L’École des biches/Treizième entretien

La bibliothèque libre.
J. P. Blanche (p. 185-213).

TREIZIÈME ENTRETIEN.

adrien, caroline, marie.
antonia, introduit l’artiste près de ces dames ;
puis, après avoir mis les verrous,
elle se réfugie dans le cabinet.
adrien (qui a remarqué l’action d’Antonia,
après les compliments d’usage).

Que signifie la précaution que je viens de voir prendre ? Est-ce un attentat à ma liberté ?

caroline.

Vous avez trouvé juste. Quand on tient en cage un bel oiseau comme vous, on ferme la porte dans la crainte qu’il ne s’envole.

adrien.

Je suis très-flatté de ces sentiments, mais l’oiseau n’est pas si rare que vous veuillez le garder éternellement.

caroline.

Telle n’est point notre intention, et pour vous rassurer sur l’avenir, je m’empresse d’ajouter que nous consentirons à vous laisser libre si vous voulez bien nous faire entendre un peu de ce ramage amoureux duquel vous vous acquittez si bien.

adrien.

En venant ici j’étais loin de m’attendre à pareille faveur. Heureux d’être votre prisonnier à de semblables conditions ! Me voici à vos ordres, belles geôlières, quand et tant que vous voudrez.

caroline.

Allons, je vois qu’il n’est pas changé : monsieur ne doute de rien ; nous allons voir si les faits répondent aux paroles.

(Les deux jeunes femmes prennent chacune Adrien par la main et le font asseoir entre elles sur le divan.)

caroline.

Dites-moi, monsieur, comment, malgré les intimités de la lune de miel, que je comprends parfaitement, n’avez-vous pu trouver un moment pour venir visiter en compagnie de Marie une amie qui vous aime si franchement tous les deux, et à qui vous devez bien une partie de votre bonheur ? Marie ne me néglige pas comme vous ; et sans elle, je ne saurais même pas si vous existez. Quand vous lui faisiez la cour, vous saviez bien trouver le temps de venir ici. Ah ! je le vois, le bonheur vous rend égoïste.

adrien.

Madame, si vous saviez…

caroline.

Je sais ce que vous allez me dire ; Marie me l’a expliqué, et a cherché à vous excuser. Heureusement, elle vous ressemble peu, et vous ne pouvez vous douter jusqu’où va pour moi son dévouement à mes caprices, même les plus extravagants. Nous parlions dernièrement de vos noces, je lui rappelais les folies de ce jour et l’idée bizarre que j’avais eue de ne vouloir, par scrupule, vous abandonner que le côté non canonique de mon corps. J’ajoutai que depuis lors, en réfléchissant sur ce singulier scrupule, j’avais bien changé d’opinion sur le droit que j’aurais de disposer à l’avenir de ma personne comme je l’entendrais, et que j’étais aux regrets de ne vous avoir pas tout permis, « Qu’à cela ne tienne ! m’a-t-elle répondu sans hésiter. Quoique j’aime Adrien autant qu’on peut aimer, je désire tant t’être agréable, et j’ai tant de confiance en votre loyauté à tous deux, que si ta passion dure encore, je ne crains pas de me prêter à une nouvelle épreuve ; et je le verrai, a-t-elle ajouté, dans tes bras sans jalousie. » Qu’en pensez-vous ?

marie.

Ce qu’il en pense ? Vois la saillie que fait son membre sur son pantalon. Voilà sa réponse, ma chère.

(Marie écartant elle-même les obstacles qui cachent aux regards ce superbe bijou, et le présentant à son amie :)

marie.

Tiens ! vois qu’il ne demande pas mieux et qu’il y mettra toute sa bonne volonté ! Je te l’abandonne ; sois donc heureuse !

caroline.

Excellente Marie ! Aussi je ne veux rien permettre à Adrien sans qu’il sache la condition que tu as mise à ta complaisance et qu’il ait promis de s’y conformer.

adrien.

Quelques soient les conditions que Marie m’impose, j’y consens sans hésiter, car je sais qu’elle ne demandera rien d’impossible ; parlez donc ?

marie.

J’ai consenti à vous voir réunis ensemble et à ce qu’elle goûte dans tes bras autant de plaisir que possible, à la condition que le produit m’en sera réservé, ne voulant rien abandonner de mes droits. Quand donc tu sentiras le moment de la crise dernière, c’est chez moi que tu viendras déposer ton offrande.

adrien.

