L’Encyclopédie/1re édition/HYPOTHEQUE
HYPOTHEQUE, s. f. (Jurisprud.) est un engagement particulier des biens du débiteur en faveur du créancier pour plus grande sûreté de sa dette.
Ce mot vient du grec ὑποθήκη, qui signifie une chose sur laquelle une autre est imposée, c’est-à-dire qui est sujette à quelque obligation.
Lorsque le créancier ne se confie pas pleinement en la bonne-foi ou en la solvabilité du débiteur, il prend pour sa sûreté des gages ou des cautions, & quelquefois l’un & l’autre : la sûreté qui se trouve dans le gage est plus grande que celle des cautions ou fidéjusseurs, de-là vient cette maxime, plus cautionis est in re quam in personâ.
On oblige les choses en deux manieres, ou par tradition actuelle, ou par simple convention ; la premiere est ce que l’on appelle gage, ou, si c’est un immeuble, engagement ou anticrese ; la seconde est la simple hypotheque, où le débiteur oblige son héritage sans néanmoins se désaisir du fond, ni de la jouissance en faveur de son créancier.
Les Grecs, plus habiles que les autres peuples, mais aussi plus méfians & plus cauteleux, ne prétoient leur argent que sur l’assûrance des fonds du débiteur ; ils inventerent deux manieres d’engager les fonds pour sûreté de la dette ; savoir, l’anticrese & la simple hypotheque.
Lorsqu’ils se contentoient de l’hypotheque, ils exigeoient que le débiteur déclarât ses biens francs & quittes de toute autre hypotheque ; & comme, en prenant cette voie pour sûreté de la dette, le débiteur demeuroit en possession de l’héritage, on y mettoit des marques ou brandons qui se voyoient de loin, afin que chacun pût connoître que l’héritage étoit engagé.
Il est parlé de ces brandons dans deux endroits de Démosthenes ; il est dit dans l’un, qu’ayant été fait une descente sur un héritage, pour savoir s’il étoit hypothéqué, il ne s’y étoit point trouvé de brandons ou marques ; & Phenippus, qui prétendoit y avoir hypotheque, fut sommé de montrer les brandons supposé qu’il y en eût, faute de quoi il ne pourroit plus prétendre d’hypotheque sur cet héritage : l’autre passage est dans son oraison πρὸς σπουδίαν, où il dit qu’un testateur ordonne que pour mille dragmes qui restoient à payer de la dot de sa fille, sa maison soit hypothéquée, & pour cet effet que l’on y mette des brandons.
Il falloit même que l’usage des hypotheques & des brandons fût déja ancien du tems de Solon ; car Plutarque, en la vie de Solon, dit qu’il s’étoit vanté dans ses poëmes, d’avoir ôté les brandons qui étoient posés çà & là dans tout le territoire de l’Attique. Amiot, dans sa traduction, a pris ces brandons pour des bornes qui séparoient les héritages, & a cru de-là que Solon avoit non-seulement réduit les dettes, mais aussi qu’il avoit remis les héritages en commun & en partage égal, comme Lycurgue avoit fait à Lacédémone ; mais la vérité est que Solon ayant ordonné en faveur des débiteurs la remise d’une partie de ce qu’ils devoient, & ayant augmenté le prix de la monnoie, il remit par-là les débiteurs en état de se libérer : c’est pourquoi il se vantoit d’avoir fait ôter les brandons ou marques d’hypotheque qui étoient sur les terres ; ainsi chez les Grecs brandonner un héritage, signifioit la même chose que l’hypothéquer.
Les Romains, dans les premiers tems, avoient inventé une espece de vente simulée, par le moyen de laquelle le créancier entroit en possession de l’héritage de son débiteur, jusqu’à ce que la somme prêtée fut rendue.
Mais comme souvent les créanciers abusoient de ces ventes simulées pour s’emparer de la propriété, cette maniere d’engager les héritages fut abolie ; on introduisit l’usage d’en céder ouvertement la possession.
Il parut encore dur aux débiteurs d’être obligés de se désaisir, c’est pourquoi l’on parvint comme par degrés à se contenter de la simple hypotheque, dont l’usage fut emprunté des Grecs.
L’hypotheque ne se suppléoit point, elle dépendoit de la convention ; mais il n’étoit pas besoin que l’acte fût publié ni authentique.
