JORF, Débats parlementaires, Sénat — 10 juillet 1940

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JORF, Débats parlementaires, Sénat — 10 juillet 1940
ASSEMBLÉE NATIONALE
Séance du Mercredi 10 Juillet 1940.




SOMMAIRE




1. — Constitution de l'Assemblée nationale.
2. — Excuses.
3. — Incident : MM. Édouard Herriot, le président, Pierre Laval, vice-président du conseil.
4. — Règlement de l'Assemblée nationale : MM. Fernand Bouisson, le président, Émile Mireaux, Pierre Laval, vice-président du conseil ; Jean Boivin-Champeaux.
5. — Tirage au sort des bureaux.
6. — Dépôt, par M. Pierre Laval, vice-président du conseil, au nom de M. le maréchal de France Ph. Pétain, président du conseil, d'un projet de loi constitutionnelle.
Déclaration de l'urgence.
Observations de MM. de Courtois, François Piétri, Cayrel, Jean Taurines, Pierre Laval, vice-président du conseil.
Renvoi du projet de loi à une commission spéciale.
Suspension et reprise de la séance.
Dépôt et lecture, par M. Bolvin-Champeaux, au nom de la commission spéciale, d'un rapport sur le projet de loi constitutionnelle.
Suppression de la discussion générale.
Suppression des explications de vote.
Adoption, au scrutin, après pointage, de l'article unique du projet de loi.
7. — Motion d'ordre.
Clôture de la session.
8. — Adoption du procès-verbal.




PRÉSIDENCE DE M. JULES JEANNENEY

La séance est ouverte à quatorze heures.

M. le président est assisté de MM. Bertrand Carrère, Garrigou, Achille Naudin, Louis Gros, Maurice Baufle, secrétaires.


— 1 —

CONSTITUTION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

M. le président. Messieurs les membres de l'Assemblée nationale, la séance est ouverte.

Vu les alinéas 1er et 2 de l'article 8 de la loi constitutionnelle du 25 février 1875, ainsi conçus :

« Les Chambres auront le droit, par délibérations séparées, prises dans chacune à la majorité absolue des voix, soit spontanément, soit sur la demande du Président de la République, de déclarer qu'il y a lieu de réviser les lois constitutionnelles.

« Après que chacune des deux Chambres aura pris cette résolution, elles se réuniront en Assemblée nationale pour précéder à la révision » ;

Vu la résolution de la Chambre des députés en date du 9 juillet 1940 et celle du Sénat en date du même jour, déclarant qu'il y a lieu de réviser les lois constitutionnelles ;

Vu l'alinéa 2 de l'article 11 de la loi constitutionnelle du 16 juillet 1875, ainsi conçu :

« Lorsque les deux Chambres se réunissent en Assemblée nationale, leur bureau se compose des présidents, vice-présidents et secrétaires du Sénat »;

Je déclare l'Assemblée nationale constituée.


— 2 —

EXCUSES

M. le président. MM. Jacquinot, Parayre, Tony Révillon, Auguste Mounié, Hamelin, le général Stuhi, le général Hirschauer, Alexandre Duval, Jean Philip, Henry Bérenger, Mellenne et Paul Reynaud s'excusent de ne pouvoir assister à la séance.


— 3 —

INCIDENT

M. le président. D'autre part, j'ai reçu de MM. Paul Bastid, Brout, Campinchi, Catalan, Delattre, Delbos, Denais, André Dupont, Dupré, Galandou-Diouf, de la Grondière, Grumbach, Mandel, André Le Troquer, Lévy-Alphandéry, Lazurick, Perfetti, Jammy Schmidt, J.-M. Thomas, Tony Révillon, un télégramme daté : Alger, 9 juillet, douze heures trente, ainsi conçu :

« Vous adressons protestation suivante que vous prions de bien vouloir lire séance publique. Venus Afrique du Nord avec services questure et commandant militaire du Palais-Bourbon sur décisions présidences Sénat et Chambre en accord avec Gouvernement et pour le rejoindre. Essayons vainement depuis 24 juin rentrer pour collaborer relèvement de la patrie. (Interruptions.) En sommes d'autant plus surpris que Gouvernement a fait savoir par presse et radio que toutes mesures étaient prises pour faciliter retour parlementaires. Or, tandis que collègues Algérie peuvent rentrer, gouverneur général nous fait savoir qu'aucune instruction n'est donnée pour notre retour. Nous élevons contre obstacle apportée exercice notre mandat et exprimons regrets ne pouvoir participer aux débats et aux scrutins. Vous prions constituer nos collègues juges de la situation qui nous est ainsi faite. Avec tous nos sentiments distingués et respectueusement dévoués. »

M. Édouard Herriot. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Édouard Herriot.

M. Édouard Herriot. (Applaudissements sur divers bancs.) Je demande à l'Assemblée de bien vouloir m'écouter pendant quelques instants sans passion. Je voudrais l'empêcher de commettre une injustice. Je manquerais de courage et personne ne m'en estimerait si je ne venais apporter ici aux collègues dont on a donné les noms le témoignage auquel ils ont droit.