Condition très-facile à remplir ! (À Caroline.) Ceci ne doit point vous surprendre, ma belle amie, Marie connaît ma faculté de pouvoir satisfaire une femme à sa fantaisie, et néanmoins de n’arriver au dénoûment qu’à ma volonté. Aussi elle est fort tranquille sur une exigence qui vous paraît si singulière et si difficile : elle ne vous a demandé qu’une petite satisfaction d’amour-propre, et dont l’exécution lui était assurée.

marie.

Puisque nous voilà d’accord, que chacun prenne son compagnon : je vais chercher le mien.

(À ce mot de compagnon, Adrien, qui voit Marie se diriger vers le cabinet de toilette, ne peut se défendre d’une certaine méfiance. Il fait un mouvement pour la suivre ; ce mouvement est aussitôt réprimé par Caroline.)

caroline.

Eh bien ! où allez-vous, Adrien ? Quel soupçon vous passe donc par la tête ? Ne savez-vous pas qu’Antonia est dans le cabinet.

adrien.

Pardonnez-moi ce mouvement involontaire, mais Marie dit et fait aujourd’hui des choses si singulières que…

caroline.

Que vous avez peur ! et de quoi, s’il vous plaît, jaloux ? Vous craignez peut-être qu’Antonia ne viole votre vestale : soyez en repos, et venez près de moi oublier cette mauvaise pensée.

(L’absence de Marie ayant laissé toute liberté à nos impatients, que sa présence gênait encore, ils se livrent aussitôt à un mutuel pelotage, bientôt si animé, que chaque vêtement qui met obstacle à leurs caresses est vivement mis de côté. C’est dans un complet état de nudité que les retrouvent nos fugitives. Elles aussi ont pensé qu’une chemise même était un larcin fait au plaisir : elles sont donc dans le même état de nudité. Antonia entre la première, portant fièrement attaché à la ceinture le superbe godmiché dont ces dames connaissent l’utilité. Marie, qui suit de près ce compagnon d’une nouvelle espèce qu’elle vient d’improviser, la prend par la main, et s’avançant cérémonieusement vers Caroline et Adrien :)

marie.

Je vous présente le jeune Antonia, que j’ai choisi présentement pour mon amant. Il est joli garçon, bien monté, et bande toujours. Vous voudrez bien, tandis que vous vous procurerez réciproquement du plaisir, me permettre la jouissance de ce vrai chérubin.

caroline.

Comment ! tu penses à te servir d’un pareil instrument ! Je n’y comprends rien. Était-ce là le secret que tu me faisais avec Antonia ?

marie.

Est-ce que tu as pu croire que je resterais la spectatrice bénévole de vos amoureux ébats ! Oh ! non ; j’ai pris, comme vous le voyez, mes précautions pour en supporter facilement la vue.

caroline.

Que vas-tu faire, petite folle, de cette recrue ?

marie.

Tu vas le voir. Antonia, prends deux carreaux ; dépose-les sur le tapis ; que Caroline s’empare de l’un et toi de l’autre : ils vous serviront d’oreillers. Maintenant, étendez-vous sur le tapis… Très-bien… Vous y voilà !… Adrien, prends ta place entre les cuisses de ta belle affamée. Quant à moi, je vais enfourcher mon joli polisson, et, à cheval sur cette charmante monture, je me pose moi-même ce boute-joie de circonstance, avec lequel je n’en vais pas moins prendre beaucoup de plaisir, en t’attendant, monsieur l’adoré de toutes les femmes ; et comme nous sommes très-rapprochés les uns des autres, que nos croupes se touchent presque, tu voudras bien, en allongeant la main qui ne t’es pas utile, préparer par un léger postillonnage la voie où je veux que tu viennes éteindre tes feux. (En montrant du doigt son trou mignon.) Là, entends-tu ? Alors, ça m’en fera deux dans le corps ! Tu vois, cousine, que mes précautions ne seront pas inutiles, et que je ne serai pas la plus mal partagée.

(Cet arrangement si clairement ordonné est compris, et de suite mis à exécution. Chacun cherche à prendre et à donner le plus de plaisir possible. Antonia même, quoique la plus mal placée, veut faire acte de dévouement, et, passant la main sous le ventre de Marie, par une certaine masturbation dont elle connaît l’effet, elle cherche à augmenter la jouissance que se donne sa cavalière par ses mouvements précipités sur le godmiché, qui déconnerait s’il n’était tenu en place par la seconde main de la complaisante Antonia.)

caroline.

