L’Encyclopédie/1re édition/DEBRUTISSEMENT

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DEBRUTISSEMENT, s. m. signifie l’art d’adoucir ou de polir jusqu’à un certain point la surface d’un corps solide, & sur-tout les glaces, miroirs, &c. Voyez Miroir.

Suivant la nouvelle méthode de faire de grandes glaces en les jettant, pour ainsi dire, en moule, à-peu-près de la même maniere que l’on jette le plomb & d’autres métaux, comme il sera dit à l’article Verrerie, leur surface demeurant inégale & raboteuse, elles ont besoin d’être debrutées & polies.

Pour cet effet, la piece de glace se met horisontalement sur une pierre en forme de table, & on la scelle en plâtre ou en mastic afin de l’assûrer davantage, & qu’elle ne branle & ne se déplace point par l’effort de l’ouvrier, ou de la machine dont il se sert pour la débrutir. On met autour une forte bordure de bois qui soûtient la glace, & qui est d’un pouce ou deux plus haut qu’elle. Le fond ou la base de la machine avec laquelle on débrutit, est une autre glace brute qui a environ la moitié des dimensions de l’autre : on y attache une planche avec du ciment : on charge cette planche d’un poids nécessaire pour faciliter le frottement, & on lui donne du mouvement par le moyen d’une roüe ; cette roüe qui a au moins 5 ou 6 pouces de diametre, est faite d’un bois fort dur & fort leger : elle est maniée par deux ouvriers qui sont places l’un vis-à-vis de l’autre, & qui la poussent & la tirent alternativement, desorte cependant qu’ils la font tourner quelquefois en rond suivant que l’opération le demande : par ces moyens il y a une attrition constante & réciproque entre les deux glaces, laquelle est facilitée encore par l’eau & le sable que l’on y employe. A mesure que l’ouvrage s’avance on se sert de sable plus menu, & enfin on prend de la poudre d’émeri.

Il n’est pas nécessaire d’ajoûter que la petite glace supérieure venant à se polir à mesure par l’attrition, il faut en prendre de tems en tems une autre plus brute : mais il faut observer que l’on ne debrutit ainsi par le moulin que les plus grandes pieces de glace ; car pour ce qui est des pieces de la moyenne & de la petite espece, on les travaille à la main, & pour cet effet on attache aux coins de la planche qui couvre la glace supérieure, quatre ances de bois que les ouvriers empoignent pour lui donner les mouvemens nécessaires.

Ce qui reste à faire pour donner la derniere perfection aux glaces, est rapporté sous l’article polissure. Voyez. Chambers.