Lèvres de Velours (D. E.,)/17
CHAPITRE XVII
UN DERNIER MOT
La passion intermittente de la comtesse pour la délicieuse Cécile, revient toujours aussi violente, aussi intense, périodiquement. Dans les jours d’accalmie, Mercédès partage impartialement ses caresses entre toutes ses bien-aimées ; mais quand revient la période d’incandescence qui la jette dans les bras de l’appétissant tendron, il n’y en a que pour la blondinette ; c’est une orgie d’amour, qui dure toute la nuit, sans un moment de répit. Ce sont les inventions amoureuses les plus variées, une promptitude dans l’action, incroyable, dans les postures les plus bizarres, qui semblent impropres à la jouissance, des pâmoisons subites et immédiatement renouvelées, et ce qu’il y a de surprenant dans ces recommencements, c’est que la blondinette les provoque le plus souvent, tandis que c’est toujours la comtesse qui prend l’initiative des folles nuitées d’amour, dans lesquelles c’est Cécile qui a le plus souvent le rôle passif. Durant ces nuits-là, je profite souvent des bonnes dispositions de l’une et de l’autre, et je glane ici et là des entremets exquis, succulents, accommodés à l’essence d’amour. Parfois, en effet, je me réveille, pendant que les mignonnes se livrent leur duel à coups de langues, duel peu meurtrier, puisque l’issue n’en est jamais mortelle, et dans lequel le sang qu’on verse est une douce liqueur blanche, que le blessé distille au milieu des plus doux transports. Maître Jacques, ainsi réveillé, percerait un mur. Vite on lui fait place dans l’asile voisin, ou bien dans le réduit déjà occupé ; et dans l’un ou dans l’autre, il partage les joies paradisiaques que goûtent les ardentes énamourées.
L’Exposition est ouverte. Nous attendons les deux belles Andalouses, qui nous ont annoncé leur arrivée pour la semaine prochaine. Nous leur préparons des réjouissances variées, grâce à la riche imagination de Miss Pirouett, si fertile en inventions amoureuses.