Je t’aime tant, je t’aime tant !

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Je t’aime tant, je t’aime tant !
Œuvres mêlées et posthumes (p. 209-210).





ROMANCE.


Année 1788.




Je t’aime tant, je t’aime tant !
Je ne puis assez te le dire :
Et je le répète pourtant
A chaque fois que je respire.
Absent, présent, de près, de loin,
Je t’aime est le mot que je trouve :
Seul avec toi, devant témoin,
Ou je le pense ou je le prouve.

Tracer je t’aime en cent façons
Est le seul travail de ma plume ;
Je te chante dans mes chansons,
Je te lis dans chaque volume :
Qu’une beauté m’offre ses traits,
Je te cherche sur son visage ;
Dans les tableaux, dans les portraits,
Je veux démêler ton image.


En ville, aux champs, chez moi, dehors,
Ta douce image est caressée :
Elle se fond, quand je m’endors,
avec ma dernière pensée.
Quand je m’éveille, je te voi,
Avant d’avoir vu la lumière ;
Et mon cœur est plus vite à toi
Que n’est le jour à ma paupière.

Absent, je ne te quitte pas ;
Tous tes discours, je les devine :
Je compte tes soins et tes pas ;
Ce que tu sens, je l’imagine.
Près de toi, suis-je de retour ?
Je suis aux cieux, c’est un délire ;
Je ne respire que l’amour,
et c’est ton souffle que j’aspire.

Ton cœur m’est tout, mon bien, ma loi ;
Te plaire est toute mon envie :
Enfin en toi, par toi, pour toi,
Je respire et tiens à la vie.
Ma bien aimée, ô mon trésor !
Qu’ajouterai-je à ce langage ?
Dieu ! que je t’aime ! eh bien ! encor,
Je voudrais t’aimer davantage !!!