L’Encyclopédie/1re édition/GIRANDOLE
GIRANDOLE, s. f. (Hydraul.) est une espece de gerbe que quelques-uns appellent girande, qui par la blancheur de son eau, imite la neige ; on en voit plus en Italie qu’en France. Voyez ci-dessus Girande. (K)
Girandole, en terme de Metteur en œuvre, est une espece de boucle d’oreille, composée d’un corps qui n’est le plus souvent qu’un simple nœud où l’on peut suspendre une ou trois pendeloques. Voyez Pendeloques.
Girandoles, (Artificier.) il n’y a de différence entre les soleils tournans & les girandoles que dans la position qu’on leur donne pour les tirer, qui en les mettant dans un autre point de vûe, paroît en changer l’effet. On les nomme soleils, lorsqu’ils sont placés verticalement ; & girandoles, quand leur plan est parallele à l’horison.
Un soleil tournant est une roue que le feu d’une ou de plusieurs fusées qui y sont attachées fait tourner, agissant comme dans les fusées volantes par l’action du ressort de la matiere enflammée contre l’air qui lui résiste.
On n’en fait guere à plus de cinq reprises, attendu qu’il faudroit donner un trop grand diametre à la roue pour vaincre la résistance que la pesanteur d’un plus grand nombre de fusées occasionneroit.
On peut bien garnir une roue de vingt fusées, & d’un plus grand nombre ; mais il faudra pour la faire tourner que quatre de ces fusées partent à-la-fois. Savoir, la premiere, la sixieme, la onzieme & la seizieme, qui en finissant donneront feu à la deuxieme, à la septieme, à la douxieme, & à la dix-septieme fusée, & ainsi des autres ; de sorte que la roue, quoique garnie de vingt fusées, ne sera toûjours qu’à cinq reprises. On fait communiquer le feu de l’extrémité de l’une à la gorge de l’autre par une étoupille, & ces communications doivent être bien couvertes d’un papier collé d’un jet à l’autre.
Un simple papier ne suffit pas pour le feu chinois, il seroit aussi-tôt percé par le sable de fer mis en fusion, il en faut deux, & qu’ils soient collés avec de la colle de terre glaise préparée de cette maniere. Prenez de la fleur de farine, faites-en de la colle ordinaire, passez cette colle par un tamis, ajoûtez sur une livre de farine, une poignée d’alun en poudre, & autant d’argille détrempé qu’il y a de colle.
Il y a deux façons de poser les jets sur la roue pour la faire tourner, l’une d’attacher un ou plusieurs jets sur sa circonférence : dans cette position ils doivent jetter leur feu par la gorge ; l’autre est de les attacher sur les rayes ou rayons de la roue ou sur les branches d’un tourniquet, suivant leur longueur ; dans celle-ci, ils doivent jetter leur feu, non par la gorge, mais par un trou que l’on perce avec une vrille sur la ligne latérale un peu au-dessous du tampon qui bouche intérieurement le trou de la gorge. Ce trou latéral doit être d’un quart du diametre intérieur du jet. Voyez ce qui est dit à l’article des Fusées de Table pour la position du trou latéral. Lorsque les soleils ou girandoles ne sont que d’un ou de deux jets, on préfere, comme plus simple, de les attacher sur un tourniquet à une ou deux branches, mais lorsqu’ils sont composés de trois, de quatre, ou de cinq jets, on se sert d’une roue taillée à autant de pans, & pour un plus grand nombre on forme la roue avec un cercle cloué sur le bout de chaque rayon.
Une troisieme maniere de faire des girandoles est celle que l’on nomme à pivot. Elle a cela de commode que les plus petits jets peuvent la faire tourner, & qu’au moyen de cette facilité à être mise en mouvement, on peut les garnir de beaucoup plus d’artifice que les roues ordinaires ; le corps de la machine est un tuyau de bois d’une longueur proportionnée à l’artifice que l’on veut y placer, & communément de neuf pouces ; il est fermé par en-haut d’une plaque de fer, au milieu de laquelle il y a un petit enfoncement pour recevoir la pointe du pivot sur lequel il doit tourner. On perce au milieu du tuyau sur sa circonférence trois trous à écrou à égale distance, dans chacun desquels on y visse un porte-jet en forme de T, garni d’un jet couché & lié sur la longueur des bras du T. Ces jets prennent feu par la gorge, & l’on attache un porte-feu de l’un à l’autre, pour que le premier en finissant donne feu au second, & celui-ci au troisieme.
La piece étant garnie, on la place sur une verge de fer pointue qui lui sert de pivot, sur laquelle elle tournera très-rapidement.