J'atteste sur l'honneur et je suis prêt à démontrer par les pièces les plus précises, par des documents incontestables, que nos collègues sont partis sur des instructions régulières du Gouvernement,...

M. Georges Scapini. Je demande la parole.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. Je la demande également.

M. Édouard Herriot. ...instructions qui leur ont été par moi transmises et dont je garde le texte.

M. Georges Cousin. Mais nous, nous n'avons pas accepté.

M. Édouard Herriot. Ils ont été munis de bons d'embarquement réguliers. Le bon sens, au reste, suffit à démontrer que, s'ils se sont embarqués sur un paquebot de l'importance du Massilia, c'est que ce paquebot avait été frété et mis à leur disposition par le Gouvernement.

J'ai fait toutes les démarches possibles pour leur permettre de rejoindre. Je n'y ai pas réussi. Je m'en excuse auprès d'eux, mais je suis, ou j'ai été, président de la Chambre des députés et, jusqu'au bout, quel qu'il soit, je remplirai mon devoir, préférant à un silence habile des paroles de droiture. (Applaudissements sur divers bancs.)

M. le président. Je tiens à confirmer entièrement les paroles de M. le président de la Chambre des députés en ce qui concerne les conditions d'embarquement du seul sénateur présentement en Algérie, mon collègue M. Tony Révillon.

La parole est à M. le vice-président du Conseil.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. Je regrette que, dans le débat d'aujourd'hui, cet incident ait été soulevé.

Je n'étais pas membre du Gouvernement au moment où les faits se sont passés et où le départ a eu lieu ; mais j'ai le souvenir précis que, s'il est exact que des membres du Gouvernement et le Gouvernement avaient envisagé le transfert du siège du Gouvernement de Bordeaux à Perpignan, une parole de sagesse et de noblesse — et cela ne vous surprend pas — avait été prononcée par le maréchal Pétain, qui avait dit : « Quoi qu'il arrive, moi, je resterai au milieu de mes concitoyens. » (Applaudissements.)

J'ai eu moi-même l'occasion de dire que ce n'est pas en quittant la France qu'on peut la servir. (Applaudissements.)

Mais, cela étant rappelé, il est vrai qu'un bateau ne peut appareiller sans un ordre du Gouvernement.

Sur le fond, je ne conteste aucune des paroles, soit de M. le président de la Chambre, soit de M. le président du Sénat.

Comme membre du Gouvernement actuel, j'indique que, lorsque les parlementaires ont demandé à rentrer, la commission de Wiesbaden, en vertu même des clauses de l'armistice, a été saisie d'une demande de moyen de transport. Je ne vous apprends rien, à vous qui connaissez ces clauses, en disant que la France est obligée d'accomplir cette formalité.

Aucune réponse n'est présentement parvenue. En droit parlementaire, l'attitude du Gouvernement est donc correcte.

Je vous demande, messieurs, de ne pas passionner ce débat (Très bien ! très bien !) de ne rien ajouter. La tâche que nous avons à remplir est trop importante ; les décisions que nous avons à prendre sont trop graves, puisqu'il s'agit de l'avenir du pays. Ce n'est point de mes lèvres que tomberont des paroles qui pourraient provoquer en un moment aussi douloureux pour la France des passions qui troubleraient notre Assemblée. (Applaudissements.)

M. le président. Déférant au désir que M. le vice-président du conseil vient d'exprimer, je propose à l'Assemblée de clore l'incident en agréant les regrets de nos collègues et en leur donnant acte de leur protestation. (Assentiment.)

L'incident est clos.


— 4 —

ADOPTION DU RÈGLEMENT

M. le président. Pour la procédure de ses délibérations et la discipline de la séance, je propose au congrès d'adopter le règlement de l'Assemblée nationale précédente.

M. Fernand Bouisson. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Fernand Bouisson.

M. Fernand Bouisson. Messieurs, je crois qu'après le débat de la séance de ce matin, l'Assemblée sera d'avis d'appliquer une disposition règlementaire que nous avons adoptée à la Chambre des députés et qui permet d'éviter les longueurs d'un débat.

