Aller au contenu

L’épluchette/Noël

La bibliothèque libre.
Gérard Machelosse (p. 111-112).


La Noël

C’est la veille de Noël.
Le froid est sec, vif, cruel.
Une pauvre mendiante
À la tête branlante,
Un panier sous le bras,
Ne sait où tourner ses pas.
On le voit, elle est étrangère
Dans le quartier.
Vient à passer un charretier
Qui la tire de misère
En lui conseillant de heurter
À telle maison voisine ;
Ce qu’elle fait sans hésiter,
Se dirigeant vers la cuisine
Située à l’arrière.
C’était un presbytère.
La vieille frappe : toc ! toc !
La porte s’ouvre et la servante
Du curé dit : — Saint Roch,
Not’ patron, une mendiante
Encore ! Ça n’finira plus.
Mais ça fait rien, entrez la « mère ! »
Vous n’êtes pas la première,
Et vous ne serez pas la dernière.

La misère est grande, Jésus !
Et faut soulager l’infortune ;
Mais on ne peut donner beaucoup,
Il en vient trop tout d’un coup !
Si c’était rien que quéqu’une…
Mais la « mère » quel est votre nom ?
— C’est la Noël, qu’elle répond.
— Ah ! dit Simplice, la servante,
À la pauvre mendiante,
Dans c’cas-là, ça change tout ;
Attendez un petit bout,
Et Simplice laissa la vieille.
Elle revint bientôt portant
Une dinde sans pareille
Un gallinacé géant !
— M’sieu l’curé m’a dit « Simplice,
Sers ben la dinde que v’là !
C’est pour la Noël, tu sais, là  »  !
— Ah ! que Dieu vous bénisse !
Dit la gueuse emportant l’oiseau.
Noël pour elle fut très beau !