Ah ! cher Adrien, comme ton vit est brûlant ; il me va jusqu’au cœur… comme tes mouvements répondent aux miens ! Quelle jouissance sans pareille ! Ah ! tiens… tiens !… je ne peux plus résister à tes coups, je pars !

(Adrien, qui, malgré les entraînements de sa chaude partenaire, a su, selon sa promesse, se retenir, se retire très-brillant et va de suite s’introduire sans difficulté, mais non pas sans bonheur, dans le gîte qu’on lui a indiqué à l’avance et où il est impatiemment attendu. Caroline, de son côté, fort satisfaite du service de notre artiste, ne veut pas rester simple spectatrice de ce nouvel assaut ; et pour prouver qu’elle lui en est reconnaissante, elle approche ses mains délicates des compagnons de son priape, et par un doux chatouillement les excite à bien faire leur office, en même temps qu’avec son experte langue elle fête le trou voisin. Ce surcroît de plaisir raffiné, auquel notre fouteur ne s’attendait pas, a un effet immédiat, et un jet bouillant, que Marie sent pénétrer jusqu’au fond de ses entrailles, décide aussi de son côté la crise suprême. Il était temps qu’un jeu si violent prît fin : un frottement double dans des parties si sensibles et si voisines l’une de l’autre, pouvait, s’il avait été prolongé, et avec une organisation si délicate, amener de dangereux accidents pour la santé de notre charmante mais trop passionnée Marie. Un calme au moins relatif succède à une aussi chaude passade. Marie, quoique restée d’abord pâmée dans les bras de son amant, reprend peu à peu ses sens. Revenue tout à fait à elle, elle s’attache surtout à caresser Antonia, cette compagne d’une si bonne nature ; elle veut la consoler de la maigre part qu’elle a eue dans leurs plaisirs.)

antonia (comprenant la pensée et le délicat
sentiment de marie).

Vous êtes dans l’erreur, chère demoiselle ; touchez ! (Et prenant la main de son ex-partenaire, elle la porte entre ses cuisses.)

marie.

Comme tu es trempée, et pour si peu !

antonia.

Ne comptez-vous donc pour rien vos baisers de feu, le contact de votre chair contre ma chair, et la vue de ce qui se passait près de nous !

caroline.

Mais toi, Marie, dis moi donc quel diable a pu te donner l’idée de ce libertinage qui, tu l’avoueras, casse un peu les vitres ?

marie.

Cela m’est venu très-naturellement.

caroline.

Très-naturellement ? je te félicite ; tu fais des progrès.

marie.

C’est ce à quoi je m’applique. Je t’ai déjà dit que pour ménager ma santé, et cependant ne pas trop faire jeuner mon Adrien, je lui permettais de temps en temps quelques extras dans le goût florentin. Dernièrement, pendant que, sans beaucoup de plaisir pour moi, il s’escrimait dans mon pauvre petit cul, j’eus machinalement la pensée d’introduire mon doigt dans mon con, et comme l’introduction de ce doigt ne me faisait éprouver aucune douleur, j’eus aussi machinalement l’idée de le remuer de bas en haut, comme fait le membre d’un homme. Ce jeu dû au hasard me procura des sensations étranges et très-agréables ; je rêvai du godmiché, et à part moi je me promis, à la première occasion, de renouveler plus sérieusement un essai qui avec le seul secours de mon doigt m’avait si bien réussi. Voilà, mes amis, la raison qui m’a fait tenir à ce qu’Adrien ne dût jouir qu’avec moi. Quant à la jalousie à laquelle tu as dû croire, chère cousine, elle n’y était pour rien.

caroline.

Et as-tu eu autant de jouissance que tu te l’étais promis ?

marie.

Plus encore. Mais il faut l’avoir éprouvée. Toute narration serait impossible et ne t’en donnerait qu’une faible idée.

caroline.

Sais-tu que tu piques ma curiosité et que si je ne craignais d’abuser…

marie.

De qui ? de mon amant ! Regarde si la bonne volonté lui fait défaut. Ne vas pas faire la petite bouche, et si le cœur t’en dit…

adrien (l’interrompant avec vivacité).

Je suis votre prisonnier, Caroline, et suis résigné à faire tout ce qu’il vous plaira d’exiger.

marie (que cet empressement a froissée).

Jolie résignation, ma foi ! faire ce qu’on désire ardemment !

caroline.

Ne vas-tu pas maintenant le quereller de ce qu’il exécute de bonne grâce ce que tu as toi-même proposé !

marie.

