L’Encyclopédie/1re édition/COHABITATION

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COHABITATION, s. f. (Jurisp.) se prend en général pour la demeure commune que quelqu’un a avec une autre personne.

C’est en ce sens qu’il est défendu aux clercs de cohabiter avec les personnes du sexe. Décrétal. lib. III. tit. ij.

La cohabitation ou demeure commune entre le pere & les enfans ou entre autres personnes, emporte dans certaines coûtumes une société tacite ; telles sont les coûtumes de Poitou, Troyes, & autres.

Le terme de cohabitation entre personnes conjointes par mariage, signifie quelquefois la demeure commune des conjoints : c’est en ce sens que l’ordonnance de 1639 demande, pour l’honneur & la validité du mariage, une cohabitation publique : le défaut de telle cohabitation est une marque de clandestinité ; au contraire la cohabitation publique assûre la validité du mariage, l’état des conjoints, & celui des enfans. Mais la cohabitation seule n’est pas capable de faire présumer le mariage, à moins que les conjoints n’ayent encore d’autres preuves de possession d’état. Voyez Henris, tome II. liv. VI. quest. 6. Duperier, tome II. p. 454. Augeard, tome II. ch. xxviij.

On entend aussi quelquefois par le terme de cohabitation entre conjoints, la consommation du mariage : il n’est pas nécessaire qu’il y ait eû cohabitation entre les conjoints pour que la femme gagne son douaire, si ce n’est dans les coûtumes qui portent que la femme gagne son douaire au coucher, comme celle de Normandie. Quand on sépare les conjoints d’habitation, on n’entend pas seulement qu’ils auront chacun leur demeure séparée, mais aussi qu’ils seront séparés à toro.

La cohabitation entre autres personnes que les conjoints par mariage légitime, se prend ordinairement pour le commerce charnel qu’un homme a eu avec une fille ou femme autre que sa femme légitime. Comme on a rarement des preuves de la cohabitation, même lorsqu’une fille se trouve enceinte, & qu’elle déclare celui des faits duquel elle l’est, cette déclaration, jointe aux preuves de fréquentation & de familiarité, suffisent pour obliger le pere à payer les frais de gésine, & dommages & intérêts de la mere, s’il y a lieu de lui en adjuger, & à se charger de l’enfant.

Suivant l’ancienne Jurisprudence, dès qu’il y avoit preuve de cohabitation, on condamnoit le garçon à épouser la fille qu’il avoit rendue enceinte, sinon à être pendu : mais présentement cela ne s’observe plus, du moins dans la plûpart des tribunaux. Voyez Mariage. (A)