L'article 50 bis du règlement de la Chambre dit qu'on doit mettre aux voix, sur la demande du Gouvernement, d'abord les projets du Gouvernement.

Je demande donc, pour éviter un débat très long et inutile, puisque chacun est fixé, de vouloir bien appliquer à l'Assemblée nationale l'article 50 bis du règlement de la Chambre indiquant que le projet du Gouvernement doit être mis d'abord aux voix. (Applaudissements sur divers bancs.)

M. le président. Je donne connaissance à l'Assemblée de l'article 50 bis du règlement de la Chambre des députés.

« Avant l'examen des contre-projets ou avant l'examen de l'article premier, le Gouvernement peut demander la prise en considération en faveur de son texte régulièrement déposé. Il peut, au cours de la discussion, faire la même proposition pour un ou pour plusieurs articles.

« Cette demande a la priorité sur les contre-projets ou sur les amendements.

« Le débat sur cette demande ne pourra être limité ni pour le nombre des orateurs, ni pour la durée du temps de parole, mais la clôture pourra toujours être prononcée. Sur la clôture, la parole ne peut être accordée qu'à un seul orateur, qui ne pourra la garder pendant plus de cinq minutes. » (Très bien ! très bien !)

La parole est à M. le vice-président du conseil.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. Le Gouvernement demande l'application à l'Assemblée nationale du texte règlementaire dont M. le président vient de donner lecture.

Il demande, en outre, conformément à ce texte, la prise en considération du projet de loi constitutionnelle dont l'Assemblée nationale est saisie.

Cela ne signifie pas que les membres de l'Assemblée qui ont déposé un contre-projet n'auront pas le droit de s'expliquer librement à la tribune.

M. le président. Le Gouvernement donne son adhésion à la proposition de M. Fernand Bouisson.

Il n'y a pas d'opposition ?...

La proposition est adoptée.

Le règlement ainsi modifié est adopté.

Je rappelle à MM. les membres de l'Assemblée nationale que les bulletins de vote du Sénat et de la Chambre des députés ne sont plus valables et que des bulletins de vote spéciaux ont été mis en distribution depuis ce matin dans la salle des conférences.

Je dois aussi rappeler à l'Assemblée les termes de l'article 8 de la loi constitutionnelle du 25 février 1875 :

« Les délibérations portant révision des lois constitutionnelles, en tout ou en partie, devront être prises à la majorité absolue des membres composant l'Assemblée nationale. »

Ces termes : « ...membres composant l'Assemblée nationale » ont toujours été entendus en 1879, 1884 et 1926 de la façon que voici :

Par « membres de l'Assemblée nationale » on a entendu le nombre légal des membres composant l'Assemblée, c'est-à-dire le nombre des sièges des deux Assemblées.

Pratiquement, je puis indiquer, dès à présent, que la Chambre des députés comportant 618 membres, le Sénat 314, au total 932, la majorité constitutionnelle serait de 467. (Vives interruptions.)

Voix nombreuses. Et les déchus ?

M. le président. Mon devoir est de demander à l'Assemblée si elle admet et veut maintenir cette interprétation.

Plusieurs voix. Il ne faut pas compter les communistes déchus.

M. le président. La parole est à M. Mireaux.

M. Émile Mireaux. Mes chers collègues, l'Assemblée nationale est toujours, je crois, maîtresse de son règlement. Je ne rencontrerai pas sur ce point d'opposition.

M. le président. Il ne s'agit pas en ce moment, mon cher collègue, du règlement de l'Assemblée, mais de l'interprétation de l'article 8 de la loi constitutionnelle.

M. Émile Mireaux. Il s'agit, en effet, d'interpréter l'article 8 de la loi constitutionnelle. Les Assemblées nationales précédentes ont donné leur interprétation de cette loi. Dans ces conditions, la présente Assemblée nationale a le droit, elle aussi, d'interpréter comme elle l'entend cet article 8 de la loi constitutionnelle de 1875. (Vifs applaudissements.)

D'abord, l'Assemblée nationale n'est-elle pas, hélas ! réunie dans des conditions tout à fait exceptionnelles ?

D'autre part, un certain nombre de membres de la Chambre des députés et un membre du Sénat sont déchus par un texte législatif. (Très bien ! très bien !)

Qui pourrait admettre que ces membres que nous avons condamnés pourraient intervenir, par prétérition, par leur seule absence par suite de leur indignité, dans nos délibérations ? (Applaudissements.)

De même, par suite de circonstances que je n'ai pas à juger, un certain nombre de nos collègues sont absents du sol métropolitain. Je n'insiste pas.

