L’Encyclopédie/1re édition/DONATISTES

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DONATISTES, s. m. pl. (Hist. ecclés.) anciens schismatiques d’Afrique, ainsi nommés de Donat, chef de leur parti.

Ce schisme qui affligea long-tems l’Eglise, commença l’an 311 à l’occasion de l’élection de Cécilien, pour succéder à Mensurius dans la chaire épiscopale de Carthage. Quelque canonique que fût cette élection, une brigue puissante, formée par une femme nommée Lucille, & par Botrus & Célestius, qui avoient eux-mêmes prétendu à l’évêché de Carthage, la contesta, & lui en opposa une autre en faveur de Majorin, sous prétexte que l’ordination de Cécilien étoit nulle, ayant, disoient-ils, été faite par Félix évêque d’Aptonge, qu’ils accusoient d’être traditeur, c’est-à-dire d’avoir livré aux Payens les livres & les vases sacrés, pendant la persécution. Les évêques d’Afrique se partagerent pour & contre ; ceux qui tenoient pour Majorin, ayant à leur tête un nommé Donat évêque des Cases-Noires, furent appellés Donatistes.

Cependant la contestation ayant été portée devant l’empereur, il en remit le jugement à trois évêques des Gaules ; savoir Maternus de Cologne, Reticius d’Autun, & Marin d’Arles, conjointement avec le pape Miltiade. Ceux-ci, dans un concile tenu à Rome, composé de quinze évêques d’Italie, & dans lequel comparurent Cécilien & Donat, chacun avec dix évêques de leur parti, déciderent en faveur de Cécilien. Ceci se passa en 313 ; mais la division ayant bientôt recommencé, les Donatistes furent de nouveau condamnés par le concile d’Arles en 314, & enfin par un édit de Constantin du mois de Novembre 316.

Les Donatistes, qui avoient en Afrique jusqu’à trois cents chaires épiscopales, voyant que toutes les autres églises adhéroient à la communion de Cécilien, se précipiterent ouvertement dans le schisme ; & pour le colorer, ils avancerent des erreurs monstrueuses, entre autres ; que la véritable église avoit péri par-tout, excepté dans le parti qu’ils avoient en Afrique, regardant toutes les autres églises comme des prostituées qui étoient dans l’aveuglement ; 2°. que le baptême & les autres sacremens conférés hors de l’église, c’est-à-dire hors de leur secte, étoient nuls : en conséquence ils rebaptisoient tous ceux qui sortant de l’église Catholique entroient dans leur parti. Il n’y eut rien qu’ils n’employassent pour répandre leur secte : ruses, insinuations, écrits captieux, violences ouvertes, cruautés, persécutions contre les Catholiques ; tout fut mis en usage, & à la fin réprimé par la sévérité des édits de Constantin, de Constance, de Théodose, & d’Honorius.

Ce schisme au reste étoit formidable à l’Eglise par le grand nombre d’évêques qui le soûtenoient ; & peut-être eût-il subsisté plus long-tems, s’ils ne se fussent d’abord eux-mêmes divisés en plusieurs petites branches, connues sous les noms de Claudianistes, Rogatistes, Urbanistes, & enfin par le grand schisme qui s’éleva entr’eux à l’occasion de la double élection de Priscien & de Maximien pour leur évêque, vers l’an 392 ou 393 : ce qui fit donner aux uns le nom de Priscianistes, & aux autres celui de Maximinianistes. S. Augustin & Optat de Mileve les combattirent avec avantage : cependant ils subsisterent encore en Afrique jusqu’à la conquête qu’en firent les Vandales, & l’on en trouve aussi quelques restes dans l’histoire ecclésiastique des vj. & vij. siecles.

Quelques auteurs ont accusé les Donatistes d’avoir adopté les erreurs des Ariens, parce que Donat leur chef y avoit été attaché ; mais S. Augustin, dans son épître 185 au comte Boniface, les disculpe de cette accusation. Il convient cependant que quelques-uns d’entre eux pour se concilier les bonnes graces des Goths qui étoient Ariens, leur disoient qu’ils étoient dans les mêmes sentimens qu’eux sur la Trinité ; mais en cela même ils étoient convaincus de dissimulation par l’autorité de leurs ancêtres, Donat leur chef n’ayant pas été Arien. Les Donatistes sont encore connus, dans l’histoire ecclésiastique, sous les noms de Circoncellions, Montenses, Campitæ, Rupitæ, dont le premier leur fut donné à cause de leurs brigandages, & les trois autres, parce qu’ils tenoient à Rome leurs assemblées dans une caverne, sous des rochers, ou en plaine campagne. Voyez Circoncellions, &c. (G)