L’Encyclopédie/1re édition/GAULE
GAULE ou LES GAULES. (Géog.) L’ancienne Gaule a été une des plus célebres régions de l’Europe ; elle avoit au levant la Germanie & l’Italie, les Alpes la séparant de celle-ci, & le Rhin de celle-là. La mer d’Allemagne & celle de Bretagne la baignoient au nord, l’océan Aquitanique ou occidental au couchant, & la mer Méditerranée au midi ; les montagnes des Pyrénées la séparoient de l’Espagne entre le midi & le couchant.
Cette région n’étoit pas une monarchie particuliere ; elle étoit possédée par un grand nombre de peuples indépendans les uns des autres : ses plus considérables montagnes étoient les Alpes, les Pyrénées, le Mont-Jura & les Cevenes ; ses principales rivieres le Rhin, la Meuse, la Seine, la Loire, la Garonne, le Rhone & la Saone. Elle renfermoit le royaume de France, tel qu’il est aujourd’hui, la Savoie, la Suisse, le Piémont, une partie du pays des Grisons, & toute la partie d’Allemagne & des Pays-bas qui sont au couchant du Rhin.
C’étoit-là la vraie Gaule ; mais les Gaulois ayant passé les Alpes, & conquis une partie de l’Italie, ils donnerent le nom de Gaule à leurs conquêtes ; ce qui fit naître la division de la Gaule en Gaule cisalpine ou citérieure, & en transalpine & ultérieure, dont la premiere fut encore subdivisée en cispadane & en transpadane : la transalpine le fut aussi en Gaule chevelue ou comata, & en Gaule bracatte ; & après qu’elle eut été conquise par les Romains, en Gaule naibonnoise, aquitanique, lyonnoise & belgique ; ce fut à cause de ces différentes parties qu’on fit de la Gaule, qu’elle reçut fort souvent le nom de Gaules au pluriel.
Tous ces différens noms viennent des divisions qui s’en firent sous les empereurs romains ; divisions qui changerent plusieurs fois, comme changent aujourd’hui nos gouvernemens & nos généralités.
A la mort de César toute la Gaule étoit romaine, & consistoit en quatre parties principales au nord des Alpes ; ces quatre parties étoient la Gaule narbonnoise, la Gaule aquitanique, la Gaule celtique, & la Gaule belgique. Auguste devenu arbitre souverain de Rome & de tout l’Empire, continua de partager la Gaule en quatre grandes régions, auxquelles il conserva leurs anciens noms, hormis celui de celtique, qui paroissant appartenir à la Gaule entiere, fut abrogé, & cette partie fut nommée la lyonnoise ; & parce que ces parties étoient trop inégales, il ôta à quelques-unes pour donner à d’autres. On peut consulter la table que le P. Briet a dressée des peuples distribués dans ces quatre grandes provinces.
La division de la Gaule en quatre provinces par Auguste, est attestée par tant d’auteurs qu’il n’est pas possible d’en douter. Dion-Cassius, Ammien-Marcellin, & quantité d’autres anciens en ont parlé ; de-plus elle est décrite par Strabon, Mela, Pline & Ptolomée. Il paroît cependant par des monumens incontestables, que dans la Gaule même on persista à ne compter que les trois provinces de Jules César.
Il se fit un nouveau partage des Gaules vers le tems de Constantin, suivant l’opinion générale ; toûjours est il sûr que nous en avons une ancienne notice publiée par le P. Sirmond dans les conciles de l’église gallicane, par Duchesne dans ses écrivains de l’histoire de France, & par Hadrien de Valois dans la préface de sa notice des Gaules. On croit qu’elle a été dressée vers le tems d’Honorius, lorsque c’étoit l’usage de distinguer les Gaules des sept provinces.