On peut garnir le tuyau de deux ou trois rangs de jets, & chaque rang de trois, quatre & cinq jets ; lorsque les rangs sont de plus de trois jets, comme la circonférence du tuyau ne seroit pas assez grande pour y percer plus de trois trous, on les perce alternativement, l’un un peu au-dessus, & l’autre un peu au-dessous de la ligne circulaire sur laquelle on les auroit percés, s’il n’y en avoit eu que trois ; on dispose les jets de façon, en tournant la gorge de ceux du second rang dans un sens contraire à celle du premier, que la machine après avoir tourné à droite retourne à gauche.
On peut encore ajoûter à la garniture de cette piece des jets placés droits pour jetter du feu perpendiculairement ou suivant telle ouverture d’angle que l’on voudra, pendant que les jets couchés en jetteront horisontalement.
Les soleils tournans & les girandoles servent à l’exécution d’une infinité de machines & pieces d’artifice, parmi lesquelles les plus en usage sont les quatre especes qui suivent.
1°. Le feu guilloché. Il est formé par deux roues garnies chacune de douze jets & à trois reprises qui tournent en sens contraire sur un même axe ; le moyeu de chaque roue est armé d’une roue de fer dentelée qui engrenne dans une lanterne ou pignon commun aux deux roues. Cet engrenage sert à en régler le mouvement pour que l’une ne tourne pas plus vîte que l’autre ; quatre-jets de chaque roue partent à-la-fois, & leurs feux qui se croisent, forment ce qu’on nomme du guilloché.
2°. Les découpures. On forme des desseins en feu en plaçant derriere des découpures de carton, des soleils tournans, renfermés entre des planches pour contenir leurs feux, & pour qu’ils ne soient vûs qu’à-travers les découpures. Cet artifice employé en décoration fait un grand effet.
3°. L’étoile. Un soleil tournant étant placé au milieu d’un panneau de menuiserie, figuré en étoile & bordé de planches ou de carton pour contenir son feu, il en prendra la forme & représentera une étoile, & de même toute autre figure dans laquelle il seroit renfermé. On accompagne ordinairement l’étoile de six girandoles formées par autant de tourniquets à deux jets, placés sur chaque angle, qui partant ensemble forment une figure exagone qui borde & renferme l’étoile. Si son feu est chinois & la bordure de feu commun, ce contraste ajoûtera encore à sa beauté.
4°. Les tourbillons. On a une table de bois bien unie, parfaitement ronde de quatre piés de diametre, posée horisontalement comme un guéridon, & affermie sur un pieu à la hauteur de huit piés ; au centre de cette table est un pivot sur lequel on pose un tourniquet de bois à trois branches pour être garnies à leurs extrémités chacune d’un soleil tournant qui déborde la circonférence de la table ; chaque branche du tourniquet également distante l’une de l’autre a de longueur un pié onze pouces ; cette longueur est prolongée par un essieu de cinq pouces. On enfile dans cet essieu un moyeu bien mobile de bois, & on l’y arrête, on donne à la partie de ce moyeu qui porte sur le bord de la table, la forme d’une rotule de bois de quatre pouces de diametre ; le reste du même moyeu, qui déborde entierement la table, sert à porter les raies d’une roue de quinze pouces de diametre, pour y attacher quatre jets & former un soleil à quatre reprises. La machine ainsi construite & les trois soleils préparés pour tourner dans le même sens & prendre feu tous à-la-fois au moyen des communications, on conçoit que leur mouvement de rotation étant inséparable de celui des rotules qui portent sur la table & qui font partie du même moyeu, ces rotules auront nécessairement un mouvement de progression comme celui des voitures, & qu’ainsi les trois soleils, outre le mouvement de rotation verticale sur eux-mêmes, qui leur est particulier, seront emportés horisontalement & circulairement autour de la table, & que le spectateur les verra se succéder assez rapidement & courir l’un après l’autre comme trois tourbillons enflammés.
Les jets dont on garnit les soleils tournans doivent être chargés en massif sur une pointe de culot & engorgés.
Un soleil à cinq reprises se garnit ordinairement de jets chargés pour la premiere reprise en feu chinois blanc, la deuxieme en feu commun, la troisieme en feu blanc, la quatrieme en feu nouveau, & la cinquieme en feu chinois rouge ; & pour faire une plus grande variété, on peut charger chaque jet, moitié d’un feu & moitié d’un autre.
La force de la composition devant toûjours être proportionnée à la grosseur des jets, comme leur grosseur doit l’être à la grandeur de la roue qu’il s’agit de faire tourner, on diminuera ou l’on augmentera la force des compositions ci-après, à-proportion que les jets seront plus ou moins gros.
Cet article est tiré du manuel de l’artificier.