Les biens présens étoient seuls sujets à l’hypotheque, jusqu’à ce que Justinien l’étendit aussi aux biens que le débiteur avoit acquis depuis son obligation.
Il étoit parlé des gages & hypotheques dans la loi des douze tables ; mais l’on a perdu la onzieme table qui concernoit cette matiere, & nous n’en avons connoissance que par le commentaire de Caïus.
L’usage de mettre des marques aux héritages engagés ou hypothéqués, se pratiquoit à Rome avant les empereurs, comme il paroît par plusieurs lois du digeste : aux terres & héritages imponebantur tituli, & aux maisons superscribebantur nomina.
Les empereurs défendirent à toutes personnes, de faire de ces appositions de marques sur les héritages de leur autorité privée ; cette défense fit perdre l’usage d’apposer aucunes marques publiques, ni privées, pour l’hypotheque conventionnelle.
Il ne paroît pas qu’en France on ait jamais usé de marques ou brandons pour la simple hypotheque, mais seulement aux gages de justice & choses saisies.
L’hypotheque se contracte par le seul consentement des parties.
Dans les commencemens, il falloit une stipulation expresse, ensuite l’hypotheque fut supplée de plein droit dans toute obligation authentique.
Je ne sais pourquoi l’on tient communément que c’est l’ordonnance de Moulins, qui a attribué aux jugemens l’effet de produire hypotheque ; il est vrai qu’il en est parlé dans l’article liij. de cette ordonnance, mais cette hypotheque avoit déja lieu, suivant l’ordonnance de 1539, art. xcij. & xciij.
Elle a lieu du jour du jugement même, lorsque le jugement est contradictoire ; pour les jugemens par défaut à l’audience, ou pour les jugemens sur procès par écrit, elle n’est que du jour de la signification du jugement à procureur ; voyez l’ordonnance de 1667, tit. xxxv. des requêtes civiles, art. ij. quand la sentence est confirmée par arrêt, l’hypotheque remonte au jour de la sentence.
Pour mieux assûrer l’hypotheque & la rendre notoire, de maniere qu’un second créancier ne soit point trompé, plusieurs coûtumes, notamment dans les provinces de Picardie & de Champagne, ont établi une espece de tradition fictive de l’héritage hypothéqué, qu’on appelle nantissement & qui se fait en trois manieres ; savoir, par saisine & desaisine, ou par vest & dévest, par main-assise & par mise en possession : dans quelques coûtumes on pratique une autre espece de nantissement pour les rentes constituées, appellé ensaisinement ; en Bretagne, on fait des appropriances pour purger les hypotheques ; en Normandie, on fait lecturer le contrat, mais cette lecture ne sert pas pour l’hypotheque.
Henri III. par un édit de 1581, avoit ordonné que tous contrats seroient contrôlés & enregistrés, sans quoi l’on ne pourroit acquérir aucun droit de propriété ni d’hypotheque, ce qui fut révoqué par l’édit de Chartres en 1588, art. x. & n’eut d’exécution que dans la province de Normandie. Henri IV. renouvella cet édit au mois de Juin 1606, mais il ne fut registré qu’au parlement de Normandie ; il s’exécute dans cette province, comme il paroît par les articles cxxxiij. & cxxxjv. des placités.
En 1673, le Roi établit un greffe dans chaque baillage & sénéchaussée, où ceux qui prétendoient hypotheque pouvoient s’opposer pour la conservation de leurs droits ; les opposans devoient être préférés sur les immeubles à ceux qui n’avoient pas formé d’opposition.
Cet édit n’eut pas d’exécution, & fut révoqué par un autre du mois d’Avril 1674.
En 1693, le Roi établit le contrôle des actes des Notaires. L’édit porte que les actes seront contrôlés quinze jours au plus tard, après la date d’iceux ; & il est dit que les particuliers ne pourront en vertu d’actes non-contrôlés acquérir aucuns privileges, hypotheque, propriété, ni autre droit.
Cet édit fut supprimé pour les actes reçus par les Notaires au châtelet de Paris, par la déclaration du 27 Avril 1694, le contrôle fut pourtant rétabli pour Paris par la déclaration du 29 Septembre 1722 ; mais par une autre déclaration du 7 Décembre 1723, il fut supprimé pour Paris à commencer du 7 Janvier 1724.
