Histoire naturelle (trad. Littré)/II/Bilingue/112

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Traduction par Émile Littré.
Dubochet, Le Chevalier et Cie (p. 148-150).
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Livre II — § 112 (bilingue)

CXII.

1(CVIII.) La portion du monde que nous habitons, et dont j’entends parler, flottant en quelque sorte sur l’Océan, qui, comme on l’a vu (II, 66), l’entoure de toutes parts, a la plus grande dimension de l’est à l’ouest, à savoir de l’Inde jusqu’aux Colonnes d’Hercule, consacrées près de Cadix, dans une longueur de 8,568,000 pas (1261 myr., 6380), d’après Artémidore, de 9,818,000 (1445 myr., 7005) d’après Isidore. Artémidore ajoute en plus depuis Cadix, en doublant le promontoire Sacré jusqu’au promontoire Artabrum, dernière limite de la côte d’Espagne, 491,000 pas (58). 2La mesure peut se prendre par deux lignes. Du Gange et de son embouchure dans l’océan Oriental, à travers l’Inde et la Parthyène jusqu’à Myriandre, ville de Syrie, située dans le golfe d’Issus, 5,215,000 pas ; de là, naviguant en droite ligne par Chypre, Patare de Lycie, Rhodes, Astypalée, îles de la mer Carpathienne, Ténare de la Laconie, Lilybée de la Sicile, Calaris de la Sardaigne, 2,103,000 pas ; de là à Cadix 1,250,000 pas, ce qui porte la mesure totale, à partir de la mer orientale à 8,568,000 (1261 myr., 6380).

3 L’autre mesure, presque tout entière par terre, a plus de certitude : du Gange à l’Euphrate, 5,169,000 pas ; de là à Mazaca de la Cappadoce, 319,000 pas ; de là, par la Phrygie et la Carie, jusqu’à Éphèse, 415,000 ; d’Éphèse, à travers la mer Égée, jusqu’à Délos, 200,000 ; jusqu’à l’isthme, 2,12,500[sic] ; 4 de là, par terre, de la mer Léchaïque (IV, 5) et du golfe de Corinthe jusqu’à Patras, du Péloponnèse, 90,000 ; jusqu’à Leucade (IV, 5), 87,500 ; jusqu’à Corcyre, autant ; jusqu’aux monts Acrocérauniens, 132,500 ; jusqu’à Brindes, 87,500 ; jusqu’à Rome, 360,000 ; jusqu’au bourg de Scingomagus, dans les Alpes, 519,000 ; à travers les Gaules, jusqu’à Illiberis, dans les Pyrénées, 927,000 ; jusqu’à l’Océan et à la côte d’Espagne, 331,000 ; pour le détroit de Cadix, 7,500. Ces distances, données par Artémidore, font 8,945,000 pas (1317 myriamètres, 1512).

5 Quant à la largeur de la terre, du midi au nord, elle est considérée comme étant à peu près moitié moindre, 4,490,000 pas ; on voit, par cette différence, combien d’espace est enlevé, d’un côté par la chaleur, de l’autre par le froid. Je ne pense pas qu’il manque quelque chose à la terre et que la forme n’en soit pas sphérique, mais les deux zones extrêmes étant inhabitables sont inconnues. La mesure en largeur part des rives de l’Océan Éthiopique, là du moins où se trouvent des habitants, et jusqu’à Méroé comprend un million de pas ; de Méroé à Alexandrie, 1,250,000 ; jusqu’à Rhodes, 563,000 ; jusqu’à Cnide, 87,500 ; jusqu’à Cos, 25,000 ; jusqu’à Samos, 100,000 ; jusqu’à Chios, 94,000 ; jusqu’à Mitylène, 65,000 ; jusqu’à Ténédos, 94,000 ; jusqu’au promontoire Sigée, 12,500 ; 6jusqu’à l’entrée du Pont-Euxin 312,500 ; jusqu’au promontoire Carambis, 350,000 ; jusqu’à l’ouverture des Palus-Méotides, 312,500 ; jusqu’à l’embouchure du Tanaïs, 275,000 ; trajet qu’on peut abréger de 89,000, en le faisant par mer. À partir de l’embouchure du Tanaïs, les auteurs les plus exacts n’ont donné rien de précis. Artémidore a pensé que les contrées intérieures étaient inconnues, avouant que les nations sarmatiques s’étendent autour du Tanaïs dans la direction du nord. 7Isidore a ajouté 1,250,000 pas jusqu’à Thulé, devinant plutôt que conjecturant. Quant à moi, je sais que l’on connaît le territoire des Sarmates dans un espace égal au moins à tout ce qui vient d’être énuméré. D’ailleurs, combien cet espace ne doit-il pas être grand, puisqu’il renferme des nations innombrables, qui changent, par intervalle, d’habitation ? Aussi pensé-je que l’étendue de ces contrées si rigoureuses à leurs habitants est beaucoup plus grande qu’on ne la fait ; car je sais que du côté de la Germanie sont des îles immenses, connues depuis peu de temps (59).

8 Voilà ce que je regarde comme digne d’être rapporté au sujet de la longueur et de la largeur de la terre. Ératosthène, d’une habileté supérieure dans toutes les sciences et surtout dans celle-ci ; Ératosthène, à qui tout le monde rend hommage, a évalué le tour entier de la terre à 250,000 stades (mètres 46,000,000), 9ce qui, exprimé en mesures romaines, fait 31,500,000 pas : assertion hardie, mais appuyée sur des arguments si pressants, qu’on aurait honte de ne pas y croire. Hipparque, admirable et quand il contrôle Ératosthène, et quand il se livre à toutes ses autres recherches, ajoute à cette mesure un peu moins de 25,000 stades (mètres 4,600,000).

10(CIX.) Dionysodore n’inspire pas la même confiance ; mais je ne veux pas priver le lecteur de l’exemple le plus grand de la trinité grecque. Il était de Mélos (IV, 24), et célèbre par ses connaissances en géométrie. Il mourut de vieillesse dan sa patrie. Des parentes, à qui revenait son héritage, lui rendirent les derniers devoirs. Ces femmes, accomplissant, les jours suivants, les cérémonies d’usage, trouvèrent, dit-on, dans son tombeau une lettre écrite au nom de Dionysodore, et adressée aux gens de ce monde-ci. La lettre disait que de son tombeau il était arrivé au plus bas de la terre, et qu’il y avait jusque-là 42,000 stades (mètres 7,728,000). 11Il ne manqua pas de géomètres qui expliquèrent ainsi la chose : La lettre est envoyée du milieu de la terre ; car le milieu, vers le bas, est le point le plus éloigné de la surface, et est en même temps le centre de la sphère. Cela posé, le calcul montre que la terre a, de tour, 252,000 stades (mètres 46,368,000) (60).

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