Initiations à la physique/Chapitre IV

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Traduction par Joachim du Plessis de Grenédan.
Flammarion (p. 68-84).

CHAPITRE IV

LA GENÈSE ET L’ÉVOLUTION DE LA THÉORIE DES QUANTA

Reportons-nous à une époque déjà vieille de vingt ans : c’est le temps où la notion de quantum d’action commence à se dégager pour la première fois de l’accumulation des faits expérimentaux. Elle n’a pas encore parcouru le chemin long et sinueux qui doit l’amener à l’état adulte et, considérant toute cette évolution, je ne puis m’empêcher d’évoquer le mot de Gœthe d’après lequel la course errante de l’homme dure aussi longtemps que son effort vers un but. Tout le travail et le zèle du chercheur ne pourrait lui apparaître que comme une tentative vaine et sans espoir s’il n’y avait, de temps en temps, certains faits de nature à lui prouver irréfutablement que le va-et-vient de ses démarches tâtonnantes lui a permis finalement de faire un pas de plus vers la vérité. Si elle n’est pas la garantie du succès, la poursuite d’un but déterminé n’en est pas moins la condition inéluctable.

Dans l’espèce, mon but, depuis longtemps, était d’arriver à résoudre le problème de la répartition de l’énergie dans le spectre normal de l’émission thermique.

Depuis que Gustave Kirchhoff avait montré que la structure du rayonnement émis à l’intérieur d’une enceinte close, formée par un nombre quelconque de corps, dont la température est uniforme, est complètement indépendante de la nature de ces corps[1], on savait qu’il existe une fonction universelle reliant entre elles températures et longueurs d’ondes, et que pour la détermination de cette fonction, les propriétés spéciales d’aucune substance n’entrent pas en ligne de compte. Il était donc naturel de penser que la découverte de cette fonction remarquable serait susceptible de permettre d’élucider plus à fond la nature des relations existant entre l’énergie et la température, or c’est là le problème principal de la thermodynamique et par suite de toute là physique moléculaire. L’unique moyen pour arriver à résoudre ce problème consiste à choisir parmi tous les corps qui s’offrent à nous dans la nature, un de ceux dont nous connaissons le pouvoir d’absorption et le pouvoir d’émission et à calculer ensuite la structure de l’échange d’énergie thermique dont ce corps est le siège quand le régime stationnaire est établi. D’après la loi de Kirchhoff, la structure de cet état stationnaire doit être tout à fait indépendante de la nature du corps choisi.

Il me sembla que l’oscillateur rectiligne de Henri Hertz était un corps particulièrement approprié au but que je me proposais. Hertz venait, en effet, de donner une théorie complète des lois qui relient l’émission de son résonateur à la fréquence des oscillations[2]. Supposons maintenant un certain nombre de ces oscillateurs situés dans une enceinte fermée formée de parois réfléchissantes, ils émettront et recevront simultanément des ondes électromagnétiques et, par analogie avec ce qui se passe en acoustique dans le cas de résonateurs et d’oscillateurs qui échangent de l’énergie, un état stationnaire doit finir par s’établir ; état assimilable à l’état stationnaire correspondant au rayonnement du corps noir. Je me pris à espérer d’une façon qui semblerait aujourd’hui un peu naïve qu’en appliquant les lois de l’électrodynamique classique je pourrais arriver à en déduire dans ses grandes lignes le comportement du phénomène, à condition de m’en tenir aux généralités et de m’abstenir d’hypothèses trop spéciales.

Je m’attachai donc tout d’abord à trouver les lois de l’émission et de l’absorption d’un résonateur rectiligne en me plaçant au point de vue le plus général possible. Pour cela je pris une voie détournée, j’aurais pu en effet abréger mon travail en m’appuyant sur la théorie électronique de H. A. Lorentz déjà connue dans ses grandes lignes ; mais je ne me fiais pas alors entièrement à l’hypothèse électronique, aussi je préférais m’en tenir à considérer l’énergie qui entre et qui sort d’une surface sphérique située à une distance donnée du résonateur. Naturellement, il ne s’agit ici que de phénomènes ayant lieu dans le vide, mais leur connaissance suffit pour permettre de tirer des conclusions en ce qui concerne les variations de l’énergie du résonateur lui-même.

Ceci me conduisit à une longue série de recherches dont quelques-unes purent être contrôlées par comparaison avec les résultats d’observations déjà effectuées, notamment avec les résultats des mesures d’amortissement dues à Bjerknes ; elles se trouvèrent confirmées[3]. Leur aboutissement fut l’établissement d’une relation générale entre l’énergie d’un résonateur possédant une période propre et l’énergie du rayonnement spectral correspondant dans le champ entourant ce résonateur, quand le régime stationnaire est établi[4]. Le plus remarquable dans tout ceci fut que la relation trouvée ne dépendait aucunement de la nature du résonateur et que, notamment, elle était indépendante de sa constante d’amortissement. J’étais d’autant plus satisfait de ce résultat qu’il me permettait de simplifier tout le problème en remplaçant l’énergie du rayonnement par celle du résonateur. Au lieu d’avoir un système compliqué possédant un grand nombre de degrés de liberté, je n’avais plus qu’un système simple avec un seul degré de liberté.