Enfin, une grande partie du territoire, héla ! est occupée. Si la grande majorité de nos collègues a pu venir, certains d'entre eux, par suite de circonstances malheureuses, exceptionnelles aussi, ne peuvent être présents parmi nous. Alors qu'ils sont prisonniers de nos ennemis, il faudrait, malgré leur absence, les considérer comme présents à nos délibérations ? Je crois, mes chers collègues, qu'aucun de vous ne l'admettra. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. le vice-président du conseil.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. Messieurs, j'ignore si un membre du Gouvernement a le droit de prendre part à une discussion qui intéresse le règlement...

M. le président. Il ne s'agit pas du règlement.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. ...qui intéresse l'interprétation d'un article de la loi constitutionnelle. Mais ce que je veux dire pour appuyer la proposition faite par M. Mireaux sur ce point, c'est que le Gouvernement n'a rien négligé pour que tous les parlementaires soient informés de la date des séances de la Chambre et du Sénat. Pour ce, il a utilisé tous les moyens mis à sa disposition. Ainsi, alors que nous étions sans rapports téléphoniques avec les préfets des départements occupés, alors que nos moyens de communication étaient difficiles avec les départements non occupés, par des informations de presse et grâce à l'obligeance du Gouvernement espagnol qui a bien voulu les faire radiodiffuser en français, par les postes de T. S. F. de Suisse qui les ont radiodiffusées également en français, puis, par la radio française lorsque l'usage nous en a été restitué, nous avons, chaque jour et plusieurs fois par jour, fait répéter la convocation pour que nul n'en ignore.

Nous avons fait mieux : nous avons fait informer le Gouvernement allemand, par la commission de Wiesbaden, que l'Assemblée nationale se réunissait. Nous avons demandé que les représentants de la nation se trouvant dans les départements occupés, non seulement fussent informés qu'ils devaient se rendre à Vichy, mais voient leur déplacement facilité.

Messieurs, interpréter autrement la loi constitutionnelle dans le moment présent serait un peu puéril. Vous imaginez-vous que les constituants de 1875 aient pu supposer qu'un jour nous aurions à nous réunir alors que les deux tiers de la France seraient occupés par l'armée allemande ?

Au surplus, de quoi s'agit-il ?

Le quorum est atteint ; il est même largement dépassé.

Il s'agit donc simplement du calcul de la majorité. N'estimez-vous pas, dans l'intérêt du pays, qu'il vaut mieux montrer à la France et au monde que la majorité, que le Gouvernement va recueillir tout à l'heure, est importante et digne de l'objet de vos débats ? (Applaudissements.)

M. le président. En conclusion de ses observations, notre collègue, M. Mireaux, demande, en réalité, à l'Assemblée nationale, de modifier l'article 8 de la loi constitutionnelle qui, je le rappelle, stipule une majorité constitutionnelle correspondant à la majorité absolue des membres composant l'Assemblée nationale.

M. Mireaux demande, en effet, la substitution des mots « ...la majorité absolue des membres composant l'Assemblée nationale... », de ceux-ci « ...la majorité absolue des membres, actuellement en exercice, de l'Assemblée nationale... »

À cet égard, je puis donner une indication à l'Assemblée nationale : le nombre des députés actuellement en exercice est de 546 et celui des sénateurs de 304, compte tenu des décès, démissions, exclusions, etc., soit au total 850 membres.

La majorité constitutionnelle de l'Assemblée nationale serait donc de 426.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. Ce sont des présents dont nous parlons.

Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. le vice-président du conseil.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. Messieurs, il ne faut pas qu'il y ait de malentendu. Or, il semble bien que je me suis mal exprimé ou que j'ai été mal compris.

Ce que veut M. Mireaux, ce que demande le Gouvernement, c'est que l'Assemblée nationale soit considérée comme se composant des membres présents... (Applaudissements.)

M. le président. Ce n'est pas ce que M. Mireaux avait indiqué tout à l'heure.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. ...et que la majorité soit calculée d'après le nombre des membres présents. C'est sur ce point que je demande à l'Assemblée de se prononcer. (Nouveaux applaudissements.)

M. Émile Mireaux. Il y a eu un malentendu. Je m'en excuse. La faute en est, non pas à M. le président, mais à moi-même.

Je me rallie à la proposition de M. le vice-président Laval.

M. le président. La parole est à M. Boivin-Champeaux.

M. Boivin-Champeaux. Dans une question aussi importante, il ne faut pas qu'il existe de confusion . Or, on paraît confondre deux questions absolument différentes.

