L’Encyclopédie/1re édition/GRANDS-JOURS

La bibliothèque libre.

Grands-Jours, (Hist. de France.) especes d’assises solemnelles ; c’étoient des séances que les seigneurs ou nos rois tenoient ou faisoient tenir de tems en tems en certaines villes de leur dépendance, pour juger des affaires civiles & criminelles. Les grands-jours ont été appellés au lieu de grands-plaids, dit Loiseau.

Les comtes de Champagne tenoient les grands-jours à Troyes deux fois l’année, comme les ducs de Normandie leur échiquier, & les rois leur parlement. Les grands-jours de Troyes étoient la justice de Champagne, tant que cette province fut gouvernée par ses propres comtes, & les sept pairs de Champagne assistoient leurs comtes à la tenue des grands-jours. Dans les lettres patentes de Charles VI. du 4 Mars 1405, il est porté que le comte de Joigny, comme doyen des sept pairs de Champagne, seroit toûjours assis auprès du comte, quand il tiendroit son état & grands-jours. C’est vraissemblablement de Troyes que tous les autres grands-jours ont pris leur nom ; car Philippe-le-Bel ordonna en 1302, que les grands-jours de Troyes se tiendroient deux fois l’an, & qu’il s’y trouveroit des commissaires ecclésiastiques & gentils-hommes. Le duc de Berri avoit aussi le droit de faire tenir les grands-jours pour le pays de son obéissance.

Dans la suite, le nom de grands-jours a été spécialement appliqué à des tribunaux extraordinaires, mais souverains, que nos rois ont quelquefois établis dans les provinces éloignées des parlemens dont elles ressortissent, pour réformer les abus qui s’y introduisoient dans l’administration de la justice, pour juger les affaires qui y naissoient, & pour affranchir les peuples des droits que les seigneurs usurpoient sur eux par autorité.

Coquille définit les grands jours de son siecle, un tribunal composé de présidens, maîtres des requêtes & conseillers du parlement, nommés par lettres patentes, séans dans la ville marquée par le roi pour certaines provinces, spécifiés avec pouvoir de juger en dernier ressort de toute matiere criminelle, & des affaires civiles jusqu’à la concurrence de six cents liv. de rente ou de dix mille liv. en capital.

Les grands-jours ont été tenus au nom du roi à Poitiers, en 1454, 1531, 1541, 1567, 1579 ; à Angers, en 1539 ; à Moulins, en 1534, 1540, 1545 ; à Riom, en 1546 ; à Tours, en 1547 ; à Troyes, en 1535 ; à Lyon en 1596, & ailleurs. Avant l’érection du parlement de Dijon, les grands-jours du duché de Bourgogne se tenoient à Beaune.

Les lettres patentes portant établissement de grands-jours, nommoient les juges & les autres officiers dont le tribunal devoit être composé, & détailloient les matieres dont ils devoient connoître.

Les lettres patentes données pour les grands-jours établis à Clermont en Août 1665, attribuoient aux commissaires pour la province d’Auvergne, à-peu-près la même autorité qu’ont les parlemens dans leur ressort, tant en matiere civile qu’en matiere criminelle & de police. Ces sortes de lettres patentes devoient être enregistrées au parlement ; celles données pour l’Auvergne l’ont été le 5 Septembre 1665 ; mais aussi depuis ce tems les grands-jours se sont évanoüis. (D. J.)