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L’Encyclopédie/1re édition/EPICHERÊME

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EPICHERÊME, s. f. (Logique.) L’école a donné le nom d’épicherême aux syllogismes dans lesquels l’on joint à chaque prémisse sa preuve, au moins lorsque chacune en a besoin. M. de Crousaz en donne l’exemple suivant :

Il est raisonnable de penser que les biens qui ont le plus de rapport à ce que notre nature renferme de plus excellent, sont les plus capables de nous rendre heureux ; car la félicité & la perfection doivent aller d’un pas égal, puisqu’elles sont l’une & l’autre notre but.

Or la science & la sagesse sont des biens qui perfectionnent ce qu’il y a en nous de plus excellent, puisque l’entendement & la volonté sont des facultés beaucoup plus estimables que les sens.

Il est donc raisonnable de penser que l’on se rendra plus heureux par la connoissance & par la sagesse, que par les voluptés des sens.

L’épicherême, dit-on, a un grand avantage ; c’est de ne point retarder l’impatience de l’homme, parce qu’elle prouve ses prémisses en les avançant : ce qui est court & très-agréable ; mais il ne s’agit pas ici d’agrément. Ou de si courtes preuves sont inutiles par l’évidence de la proposition, ou elles ne sont pas suffisantes pour la démontrer. L’épicherême de M. de Crousaz lui-même n’est peut-être pas trop solide ; mais qu’il le soit ou non, je dis que des preuves que l’on fait passer si rapidement devant l’esprit, ne sont guere propres qu’à l’ébloüir, au lieu de l’éclairer : ainsi l’usage de ce syllogisme irrégulier, qu’on nomme épicherême, n’est bon que pour former les récapitulations des orateurs, quand les principes d’où dépend leur conclusion, ont déjà été précédemment établis & prouvés par ordre. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.