Je crois avoir entendu dire, tout à l'heure, que l'interprétation de l'article 8 de la loi constitutionnelle devait être telle que la majorité des membres présents serait nécessaire. Si vous adopter cette interprétation, il faudra procéder à un pointage des membres présents, il faut un scrutin. Est-ce cela que vous voulez ?

Je vous propose d'interpréter l'article 8 de la loi constitutionnelle en décidant que les délibérations pourront être prises à la majorité absolue des suffrages exprimés. Dans les circonstances présentes, comme vient de l'indiquer M. Mireaux, cette interprétation serait la seule raisonnable.

M. Pierre Laval nous disait, il y a un instant : « Les constituants de 1875 ne pouvaient pas imaginer que nous nous réunirions dans des circonstances aussi tragiques ».

Je me permets donc de demander à l'Assemblée nationale de bien vouloir interpréter l'article 8 en ce sens : l'Assemblée nationale décide que la présente délibération sera prise à la majorité absolue des voix. (Applaudissements.)

M. le président. M. Boivin-Champeaux propose à l'Assemblée d'admettre, comme majorité constitutionnelle, la majorité des suffrages exprimés.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. Nous sommes d'accord.

M. le président. Le Gouvernement donne, eu égard aux circonstances, son adhésion à cette formule simple d'interprétation de la loi constitutionnelle.

Personne ne demande la parole ?...

Je consulte donc l'Assemblée nationale sur la proposition de M. Boivin-Champeaux, acceptée par M. Mireaux et le Gouvernement, tendant à ramener la majorité constitutionnelle à la majorité absolue des suffrages exprimés.

(Cette proposition est adoptée.)


— 5 —

TIRAGE AU SORT DES BUREAUX

M. le président. Afin d'éviter une longue suspension de séance, le tirage au sort des bureaux a été effectué par les soins du bureau de l'Assemblée nationale.

Il va être procédé à l'affichage de ce tirage au sort.


— 6 —

DÉPÔT DU PROJET DE LOI CONSTITUTIONNELLE

M. le président. La parole est à M. Pierre Laval, vice-président du conseil, pour le dépôt du projet de loi constitutionnelle.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de l'Assemblée nationale le projet de loi constitutionnelle suivant :

Article unique.

« L'Assemblée nationale donne tous pouvoirs au Gouvernement de la République, sous l'autorité et la signature du maréchal Pétain, à l'effet de promulguer par un ou plusieurs actes une nouvelle constitution de l'État français.

« Cette constitution devra garantir les droits du travail, de la famille et de la patrie.

« Elle sera ratifiée par la nation et appliquée par les Assemblées qu'elle aura créées. »

Je fais remarquer à l'Assemblée que le texte que je viens de lui lire est différent du texte imprimé qui lui a été distribué. Cette modification est le résultat d'une demande qui a été formulée au Gouvernement et qui a fait l'objet du débat de notre réunion de ce jour.

Voix nombreuses. Aux voix !

M. le président. Je dois d'abord consulter l'Assemblée sur l'urgence.

Il n'y a pas d'opposition ?...

L'urgence est déclarée.

Aux termes du règlement, le projet de loi devrait être renvoyé aux bureaux.

M. de Courtois. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. de Courtois.

M. de Courtois. Messieurs, ainsi qu'il résulte d'un précédent de l'Assemblée nationale de 1926, et dans le but de gagner du temps et de simplifier, il conviendrait, je pense, de désigner, pour examiner le projet de loi constitutionnelle qui vient d'être déposé, une commission spéciale composée de trente membres. (Mouvements divers.)

Sur de nombreux bancs. Aux voix !

M. Piétri. Ne vous semble-t-il pas, messieurs, que nous perdrions un temps précieux à nommer une commission spéciale de trente membres et qu'il serait infiniment plus expédient de renvoyer le projet de loi devant la commission de la législation civile du Sénat et la commission du suffrage universel de la Chambre des députés réunies ? (Très bien ! très bien !)

M. de Courtois. Mon cher collègue, vous êtes allé au-devant de ma pensée. Je voulais demander à l'Assemblée de désigner une commission de trente membres, lesquels seraient choisis, vingt parmi les membres de la commission du suffrage universel de la Chambre des députés, et dix parmi les membres de la commission de la législation civile du Sénat.

Si vous en décidez ainsi, les deux commissions pourraient se réunir dès maintenant, afin de désigner les membres de la commission constitutionnelle.

