L’Âme nue/L’Introuvable

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G. Charpentier et Cie, éditeurs (p. 222-223).
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LE SOIR








L’INTROUVABLE


à stanislas de guaita


 

Je cherche l’introuvable et la suprême Amie,
Chants et cœur de Sirène, âme et chants de Lamie,
La chère, la très chère hypocrite aux yeux doux :
Elle aime les fleurs d’or, l’éclat des faux bijoux,
Et les fards qui la font plus blanche que l’albâtre ;
Elle aime l’artifice imagé du théâtre,
Et préfère au soleil la clarté des flambeaux ;
Le miracle l’attire, elle a peur des tombeaux ;
Triste parfois, lascive et chaste tout ensemble,
Elle m’endort : l’odeur de son baiser ressemble

Au poison des lotus que la lune fleurit ;
L’unique perfidie habite son esprit :
Son geste est une embûche et sa caresse un piège ;
Son rire est feint, sa voix parjure et sacrilège ;
Chacun de ses regards est une trahison.


Mais c’est elle qui doit consoler ma raison,
Car ma foi se réserve à l’Amie éternelle
Qui mentira si bien qu’on pourra croire en elle.