Cependant tout ce que j’avais fait n’avait pas d’autre importance que celle d’un travail d’approche avant d’aborder le problème proprement dit dont le mystère restait inviolé, tel une cime majestueuse entourée de précipices. Ma première tentative échoua. J’avais espéré que le rayonnement du résonateur se distinguerait par une caractéristique quelconque du rayonnement absorbé, de telle sorte qu’on pourrait établir une équation différentielle ; or le résonateur réagissait seulement vis-à-vis des rayons qu’il émettait et il ne se montrait aucunement sensible aux radiations spectrales avoisinantes.

Je suggérai alors que le résonateur pourrait exercer une action unilatérale, donc irréversible, sur l’énergie du champ qui l’entoure, mais je m’attirai la contradiction énergique de L. Boltzmann[5]. Avec l’expérience plus mûre qu’il possédait de ce genre de questions, il eut tôt fait de montrer que, d’après les lois de la dynamique classique, tous les phénomènes envisagés par moi pouvaient aussi bien avoir lieu dans un sens que dans l’autre, c’est-à-dire que l’onde sphérique émise par un résonateur pouvait, inversement, revenir à ce même résonateur sous la forme de surfaces sphériques se rétrécissant de plus en plus jusqu’à s’y absorber complètement. Le résonateur peut donc renvoyer dans l’espace l’énergie reçue par lui auparavant suivant la direction même dont cette énergie est venue. Si je pouvais, dans mon hypothèse du rayonnement, me passer de notions aussi singulières que celle d’ondes à sens unique, en introduisant une condition restrictive, il n’en restait pas moins vrai que toutes ces analyses montraient avec évidence l’absence d’un chaînon essentiel pour arriver à la solution complète de la question.

Il ne me restait donc plus, dans ces conditions, qu’à reprendre le problème en sens inverse, c’est-à-dire en me plaçant au point de vue de la thermodynamique, terrain sur lequel je me sentais plus à l’aise et comme chez moi. Mes recherches antérieures sur le second principe de la thermodynamique me furent, en effet, utiles en ce sens que j’eus tout de suite l’idée d’étudier, non point la température, mais l’entropie du résonateur en fonction de son énergie. À vrai dire, je n’étudiai pas l’entropie elle-même, mais seulement sa dérivée seconde par rapport à l’énergie ; parce que ce quotient différentiel est une mesure directe de l’irréversibilité du phénomène d’échange d’énergie entre le résonateur et le rayonnement ambiant. Cependant, comme ma tournure d’esprit était alors trop phénoméniste, je ne me posai pas la question du rapport entre l’énergie et la probabilité et je m’en tins à la seule considération des résultats expérimentaux, Nous étions alors en l’année 1899 où la loi de répartition de l’énergie énoncée par Wien[6] suscitait le plus vif intérêt. Cette loi avait été contrôlée expérimentalement, d’une part, par Paschen à l’école supérieure de Hanovre et, d’autre part, par Pringsheim et Lummer à l’Institut impérial de Charlottenburg, indépendamment du premier. La loi de Wien exprime la relation existant entre l’intensité du rayonnement et la température au moyen d’une fonction exponentielle. Or en utilisant cette fonction pour calculer la relation entre l’énergie et l’entropie d’un résonateur, on arrive à ce résultat remarquable que l’inverse de la dérivée seconde dont nous avons parlé tout à l’heure (je désignerai dans la suite cet inverse par R) est proportionnel à l’énergie[7]. Cette relation extrêmement simple peut être considérée comme l’expression la plus adéquate de la loi de Wien, car au moyen de la loi du déplacement de Wien[8] la relation entre l’énergie et la longueur d’onde est immédiatement donnée quand on connaît la relation entre l’énergie et la température.

Comme tout le problème concerne une loi naturelle universelle et comme j’étais alors absolument convaincu (et je le suis encore aujourd’hui) qu’une loi doit être d’autant plus simple qu’elle est plus générale (bien qu’on ne puisse pas toujours dire avec certitude et définitivement quelle est la formule qui doit être considérée comme la plus simple), je crus pendant un certain temps que la proportionnalité de l’énergie à R était la véritable base de la loi de la répartition de l’énergie[9]. Mais cette opinion se révéla bientôt être insoutenable, étant donné le résultat de mesures nouvelles. En effet, tandis que pour les faibles valeurs de l’énergie, c’est-à-dire pour les petites longueurs d’ondes, la loi de Wien se vérifiait très bien ; il y avait, par contre, des écarts notables entre le calcul et l’expérience dans le cas des grandes longueurs d’onde. Ceci fut montré tout d’abord par les expériences de Lummer et Pringsheim[10] et plus tard par celles de Rubens et Kurlbaum faites sur les rayons infra-rouges résiduels après le passage à travers du spath-fluor ou du sel gemme[11]. Dans ce dernier cas, ces auteurs montrèrent qu’il y avait une autre relation entre l’énergie et la grandeur R totalement différente de la loi de Wien, relation d’ailleurs susceptible de s’exprimer parfois d’une manière très simple. La grandeur R est alors, en effet, proportionnelle non plus à l’énergie mais à son carré, et cela avec une approximation d’autant plus grande que l’on a affaire à des énergies et à des longueurs d’ondes plus grandes[12].

