L’Encyclopédie/1re édition/ENDIVE

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ENDIVE, s. f. (Bot. Mat. méd. & Jard.) en latin endivia ou intybus, espece de chicorée : cependant Ray l’en distingue, tant à cause de ses feuilles qui sont plus courtes, & non découpées, que parce que cette plante est annuelle, au lieu que la chicorée est vivace. Il y a trois sortes d’endives en usage ; savoir l’endive à feuilles larges ou commune, la petite endive, & l’endive ou chicorée frisée.

L’endive à feuilles larges, ou commune, autrement dite chicorée blanche, est nommée par les Botanistes endivia latifolia, scariola latifolia, endivia vulgaris, &c.

Ses racines sont fibreuses & laiteuses : ses feuilles sont couchées sur terre avant qu’elle monte en tige ; elles sont longues, larges, semblables à celles de la laitue, crénelées quelquefois à leur bord, un peu ameres. Les feuilles qui sont sur la tige, sont semblables à celles du lierre, mais plus petites. La tige est haute d’une coudée, ou d’une coudée & demie ; lisse, cannelée, creuse, branchue, tortue, donnant du lait quand on la blesse. Ses fleurs naissent à l’aisselle des feuilles ; elles sont bleues, semblables à celles de la chicorée sauvage, aussi-bien que les graines.

La petite endive, en latin endivia minor, seu angustifolia, off. ne differe de la précédente que par ses feuilles qui sont plus étroites, plus ameres au goût ; & par sa tige qui est plus branchue.

L’endive ou chicorée frisée, endivia crispa seu romana, cicorium crispum, off. a ses feuilles plus grandes que celles de l’endive commune. Elles sont crêpues, & sinuées à leur fond. Sa tige est plus élevée, plus grosse & plus tendre que celle des autres endives. Sa graine est noire. Il y a long tems que les Jardiniers ont l’art de rendre frisée l’endive commune, quoique Ray regarde ces deux plantes comme étant d’une espece différente.

On seme l’endive dans les jardins, pour l’usage de la cuisine. Lorsqu’on la seme au printems, elle croît promptement, fleurit, porte des graines en été, & meurt ensuite ; mais quand on la seme en été, elle dure l’hyver, pourvû qu’on la couvre de terre au commencement de l’automne, après avoir lié auparavant ses feuilles : elle devient alors blanche comme de la neige, agréable au goût, & peut tenir lieu de salade en hyver. Voyez dans Miller l’art de sa culture.

Les feuilles fraîches d’endive verte paroissent contenir un sel essentiel, nitreux, ammoniacal, mêlé avec un peu d’huile subtile & de terre. Elles ne donnent dans les épreuves chimiques aucune marque d’acide, à cause de la grande quantité de sel urineux. Les feuilles d’endive que l’on a blanchies en les liant, donnent quelqu’acide, mais moins de sel volatil & de terre. Leur suc, quand on les lie pour les blanchir, fermente un peu intérieurement ; & par-là les sels volatils, qui sont en grande quantité dans cette plante, sont un peu développés, s’envolent en partie, & il reste de l’acide & de l’eau : la terre est, par cette même fermentation, mêlée plus intimement avec les autres principes. Ces feuilles ainsi blanchies, sont plus tendres & plus agréables au goût, que lorsqu’elles sont vertes, à cause de la partie acide, qui est plus développée avec les sels alkalis & les huiles. Les feuilles vertes sont ameres, à cause de la grossiereté des molécules salines, & de leur différent mélange avec l’huile & la terre.

Les endives ne sont guere moins connues dans les boutiques d’apoticaires que dans les cuisines ; on les y employe vertes & blanchies, sur-tout les feuilles, rarement les graines, & presque jamais les racines. Toutes les endives sont rafraîchissantes, détersives & apéritives, en vertu de leur sel nitreux, ammoniacal, subtil, délayé dans beaucoup de flegme. Elles rafraîchissent encore, en emportant les humeurs retenues dans les visceres ; elles amollissent & détachent la bile visqueuse ; elles divisent la sérosité gluante ou la pituite épaissie. Elles sont donc utiles dans la jaunisse, dans les fievres ardentes & bilieuses, dans les obstructions du foie, dans toutes les inflammations & les hémorrhagies : en un mot, ses vertus sont les mêmes que celles de la chicorée. On les employe dans les bouillons, les aposemes tempérans, rafraîchissans & apéritifs. On les joint commodément aux feuilles de bourache, de buglose, de laitue, de pourpier, de pimprenelle, d’aigremoine, de scolopendre, de fumeterre. On en donne aussi le suc clarifié, ou la décoction, à la dose que l’on veut. Enfin la graine d’endive est mise au nombre des quatre petites semences froides, & entre dans les émulsions, au défaut des autres graines. Voyez Ray, Tournefort, Bradley, Herman, Miller, Geoffroy ; ils vous instruiront completement sur cette plante. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.