L’Encyclopédie/1re édition/ECRAIN ou ECRIN

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ECRAIN ou ECRIN, s. m. (Arts.) terme synonyme à baguier ; petit coffre où les dames mettent leurs pierreries, & les curieux leurs pierres gravées.

Dans les beaux jours de la Grece & de Rome, les amateurs des pierres gravées desirant de les tenir continuellement en garde contre les frottemens, l’usure, & autres accidens qui pouvoient leur arriver, les conservoient précieusement avec leurs anneaux, leurs bagues & leurs cachets, dans une cassette portative qu’ils appelloient δακτυλιοθήκη, dactyliotheca. Nous ignorons comment étoient faites ces cassettes, mais cela nous importe fort peu.

Les écrains ou baguiers de nos jours, sont de petits coffrets ordinairement couverts de chagrin, dont l’intérieur est distribué en plusieurs rangs de petites cellules paralleles, & dressées en maniere de sillons. On y place les bagues & pierres gravées, de façon que le jonc posé debout, entre dans le fond du sillon, & la pierre ou le chaton pose horisontalement sur les rebords du sillon, dont les intervalles sont pour l’ordinaire couverts de velours. On a soin que le couvercle de l’écrain soit doublé d’étoffe mollette, & même garni d’une coüete ou de coton, afin que venant à se rabattre sur les pierres gravées, la compression ni le frottement ne puissent leur nuire.

Quand on ne possede pas un grand nombre de pierres gravées, on se contente de ces sortes d’écrains ou baguiers ; mais si la collection qu’on a faite de pierres gravées est nombreuse, on ne peut se dispenser de les ranger dans des layettes, c’est-à-dire dans de petits tiroirs plats, qui seront placés au-dessus l’un de l’autre dans une armoire faite exprès.

Ces layettes seront distribuées en-dedans, comme les écrains, & les pierres y seront disposées de la même maniere. Les gravures qui ne sont environnées que d’un cercle en façon de médaillon, seront mises dans quelques-uns de ces tiroirs qu’on aura réservés vuides, & sans aucunes loges, & y seront seulement assujetties avec de petits clous, pour empêcher qu’elles ne se déplacent, & qu’elles ne se brisent ou ne s’écornent en démarrant.

De cette maniere les pierres gravées d’un curieux occuperont moins de place, il les pourra faire voir plus commodément & plus honorablement pour lui ; & réunies toutes ensemble, elles pourront être gardées sous une seule clé : car pourquoi ne les mettroit-il pas en sûreté & sous la clé ? elles font ses plaisirs, du moins pour l’art du travail, avec autant de fondement que les pierreries font les délices des femmes du monde ; & il y trouve de plus des portraits, des figures qui, sans être un vain appareil de luxe, servent à entretenir & à cultiver le goût, & rappellent souvent des faits à la mémoire. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.