Tu sais bien que je ne suis pas capricieuse. Mais pourquoi manque-t-il de franchise, et dit-il qu’il est résigné à tout, quand il est si heureux de ton désir.

caroline.

Tu vois bien qu’il ne parle ainsi que par la crainte qu’il a de te déplaire en ne paraissant pas joyeux de la proposition. Tu te plains que la mariée soit trop belle ! C’est une délicatesse, que, malgré nos actions plus que légères, tu devrais mieux apprécier.

(Marie, pour prouver que ce mouvement d’humeur est oublié, s’empresse d’embrasser Adrien, qui veut lui rendre ce baiser sur la partie encore humide du dernier assaut.)

caroline.

Attendez au moins que nos bijoux soient un peu rafraîchis ! Pendant que nous prendrons ce soin, vous allez, cher Adrien, enlever deux matelas de mon lit ; vous les déposerez sur le tapis, en ayant soin de les placer côte à côte. J’ai trouvé, pour mon compte, que le parquet manquait complétement d’élasticité : je ne veux pas que celles qui doivent me remplacer soient durement couchées.

(Ces dames ayant disparu, emmenant avec elles Antonia, Adrien s’empresse de satisfaire aux intentions de Caroline en faisant vivement ce qu’elle lui a demandé et en y ajoutant même comme complément deux oreillers. Cela fait, il se dispose à rejoindre les fugitives, lorsqu’il voit venir à pas comptés et d’un air très-sérieux la fringante Antonia ; elle tient dans ses mains une cuvette, et elle est accompagnée dans sa marche par Caroline et Marie ; l’une, à gauche, porte le pot à eau, l’autre, à droite, le linge nécessaire à l’opération qu’elles méditent. Arrivées près d’Adrien, Antonia se prosterne gravement, la tête et les mains à portée de son boute-joie.)

antonia.

Seigneur, je suis la victime désignée. Vous avez été choisi comme le sacrificateur : Permettez-moi donc de purifier l’instrument sacré qui doit m’immoler.

(Et voilà notre victime de bonne volonté versant de l’eau sur le membre d’Adrien, resté dans un vaillant état. Par des attouchements adroitement réitérés, elle fait disparaître les restes de sa dernière offrande ; puis elle prend la serviette des mains de Marie, l’essuie avec soin, l’introduit entre ses lèvres et caresse de sa langue frétillante son gland, que la fraîcheur de l’eau a rendu rose et appétissant.)

caroline (à Antonia).

Enfin, je crois que te voilà convertie !

antonia.

Ah ! mesdames, si tous les hommes ressemblaient à M. Adrien, il y a longtemps que ma conversion serait faite ; mais…

marie (à Adrien étonné).

Tu désires l’explication de ce que tu viens de voir, et même de ce qu’on t’a fait ? Trop heureux mortel, eh bien ! je vais te contenter. J’ai trouvé qu’Antonia toujours bonne et complaisante pour nous, n’avait eu, quoiqu’elle en dise, qu’une pauvre petite part dans nos ébats ; cela n’était pas juste, et j’ai voulu que dans la prochaine reprise sa part fût plus sérieuse. Nous avons donc décidé, Caroline et moi, que ce serait elle qui cette fois serait enfilée par toi, toujours à la même condition, bien entendu, mais ici, avec mon consentement, dans l’intérêt de Caroline : de là son droit de préparer comme elle l’entend ce que nous lui avons destiné.

caroline.

Comprends-tu maintenant ? On te la fait belle, j’espère. Tiens, regarde : Antonia, déjà étendue sur le matelas, t’attend avec impatience. Va vite dans ses bras, et toi, ma belle… (Voyant Marie qui, n’ayant pas l’habitude de se servir du godmiché, ne peut parvenir à l’ajuster.) Comment ! tu n’es pas encore armée ? Voyons, je vais t’aider ; car sans cela nous risquerions de commencer quand ils auraient fini. Enfin, t’y voilà : ce n’est pas sans peine. À présent, viens te coucher près de moi sur cet autre matelas ; en montant à cheval sur toi ; je vais à ton exemple m’introduire ce beau joujou moi-même, et me suffire jusqu’au fortuné moment où Adrien ayant tout à fait raccommodé Antonia avec le membre viril, viendra me faire éprouver, je l’espère, une jouissance inconnue.

