L’Encyclopédie/1re édition/BASSON DE HAUTBOIS

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Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 2p. 127-129).

BASSON DE HAUTBOIS ou simplement BASSON, (Lutherie.) est un instrument de Musique à vent & à anche, représenté fig. 40. & 41. Pl. IX. de Luth.

Il est composé de quatre pieces de bois A, B, D, C, perforées dans toute leur longueur. La premiere piece Dd, qui est percée intérieurement d’un trou conique, qui va en s’élargissant de D vers d, a un épaulement ab que l’on a ménagé en tournant l’extérieur de la piece. Cet épaulement est percé de trois trous, qui communiquent au canal intérieur de la piece. Ces trous notés 1, 2, 3, suivent pour gagner le canal ou tuyau Dd, la direction des petites lignes ponctuées que l’on voit auprès des trous. Aux deux extrémités de cette piece sont deux tenons Dd garnis de filasse, pour les faire joindre exactement. Le tenon D entre dans le trou du bocal E ; comme on voit dans les figures qui représentent le basson tout monté. L’autre tenon d entre dans le trou K de la partie inférieure, qu’on appelle le cul, lequel est la seconde partie. Cette piece est percée de deux trous KC : le premier K reçoit, comme nous avons dit, la piece Dd ; & le second C, qui est plus grand, reçoit la piece Bb par le tenon b. Les deux trous KC de la piece KL vont dans toute sa longueur ; savoir, le trou K en s’élargissant de K vers L, & le trou C au contraire de L vers C : ces deux trous communiquent l’un à l’autre vers L, ensorte qu’ils forment un tuyau recourbé. On perce les trous comme ceux de tous les autres instrumens à vent. Voyez Flute. Ces deux trous KC qui traversent d’outre en outre la piece KL lorsqu’on fabrique l’instrument, sont ensuite rebouchés en L par un tampon de liége, ou autre bois garni de filasse, pour fermer exactement : or avant de reboucher le trou L, on abat un peu de la cloison qui sépare les deux trous KC ; ensorte que du côté de L ils ne forment qu’une seule ouverture ; & que la communication que laisse la breche de la cloison, lorsque la piece L est rebouchée, soit à-peu-près égale à l’ouverture des tuyaux en cet endroit, ensorte que les deux canaux KC forment un tuyau recourbé en L. On garnit de frettes de cuivre ou d’argent les deux extrémités de cette piece KL, pour qu’elle ne fende point lorsqu’on met en L le bouchon, & dans les trous KC, les pieces Dd & Bb, appellées petite & grosse pieces. Le cul est percé de six trous ; les trois marqués 4, 5, 6, communiquent au tuyau K de la petite piece, en suivant la direction des lignes ponctuées qui partent des ouvertures de ces trous. Le trou marqué 7, & qui est fermé par une clé que son ressort tient appliquée sur ce trou comme celle du mi-b de la flûte traversiere, & qui ne débouche que lorsqu’on appuie avec le petit doigt sur la patte de cette clé, communique aussi avec le tuyau K. Le trou marqué 8, au contraire, communique avec le tuyau C, & est toûjours ouvert quoiqu’il ait une clé d 8, fig. 51 & 2. Cette clé est composée de deux pieces principales ; de la bascule AC, ac, & de la soupape CD, cd. La bascule AC, ac, fait charniere dans un tenon fg, fig. 53. où elle est traversée par une goupille ou une vis h, qui lui laisse la liberté de se mouvoir. La soupape est de même articulée dans un tenon, fig. 54. par le moyen d’une vis qui traverse ses oreilles kk. Les tenons sont fixés sur le corps de l’instrument par le moyen de quelques vis qui le traversent, & vont s’implanter dans le corps de l’instrument. Ces tenons doivent être tellement éloignés les uns des autres, que le crochet de la bascule puisse prendre dans l’anneau de la soupape. Au-dessous de la patte A de la bascule, est un ressort qui la renvoye en en-haut ; ensorte que le crochet de la bascule est toûjours baissé, & par conséquent l’anneau de la soûpape, dont le cuir D est par ce moyen tenu éloigné du trou e. Voy. la fig. 52. Mais lorsqu’on tient le doigt appliqué sur la patte de la bascule, on fait hausser son crochet & l’anneau de la soupape, & par conséquent baisser cette même soupape Dd, dont le cuir s’applique & ferme exactement le trou e. Les trois clés du basson qui ferment les trous 8, 10, 12, sont construites de même ; elles ne different que par les différentes longueurs de leurs bascules.

La grosse piece Bb, comme la petite Dd, est percée dans toute sa longueur d’un trou qui va en s’élargissant de b en B, & terminée de même par deux tenons Bb. Le premier qui est garni de filasse, entre dans le trou C, & l’autre B aussi garni, reçoit le bonnet aA, qui est entouré d’une frette de cuivre ou d’argent, selon que les clés & les autres frettes en sont faites. Le bonnet est percé d’un trou dans toute sa longueur, lequel est la continuation de celui de la grosse piece. La grosse piece est percée de trois trous 10, 11, 12, qui communiquent avec le trou intérieur Bb. Ces trous marqués 10 & 12, se ferment avec les clés brisées C 10, C 12, lorsqu’on appuie le doigt sur la patte de leurs bascules.

