L’Encyclopédie/1re édition/FRÉGATE

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FRÉGATE, s. f. (Marine.) c’est un vaisseau de guerre peu chargé de bois, qui n’est pas haut élevé sur l’eau, leger à la voile, & qui n’a ordinairement que deux ponts. On prétend que les Anglois ont été les premiers qui ayent appellé frégates sur l’Océan, les bâtimens longs armés en guerre, qui ont le pont beaucoup plus bas que celui des galions ou des navires ordinaires. Ce mot de frégate tire son origine de la mer Méditerranée, où l’on appelloit frégates de longs bâtimens à voile & à rame qui portoient couverte, & dont le bord qui étoit beaucoup plus haut que celui des galeres, avoit des ouvertures comme des sabords pour passer les rames : mais cette sorte de bâtimens n’est plus d’usage, & les frégates sont aujourd’hui des vaisseaux de guerre qui vont après les vaisseaux du troisieme rang, & l’on désigne leur force & leur grandeur par le nombre de leurs canons,

Les frégates depuis 32 canons jusqu’à 46 ont deux ponts, deux batteries completes, un gaillard, un barrot en avant du grand-cabestan, un château d’avant de 23 piés de long.

Les frégates depuis 30 jusqu’à 32 canons ont deux pont, une batterie complete sur le deuxieme pont, un gaillard jusqu’au grand-cabestan, un château d’avant de 20 piés de long. On peut faire une frégate de ce rang qui n’auroit qu’un pont, une batterie complete, & un gaillard, avec un château d’avant, qui seroient séparés au milieu de la distance nécessaire pour placer la chaloupe sur le pont.

Une frégate de 28 canons a deux ponts, & la plus grande partie du canon se place sur le deuxieme pont ; il n’y a sur le premier que huit canons, quatre de chaque côté, un gaillard prolongé de trois barrots en-avant du mât d’artimon, & un château d’avant de 19 piés de longueur.

Depuis quelque tems on a changé cet usage, & maintenant une frégate de 28 à 30 canons n’auroit qu’un pont, sur lequel il y auroit 24 canons, & quatre ou six sur son gaillard d’arriere. Cette disposition est bien meilleure, quand les frégates ont leur batterie élevée ; car les huit canons qu’on mettoit sur le premier pont étant fort près de l’eau, étoient presque toûjours hors de service.

Ure frégate de 22 à 24 canons n’a qu’un pont, un gaillard, & un château d’avant de 18 piés de longueur.

Au-dessous de 20 canons ce ne sont plus des frégates ; on les nomme corvettes, qu’on distingue comme les frégates, par le nombre de leurs canons.

Ce qu’on vient de voir est tiré de l’architecture navale, que j’ai eu occasion de citer en plus d’un endroit ; & pour entrer dans un plus grand détail, j’y ai joint le devis d’une frégate de cent quarante-cinq piés de long de l’étrave à l’étambot, trente-six piés de bau, & quinze piés de creux, dressé par un habile constructeur.

La frégate a cent trente piés de quille portant sur terre, & la quille a un pié neuf pouces en quarré.

L’étrave a vingt-huit piés de hauteur à l’équerre, un pié cinq pouces d’épaisseur, trois piés cinq pouces de large par le haut, deux piés dix pouces au milieu, trois piés cinq pouces par le bas, trois piés trois pouces de ligne courbe, douze piés quatre pouces de quête.

L’étambot a vingt sept piés de long à l’équerre ; un pié sept pouces d’épais, deux piés de large par le haut, deux piés sept pouces à la pointe de l’arcasse, sept piés par le bas, neuf pouces de ligne courbe, deux piés sept pouces de quête.

La lisse de hourdi a vingt-sept piés de long, un pié neuf pouces d’épais, un pié sept pouces de large en son milieu, un pié cinq pouces par les bouts, un pié d’arc ou de rondeur.

La pointe de l’arcasse en-dehors est à douze piés au-dessous de la tête de l’étambot, ou de son bout d’en-haut.

Les alonges de poupe ont vingt-quatre piés de hauteur, prise au niveau de la tête de l’étambot, & sont à la distance de seize piés l’une de l’autre.