M. Antoine Cayrel. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Cayrel.

M. Antoine Cayrel. Messieurs, je crois que, dans les circonstances que nous vivons, notre Assemblée ne doit pas s’embarrasser d'un formalisme périmé. (Applaudissements.) Et autant, après consultation avec M. le président de la commission de la législation civile du Sénat, avant notre réunion, j'étais prêt, au nom de la commission du suffrage universel, à accepter la proposition qu'il me faisait, autant je pense qu'il est utile que notre Assemblée délibère rapidement ; et je suis certain que j'interprète la pensée de mes collègues, membres de la commission que je préside, en vous demandant de renoncer à ces prérogatives inutiles et puériles (Applaudissements) et en priant l'Assemblée nationale de se prononcer immédiatement. (Nouveaux applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. le vice-président du conseil.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. Je remercie mon ami M. Cayrel de son intention, mais je pense que nous pourrions et simplement adopter la proposition qui a été faite par M. Piétri (Très bien ! très bien !) et soutenue par notre ami M. de Courtois, et décider, sans plus attendre, que la commission spéciale chargée d'examiner et de rapporter le projet, comprendra les membres de la commission de législation civile du Sénat et ceux de la commission du suffrage universel de la Chambre.

Pourquoi ?

Parce que l'une et l'autre de ces commissions, devant l'une et l'autre Assemblée, ont déjà examiné notre projet, et qu'il leur suffira de désigner, d'un commun accord, un rapporteur unique.

Je demande à l'Assemblée d'adopter cette procédure qui permettra de gagner du temps. (Applaudissements.)

M. le président. Aux termes de la proposition que vous venez d'entendre, le projet de loi constitutionnelle serait renvoyé à une commission composée de la commission du suffrage universel de la Chambre des députés et de la commission de législation du Sénat.

Monsieur de Courtois, vous ralliez-vous à cette proposition ?

M. de Courtois. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix cette proposition.

(La proposition, mise aux voix, est adoptée.)

M. le président. J'invite, en conséquence, les deux commissions à se réunir sans délai.

M. Jean Taurines. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Taurines.

M. Jean Taurines. Messieurs, ce matin, vous avez eu connaissance du contre-projet présenté par les sénateurs anciens combattants. Dans le but d'obtenir certaines précisions, et indépendamment de la concession qui nous a été accordée par le Gouvernement, nous demandons que la commission de législation civile du Sénat et la commission du suffrage universel de la Chambre veuillent bien entendre nos délégués (Mouvements divers) qui s'efforceront d'obtenir que figurent dans le rapport certaines précisions qui vous feront un devoir de soutenir le Gouvernement. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. le vice-président du conseil.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. J'appuie la proposition de M. Taurines qui demande, afin de simplifier le débat,...

M. de Courtois. Évidemment !

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. ...que les auteurs du contre-projet puissent être entendus par la commission, dans l'espoir, d'ailleurs exprimé par M. Taurines, que nous n'aurons pas ensuite à le discuter en séance publique.

M. le président. J'invite donc les membres des deux commissions à vouloir bien se réunir pour l'examen du projet de loi constitutionnelle.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quatorze heures cinquante minutes, est reprise à dix-sept heures quinze minutes.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. Boivin-Champeaux pour le dépôt et la lecture de son rapport.

M. Boivin-Champeaux. J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de l'Assemblée nationale le rapport fait, au nom de la commission spéciale, sur le projet de loi constitutionnelle.

M. le président. Veuillez donner lecture de votre rapport.

M. Boivin-Champeaux. Messieurs, le texte soumis à vos délibérations tend, dans sa brièveté, à régler à la fois le présent et l'avenir de la France.

Il donne au Gouvernement du maréchal Pétain les pleins pouvoirs exécutif et législatif. Il les lui donne sans restriction, de la façon la plus étendue.

La tâche à accomplir est immense. Nous sommes assurés qu'avec le grand soldat qui préside aux destinées du pays, elle sera menée à bien.

Le texte donne, en second lieu, au Gouvernement, les pouvoirs constituants. Je crois devoir faire ici, au nom de mes collègues, une déclaration solennelle.

L'acte que nous accomplissons aujourd'hui, nous l'accomplissons librement. Si nous vous demandons une réforme, c'est qu'ainsi que les Chambres l'ont manifesté à une immense majorité, nous avons la conviction profonde qu'elle est indispensable aux intérêts de la patrie.

Il n'y a rien à ajouter à ce que nous avons dit hier, les uns et les autres, sur cette nécessité absolue.

En ce qui concerne les modalités, nous avons deux observations à formuler. Il faut aboutir rapidement. Nous admettons que la constitution soit étudiée et promulguée sous l'égide et l'autorité de M. le maréchal Pétain.

