d’année en année, et ensuite de règne en règne, marquent l’origine de l’exemption des droits d'aides dont jouirent plus tard ces mêmes provinces.
D’autres provinces, au contraire, ayant refusé de s’assujettir à l’imposition de douze deniers sur les choses vendues dans l’intérieur du royaume, furent traitées comme pays étrangers dans leur commerce avec celles où ce droit avait cours. En conséquence les marchandises sortant de ces dernières provinces, pour aller dans celles où le droit n’était pas établi, furent soumises aux trois droits d’imposition foraine, de rêve et de haut passage, soit que les objets transportés fussent destinés à l’étranger, ou seule mentaux provinces de France réputées étrangères[25].
Telle a été l’origine de ces barrières intérieures qui, pendant plus de cinq siècles, isolant entre elles les diverses parties d'un même état, les tenaient divisées d’intérêts, et formaient autant d'obstacles aux progrès du commerce et de l’industrie : résultat fâcheux des prétentions d'une assemblée qui, par ses fautes, perpétua l’absence d’un système général et uniforme d’impositions établi sur des lois stables, autant que de l’impuissance où se trouvait l’autorité royale de vaincre l’opposition que rencontrait l’exécution de mesures émanées de la volonté seule du monarque.
- ↑ Ordon. du Louvre, t. 3, p. 5.
- ↑ Ordon. du Louvre, t. 1, p. 783, et t. 2, p. 147 et 148.
- ↑ Histoire de France par le comte de Boulainvilliers. - Ordon. du Louvre, t. 1.- Mézerai.
- ↑ Préambule de l’ordonn. du 15 mars 1332, t. 2, p. 84.
- ↑ Guy Coquille, chap. 14, p. 17. - ordonn. du Louvre, t. 6, p. 549 et 550. Économies royales de Sully, t. 10
- ↑ Ordonnances du Louvre, t. 2, p. 238 et suiv. ; t. 3, p. 682, art. 16.
- ↑ Ordonn. du Louvre, t. 2, p. 179 et 238. — Le Guydon général des finances, p. 149, etc.
- ↑ Ordon. du Louvre, t. 3, préface, p. xix et suiv., xxxij et xxxvj ; et t. i, p. 391 et 400.— Le Guydon général des finances, p, 165. — Œuvres de Pasquier, t. 1, p. 87, D.
- ↑ Ordon. du Louvre, t. 2, p. 449 et t. 3, p. 15.
- ↑ Ordon. du louvre t.3, p. xxxviij et suiv.
- ↑ Convention conclue en 1338 par le roi, Philippe de Valois avec les nobles du royaume, concernant la solde des troupes de toutes armes à payer par le trésor. (Ordonnance du Louvre, t. 2, p. 120 et suiv.)
- ↑ Ordon. du Louvre, t. 3, p. xxiij, 19 et suiv. — Chronique de Froissard, t. 1.
- ↑ Froissard, t. 1. — Ordonn. du Louvre, t. 3, p. 25, art. 7, et préface, p. cj. -Le Guydon général des finances, p. 152.
- ↑ Ordon. du Louvre, t. 3, p. 22 et suiv., et t. 17, p. iij et 10.
- ↑ Ordonn. du louvre, t.3, préface p. ????, ????, etc. - Chroniques de Froissart t. ??.
- ↑ Chronique de Froissard, t. 1.- Histoire de France par le comte de Boulainvilliers.
- ↑ Ordon. du Louvre, t. 3.
- ↑ Ordon. du Louvre, t.3, p. 123 à 146.
- ↑ Ordon. du Louvre, t. 3, préface, p. xliv, lxxij, et 212, 221 t suiv. - Hist. de France par le comte de Boulainvilliers.
- ↑ Ordon. du Louvre, t. 3, p. 193, 301, 302, etc.
- ↑ Préambule de l’ordon. du 15 décembre 1360. - Mémoires de Ph. de Commines. — Chronique de Froissard.
- ↑ Ordon. du Louvre, t. 3, p. 467, 476 et 487.
- ↑ Ordon. du 5 décembre, t. 3, p.433 et suiv.
- ↑ Ordon. du Louvre, t. 4, p. 490; t. 13, p. 65, en note; t. 5, préface, p. viij et 82, et t. 17, p. iv.
- ↑ Ordon. du Louvre, t. 3, p. 496 et 503 ; t. 4, p. 690, et t. 5, p. viij et 82.