L’Encyclopédie/1re édition/CAZEMATE

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Texte établi par D’Alembert, Diderot (Tome 2p. 794-795).
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CAZEMATE, s. f. (en terme de Fortification.) est une espece de voûte de maçonnerie pratiquée dans la partie du flanc du bastion proche la courtine, & qui fait une petite retraite, ou un enfoncement vers la capitale du bastion. On y place le canon qui sert à défendre la face du bastion opposé, & à balayer le fond du fossé. Voyez Bastion.

Ce nom vient d’une voûte qui servoit autrefois à séparer les plate-formes des batteries hautes & basses que les Italiens appellent casa armata, & les Espagnols casamata : mais d’autres dérivent ce mot de casa à matti, maison à fous : Covarruvias de casa & mata, maison basse.

La cazemate est quelquefois composée de trois plate-formes l’une au-dessus de l’autre, le terre-plain du bastion étant la partie la plus élevée : mais l’on se contente quelquefois de placer la derniere au-dedans du bastion.

On donne aussi à la cazemate le nom de place basse ou de flanc bas, parce qu’elle est placée au pié du rempart près du fossé ; quelquefois celui de flanc retiré, parce qu’elle est la partie du flanc qui est la plus proche de la courtine, & qui forme le centre du bastion : on la couvroit autrefois d’un épaulement ou d’un corps de maçonnerie rond ou quarré qui mettoit à couvert les batteries, ce qui l’a fait appeller flanc couvert.

On met aujourd’hui rarement les cazemates en usage, parce que les batteries de l’ennemi peuvent ensevelir les pieces de canon qu’elles contiennent, sous les ruines de leurs voutes, outre que la fumée dont elles se remplissent les rend insupportables à ceux qui servent à l’Artillerie. C’est ce qui fait que les Ingénieurs modernes les font à découvert, & se contentent de les munir d’un parapet.

Les places basses & hautes doivent avoir au moins huit toises d’enfoncement ; savoir trois pour le parapet, & cinq pour le terrein ; desorte que s’il y a deux places l’une devant l’autre, elles doivent avoir seize toises d’enfoncement.

Les places basses ont les desavantages suivans.

1°. Qu’il est très-difficile de se servir en même tems des unes & des autres, à cause des éclats & des débris qui tombent continuellement.

2°. Qu’elles deviennent presque inutiles quand la demi-lune est prise, par le commandement qu’elle a sur elles.

3°. Que la quantité des débris qui tombent des places hautes, prépare une montée fort douce à l’ennemi pour monter à l’assaut.

Lorsqu’on a des places basses, il est important que le flanc soit couvert par un orillon qui les mette à l’abri du commandement de la demi-lune. Les meilleurs flancs bas sont ceux qui forment une espece de fausse craie au flanc, à la distance de dix ou douze toises ; ou si l’on veut les tenailles du fossé de M. de Vauban qui en tiennent lieu. Voyez Tenaille, &c. (Q)