Introduction à la vie dévote (Boulenger)/Cinquième partie/07

La bibliothèque libre.
Texte établi par Fernand Boulenger,  (p. 345-346).


CHAPITRE VII

EXAMEN SUR LES AFFECTIONS DE NOTRE AME


J’ai étendu ainsi au long ces points, en l’examen desquels gît la connaissance de l’avancement spirituel qu’on i fait ; car quant à l’examen des péchés, cela est pour es confessions de ceux qui ne pensent point à s’avancer.

Or il ne faut néanmoins pas se travailler sur un chacun de ces articles sinon tout doucement, considérant en quel état notre cœur a été touchant iceux dès notre résolution, et quelles fautes notables nous y avons commises. Mais pour abréger le tout, il faut réduire l’examen à la recherche de nos passions ; et s’il nous fâche de considérer si fort par le menu comme il a été dit, nous pouvons ainsi nous examiner, quels nous avons été et comme nous nous sommes comportés :

En notre amour envers Dieu, envers le prochain, envers nous-mêmes.

En notre haine envers le péché qui se trouve en nous, envers le péché qui se trouve ès autres ; car nous devons désirer l’exterminement de l’un et de l’autre.

En nos désirs, touchant les biens, touchant les plaisirs, touchant les honneurs.

En la crainte des dangers de pécher et des pertes des biens de ce monde : on craint trop l’un, et trop peu l’autre.

En espérance, trop mise peut-être au monde et en la créature, et trop peu mise en Dieu et ès choses éternelles.

En la tristesse, si elle est trop excessive, pour choses vaines.

En la joie, si elle est excessive et pour choses indignes.

Quelles affections enfin tiennent notre cœur empêché ? quelles passions le possèdent ? en quoi s’est-il principalement détraqué ? Car par les passions de l’âme, on reconnaît son état en les tâtant l’une après l’autre : d’autant que, comme un joueur de luth pinçant toutes les cordes, celles qu’il trouve dissonantes il les accorde, ou les tirant ou les lâchant, ainsi, après avoir tâté l’amour, la haine, le désir, la crainte, l’espérance, la tristesse et la joie de notre âme, si nous les trouvons mal accordantes à l’air que nous voulons sonner, qui est la gloire de Dieu, nous pourrons les accorder, moyennant sa grâce et le conseil de notre père spirituel.