Tous ceux qui ont la libre disposition de leurs biens pourront les hypothéquer, & on peut hypothequer tout ce que l’on peut vendre & aliéner.
Quant aux effets de l’hypotheque dans l’ancienne jurisprudence des Romains, l’hypotheque ne produisoit point d’action particuliere : lorsque l’effet hypothéqué étoit enlevé au créancier, il falloit user de la vendication, encore cette voie n’étoit-elle propre qu’au gage, car on ne connoissoit pas encore le droit de suite pour l’hypotheque.
Les préteurs y pourvurent en accordant aux créanciers hypothécaires une action qui fut appellée quasi Serviana ou utilis Serviana, parce qu’elle sut introduite à l’instar de celle qu’établit le préteur Servius, en faveur du propriétaire, à l’effet de suivre & revendiquer les meubles de ses locataires qui étoient tacitement obligés aux loyers.
Cette action quasi servienne ou hypothécaire s’intentoit soit contre l’obligé, ou contre les tiers détenteurs de la chose hypothéquée ; ils avoient le choix à l’égard de l’obligé d’intenter contre lui l’action personnelle sans l’hypothécaire, ou l’hypothécaire sans la personnelle, ou de cumuler les deux actions ensemble ; mais de façon ou d’autre, l’hypotheque ne produisoit qu’une simple action, les contrats n’ayant point chez eux d’exécution parée.
L’action hypothécaire ne tendoit même pas à saisir l’héritage & à le mettre sous la main de la justice, mais seulement à ce que le créancier fût mis en possession pour en jouir par lui jusqu’au parfait payement de sa dette.
Suivant le droit romain, les meubles sont susceptibles d’hypotheque, aussi-bien que les immeubles.
Non seulement ils se distribuent par ordre d’hypotheque entre les créanciers, lorsqu’ils sont encore en la possession du débiteur ; mais ils peuvent être suivis par hypotheque, lorsqu’ils passent entre les mains d’un tiers.
Il y a cependant quelques créanciers privilégiés, tels que le nanti de gages, qui passent avant des créanciers hypothécaires.
On observoit autrefois la même chose dans les pays de droit écrit du ressort du parlement de Paris, mais présentement on y suit la disposition de l’article clxx. de la coûtume de Paris, qui porte que meubles n’ont point de suite par hypotheque : quoique cette regle semble n’exclure que le droit de suite contre un tiers : il est néanmoins certain que, dans les pays où elle est reçue, le prix des meubles étant encore en la possession du débiteur, ne se distribue point par ordre d’hypotheque, mais seulement suivant l’ordre des privileges.
Dans les parlemens de droit écrit, les meubles se distribuent par ordre d’hypotheque, quand ils sont encore dans la possession du débiteur, mais ils n’ont point de suite par hypotheque.
Pour ce qui est de l’hypotheque sur les immeubles, elle produit par-tout un droit de suite.
Lorsque le contrat a exécution pareé contre l’obligé, il n’est pas besoin d’intenter contre lui l’action hypothécaire ; après un commandement recordé, on peut saisir directement l’héritage hypothéqué.
Il y a proprement trois sortes d’actions hypothécaires ; savoir, l’action pure hypothécaire, qui a lieu contre le tiers détenteur après discussion du principal obligé & de ses cautions ; l’action en déclaration d’hypotheque ou interruption que l’on peut intenter contre le détenteur avant la discussion ; & l’action personnelle hypothécaire, qui a lieu contre l’obligé personnel, ou contre ses héritiers qui sont en même tems détenteurs de quelque immeuble hypothéqué.
L’action personnelle & l’action hypothécaire avoient bien lieu en droit contre l’héritier & biens tenans, mais elles ne pouvoient être exercées que séparément, l’héritier entant que tenu personnellement avoit le bénéfice de division, c’est-à-dire qu’il n’étoit tenu que pour sa part personnelle, & entant qu’il étoit convenu hypothécairement, il avoit le bénéfice de discussion.
Mais parmi nous, on cumule les deux actions de maniere que chacun des coobligés ou de leurs héritiers qui sont aussi biens tenans, ne peut opposer ni division, ni discussion ; il est tenu personnellement pour sa part, & hypothécairement pour le tout ; & lorsque l’action d’hypotheque est ainsi jointe avec la personnelle, elle est prorogée jusqu’à quarante ans, parce que la prescription de cette action ne doit point courir tant que dure l’exercice de l’action personnelle.