(Sauf les rôles, qui sont changés, les groupes sont pareils au précédent. Antonia, très-fière et très-satisfaite de tenir entre ses bras le seul homme vers lequel jusqu’à présent elle se sente attirée, commence le jeu de si grand cœur, que deux postes sont lestement courues par elle. De son côté, Adrien ne veut pas paraître insensible à tant de bon vouloir ; et comme il se sent de force à rendre politesse pour politesse, sans craindre de faillir à ce que la voisine attend de lui, il ne se fait pas scrupule d’arroser abondamment la lice hospitalière d’Antonia. Quoique cette passade ait été rondement menée, sans indices extérieurs, pour ne pas éveiller l’attention de l’autre groupe, le temps n’en paraît pas moins long à l’ardente Caroline, qui, quoique gentiment amusée par les caresses et les mouvements de Marie, est dans une attente fébrile du complément de plaisir qu’elle a demandé et qu’on lui a promis.)

caroline.

Viens, viens donc, cher Adrien ! mes désirs me brûlent. Ah ! comme cette petite m’excite… Je ne puis plus attendre, et je veux pourtant jouir sous tes coups.

(Adrien ne peut se refuser à un appel si pressant ; il quitte le réduit de la soubrette, où il se plaît tant, et va vivement plonger dans le cul de Caroline son vit tout couvert d’écume, ce qui facilite l’entrée d’un si gros engin dans un passage si étroit.)

caroline (dont la tête commence à se perdre).

Sacredieu ! comme il entre !… Quelle adresse ! Cher bougre, comme tu connais la manière agréable de t’introduire là ! Enfonce… enfonce… ne crains rien, et toi, gentille garce, branle bien mon clitoris, et ne ralentis pas tes mouvements. Oh ! quelle délicieuse fouterie !

(La délaissée Antonia, remise de sa chaude accolade, ne peut détourner ses regards des superbes formes de l’homme qui vient de lui faire connaître pour la première fois l’amour masculin. Toute à la reconnaissance de ce qu’elle a éprouvé, elle cherche, en se rapprochant de son vainqueur, d’être encore pour quelque chose dans les plaisirs qu’il éprouve avec une autre. Allant se placer derrière Adrien et s’agenouillant entre ses jambes, elle baisse la tête de façon à pouvoir caresser de sa langue et de sa main tout ce qui est à sa portée. Comme la première fois, ce surcroît d’excitation que reçoit Adrien double sa vigueur. Aussi Caroline, ne pouvant supporter plus longtemps une sensation si violente :)

caroline.

Ah ! foutre ! assez !… assez !… Gredin, tu vas me faire passer !

marie.

Eh ! c’est bien heureux ! Il est temps que tu t’arrêtes. Tu jures comme une vivandière, tu me mords et tu me pinces. Ce n’est plus de la passion, c’est du délire.

caroline (un peu apaisée).

Que veux-tu ? Ne m’en veux pas. Ce n’est pas ma faute. La vivacité des mouvements du godmiché que j’avais dans le con, ton habileté dans la masturbation de mon clitoris, et par dessus tout la vigoureuse attaque de mon cul par le gros vit de ton Adrien et sa copieuse décharge, tout cela m’avait mis la tête à l’envers. Aussi c’est un jeu auquel il ne faudrait pas souvent se livrer. La jouissance est si forte qu’elle userait bientôt les ressources du meilleur tempérament, et j’engage bien ton amant à réserver ce grand jeu pour les occasions extraordinaires. Je te crois maintenant assez expérimentée et assez convaincue du danger, pour ne pas y exciter Adrien, qui, par faiblesse, pourrait bien ne pas résister à pratiquer de si dangereuses habitudes.

(Antonia, pendant les réflexions de sa maîtresse, est restée au poste qu’elle s’est choisi, et le boute-joie d’Adrien restant en évidence, elle s’en empare et s’occupe à le purifier avec les objets de toilette apportés par elle et abandonnés sur le tapis.)

caroline.

Regarde donc, Marie, c’est à ne pas y croire. Vois comme Antonia caresse avec amour le vit d’un homme, comme elle en prend soin ! C’est une transformation complète.

antonia.