Ainsi donc, l’expérience mettait en évidence deux limites très simples pour la fonction R : pour les petites longueurs d’onde proportionnalité à l’énergie, pour les grandes longueurs d’onde proportionnalité au carré de l’énergie. Rien de plus naturel alors que de mettre, dans le cas général, la valeur de R sous la forme d’une somme de deux termes contenant l’un la première puissance de l’énergie et l’autre la seconde puissance, et cela de telle façon que pour les petites valeurs de l’énergie le premier terme soit prépondérant et le second pour les grandes longueurs d’onde. C’est ainsi que j’arrivai à une formule du rayonnement qui s’est comportée d’une façon assez satisfaisante au contrôle expérimental[13]. Il ne faudrait pas cependant tenir cette formule pour définitive, j’estime au contraire qu’il serait des plus souhaitable qu’on la soumit à un nouveau contrôle[14].

En tout cas, même si cette formule devait être pleinement vérifiée par l’expérience, elle ne pourrait jamais être considérée que comme une heureuse formule d’interpolation et elle n’aurait, à ce titre, qu’une valeur tout à fait limitée. C’est pourquoi je ne l’eus pas plutôt trouvée que je me mis en devoir d’en chercher la véritable signification physique. La question considérée sous cet angle m’amena à considérer les rapports entre l’énergie et l’entropie, en reprenant le point de vue de Boltzmann. Après quelques semaines qui furent certes remplies par le travail le plus acharné de ma vie, un éclair se fit dans l’obscurité où je me débattais et des perspectives insoupçonnées s’ouvrirent à moi.

Qu’il me soit permis de faire ici une légère digression. Selon Boltzmann, l’entropie est une mesure de la probabilité et le second principe de la thermodynamique consiste essentiellement à affirmer qu’un état se reproduit d’autant plus fréquemment dans la nature qu’il est plus probable.

Remarquons, d’autre part, qu’on ne mesure jamais directement des entropies, mais seulement des différences d’entropies. C’est pourquoi il y a toujours un certain arbitraire à parler d’entropie absolue d’un système. Et pourtant il convient d’introduire le concept d’une entropie absolue, définie d’une manière suffisante, car on peut arriver ainsi à formuler certaines propositions d’une manière particulièrement simple. À mon avis, le cas de l’entropie est très semblable au cas de l’énergie, car l’énergie elle-même n’est pas mesurable, mais seulement la différence d’énergie. Ceci est tellement vrai qu’il y a un certain temps que l’habitude s’était introduite de ne plus calculer en termes d’énergie ; mais en termes de travail. Ainsi nous voyons Mach, — qui s’est beaucoup occupé du principe de la conservation de l’énergie, et qui est peut-être l’auteur qui a été le plus loin dans la voie de spéculations dépassant la portée de simples observations, — éviter de se servir du mot énergie.

De même, pour la thermochimie à ses débuts, on parlait toujours de chaleur de réaction, c’est-à-dire qu’on s’en tenait à des différences d’énergie. Cet état de choses dura jusqu’à ce que Wilhelm Ostwald eût fait observer, à juste titre, que de nombreuses considérations passablement complexes se trouvaient simplifiées si, au lieu d’utiliser des termes calorimétriques on calculait en énergie proprement dite. La constante qui figure dans l’expression de l’énergie resta tout d’abord indéterminée, mais elle finit par être calculée au moyen de la théorie de la relativité ; qui établit définitivement la proportionnalité de l’énergie et de l’inertie[15].

Pour l’entropie et, par conséquent, pour la probabilité physique il est possible de définir une valeur absolue en fixant, comme dans le cas de l’énergie, la valeur de la constante additive, ce qui se fait en annulant la valeur de l’entropie en même temps que celle de l’énergie (ou mieux de la température). Sur ces bases, on peut alors calculer la valeur de la probabilité physique d’une répartition donnée de l’énergie dans un système composé de résonateurs. Ce calcul se fait par une analyse combinatoire assez simple et il conduit à une expression de l’entropie identique à celle qui est exigée par la loi du rayonnement[16]. À cette occasion j’eus la satisfaction particulièrement précieuse, après tant de désillusions, de voir Ludwig Boltzmann, dans la lettre qu’il m’écrivit quand je lui eus envoyé mon mémoire, se déclarer pleinement d’accord avec moi, tant sur les principes que sur toute la suite de mes déductions.

