L’Encyclopédie/1re édition/CAROLINS

La bibliothèque libre.
Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 2p. 692).
◄  CAROLINE
CAROLUS  ►

CAROLINS, adj. pris s. (Hist. ecclés.) nom qu’on donna à quatre livres composés par l’ordre de Charlemagne en 790, pour réfuter le second concile de Nicée.

Ce concile avoit fait plusieurs decrets contre les Iconoclastes sur le culte des images ; decrets très-catholiques, mais qui ayant été envoyés mal traduits aux évêques assemblés à Francfort pour la même cause, & par ordre de Charlemagne, leur parurent contenir une doctrine jusqu’alors inoüie, & qui tendoit à faire rendre aux images un culte fort approchant de celui qu’on rend à Dieu même. Cette erreur de fait engagea Charlemagne à faire composer ces quatre livres, qui contiennent cent vingt chefs d’accusation contre les Grecs. Ces livres furent envoyés au pape Adrien I. à qui ils furent présentés par Angilbert, abbé de Centule. Adrien récrivit à Charlemagne pour soûtenir les décisions du concile de Nicée : mais on persista en France à les rejetter, parce qu’on ne les entendoit pas ; opposition qui cessa pourtant lorsqu’on eut démêlé la véritable pensée des Grecs, & réduit à leur juste sens des expressions qui avoient paru outrées, & révolter les esprits. Aussi les prétendus réformés n’ont-ils jamais pû tirer aucun avantage réel, ni des décisions du concile de Francfort, ni des livres carolins.

On a douté de la vérité & de l’antiquité de ces livres, lorsque M. du Tillet, évêque de Meaux, les donna pour la premiere fois en 1549 sous le nom d’Eliaphilyra ; parce qu’on crut qu’ils avoient été supposés par les nouveaux sectaires, dont ils paroissoient favoriser extrèmement les opinions. Quelques-uns les attribuoient à Angilram, évêque de Metz ; d’autres à Alicuin ; & d’autres enfin à tous les évêques assemblés à Francfort : mais quoiqu’on n’en connoisse pas le véritable auteur, il est certain qu’ils ont été écrits du tems de Charlemagne, comme il paroît par la réponse du pape Adrien, par les conciles de Francfort & de Paris, par le temoignage d’Hincmar, qui les cite, & par les divers manuscrits anciens qu’on en a recouvrés. Dupin, Biblioth. des auteurs ecclésiast. du huitieme siecle. (G)