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Joies errantes/Le Sabbat

La bibliothèque libre.
Alphonse Lemerre (p. 75-76).

LE SABBAT

À Jean Lorain.

Par la clairière,
Blême de lumière
De lune,
La folle ronde
Tournoie et gronde —
Comme la rafale
Chevauchant la pâle
Lagune.

C’est la gaieté — combien morose ! —
C’est la peur et la soif de l’oubli guérisseur,
De l’oubli destructeur
De toute chose,

Qui enlace : riant et criant,
Ces pauvres êtres en proie
À la pire joie ;


Et fait ces fulgurantes étreintes d’amour
Sans Amour.

Mais, de cette ivresse, triste comme la Mort,
Où les vivants damnés veulent fuir la Vie
— Ses deuils, ses crève-cœur, ses crimes, ses remords —
D’autres êtres vont naître — et l’odieuse Vie
Germera triomphante en ces baisers de Mort.

Par la clairière,
Blême de lumière
De lune,
La folle ronde
Tournoie et gronde…