L’Éveil de Pâques (Verhaeren)

La bibliothèque libre.
Poèmes (IIIe série)Société du Mercure de France (p. 188-189).

L’ÉVEIL DE PÂQUES


Les vieilles mains d’argent des coutumes locales
— Et carillons et bruits de fête à pleins bourdons —
Tendent soudain les longs et torpides cordons
À l’horloge de mes douleurs maniacales.

Le sonnant cuivre clair des musiques pascales
Couvre les voix et les sanglots des abandons ;
Et me voici : le radieux vers des pardons
Ardents et purs, ainsi que des lueurs focales.


Des Christs passent dans l’air et font leur charité ;
Et je suis bon et net et droit par volonté
Bien que le vieux péché gèle toujours mon âme.

Je sens mon cœur tiédir, sous leurs beaux doigts de flamme,
Posés sur mon désir d’être, malgré l’hiver,
L’herbe neuve qui brille au vent acide et vert.