Justice aux Canadiens-Français !/Chapitre XII

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XII


Les territoires du Nord-Ouest, avec leurs 2 750 000 milles carrés, forment une partie intégrante de la confédération canadienne.

Il est parfaitement vrai, comme vous le dites, que cette immense étendue de terres, plus développée, en superficie, que l’empire de Russie, pourra, dans l’avenir, être subdivisée en provinces ayant chacune leur autonomie.

Mais tel qu’il est constitué, aujourd’hui, notre Nord-Ouest compte comme un facteur important dans le développement commercial, agricole et industriel du « Dominion. »

Sillonné par de nombreuses voies ferrées, traversé de part en part par le « Transcontinental Canadien, » il offre au travail et à l’initiative individuelle un champ d’action sans limites.

Le « Transcontinental Canadien ! » quel sujet d’étude fertile en féconds enseignements ! et pourtant vous paraissez l’avoir ignoré.

Laissez-moi esquisser ici cette œuvre gigantesque, dont l’ensemble apparaît comme l’effort le plus prodigieux tenté par cette jeune nationalité canadienne, impatiente de proclamer, à la face du monde, sa virilité.

L’historique du « Canadian Pacific Railway » est étroitement lié à celui de la Confédération.

Les deux œuvres, solidaires l’une de l’autre, portent à un égal degré l’empreinte d’un patriotisme large et éclairé.

La confédération des colonies anglaises de l’Amérique du Nord remonte à 1867.

À cette époque, quatre provinces adhérèrent au pacte fédéral : celles de Québec, d’Ontario, du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse.

Le 11 décembre de la même année, la chambre des communes votait l’acquisition des territoires du Nord-Ouest.

Le 5 juillet 1870, la Colombie Anglaise entrait dans la Confédération, et le 3 avril 1873, l’Île du Prince Édouard y adhérait également.

Livrées à leurs propres forces ; sans liens directs les rattachant les unes aux autres ; condamnées à un isolement qui paralysait leurs efforts ; en partie, tributaires des États-Unis ; trop faibles séparément pour résister à une attaque de la république voisine ; les colonies anglaises de l’Amérique Britannique du Nord, en s’unissant par un lien fédéral, garantissaient, pour l’avenir, l’inviolabilité de leurs institutions.

Mais il ne suffisait pas aux fondateurs de la Confédération, à Sir George Étienne Cartier (un Canadien-Français !), à Sir John A. MacDonald et à leurs illustres coopérateurs, d’avoir groupé autour d’un seul drapeau les forces vives et les énergies engagées jusqu’à cette époque dans des sphères d’action différentes.

L’union politique des provinces accomplie, il était d’une absolue nécessité, pour en garantir la perpétuité et en développer les avantages, de les grouper dans une complète communauté d’intérêts. Il fallait, dans cet immense « Dominion » faire circuler la vie, et pour cela déplacer l’axe économique du pays, en l’étendant des bords de l’océan Atlantique à ceux du Pacifique.

La construction d’un vaste réseau de voies ferrées, sagement conçu, s’imposait donc comme une conséquence immédiate de l’acte de Confédération.

Tandis que l’« Intercolonial » devait mettre en relations directes les Provinces Maritimes avec celles de Québec et d’Ontario ; un grand chemin de fer transcontinental devait relier le Canada-Est à la Province de la Colombie Anglaise, sur les côtes du Pacifique.

En 1872, la chambre des communes adoptait, en principe, le projet de construction de cette colossale voie ferrée.

Jusqu’en 1881, les travaux avancèrent lentement, mais, à cette époque, l’entreprise, placée entre les mains d’une compagnie privée, soutenue par les subsides du gouvernement, marcha à pas de géant.

Aux termes du contrat passé entre le gouvernement et la compagnie du « Canadian Pacific Railway », celle-ci s’engageait à livrer sa ligne équipée et terminée pour le Ier mai 1891 ; mais, tel fut l’élan donné par les chefs de l’entreprise, encouragés et soutenus par l’opinion publique qu’à la fin de 1885, c’est-à-dire moins de cinq ans après le commencement des travaux, une voie ferrée de plus de six mille kilomètres s’élançait de Montréal, traversait tout le continent, et allait aboutir aux rives de l’océan Pacifique. Plus de six cents millions de francs avaient été dépensés ; cinquante mille ouvriers avaient travaillé à la ligne, de nombreux et magnifiques travaux d’art avaient été construits, et les Montagnes-Rocheuses étaient percées de part en part.

Vers le milieu de l’année 1886, toute la ligne était en pleine opération.

Depuis cette époque, de nombreuses villes se sont fondées le long de la voie. Quelques-unes d’entre elles ont une importance de premier ordre.

Le bois des forêts a été mis en exploitation, le sol des prairies labouré, des mines ont été ouvertes, et le dernier rail n’était pas encore posé, qu’un trafic considérable se faisait d’un bout à l’autre de la ligne.

Le peuple canadien est fier, à juste titre, de la grande œuvre qu’il a menée à bonne fin.

Il a donné ainsi une nouvelle preuve que la modeste colonie d’hier est devenue un grand pays, plein de confiance dans l’avenir que lui réservent ses richesses naturelles et l’énergique activité de ses enfants, sans distinction de race.


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