Selon cette notice dont on peut tirer de grands avantages pour la connoissance de l’histoire ecclésiastique & politique, il y avoit dix-sept provinces dans la distribution de la Gaule, & cent quinze cités, dont seize jouissoient du rang de métropole ; au lieu qu’avant Constantin on ne connoissoit que quatorze provinces & quatre métropoles.
Dans la suite des tems, les papes & les rois ont fait tant de changemens à cette distribution de provinces par l’érection de nouveaux évêchés & archevêchés, outre le changement du gouvernement civil des provinces qui ont été unies ou démembrées en introduisant de nouveaux noms, que la géographie de l’ancienne Gaule, pour ne parler ici que de la Gaule françoise, est actuellement un cahos indéchiffrable ; c’est peine perdue de chercher à le débrouiller. (D. J.)
Gaule, s. f. (Manége) On appelle ainsi dans l’école la branche de bouleau mince, legere & effeuillée, dont la main droite de chaque cavalier est armée ; de-là la dénomination particuliere de main de la gaule pour designer cette même main.
La gaule doit avoir quatre piés ou environ de longueur ; lorsqu’elle en a davantage, on s’en sert moins commodément & avec moins de grace.
Les commençans sont assujettis à la tenir la pointe en l’air à la hauteur de leurs yeux, & au-dessus de l’oreille gauche du cheval ; les éleves avancés la tiennent de même, ou la pointe en bas & le long de l’épaule de l’animal, ou la pointe en arriere au-dessus de sa croupe, ou différemment, selon leur volonté, l’usage qu’ils se proposent d’en faire, & la plus grande facilité de leur action, relativement aux effets qu’elle peut produire. L’habitude de la porter de la main droite dispose d’ailleurs le cavalier à se servir ensuite de son épée avec liberté, & à manier, quoique cette main en soit saisie, toûjours son cheval avec aisance.
Par le moyen de la gaule, tantôt nous prévenons les fautes, & tantôt nous les corrigeons ; nous l’employons donc ou comme aide ou comme châtiment. Sion en frappe vigoureusement le cheval, on le punit par l’impression douloureuse qui en résulte, tandis que des coups legers ne sont que des moyens de l’inviter avec douceur & sans l’étonner à des mouvemens que l’on desire de lui ; c’est dans ce dernier sens que la gaule est véritablement une aide.
Nous touchons de la gaule sur l’épaule d’un cheval que nous voulons lever à courbettes, dont nous souhaitons tirer des pesades, qui dans les sauts se montre trop leger du derriere. Nous aidons le sauteur qui s’accroupit, qui balotte, qui n’épare point, en adressant nos coups sur la place du trousse-queue ; nous sollicitons des croupades en les dirigeant au-dessus des jarrets, &c.
Le sens du toucher n’est pas le seul que la gaule affecte, ses aides s’impriment encore sur ceux de l’oüie & de la vûe : l’action de la faire siffler en avant & en arriere, ou d’en frapper les murs, chasse le cheval en avant, & l’effraye même quelquefois trop, puisqu’elle le détermine à fuir, sur-tout quand il n’est pas accoûtumé à ce bruit ; celle de la porter tantôt d’un côté, tantôt d’un autre, lui indique celui sur lequel il doit se mouvoir, soit dans les changemens, soit dans les contre-changemens de main de deux pistes, & dans lesquels les hanches sont observées : mais on doit bannir des manéges bien réglés cette aide prétendue qui confirme les chevaux dans une mauvaise routine, & qui est fort éloignée des principes que les éleves doivent recevoir. Du reste, rien n’est plus pitoyable que de voir des maîtres harceler eux-mêmes sans cesse les chevaux avec la gaule, & abuser misérablement d’un moyen utile dans de certains cas, mais qui dans d’autres est aussi desagréable aux spectateurs que fatiguant pour l’animal.
Gaule d’écuyer, est une gaule semblable à celle des éleves, à l’exception qu’elle est un peu plus forte, & beaucoup plus longue ; le maître en fait usage sur les chevaux des piliers.