L’Encyclopédie/1re édition/ENCAPUCHONNER
ENCAPUCHONNER, (S’) S’ARMER, v. pass. & termes synonymes, (Manége.) L’un & l’autre expriment l’action d’un cheval qui, pour ne point consentir à l’effet des renes, déplace sa tête & baisse le nez, en le ramenant en-arriere de la ligne perpendiculaire sur laquelle il devroit être.
Je crains fort que M. de la Broue n’ait erré, lorsqu’il a voulu remonter aux raisons de l’application du mot armer usité dans ce sens. Il prétend que cette expression n’a été employée que parce que le cheval, dans cette position, présentant le haut du front, doit donner dans une troupe serrée avec beaucoup plus d’assûrance que s’il avoit le nez legerement en-avant : car il semble, dit-il, que le cheval se met en garde pour vouloir heurter ou soûtenir un choc ; c’est pourquoi on nomme cette posture s’armer. Quelque respectable que puisse être l’autorité de cet homme aussi malheureux que célebre, je ne puis m’empêcher de penser que nous n’avons adopté en pareil cas le terme dont il s’agit, que parce que l’animal, dans cette attitude, s’arme précisément contre le cavalier, puisque dès-lors il défend ses barres, ses levres, sa langue, sa barbe, & se soustrait à tous les mouvemens de la main.
En effet, en baissant ainsi la tête, il appuie les branches du mords ou contre son encolure, ou contre son poitrail ; or comme la main n’a de pouvoir & d’empire qu’autant qu’elle peut transmettre ses impressions jusque dans la bouche, & qu’elles ne sauroient y parvenir & s’y manifester que par le moyen des branches, qui sont le levier qu’elle doit mouvoir, il suit de leur appui & de leur fixation contre ces parties du corps de l’animal, que toutes ses opérations sont inutiles, & qu’elles se trouvent constituées dans une entiere impuissance.
Les chevaux dont l’encolure est foible & débile, sont plus portés à s’encapuchonner que les autres.
Il est assez difficile de remédier à cette imperfection, sur-tout quand le cheval en a contracté l’habitude, & qu’il a reconnu tous les avantages qu’il peut retirer d’une semblable défense ; car il n’est, pour ainsi dire, aucune action de la main qui puisse véritablement porter le nez de l’animal en-avant, elles paroissent toutes plûtôt propres à le ramener. Nous trouvons cependant une ressource contre le cheval qui s’arme, lorsque nous rendons l’angle que forment l’extrémité inférieure des renes & le bas des branches, beaucoup plus aigu par l’élévation & par le port de notre main en-avant. L’effet de ce changement de position est tel, que l’embouchure, non-seulement en appuyant sur les barres, mais en remontant & en les froissant, contraint l’animal de se relever, & le desarme. Cette voie une fois découverte, il s’agit encore de l’employer dès que le cheval tend à s’armer de nouveau, & avant qu’il se soit encapuchonné : une grande attention à pratiquer ainsi, pourroit peut-être corriger entierement ce défaut, qui a engagé nombre d’écuyers à chercher vainement dans des embouchures de plusieurs especes, dans des billots cannelés & arrêtés dans les sous-gorges, dans des boules de bois placées à l’angle de l’os maxillaire inférieur, dans des pointes fixées au bas des branches, &c. des moyens qui ne leur ont jamais réussi.
Le bridon peut être aussi, dans de pareilles circonstances, d’une véritable utilité. (e)