L’Encyclopédie/1re édition/DELIES

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DELIES, adj. pris subst. (Hist. anc. & Mythol.) delia, fête qui se célebroit à Athenes en l’honneur d’Apollon, surnommé delius. La principale cérémonie de cette fête étoit une ambassade des Athéniens à l’Apollon de Délos, ou bien un pélerinage qu’ils y faisoient faire tous les cinq ans. Ils choisissoient pour cela un certain nombre de citoyens, qu’on chargeoit de cette commission ; c’est pourquoi on les appelloit Déliastes, Δηλιασταὶ, ou Théores, Θεωροὶ c’est-à-dire les voyans, ceux qui vont voir. Le chef de l’ambassade ou de la députation s’appelloit archithéore, ἀρχιθεωρὸς. On y joignoit quatre personnes de la famille des Ceryques, prêtres descendans de Mercure, qui demeuroient à Délos toute l’année pour y servir dans le temple. Toute cette députation partoit sur cinq vaisseaux, qui portoient tout ce qui étoit nécessaire pour la fête & les sacrifices.

Le vaisseau qui portoit les déliastes ou théores, étoit appellé Déliade, Δηλιὰς ou Théoride ; les quatre autres vaisseaux sacrés qui l’accompagnoient se nommoient le Parale, l’Antigonide, la Ptolemaïde, l’Ammonide. Cette circonstance a donné lieu à plusieurs disputes entre les savans qui se repaissent des niaiseries de la critique.

Les déliastes qui montoient le premier vaisseau, étoient couronnés de laurier. Quand ils étoient arrivés, ils offroient d’abord un sacrifice à Apollon, après lequel de jeunes filles dansoient autour de l’autel une danse nommée en grec γέρανος, & dans laquelle, par leurs mouvemens embarrassés & la maniere dont elles figuroient ensemble, elles représentoient les tours & les détours du labyrinthe. V. Danse. Quand les déliastes revenoient, le peuple alloit au-devant d’eux, & les recevoit avec de grandes acclamations & de grands cris de joie. Ils ne quittoient point leur couronne que toute leur commission ne fût terminée, après quoi ils les alloient consacrer à quelque divinité dans son temple.

Tout le tems que duroit l’allée & le retour, & toute la cérémonie, s’appelloit les délies ; & pendant tous ces jours-là les lois défendoient d’exécuter aucun criminel, privilége singulier de cette fête d’Apollon, & que n’avoient pas même celles de Jupiter ; car Plutarque remarque que ce fut un jour consacré à Jupiter, qu’on fit prendre à Phocion le poison auquel il avoit été condamné ; & on attendit au contraire trente jours pour le donner à Socrate, parce que c’étoient les délies, & que le vaisseau envoyé à Délos n’étoit point encore de retour.

Thucydide dit que ce fut pendant l’hyver de la sixieme année de la guerre du Péloponnese, que les Athéniens instituerent les délies, après qu’ils eurent expié l’île de Délos, & en eurent ôté tous les tombeaux, & ordonné que personne n’y naîtroit & n’y mourroit dans la suite, mais que l’on transporteroit tous les moribonds dans une petite île appellée Rhenie, qui touche presqu’à Delos. Long tems avant ce tems-là, les Ioniens & les insulaires voisins de l’Ionie faisoient des especes de délies, c’est-à-dire des fêtes & des jeux semblables aux éphesies qu’ils célebrerent dans la suite. Dict. de Trév. & Chambers. (G)