Pour effectuer le calcul numérique de la valeur de la probabilité, il est nécessaire de connaître deux constantes universelles qui possèdent chacune une signification physique bien déterminée. Comme on peut aussi calculer ces deux constantes en s’appuyant sur la loi du rayonnement, j’avais un moyen de vérifier si tout ce qui avait été fait antérieurement n’était pas qu’un simple artifice de calcul et s’il convenait de lui attribuer un sens physique. La première constante a un caractère plutôt formel et elle est en rapport avec la définition de la température. Si l’on définit la température comme étant l’énergie cinétique moyenne d’une molécule d’un gaz parfait, énergie qui est en soi extrêmement faible, la constante en question a pour valeur deux tiers[17]. Par contre, si l’on adopte l’échelle conventionnelle des températures, la même constante prend une valeur extrêmement faible et cette valeur est naturellement très étroitement liée à l’énergie d’une molécule unique. La connaissance de cette constante est donc une étape dans le calcul de la masse d’une molécule et de toutes les grandeurs qui s’y rattachent. La constante en question a souvent été nommée constante de Boltzmann, bien qu’à ma connaissance, Boltzmann ne l’ait jamais introduite dans ses calculs, ce qui, entre parenthèses, à défaut d’affirmations explicites de sa part[18], suffirait à prouver que Boltzmann ne croyait pas du tout qu’il fût possible de mesurer exactement cette constante. Je ne crois pas qu’il soit possible de trouver un exemple plus saisissant des progrès gigantesques accomplis par l’art de l’expérimentation, que cette découverte de toute une série de méthodes pour mesurer la masse d’une molécule et cela avec une exactitude presque égale à celle avec laquelle on mesure la masse d’une planète.

À l’époque où j’effectuais mes calculs en m’appuyant sur la loi du rayonnement, on ne pouvait penser à une vérification exacte du nombre obtenu, la seule chose possible était de voir si l’ordre de grandeur trouvé correspondait bien à la réalité. Mais bientôt Rutherford et Geiger[19], en dénombrant directement les particules du radium, calculaient la valeur de la charge électrostatique de ces particules et la trouvaient égale à 4,65 × 10−10 unités électrostatiques. Or, de mon côté, j’avais trouvé 4,69 × 10−10, je considérais donc ce résultat comme une confirmation décisive de la valeur de ma théorie. Il convient cependant de signaler que par des méthodes plus récentes E. Regener et R. A. Millikan ont été conduits à attribuer une valeur un peu plus grande à la constante de Rutherford[20].

Il était bien plus malaisé de découvrir la signification de la deuxième constante universelle de la loi du rayonnement noir à laquelle mon premier calcul donnait pour valeur 6,55 × 10−27 ergs-seconde, et que je désignais sous le nom de quantum élémentaire d’action, parce qu’elle était le produit d’une énergie par un temps. D’une part, en effet, cette constante était absolument nécessaire pour obtenir la véritable valeur de l’entropie, car c’est grâce à elle seule qu’on pouvait déterminer les domaines ou intervalles indispensables pour le calcul de la probabilité[21] et, d’autre part, il était absolument impossible, en dépit des plus grands efforts, de la faire rentrer dans le cadre d’une théorie classique, quelle qu’elle fût. Tant qu’on pouvait traiter la constante comme un infiniment petit, c’est-à-dire dans le cas des grandes énergies ou des longs intervalles de temps, tout allait fort bien ; mais, dans le cas général, il y avait toujours un moment où l’on aboutissait à une solution de continuité d’autant plus infranchissable qu’on avait affaire à des oscillations plus faibles et plus rapides. Devant l’échec de tous les essais destinés à combler l’abîme, il devenait de plus en plus impossible d’échapper au dilemme suivant : ou bien toute ma série de déductions aboutissant à retrouver par le calcul la loi du rayonnement noir était par principe illusoire et n’était rien d’autre qu’un artifice de calcul sans portée réelle, ou bien une idée correspondant à quelque chose de physiquement réel présidait à toute cette déduction et par suite le quantum d’action devait jouer un rôle fondamental en physique. Dans la seconde alternative ce quantum représentait donc quelque chose d’absolument nouveau, d’insoupçonné jusqu’alors et qui semblait destiné à révolutionner une pensée physique basée sur la notion de continuité elle-même, inhérente à toutes les relations causales, depuis la découverte du calcul infinitésimal par Leibnitz et Newton.

L’expérience s’est prononcée pour la seconde alternative. Mais si la décision est intervenue aussi rapidement et aussi nettement ce n’est pas parce que la loi de répartition de l’énergie dans le rayonnement noir a été trouvée conforme à l’expérience et encore moins parce que j’ai élaboré une théorie spéciale de ce rayonnement. Si la question est aujourd’hui tranchée, cela est dû au travail infatigable des physiciens qui ont mis le quantum d’action au service de leurs recherches.

Le premier pas dans cette voie fut fait par l’introduction de quanta d’énergie régis par le quantum d’action qui permet d’expliquer très simplement un grand nombre de faits d’observation tels que la règle de Stokes, l’émission des électrons, l’ionisation des gaz[22] ; et que, d’autre part, si l’on assimile, quant à leurs expressions, l’énergie d’un système de résonateurs et celle d’un corps solide, il devient possible de calculer théoriquement une formule de la chaleur spécifique des solides qui donne très exactement la variation de cette chaleur, surtout quand la température s’abaisse[23]. Ce travail attira l’attention sur un grand nombre de questions intéressant des branches diverses de la physique et les recherches qui furent entreprises à cette occasion permirent avec le temps d’accumuler un matériel d’observation abondant et précieux. Je ne puis naturellement pas donner ici une idée, même approximative, de ce qui a été entrepris dans cet ordre d’idées ; je me bornerai donc à retracer les étapes les plus caractéristiques de ce progrès dans les voies de la connaissance en physique.

