L’Encyclopédie/1re édition/ECLUSE
ECLUSE, du mot latin excludere, empêcher, en Architecture, se dit généralement de tous les ouvrages de maçonnerie & de charpenterie qu’on fait pour soûtenir & pour élever les eaux ; ainsi les digues qu’on construit dans les rivieres pour les empêcher de suivre leur pente naturelle, ou pour les détourner, s’appellent des écluses en plusieurs pays : toutefois ce terme signifie plus particulierement une espece de canal enfermé entre deux portes ; l’une supérieure, que les ouvriers nomment porte de tête ; & l’autre inférieure, qu’ils nomment porte de mouille, servant dans les navigations artificielles à conserver l’eau, & à rendre le passage des bateaux également aisé en montant & en descendant ; à la différence des pertuis qui n’étant que de simples ouvertures laissées dans une digue, fermées par des aiguilles appuyées sur une brise, ou par des vannes, perdent beaucoup d’eau, & rendent le passage difficile en montant, & dangereux en descendant.
Ecluse à tambour, est celle qui s’emplit & se vuide par le moyen de deux canaux voûtés, creusés dans les joüilleres des portes, dont l’entrée, qui est peu au-dessus de chacune, s’ouvre & se ferme par le moyen d’une vanne à coulisse, comme celle du canal de Briare.
Ecluse à vannes, celle qui s’emplit & se vuide par le moyen de vannes à coulisse pratiquées dans l’assemblage même des portes, comme celles de Strasbourg & de Meaux.
Ecluse quarrée, celle dont les portes d’un seul ventail se ferment quarrément, comme les écluses de la riviere de Seine à Nogent & à Pont, & celles de la riviere d’Ourque. Voyez Canal & Digue. (P)
* Ecluse, (Pêche.) c’est ainsi qu’on nomme dans l’île d’Oleron, les pêcheries appellées par les pêcheurs du canal, pares de pierre ; elles sont bâties de pierres seches, sans mortier ni ciment : les murailles en sont épaisses & larges ; elles ont du côté de la mer sept à huit piés de hauteur : elles sont moins fortes & moins hautes, à mesure qu’elles approchent de la terre : les pêcheurs n’y prendroient pas un poisson, si elles étoient construites selon les ordonnances. L’exposition de la côte & la violence de la marée, font qu’elles sont toutes au moins à quatre cents brasses du passage ordinaire des vaisseaux. Si l’on a l’attention de les arrêter-là, elles ne gêneront point la navigation ; les bâtimens qui aborderoient à cette côte, seroient en pieces avant que d’atteindre aux écluses. Il seroit à souhaiter qu’elles fussent multipliées, & que la côte en fût couverte ; elles formeroient une digue qui romproit la brise & les lames qui rongent sans cesse le terrein, & minent peu-à-peu l’île. Ces pêcheries ont différentes figures ; les unes sont quarrées, d’autres arrondies ; il y en a d’ovales & d’irrégulieres : il y en a qui n’ont qu’un de ces égouts, que les pêcheurs appellent passes, gorres ou bouchots ; d’autres en ont deux, & même trois : on y place des bourgnes & bourgnons, où sont arrêtés les poissons, gros & petits. On appelle bourgnes, ces tonnes, baches ou gonnatres que les pêcheurs de la baie du Mont-Saint-Michel mettent au fond de leurs pêcheries. On appelle bourgnons, les paniers, nasses & baschons qui retiennent par la petitesse des intervalles de leurs claies, tout ce qui s’échappe des bourgnes. Le poisson reste à sec dans les bourgnons, quand la mer est retirée. Le bourgnon est soûtenu par un clayonnage bas & petit, de dix-huit pouces de hauteur. S’il est bon de conserver les écluses, il est encore mieux de supprimer les bourgnes & bourgnons. Les écluses sont d’autant moins nuisibles aux côtes de l’île, que ces côtes sont ferrées & sur fond de roche, où le frai se forme rarement, & où le poisson du premier âge ne séjourne guere. Les écluses qui sont quarrées, ont leurs gorres ou passes placées aux angles. Ces passes ont deux à trois piés de large ; c’est toute la hauteur du mur, & une claie de bois les ferme. Les murs sont exactement contigus aux bourgnes. Ces bourgnes sont enlacées d’un clayonnage qui traverse par le haut l’ouverture de la passe : or pour rendre la pêche & plus sûre & plus facile, on éleve en-dedans de l’écluse un petit mur appellé les bras de l’écluse ; il est de pierre seche, & va en se rétrécissant à mesure qu’il s’avance vers l’ouverture de la bourgne : c’est ainsi que le poisson y est conduit, & y reste quand la marée se retire. Les tems orageux sont les plus favorables pour la pêche des écluses, le poisson allant toûjours contre le vent, & le vent le plus favorable étant celui qui souffle de terre vers la pêcherie. Pendant les mortes-eaux on ne prend rien ; les pêcheries ne découvrent point en été & dans les grandes chaleurs, le gain ne vaudroit pas la peine.
Ecluse ou Sluis, (Géogr. mod.) ville du comté de Flandres, aux Pays-bas hollandois. Long. 20. 54. lat. 51. 18.
Il y a une autre ville du même nom dans la Flandre walonne.