Des deux grands gabarits, celui qui est le premier du côté de l’arriere est pose à soixante & quinze piés du dehors de l’étambot, & l’autre est onze piés plus en-avant. Le premier gabarit de l’avant est posé sur le ringot, & a trente-deux piés six pouces de distance d’un de ses côtés à l’autre à la baloire. Le dernier gabarit ou le premier de l’arriere, est posé à autant de distance de l’étambot que l’étrave a de quête, ou un peu plus, c’est-à-dire à douze piés six pouces. Il y a de distance de l’un de ses côtés à l’autre, vingt-neuf piés six pouces pris à la baloire, & vingt-quatre piés pris à neuf piés de hauteur au-dessus de la quille.

La plus basse préceinte a un pié trois pouces de large, & sept pouces d’épais ; la seconde a un pié deux pouces de large, & sept pouces d’épais ; la fermure qui est entre-deux, a un pié neuf pouces de large ; la troisieme préceinte a un pié un pouce & demi de large, & la fermure, qui est la fermure des sabords, a deux piés six pouces ; la quatrieme préceinte a un pié un pouce de large, & six pouces d’épais, & la fermure entre la troisieme & la quatrieme, a un pié quatre pouces aussi de largeur. La lisse de vibord a un pié de large, & six pouces d’épais ; le bordage entre la quatrieme préceinte & la lisse de vibord, a deux piés trois pouces ; & les sabords de la seconde bande y sont percés.

Le grand mât a quatre-vingts-six piés de long, & deux piés six pouces d’épais dans l’étambraie. Le ton pris sur les barres de hune, a neuf piés de hauteur ; & sous les barres de hune, six piés neuf pouces. Le mât de misene a soixante & dix-sept piés de long, & deux piés trois pouces & un quart d’épaisseur ou de diametre dans l’étambraie. Le ton pris sur les barres de hune a six piés de long, & quatre piés six pouces sous les barres. Le mât d’artimon a soixante-quatre piés cinq pouces de long, & un pié sept pouces & demi d’épais dans l’étambraie. Le ton pris sur les barres de hune, a six piés de long & quatre piés six pouces sous les barres. Le mât de beaupré a cinquante-quatre piés de long, & deux piés quatre pouces & demi d’épais sur l’étrave en-dedans. Le grand mât de hune a soixante piés de long ; le mât de hune d’avant, cinquante-quatre piés ; le grand perroquet, vingt-sept piés ; le perroquet d’avant, vingt-trois piés. (Z)

Frégate legere, (Marine.) c’est un vaisseau de guerre bon voilier, qui n’a qu’un pont. Il est ordinairement monté depuis seize jusqu’à vingt-quatre pieces de canon. (Z)

Frégate, (Hist. nat. Ornith.) oiseau des Antilles ainsi appellé, parce que son vol est très-rapide. Il n’a pas le corps plus gros qu’une poule ; mais il est très-charnu. Les plumes du mâle sont noires comme celles du corbeau ; lorsqu’il est vieux, il a sous la gorge une grande crête rouge comme celle d’un coq. La femelle n’en a point ; ses plumes sont blanches sous le ventre. Le cou est médiocrement long, & la tête petite. Les yeux sont gros, noirs, & aussi perçans que ceux de l’aigle ; le bec est de couleur noire, long de six à sept pouces, assez gros, droit dans la plus grande partie de sa longueur, & crochu à l’extrémité ; les pattes sont fort courtes, & les serres ressemblent à celles du vautour, mais elles sont noires. Cet oiseau a sept à huit piés d’envergure : aussi on prétend qu’il s’éloigne des terres de plus de trois cents lieues : quoiqu’il s’éleve quelquefois à une grande hauteur, il apperçoit toûjours les poissons volans qui s’élevent au-dessus de l’eau pour se sauver des dorades, alors les frégates s’abaissent précipitamment jusqu’à une certaine distance de la surface de la mer, & enlevent les poissons volans dans leur bec, ou dans leurs serres. On a donné le nom d’islette des frégates, à une île dans le petit cul-de-sac de la Guadeloupe, parce qu’on y trouvoit beaucoup de ces oiseaux qui venoient des environs pour passer la nuit dans cette île, & pour y faire leur nid : mais on les a obligé de la deserter en leur donnant la chasse, pour avoir de leur graisse, que l’on regarde dans les Indes comme un souverain remede contre la sciatique. On les frappe avec de longs bâtons, lorsqu’elles sont sur leur nid, & elles tombent à demi-étourdies. On a vû dans une de ces chasses, que les frégates qui prenoient leur essor étant épouvantées, rejettoient chacune deux ou trois poissons grands comme des harengs, en partie digérés. Hist. nat. des Ant. par le P. du Tertre, tom. II. (I)