L’Encyclopédie/1re édition/DANIEL

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DANIEL, (prophétie de) Hist. eccles. & théol. nom d’un des livres canoniques de l’ancien Testament, ainsi nommé de Daniel prophete du Seigneur, sorti de la race royale de David, & qui prophétisa à Babylone où il avoit été mené fort jeune en captivité avec un grand nombre d’autres Juifs ses compatriotes, sous le regne de Joakim roi de Juda.

Nous ne traitons ici de ce livre, qu’en tant qu’on a contesté la canonicité de quelques-unes de ses parties ; & nous emprunterons du P. Calmet ce qu’il en a dit dans son dictionnaire de la Bible, tome I. page 499 & suiv.

Parmi les écrits de Daniel, dit ce savant Bénédictin, il y a des pieces qui ont toûjours constamment passé pour canoniques ; d’autres qui ont été contestées fort long-tems. Tout ce qui est écrit en hébreu ou en chaldéen, car il y a quelques morceaux de chaldéen mêlés avec l’hébreu, tout cela est généralement reconnu pour canonique, tant chez les Juifs que chez les Chrétiens ; mais ce qui ne se trouve qu’en grec a souffert de grandes contradictions, & n’a proprement été reçû pour canonique parmi tous les orthodoxes sans exception, que depuis la décision du concile de Trente. Du tems de saint Jerôme les Juifs étoient partagés à cet égard, comme nous l’apprend ce pere dans sa préface sur Daniel, & sur le chap. xiij. du même prophete. Les uns admettoient toute l’histoire de Susanne, d’autres la rejettoient toute entiere ; quelques-uns en recevoient une partie & en rejettoient une autre. Joseph l’historien, par exemple, n’a rien dit de l’histoire de Susanne, ni de celle de Bel & du dragon ; mais Joseph Ben-Gorion auteur juif, qui a écrit en hébreu, rapporte tout au long ce qui regarde Bel & le dragon, & ne dit rien de l’histoire de Susanne.

Les douze premiers chapitres de Daniel sont partie en hébreu, partie en chaldéen : les deux derniers sont en grec. Il parle hébreu lorsqu’il récite simplement ; mais il rapporte en chaldéen les entretiens qu’il a eus en cette langue avec les Mages & les rois Nabuchodonosor, Baltbasar & Darius le Mede. Il rapporte dans la même langue l’édit que Nabuchodonosor donna après que Daniel eut expliqué le songe que ce prince avoit eu d’une grande statue d’or ; ce qui montre l’extreme exactitude de ce prophete, qui rend jusqu’aux propres paroles des personnages qu’il introduit. Le chap. iij. v. 24 & suiv. jusqu’au 9e. sont en grec, aussi-bien que les deux derniers chapitres ; & c’est une grande question parmi les critiques, de savoir s’ils ont jamais été écrits en hébreu. La version greque que nous avons de tout Daniel, est de Théodotion ; celle des Septante est perdue il y a très-long tems.

Les prophéties de Daniel sont si claires, que Porphyre n’a crû pouvoir se délivrer de leur témoignage & de leur autorité, qu’en supposant que Daniel avoit vécu du tems d’Antiochus Epiphanes, & qu’il avoit alors décrit les évenemens qui se passoient sous ses yeux ; & que d’ailleurs il avoit contrefait l’homme inspiré, en assûrant qu’il avoit été contemporain de Nabuchodonosor & de Balthasar ; mais l’absurdité de la supposition de Porphyre est palpable, & l’existence de Daniel au tems des monarques assyriens, est attestée autant qu’aucun fait historique le puisse être. La plûpart des Rabbins le retranchent du nombre des prophetes, & se contentent de mettre ses écrits au rang des hagiographes. Voyez Hagiographes. (G)