A l’extrémité D de la petite piece, on ajuste le bocal eE, qui est un tuyau de cuivre ou d’argent courbe, comme on voit dans la figure ; on fait entrer le tenon E du bocal dans l’ouverture D de la petite piece, qui est garnie d’une frette comme toutes les parties qui en reçoivent d’autres. A l’extrémité e du bocal on ajuste l’anche eF, composée de deux lames de roseau liées sur une broche de fer de la grosseur du bocal en e : on fait entrer l’extrémité de cette partie à la place de la broche de fer qui a servi de moule à l’anche, à l’entour de laquelle on fait encore une autre ligature g, qui peut couler le long des lames dans l’espace de deux ou trois lignes. Cette ligature ou anneau, qu’on peut appeller rasette par analogie à celles de l’orgue, sert à déterminer la longueur gF des lames de l’anche qui doivent battre, & par conséquent à la mettre au ton. Voyez Anche. La longueur du basson prise d<epuis l’extrémité e de l’anche ac du bocal jusqu’à l’extrémité A du bonnet, est de huit piés, réduits à quatre à cause de la courbure en il. Les trous sont percés dans la longueur de ce tuyau qui s’élargit toûjours depuis la pointe e du bocal jusqu’à l’extrémité A du bonnet, où ce trou peut avoir deux pouces un ou de diametre, selon les distances qui conviennent aux tons que ces trous doivent rendre, lesquels sont d’autant plus graves que les trous sont plus éloignés de l’anche. L’ordre des nombres 1, 2, 3, 4, 5, &c. marqués vis-à-vis des trous du basson dans la figure, suivent l’ordre des distances, qui sont d’autant plus grandes, que le nombre qui est vis-à-vis est plus grand. Voyez la figure. Pour joüer de cet instrument, que l’on tient debout devant soi avec les deux mains, il faut d’abord tourner le côté représenté par la figure ABCD, vers soi : on accroche ensuite le ruban qui passe dans l’anneau X, qui est à la frette supérieure du cul CL, à un des boutons de l’habit qui répondent à la partie supérieure de la poitrine, ensorte que le trou 9 réponde vis-à-vis la région ombilicale. L’instrument doit pencher un peu du côté gauche, pour que l’extrémité e du bocal garnie de son anche, se présente à la bouche avec facilité : c’est pour cela que le bocal est mobile, & peut se tourner de différens sens. On porte ensuite la main gauche vers la partie moyenne de l’instrument, avec laquelle on embrasse la grosse piece ; ensorte que le pouce de cette main bouche le 11e trou, & les doigts index, medius & annulaire de cette main, les trous 1, 2, 3, fig. AD & I qui répondent à la petite piece. Le pouce de la main gauche qui sert à boucher le 11e trou, lequel répond à la grosse piece, sert aussi à toucher les deux clés brisées, avec lesquelles on ferme le 10 & le 12e trou. Ce pouce doit pouvoir tout à la fois appuyer sur les deux clés pour les fermer, & boucher le 11e trou.

A l’égard de la main droite que l’on porte vers la partie inférieure de l’instrument, le pouce doit boucher le 9e trou ; le doigt index le 4e ; le doigt medius le 5e, & le doigt annulaire de cette main le 6e. Pour le petit doigt, on s’en sert pour toucher les deux clés du 7e & 8e trou, observant que lorsqu’on touche celle du 7e trou on l’ouvre, & qu’au contraire on ferme le 8e lorsqu’on touche sa clé, à cause de la bascule qui précede la soupape.

Après avoir posé les doigts, on soufflera dans l’anche, comme il sera expliqué à l’article haut-bois, & on observera d’augmenter le vent à mesure que l’on monte sur cet instrument. Cette regle est générale pour tous les instrumens à vent. Quant à son étendue, voyez la table du rapport de l’étendue de tous les instrumens. Tous ceux qui jouent du basson ne peuvent pas faire cette étendue, soit qu’ils ne ménagent pas assez leur vent, ou que l’instrument n’y soit pas propre. Ainsi ils se contentent de descendre en fa si,, & ♮, lesquels tons se forment sans déboucher aucun trou, par la seule maniere de pousser le vent dans l’instrument. Voyez la tablature suivante, où les notes de Musique font connoître quelle partie sonne cet instrument, & les caracteres noirs & blancs qui sont dessous, quels trous il faut fermer & ouvrir pour faire le ton de la note qui est dessus.

Les agrémens se font sur le basson comme sur le haut-bois & les autres instrumens à vent, en exécutant les notes que les agrémens renferment ; & les cadences, en battant sur les trous de la note qui sert de port de voix, & qui ne sont point bouchés dans la note sur laquelle on veut faire la cadence : ainsi pour cadencer le fa premiere octave, qui se forme en débouchant les 9, 10, 11, & 12 trous, la cadence étant préparée du sol, qui a de plus le huitieme trou de débouché, on battra sur le huitieme trou qui est la différence du fa & du sol, lequel restera fermé en finissant. Voyez Haut-bois.