L’Encyclopédie/1re édition/CANDIDAT

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Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 2p. 590).

CANDIDAT, s. m. (Hist. anc. & mod.) se dit en général de toute personne qui aspire à un emploi honorable ou lucratif : Les Romains nommoient ainsi particulierement les prétendans aux charges publiques, qui se mettoient sur les rangs au tems de l’élection des magistrats. Le mot est Latin, candidatus, formé de candidus, blanc, à cause de la robe blanche que ces aspirans portoient. Vêtus de la sorte, ils alloient solliciter les suffrages, accompagnés de leurs proches, de leurs amis, & de leurs cliens. Les plus illustres magistrats qui prenoient intérêt à un candidat, le recommandoient au peuple. De son côté, le candidat averti par ses nomenclateurs, gens chargés de lui faire connoître par noms & surnoms ceux dont il briguoit les suffrages, saluoit tous ceux-ci, embrassoit tous ceux qu’il rencontroit en chemin ou dans la place publique. La loi Tullienne défendoit aux candidats de donner des jeux ou des fêtes au public, de peur que par ce moyen on ne gagnât les suffrages du peuple : mais du reste on n’oublioit rien pour y parvenir ; caresses, intrigues, libéralités, bassesses même, tout étoit prodigué. Dans les derniers tems de la république, on en vint jusqu’à corrompre les distributeurs des bulletins, qui en les donnant au peuple pour le scrutin, glissoient adroitement par-dessous une piece d’or à chacun de ceux dont on vouloit déterminer le suffrage en faveur du candidat, dont le nom étoit inscrit sur ce bulletin. C’étoit pour prévenir cet inconvénient, disent quelques auteurs, qu’on avoit imposé aux candidats la nécessité de ne paroître dans les assemblées qu’avec la robe blanche sans tunique, afin d’ôter tout soupçon qu’ils portassent de l’argent pour corrompre les suffrages : d’autres disent que cet habillement servoit simplement à les faire mieux remarquer dans la foule par leurs cliens & leurs amis. (G)