Et tout d’abord en ce qui concerne les phénomènes chimiques et thermiques, la théorie sur la chaleur spécifique des solides qui repose sur l’hypothèse d’une vibration unique propre à chaque atome a été élargie par Th. von Kármán et M. Born[24], qui ont considéré le cas, plus approprié à la réalité, de plusieurs vibrations propres de nature différente. Enfin Debye, par une hypothèse hardiment simplificatrice concernant la nature des vibrations propres atomiques, est arrivé à établir une formule relativement simple au moyen de laquelle on peut retrouver, avec une exactitude très grande, les valeurs mesurées par Nernst et ses élèves pour les chaleurs spécifiques aux basses températures[25]. Cette formule aussi, chose remarquable, s’accorde bien avec les propriétés optiques et élastiques des mêmes corps. D’autre part, les quanta d’action ont pu être appliqués aux chaleurs spécifiques des gaz eux-mêmes. Déjà Nernst[26] avait attiré l’attention sur le fait qu’il doit y avoir un quantum d’action applicable à une rotation comme il y en a un pour une vibration et que, par suite, l’énergie de rotation des molécules gazeuses doit s’annuler aux basses températures, tout comme l’énergie oscillatoire. Les mesures d’Eucken sur la chaleur spécifique de l’hydrogène ont confirmé cette conclusion[27], et si les calculs de O. Stern et de P. Ehrenfest n’ont pas donné jusqu’ici de résultats entièrement satisfaisants, cela doit sans doute être attribué à notre connaissance imparfaite du modèle structural de la molécule d’hydrogène. En tout cas, depuis les travaux de Bjerrum, E. v. Bahr, H. Rubens et G. Hettner sur les bandes d’absorption dans l’infrarouge, il est impossible de douter de l’existence de rotations dans les molécules gazeuses, rotations régies par des lois quantiques ; bien qu’une explication complète de ces remarquables spectres de rotation n’ait pas encore été donnée jusqu’ici.

Enfin, dès lors que toutes les propriétés d’affinité d’une substance sont conditionnées par son entropie, il est clair que le calcul quantique de cette entropie donne aussi la clef de tout ce qui concerne l’affinité chimique. La constante de Nernst, entre autres, qui est liée d’une manière caractéristique à la valeur absolue de l’entropie, a pu être retrouvée directement par le calcul grâce aux travaux de O. Sackur[28]. Ces travaux font appel aux mêmes procédés d’analyse combinatoire que j’avais déjà utilisés à propos des résonateurs. De même O. Stern et H. Tetrode, dont les travaux serrent de plus près les résultats des mesures expérimentales, ont pu calculer la différence des entropies à l’état solide et à l’état de vapeur en analysant le processus de vaporisation[29].

Dans tout ce qui précède, il n’a été envisagé jusqu’ici que des cas d’équilibre thermodynamique où les mesures ne fournissent que des moyennes statistiques se rapportant à un grand nombre de particules et à des grands intervalles de temps. La considération du choc des électrons va nous permettre de pénétrer dans le dynamisme élémentaire des phénomènes en question. Dans cet ordre d’idées, J. Franck et G. Hertz, par leur détermination de ce que l’on appelle le potentiel de résonance ou par le calcul de la vitesse critique, c’est-à-dire de la vitesse minimum qu’un électron doit posséder pour provoquer l’émission d’un quantum de lumière dans son choc contre un électron, ont fourni une méthode de mesure du quantum d’action, telle qu’on n’en saurait imaginer de plus directe[30]. Enfin l’excitation du rayonnement caractéristique du spectre de Röntgen peut aussi servir de point de départ à des méthodes de calcul du quantum d’action, qui d’après les essais effectués par D. L. Webster et E. Wagner fournissent des résultats tout à fait concordants avec les précédents.

L’émission d’électrons par incidence de la lumière ordinaire, des rayons de Röntgen ou des rayons y sur la matière est le phénomène inverse de l’émission de quanta lumineux par le choc des électrons ; les quanta d’énergie déterminés par le quantum d’action et par la fréquence vibratoire pourront donc dans ce cas également jouer un rôle caractéristique. À lui seul le fait, si remarquable, que la vitesse des électrons ne dépend pas du tout de l’intensité du rayonnement incident[31], mais seulement de la couleur de la lumière[32] permettait de le soupçonner depuis longtemps, mais ce qui est bien plus remarquable c’est que les lois photoquantiques se sont trouvées vérifiées de point en point comme cela résulte des mesures effectuées par R. A. Millikan, sur la vitesse des électrons émis[33] et aussi des découvertes de E. Warburg sur l’importance des quanta de lumière dans l’amorçage des réactions photochimiques[34].