Le seul problème est celui de la ratification des institutions nouvelles. La souveraineté nationale est, à nos yeux, non pas une fiction, mais une réalité vivante. (Applaudissements.) Il suffit de jeter les yeux sur notre histoire pour voir qu'une constitution ne peut vivre si les institutions nouvelles ne sont pas l'expression, je ne dis pas seulement des besoins, mais de la volonté du pays.

La ratification des institutions par ceux-là mêmes qui devaient en être les bénéficiaires était manifestement insuffisante. Nous savons gré au Gouvernement, se ralliant à la thèse soutenue par les anciens combattants, d'avoir modifié son texte et décidé que la constitution serait ratifiée par la nation.

Il est expressément entendu que le texte du Gouvernement doit être interprété en ce sens que la ratification de la constitution et l'élection des assemblées devra faire l'objet de deux votes distincts.

Que sera cette nouvelle constitution ? Nous ne savons que ce qui nous a été dit par un exposé des motifs dont nous ne pouvons par ailleurs qu'approuver les termes : patrie, travail, famille. L'image de la France ne serait pas complète s'il n'y figurait pas certaines libertés pour lesquelles tant de générations ont combattu (Applaudissements.)

Une constitution, quelle qu'elle soit, s'écroulerait rapidement si elle ne respectait pas les traditions et le génie de la France. C'est une France libre, monsieur le maréchal, que, il y a vingt ans, vous avez conduite à la victoire. Vous nous demandez un acte sans précédent dans notre histoire. Nous l'accomplissons comme un acte de foi dans les destinées de la patrie, persuadés que c'est une France forte qui sortira de vos mains. L’œuvre ne serait pas complète si le Gouvernement n'y ajoutait pas une action spirituelle et morale. La France est tombée moins à cause de l'insuffisance des textes que par la déficience des énergies et des âmes. (Applaudissements.)

Ancien combattant, je me souviens avec quel amour, quelle humanité, quelle énergique douceur, à une période douloureuse de notre histoire, en 1917, le maréchal Pétain s'est penché sur nos armées meurtries et en a refait des armées victorieuses. C'est la France tout entière, aujourd'hui, qui est meurtrie.

Enfin, messieurs — et c'est le dernier point que j'ai à traiter devant vous — il va falloir régler la période intermédiaire, celle qui va s'étendre jusqu'au bout où fonctionneront les institutions nouvelles.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil, a fait à la commission spéciale la promesse que, dès cette semaine, serait promulgué un acte laissant subsister les deux Chambres jusqu'au fonctionnement des institutions nouvelles. Étant donnée la délégation de pouvoirs, leur activité sera nécessairement réduite. Je suis persuadé, néanmoins, que, dans les circonstances tragiques que nous traversons, leur existence sera, pour le Gouvernement, à la fois une force et un soutien.

C'est dans ces conditions que nous vous demandons d'adopter le texte qui a été approuvé par votre commission spéciale.

Messieurs, permettez-moi un dernier mot avant de quitter cette tribune.

J'appartiens, comme beaucoup d'entre vous, aux régions actuellement occupées. Comme je n'aurai peut-être plus l'occasion de le faire, j'adresse dès maintenant un appel au Gouvernement. Je lui demande de favoriser de toute son énergie, de toute sa diligence, notre retour parmi nos compatriotes.

Que l'on nous permette de participer à leurs souffrances, à la réorganisation matérielle et morale de notre pays, à la sauvegarde de la vie française dans la zone occupée.

Nous avons encore, mes chers collègues, une belle, une noble, une dernière mission à accomplir.

Le parlementarisme tel que nous l'avons connu va peut-être mourir ; les parlementaires demeurent au service de la nation. (Vifs applaudissements prolongés.)

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Margaine.

Voix nombreuses. La clôture ! Aux voix !

M. le président. J'entends demander la clôture, ce qui signifie la suppression de la discussion générale.

Voix nombreuses. Oui ! oui !

M. le président. Je mets aux voix la suppression de la discussion générale.

(L'Assemblée décide que la discussion générale est supprimée.)

M. le président. La discussion générale est supprimée.

Je consulte le Sénat sur l'article unique.

Auparavant, j'en rappelle les termes :

« Article unique. — L'Assemblée nationale donne tous pouvoirs au Gouvernement de la République, sous l'autorité et la signature du maréchal Pétain, à l'effet de promulguer, par un ou plusieurs actes, une nouvelle constitution de l'État français. Cette constitution devra garantir les droits du travail, de la famille et de la patrie. Elle sera ratifiée par la nation et appliquée par les Assemblées qu'elle aura créées. »

Avant de mettre aux voix l'article unique par scrutin public, je dois donner la parole aux membres de l'Assemblée qui l'ont demandée pour expliquer leur vote.

