Journal (Eugène Delacroix)/3 mai 1847

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Texte établi par Paul Flat, René PiotPlon (tome 1p. 305-307).

3 mai. — Resté au lit jusqu’à onze heures. Grenier est venu pour m’acheter le Naufrage : c’est trop tard. Il voulait l’emporter dans sa retraite, à la campagne, pour en jouir.

Dufays ensuite ; j’ai tort de dire si librement mon avis avec des gens qui ne sont pas mes amis. Le docteur Laugier[1] ensuite. Je lui ai parlé varicocèle ; il est d’avis d’un bandage particulier. Je vois que tous mes petits maux sont, suivant lui, objets inhérents à ma constitution, et avec lesquels il faut vivre.

Femme nue et debout : la Mort s’apprête à la saisir.

Femme qui se peigne[2] : la Mort apprête son râteau.

Adam et Ève : les Maux et la Mort en perspective, au moment où ils vont manger le fruit, ou plutôt groupés sur les branches fatales et sur le point de fondre sur l’humanité.

— Chez Jacquet[3] : le petit Faune, un pied environ. La Vénus grecque, trois pieds. Bas-relief : Combat d’Hercule et d’Apollon. Minerve au serpent, bas-relief.

— Sorti dans la journée ; passé voir un dessin de Lacroix[4] chez Aubry[5]. Revenu chez moi par le boulevard.

— Le soir, sorti pour aller chez Leblond ; il sortait. Fatigué de ces deux courses.

  1. Stanislas Laugier, chirurgien, né en 1798, mort en 1872. Professeur de clinique chirurgicale à la Faculté de médecine, membre de l’Académie de médecine, de la Société de chirurgie et de l’Académie des sciences. Laugier était un savant fort estimé.
  2. On connaît de Delacroix une Jeune femme qui se peigne ; derrière la toilette, Méphisto. (Voir Catalogue Robaut, no 1165.)
  3. Peut-être un marchand de curiosités.
  4. Gaspard-Jean Lacroix.
  5. Aubry, marchand de tableaux.