Les résultats expérimentaux dont je viens de parler, qui se rapportent aux branches les plus diverses de la physique, constituent déjà un faisceau impressionnant de preuves en faveur de l’existence du quantum d’action ; mais c’est à la découverte et au développement de la théorie atomique de Niels Bobr que la théorie des quanta doit son fondement le plus solide. Cette théorie est, en effet, la première qui ait réussi en s’appuyant sur le quantum d’action à trouver une clef permettant de pénétrer dans le domaine mystérieux de la spectroscopie. Depuis la découverte de l’analyse spectrale, toutes les tentatives d’explication des phénomènes qu’elle avait révélée étaient restées vaines. Mais à peine la voie d’accès eut-elle été trouvée avec la théorie de Bohr qu’on assista à une véritable avalanche de connaissances nouvelles dans ce domaine et dans tous les domaines voisins de la physique et de la chimie. La première découverte sensationnelle fut l’explication théorique de la formule empirique de la série de Balmer dans le cas de l’hydrogène et de l’hélium. Cette découverte permettait de ramener la constante universelle de Rydberg à des grandeurs numériques bien connues[35]. Le léger écart des valeurs trouvées pour l’hélium et pour l’hydrogène devenait même une conséquence nécessaire de la théorie, par suite du léger mouvement dont devaient être animés les lourds noyaux atomiques. Enfin le succès obtenu dans le cas de l’hydrogène et de l’hélium ayant naturellement conduit à étudier d’autres séries dans le spectre de la lumière ordinaire et dans le spectre des rayons X, le principe de combinaison de Ritz fut découvert et il se montra d’une fécondité extraordinaire. Or ce principe est aujourd’hui rattaché d’une façon tout à fait claire aux principes fondamentaux de la théorie des quanta.

Si malgré l’existence de telles coïncidences numériques, pourtant singulièrement probantes, quand on pense à la grande précision des mesures spectroscopiques, il se trouvait quelqu’un pour y voir une simple coïncidence fortuite, ses dernières hésitations devraient cependant cesser en voyant Sommerfeld démontrer que l’on peut étendre les lois de la répartition quantique aux systèmes doués de plusieurs degrés de liberté et tirer de cette extension, jointe à la considération de la variabilité de la masse inerte telle qu’elle résulte de la théorie de la relativité, cette formule véritablement merveilleuse, grâce à laquelle il n’y a plus de mystère dans les particularités les plus fines des spectres de l’hydrogène et de l’hélium[36]. Cette formule a été confirmée par les mesures les plus précises qui soient possibles à l’heure actuelle, celles de F. Paschen[37]. On peut dire sans exagération qu’il y a là un événement scientifique à mettre en parallèle avec la découverte de la planète Neptune. (L’astronome Leverrier, on le sait, en avait découvert non seulement l’existence, mais encore il avait calculé les éléments de sa trajectoire avant qu’aucun œil humain ne l’eût aperçue.) Les réussites ne s’arrêtèrent pas là, en progressant dans la même voie Epstein arriva à donner une explication pleinement satisfaisante de l’effet Stark (dédoublement électrique des raies spectrales[38]). Debye donna aussi une explication simple de la série K du spectre de Röntgen qui avait été étudiée par Manne Siegbahn[39] et je passe sous silence un grand nombre d’autres travaux qui ont toujours eu pour résultat d’élucider plus ou moins les mystères de la structure atomique.

Quelle conclusion, le juge impartial qui ne veut pas se borner à un simple enregistrement des faits, doit-il tirer d’un pareil ensemble de résultats dont l’exposé complet aurait nécessité la citation d’un grand nombre de noms devenus aujourd’hui célèbres ? Je n’en vois pas d’autre que celle-ci ; le quantum d’action que l’on voit reparaître toujours avec la même valeur (6,54.10−27 ergs-seconde[40]) à propos des phénomènes les plus divers, est une grandeur qui a conquis pleinement le droit de cité parmi les constantes universelles et il est assez curieux de constater qu’au moment où l’idée de relativité se répand et connaît un succès vraiment triomphal, la nature révèle l’existence d’un absolu là où l’on s’y serait le moins attendu. Cet absolu est une unité de mesure effectivement invariable au moyen de laquelle on peut exprimer par un nombre, sans faire appel à aucune convention, la grandeur de l’action contenue dans un élément spatio-temporel donné ; ce qui donne à cette grandeur un caractère dont elle était complètement dépourvue auparavant.

L’introduction du quantum d’action en physique ne doit pas, il est vrai, être prise pour une véritable théorie des quanta. On peut même soutenir que nous sommes aussi éloignés de l’établissement de cette théorie qu’on l’était de posséder la théorie optique de Maxwell à l’époque où Römer découvrait la non-instantanéité de la propagation de la lumière et en mesurait la vitesse. J’ai fait tout à l’heure allusion aux difficultés soulevées par l’introduction du quantum d’action dans la théorie classique ; avec les années ces difficultés se sont plutôt accrues qu’amoindries. Dans son élan impétueux, le flot de la recherche scientifique a certes, entre-temps, rencontré quelques-unes de ces difficultés et les a inscrites à son ordre du jour ; mais il en reste nombre d’autres qui ont été laissées de côté. L’existence de ces lacunes met tout esprit soucieux de systématique dans un état d’insatisfaction pénible.