Voix nombreuses. La clôture ! Aux voix !

M. Fernand Bouisson. Je demande qu'on publie au Journal officiel les noms des abstentionnistes.

M. le président. Ceci est une autre question.

On a demandé la suppression des explications de vote.

Je consulte l'Assemblée.

(L'Assemblée, consultée, décide la suppression des explications de vote).

M. le président. Nous allons procéder au scrutin dans les conditions réglementaires.

M. Fernand Bouisson. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Fernand Bouisson.

M. Fernand Bouisson. Il y a deux sortes de votants : ceux qui votent pour et ceux qui votent contre. Mais il y a aussi les abstentionnistes. Je veux parler non de ceux qui n'assistent pas à cette séance, mais de ceux qui, étant présents, ne votent ni pour ni contre. Je demande que les noms de ces derniers soient publiés au Journal officiel.

Sur de nombreux bancs. Aux voix !

M. le président. L'Assemblée désire-t-elle discuter la proposition de M. Fernand Bouisson ou passer ou vote ?...

Voix nombreuses. Aux voix !

M. le président. En fait, messieurs, la bureau de l'Assemblée ne possède pas la liste rigoureuse des présents.

M. Fernand Bouisson. Si ! monsieur le président.

Je demande la parole.

M. le président. Je veux tout d'abord indiquer à l'Assemblée un moyen pratique, et peut-être le seul, de donner satisfaction à M. Fernand Bouisson : c'est que les abstentionnistes volontaires viennent en faire la déclaration, qui serait mentionnée au Journal officiel. (Très bien ! très bien !)

La parole est à M. Fernand Bouisson.

M. Fernand Bouisson. Je n'avais demandé la parole que pour dire, contrairement à ce que vous venez d'indiquer, monsieur le président, que les noms des membres présents peuvent être parfaitement connus du bureau, puisque, en nous remettant une enveloppe, on nous a fait signer un registre (Applaudissements.)

M. le président. Je suis obligé de dire que des émargements ont été donnés pour des collègues absents.

Un membre. On n'aurait pas dû le tolérer.

M. le président. L'Assemblée paraît désirer que les abstentionnistes volontaires fassent au bureau une déclaration qui serait mentionnée au Journal officiel. (Assentiment.)

Il en est ainsi décidé.

Je vais mettre aux voix l'article unique du projet de loi constitutionnelle.

M. Jacques Masteau. Je demande la parole pour expliquer mon vote.

M. le président. L'Assemblée a décidé qu'il n'y aurait pas d'explications de vote.

Je mets aux voix l'article unique du projet de loi constitutionnelle.

Le scrutin est ouvert.

(Les votes sont recueillis. — MM. les secrétaires en opèrent le dépouillement.)

M. le président. En raison de l'importance du scrutin, l'Assemblée nationale estimera sans doute qu'il y a lieu de procéder à l'opération du pointage.

MM. les secrétaires en sont d'avis.

Il n'y a pas d'opposition ?...

Il va être procédé à cette opération.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq minutes, est reprise à dix-huit heures cinquante-cinq minutes.)

La séance est reprise.

Voici, messieurs, le résultat du dépouillement du scrutin sur l'article unique du projet de loi constitutionnelle :

Nombre de votants 
649
Majorité absolue 
325
Pour l'adoption 
569
Contre 
80

L'Assemblée nationale a adopté. (Applaudissements.)

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. Je voudrais dire un simple mot, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. le vice-président du conseil.

M. Pierre Laval, vice-président du conseil. Messieurs, au nom du maréchal Pétain, je vous remercie pour la France ! (Vifs applaudissements.)

M. Marcel Astier. Vive la République quand même !

Voix nombreuses. Vive la France !


— 7 —

MOTION D'ORDRE

M. le président. J'avais reçu de M. Alexandre Rauzy une proposition de résolution ; mais celle-ci ne concernant en aucune façon la matière de la réforme constitutionnelle n'est pas recevable. (Adhésion.) Je n'ai donc pas à en donner connaissance.

L'Assemblée nationale a épuisé son ordre du jour.

Je déclare la session close.


— 8 —

PROCÈS-VERBAL

M. le président. La parole est à M. Bertrand Carrère, l'un des secrétaires, pour la lecture du procès-verbal.

M. Bertrand Carrère, l'un des secrétaires, donne lecture du procès-verbal de la présente séance.

M. le président. Il n'y a pas d'observations ?...

Le procès-verbal est adopté.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures.)

Le Chef du service de la sténographie
du Sénat,
H. Chapuis
Le Chef du service de la sténographie
de la Chambre des députés
Georges Detot.


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