L’Encyclopédie/1re édition/COTTE
COTTE, s. f. partie du vêtement des femmes ; il s’attache à la ceinture, & descend jusques sur le cou de pié, couvrant toute cette partie du corps. Il n’y a plus que les paysannes qui portent des cottes. Les autres femmes ont des cotillons & des jupes.
Cotte D’armes ; s. f. (Litt. Hist. milit.) habillement militaire qu’on mettoit par-dessus la cuirasse, comme un ornement pour distinguer les différens partis, & le soldat du général. On l’appelloit chez les anciens chlamys, paludamentum, sagum ; & si on en croit la plûpart des auteurs, ce n’étoit qu’une draperie ouverte de tous côtés, & qui s’attachoit sur l’épaule droite avec une boucle ou ardillon. Macrobe rapporte que les anciens comparoient la mappemonde à une cotte d’armes : Plutarque ajoûte qu’Alexandre le grand vit avec plaisir le plan que les architectes avoient fait de la ville d’Alexandrie, qui avoit la figure d’une cotte d’armes macédonienne. Ce qui prouve encore que les cottes d’armes chez les Romains, ainsi que chez les Grecs, n’étoient qu’une draperie qui n’étoit pas fermée, c’est que Néron, au rapport de Suétone, s’en servoit pour berner & faire sauter en l’air ceux qu’il rencontroit la nuit dans les rues : plaisir digne de cet imbécille tyran !
Un autre passage du même auteur (vie d’Othon), détermine encore plus précisément la forme de la cotte d’armes des Romains. Cet écrivain, après avoir dit qu’un centurion nommé Cornelius, étant venu à Rome demander le consulat pour son général, & voyant que les sollicitations étoient infructueuses, leva sa cotte d’armes, & montrant la garde de son épée, « voilà de quoi vous porter à m’accorder ma demande : » rejecto sagulo, ostendens gladii capulum, non dubitasse in curiâ dicere, hic faciet si vos non feceritis. On voit par ces paroles, que la cotte d’armes couvroit les armes de cet officier, & qu’il fut obligé de la relever pour montrer son épée, ce qui ne peut pas convenir à la cuirasse. Ces sortes d’armes, comme les écharpes de nos Cantabres dans la derniere guerre, servoient à distinguer les soldats de chaque parti ; celles des empereurs & des généraux d’armée se nommoient paludamentum, & celles des bas-officiers & des soldats, sagum. Les hauts officiers en avoient de fort longues & de fort riches ; mais le général étoit le seul qui eût le privilége d’en porter une de pourpre : il la prenoit en sortant de la ville, & il la quittoit avant que d’y rentrer.
A l’égard des sayons ou cottes d’armes des Germains, ils ne leur venoient que jusqu’aux hanches. Cluvier nous a conservé la forme de cette cotte d’armes, qui étoit une espece de manteau qui descendoit jusqu’aux hanches, & qui étoit attaché par-devant avec une agraffe ou une petite cheville.
Nos François néanmoins, quoiqu’originaires de la Germanie, avoient coûtume de porter ces manteaux plus longs. Le moine de S. Gal dit que c’étoit un manteau qui descendoit par-devant & par-derriere jusqu’à terre, & qui par les côtés touchoit à peine les genoux. Dans la suite la cotte d’armes des Gaulois, qui étoit beaucoup plus courte, devint à la mode, comme plus propre pour la guerre au rapport du même auteur. Quelques siecles après, Charlemagne rétablit l’ancien usage. Il paroît que sous Louis le Débonnaire on étoit revenu à la cotte d’armes des Gaulois ; mais dans les guerres continuelles que ses successeurs eurent à soûtenir, la mode rechangea ; & comme alors la plûpart des militaires étoient continuellement à cheval, non-seulement la cotte d’armes couvroit tous leurs habits ; mais leur magnificence se renferma dans cet habillement militaire, qu’ils faisoient ordinairement de drap d’or & d’argent, & de riches fourrures d’hermines, de martres zebelines, de gris, de vair, & autres pannes, qu’on peignoit même de différentes couleurs. Marc Velser (lib. IV. Rer. Aug.) prétend que les hérauts d’armes ont emprunté de ces cottes d’armes les métaux, les couleurs, & les pannes qui entrent dans la composition des armoiries.
Quoi qu’il en soit, les hérauts d’armes portent seuls aujourd’hui ce vêtement, que Nicod dit être appellé autrement tunique ; sur quoi il rapporte ces mots de Guaguin au couronnement du roi d’armes. Mont-joie portera la tunique ou cotte d’armes du roi… Au reste les cottes d’armes & les bannieres n’étoient permises qu’aux chevaliers & aux anciens nobles. Voyez dans le recueil de l’acad. des Belles-Lettres, tom. IX., le morceau de M. l’abbé de Vertot sur cette matiere. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.