Dans la théorie de Bohr il y a, en effet, tout un ensemble d’hypothèses qui sont à la base de toutes les lois d’action ; or ces hypothèses sont telles qu’aucun physicien n’eût hésité à les repousser, il y a seulement une génération. Qu’il y ait dans l’atome certaines trajectoires privilégiées déterminables par des lois quantiques, cela peut paraître à la rigueur acceptable, on voit déjà moins bien comment les électrons qui circulent sur ces trajectoires n’émettent aucune énergie. Mais que la fréquence, si parfaitement délimitée d’un quantum de lumière, puisse être différente de la fréquence de l’électron émetteur, voilà ce qui ne peut manquer de paraître au premier abord singulièrement hardi aux yeux de tout physicien imbu des théories de l’école classique, et presque incompatible avec tout ce qui se peut imaginer.

Mais les chiffres décident en dernier ressort et il en résulte que les rôles se sont peu à peu renversés. Dans les débuts le problème paraissait se réduire à introduire, plus ou moins péniblement, un élément étranger dans un édifice dont la solidité était généralement reconnue comme indiscutable. Aujourd’hui c’est le nouveau venu qui a pris l’offensive après s’être introduit dans la place et il n’est pas douteux qu’il ne parvienne à disloquer la vieille construction. La seule question est de savoir par où commencera cette destruction et jusqu’où elle ira.

S’il est permis de se livrer, dès maintenant, à des conjectures sur l’issue de la bataille acharnée qui se poursuit actuellement, on peut dire qu’il est à prévoir que les grands principes de la thermodynamique, non seulement ne perdront pas leur position centrale dans la théorie des quanta, mais qu’ils seront au contraire généralisés. L’hypothèse adiabatique de P. Ehrenfest[41] joue vis-à-vis de la théorie des quanta un rôle analogue au rôle des expériences purement conceptuelles de la thermodynamique classique et, de même que pour arriver à mesurer l’entropie, R. Clausius a formulé l’hypothèse de la possibilité pour deux états quelconque d’être reliés l’un à l’autre par une série de processus réversibles, de même aussi les idées de Bohr nous fournissent un moyen analogue de pénétrer dans le monde mystérieux dont il nous a donné la clef.

Une des questions dont l’élucidation apporterait, à mon avis, beaucoup de clarté à l’ensemble de la théorie est la suivante : que devient l’énergie d’un quantum quand l’émission est terminée ? Est-ce que l’énergie se propage ensuite dans toutes les directions, au sens de la théorie ondulatoire de Huyghens en occupant un volume de plus en plus grand ? Ou bien est-ce qu’elle est projetée dans une seule direction comme le voudrait la théorie de l’émanation de Newton ? Dans le premier cas, jamais un quantum ne serait plus en état de concentrer son énergie dans un espace suffisamment petit pour pouvoir détacher un électron de l’atome auquel il appartient. Dans le second cas, il faudrait sacrifier ce qui a le plus contribué au triomphe de la théorie de Maxwell : la continuité entre le champ statique et le champ dynamique, continuité qui, seule, a permis d’expliquer les phénomènes d’interférence jusque dans leurs moindres détails. Comme on le voit, chacune des deux alternatives entraîne des conséquences aussi peu satisfaisantes que possible pour le théoricien de la physique.

Mais, dans cette question comme dans toutes les autres, il n’est pas douteux que la science finira par trouver la solution et que l’on cessera d’être prisonnier d’un dilemme redoutable. Quand ce moment sera arrivé, ce qui ne nous paraît pas satisfaisant aujourd’hui, sera regardé comme s’harmonisant d’une façon particulièrement heureuse à l’ensemble parce qu’on aura su trouver un point de vue plus élevé permettant de le mieux embrasser. En attendant que ce but soit atteint, le problème du quantum d’action ne cessera de stimuler et de féconder la recherche scientifique. L’importance qu’il aura eue pour l’approfondissement de notre savoir en physique sera mesurée à la grandeur des difficultés qui auront dû être surmontées pour arriver à la solution.


ANNOTATIONS

Les références bibliographiques qui suivent n’ont aucunement la prétention d’être complètes, elles ne pourront servir que pour une première orientation.

  1. G. Kirchhoff : Sur le rapport existant entre le pouvoir émissif et le pouvoir absorbant des corps pour la chaleur et la lumière. Recueil de ses œuvres, p. 597 (p. 17). Leipzig, J. A. Barth (1882).
  2. H. Hertz : Ann. d. Physik, vol. 36, p. 1 (1889).
  3. Sitz. Ber. d. Preuss. Akad. d. Wiss. du 20 févr. 1896. Ann. d. Physik, vol. 60, p. 577 (1897).
  4. Sitz. Ber. d. Preuss. Akad. d. Wiss. du 18 mai 1899, p. 455.
  5. L. Boltzmann : Sitz. Ber. d. Preuss. Akad. d. Wiss. du 5 mars 1898, p. 182.
  6. W. Wien : Ann. d. Physik, vol. 58, p. 662 (1896).
  7. D’après la loi de répartition de Wien la relation entre l’énergie d’un résonateur est donnée par la formule
    .

