Joyeusetés galantes et autres/XXX. — Wolff

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Joyeusetés galantes et autresA l’Enseigne du Beau Triorchis (Mlle Doucé) (p. 104-106).

XXX

WOLFF

Quand, sur le boulevard, ce bas-bleu germanique,
Passe, avec l’éclat d’un souci,
Léonide Leblanc s’écrie : « Oh ! c’est unique
Que l’on puisse être fait ainsi ! »

Comme un citron qu’on jette en lavant la vaisselle,
Sa joue a de jaunes pâleurs,

Et sa voix rend le ton criard d’une crécelle
Ayant éprouvé des malheurs.

Sur sa lèvre un sourire essayant d’être acerbe,
Passe niaisement rêveur ;
Une gougnotte, en ce tambour-major imberbe,
Seule trouve quelque saveur.

Ses épaules, ainsi que deux arches montantes,
Vont roulant d’aval en amont ;
Son dos bombé se perd dans les vapeurs flottantes
Qui couvrent les buttes Chaumont !

Même étant laid, on est plus joli que cet homme
De lettres, toujours mal lavé,
Dont l’ingrate figure est flasque et molle comme
La chair d’un vieux poulpe crevé.

Dans l’espoir de trouver un angle en cette perche,
Koning, qui le suit pas à pas,
L’examinant des pieds jusqu’à la tête, cherche
Sa queue, et ne la trouve pas !

Car Wolff a cela de commun avec les anges :
Son sexe passe incognito,

Jamais on ne l’a vu dans ces bornes étranges
Que nous devons à Rambuteau.

Et cet être envieux, méchant et plein de rage,
Que tout rayon semble aveugler,
Sans force, sans esprit, sans gaîté, sans courage,
Ne peut même pas se branler !