Pour le présent, oui, mais je ne puis répondre de l’avenir. Quant à M. Adrien, c’est autre chose : il est l’amant de choix de mademoiselle Marie, et cette qualité me le rend sacré. J’ai pu profiter d’une occasion de plaisir que vous-mêmes avez fait naître. Vous connaissez ma répugnance pour son sexe, et vous avez voulu, par distraction, vous assurer si cette antipathie tiendrait devant le beau physique d’un brave garçon. C’était une distraction qui avec une autre eût été bien risquée. J’ai été attirée, fascinée comme vous par des perfections qu’on trouve si rarement chez un homme. Voyant cela, vous avez poussé l’imprudence jusqu’à me livrer à ses caresses. Eh bien ! quoique ce jour doive rester dans ma mémoire comme un des plus fortunés de ma vie, soyez dans une sécurité parfaite : tout se bornera, à ce souvenir. Vous savez bien, madame, que je n’aurais jamais osé élever mes désirs jusqu’à M. Adrien : vous en avez décidé autrement ; ce qui est fait est fait. Mais je suis trop bonne fille, pour faire aucune démarche, chercher aucune occasion qui puisse à votre insu me rapprocher de lui.

marie.

Va, Antonia, je te crois une fille loyale, et ai foi dans tes promesses ; pourrais-je d’ailleurs me méfier du si dévoué Antonia !

antonia (entendant sonner cinq heures).

Madame ne pense pas que voici l’heure ordinaire de la visite de M. le comte ? Je crois qu’il serait prudent de mettre un peu d’ordre dans nos toilettes et dans cette chambre.

caroline.

Antonia a raison. Tout est pêle-mêle sur ce tapis ; et si M. de Sarsalle arrivait, comment ferions-nous ? On ne pourrait lui refuser la porte de cette chambre ! Vite donc, ma fille !

antonia.

Que M. Adrien ait la complaisance de replacer les matelas sur le lit ; moi, je me charge du reste ; dans quelques instants il n’y paraîtra plus.

(Tandis que cela s’exécute, un aparté a lieu entre les deux cousines, pendant qu’elles s’entr’aident à se mettre dans un état décent)

caroline.

Sais-tu, chère Marie, que malgré ma grande confiance dans la probité d’Antonia, notre conduite plus que légère d’aujourd’hui me donne un peu à réfléchir ? N’y a-t-il pas à craindre qu’en jouant ainsi avec le feu, nous ne soyons nous-mêmes un jour brûlées ?

marie.

Pour une femme qui, comme toi, se pique de philosophie, cette réflexion est un peu tardive et a lieu de m’étonner. Elle montre peu de résolution et de confiance. Comment ! c’est toi qui, à force de raisonner et d’effrayer Antonia sur les dangers qu’il y avait pour les intérêts d’une femme à se prendre d’une belle passion pour un amant, lui as donné le goût des femmes, et lui a tellement engourdi la fibre du cœur, qu’elle n’avait pu jusqu’aujourd’hui avoir en fait d’homme le moindre désir, et tu redoutes que les principes que tu lui as si bien mis en tête, soient oubliés, parce que nous l’avons jetée dans les bras d’un beau garçon qui cette fois, il faut le dire, ne lui a pas trop déplu, mais ce à quoi elle n’avait jamais pensé auparavant !

caroline.

Ma théorie est basée sur le bon sens, et l’expérience m’en a prouvé la justesse. Je ne puis cependant m’empêcher de convenir que parfois les sens peuvent avoir raison de la meilleure résolution, et c’est ce qui me fait peur, car alors…

marie.

Alors comme alors, cousine. Est-ce que tu as vu jamais quelque femme mourir de la perte d’un amant, voire même d’un ami ? Non, n’est-ce pas ? parce que le temps nous fait oublier. Cela est pénible à penser, mais cela est. Il faut donc en prendre son parti, et c’est ce que je fais.

caroline.

Tu as peut-être raison, pauvre amie ; mais quelle philosophie que la tienne ! Elle est peu consolante. Ma foi ! tant pis, je vais faire comme toi : ne pas m’en tourmenter.

antonia (entrant précipitamment).

Madame, il était temps ! Voilà le comte qui entre au salon.

caroline (à Marie).

Tu sais que je te garde à dîner avec Adrien.

adrien.

Quoi ! chère Caroline, vous voulez ?

caroline.

Comment ! Monsieur va encore faire des façons ! Ah ! cousine, corrige-le donc de cette sotte retenue qu’il croit être de la dignité, et qui n’est que de l’orgueilleuse faiblesse. Vos intérêts exigent qu’il fréquente beaucoup le comte, et il faut que cela soit

adrien.

Vos ordres sont trop dans mes goûts pour que je refuse de m’y soumettre. J’obéirai.

caroline.

C’est bien heureux ! Maintenant, vous savez que le comte nous attend au salon, allons le retrouver.