    Si désigne l’entropie du résonateur, on a :

    .

    Il en résulte que la grandeur du texte a pour valeur

    .

  8. D’après la loi du déplacement de Wien l’énergie d’un résonateur est liée à sa fréquence propre par la formule
    .

  9. Ann. d. Physik, vol. 1, p. 719 (1900).
  10. O. Lummer et E. Pringsheim : Verhandl. d. Deutsch. Physik. Gesell., vol. 2, p. 163 (1900).
  11. H. Rubens et F. Kurlbaum : Sitz. Ber. d. Preuss. Akad. d. Wiss. du 25 octobre 1900, p. 929.
  12. Pour les grandes valeurs de on a, d’après H. Rubens et F. Kurlbaum et, par suite, en opérant comme au no 7 :
    .

  13. Si l’on pose alors :
    .

    il en résulte par intégration :

    d’où l’on tire la formule de rayonnement :

    .

  14. Cf. W. Nernst et Th. Wulf : Verh. d. Deutsch. Physik. Ges., vol. 21, p. 224 (1919).
  15. La valeur absolue de l’énergie est en effet égale au produit de la masse inerte par le carré de la vitesse de la lumière.
  16. Verh. d. Deutsch. Physik. Ges. du 14 décembre 1900, p. 237.
  17. La formule générale qui donne l’énergie moyenne d’une molécule de gaz est, si représente la première constante du rayonnement
    .

    Si l’on pose on a . Par contre dans l’échelle conventionnelle des températures (absolues selon Kelvin), est défini de telle façon que ta différence de température entre l’eau bouillante et la glace fondante est posée égale à 100.

  18. Cf. par ex. L. Boltzmann : « En souvenir de Joseph Lohschmidt ». Ouvrages de vulgarisation, p. 245, 1905.
  19. E. Rutherford et H. Geiger, Proc. Roy. Soc. A, vol. 81, p. 62 (1908).
  20. Cf. R. A. Millikan : Phys. Ztschr., vol. 14, p. 796 (1913).
  21. Le calcul de la probabilité d’un état physique repose, en effet, sur le dénombrement du nombre fini des cas particuliers également probables, par lesquels l’état considéré est réalisé et, pour la délimitation séparative de ces cas particuliers, il faut adopter un point de vue déterminé en ce qui concerne la notion de chaque cas particulier.
  22. A. Einstein : Ann. d. Physik, vol. 17, p. 132 (1905).
  23. A. Einstein : Ann. d. Physik, vol. 22, p. 180 (1907).
  24. M. Born et Th. v. Kármán : Phys. Ztschr., vol. 14, p. 15 (1913).
  25. P. Debye : Ann. d. Physik, vol. 39, p. 789 (1912).
  26. W. Nernst : Phys. Ztschr., vol. 13, p. 1064 (1912).
  27. A. Eucken : Sitz. Ber. d. Preuss. Akad. d. Wiss., p. 141 (1912).
  28. O. Sackur : Ann. d. Physik, vol. 36, p. 958 (1911).
  29. O. Stern : Phys. Ztschr., vol. 4, p. 629 (1013) ; Tetrode : Ber. d. Akad. d. Wiss. v. Amsterdam, 27 février et 27 mars 1915.
  30. J. Franck et G. Hertz : Verhandl. d. Deutsch. Physik. Ges., vol. 16, p. 512 (1914).
  31. Ph. Lenard : Ann. d. Physik, vol. 8, p. 149 (1902).
  32. R. Ladenburg : Verh. d. Deutsch. Physik. Ges., vol. 9, p. 504 (1907).
  33. R. A. Millikan : Phys. Ztschr., vol. 17, p. 217 (1916).
  34. Warburg : Sur l’échange d’énergie dans les réactions photochimiques des gaz. Sitz. Ber. d. Preuss. Akad. d. Wiss. depuis 1911.
  35. M. Born : Phil. Mag., vol. 30, p. 394 (1915).
  36. A. Sommerfeld : Ann. d. Physik, vol. 51, pp. 1 et 125 (1916).
  37. F. Paschen : Ann. d. Physik, vol. 50, p. 901 (1916).
  38. P. Epstein : Ann. d. Physik, vol. 50, p. 480 (1916).
  39. P. Debye : Phys. Ztschr., vol. 18, p. 276 (1918).
  40. E. Wagner : Ann. d. Physik, vol. 67 (1918) ; R. Ladenburg : Jahrb. d. Radioaktivität u. Eleletronik, vol. 17, p. 144 (1920).
  41. P. Ehrenfest : Ann. d. Physik, vol. 51, p. 327 (1916).