L’action en déclaration d’hypotheque a été prudemment inventée, pour prévenir l’inconvénient qui résultoit du Droit romain, en ce que d’un côté le créancier ne se pouvoit adresser au tiers détenteur qu’après discussion, & que d’un autre côté le tiers détenteur prescrivant par dix ans entre présens, & vingt ans entre absens, le créancier pouvoit être frustré de son hypotheque.
Il n’étoit pas permis chez les Romains d’hypothéquer ses biens à deux créanciers à la fois ; il falloit que les causes de la premiere hypotheque fussent acquittées avant d’en contracter une seconde, tellement que celui qui celoit une premiere hypotheque actuelle subsistante, étoit réputé stellionataire ; le créancier n’avoit même pas besoin d’exiger de son débiteur la déclaration que ses biens étoient francs & quittes, le débiteur devoit la faire de lui-même. Cet usage s’observoit non-seulement dans l’ancienne Rome, mais aussi sous les empereurs grecs, comme on l’apprend de l’églogue des basiliques ; celui qui y contrevenoit étoit poursuivi par la voie extraordinaire, & ne pouvoit se racheter de la peine qu’en restituant au créancier les deniers qu’il en avoit reçus.
En France, il est permis d’hypothéquer ses biens, successivement à plusieurs créanciers, & le débiteur n’est réputé stellionataire que lorsqu’il fait une fausse déclaration sur l’état de ses dettes ; si on ne lui demande point cette déclaration, il n’est pas obligé de la faire.
L’hypotheque dérive de la convention expresse ou tacite des parties ; car celle-même qu’on appelle hypotheque légale, dérive d’un consentement que la loi présume être donné par celui sur les biens duquel elle accorde cette hypotheque.
Mais le consentement exprès ou tacite ne suffit pas parmi nous pour constituer l’hypotheque ; il faut aussi l’intervention du juge ou du notaire, & que l’un & l’autre ayent caractere pour instrumenter dans le lieu, & pour les personnes qui s’obligent ; c’est pourquoi les jugemens & contrats passés en pays étrangers n’emportent point d’hypotheque en France, que du jour que l’exécution en a été ordonnée par les juges de France.
Les effets de l’hypotheque sont 1°. que le débiteur ne peut plus vendre, engager, ni hypothéquer les mêmes biens à d’autres personnes au préjudice de l’hypotheque qui est déja acquise à un premier créancier.
2°. Que si le bien hypothéqué sort des mains du débiteur, le créancier le peut suivre en quelques mains qu’il passe, tellement que le tiers détenteur est obligé de reconnoître l’hypotheque, & d’en acquitter les causes, ou de laisser le bien hypothéqué pour être vendu, & le créancier être payé sur le prix d’icelui. Voyez Délaissement par hypotheque, & Loyseau en son traité du déguerpissement, liv. III.
3°. Le créancier hypothécaire a l’avantage d’être préféré aux créanciers chil ographaires.
L’ordre des hypotheques entr’elles se regle par la date des contrats : prior tempore, potior jure ; il faut néanmoins excepter les hypotheques privilégiées qui passent les premieres, quoique leur date ne soit pas la plus ancienne. L’édit du mois d’Août 1669 attribue aux deniers royaux un privilege sur les biens des comptables, par préférence à tous créanciers hypothécaires.
Celui qui est mis au lieu & place d’un créancier en vertu d’un transport, cession ou délegation, se fait ordinairement subroger aux privileges & hypotheques de l’ancien créancier. Voyez Subrogation.
Purger les hypotheques, signifie effacer l’impression qu’elles avoient faite sur les biens du débiteur, de maniere que le créancier ne peut plus y exercer aucun droit.
Le decret volontaire ou forcé purge les hypotheques sur les héritages & rentes foncieres & constituées ; à l’égard des rentes sur le roi, on obtient des lettres de ratification ; le sceau fait le même effet pour les offices, lorsque les nouvelles provisions sont scellées sans aucune opposition.
Voyez au Digeste les titres de pignoribus & hypothecis, in quibus causis pignus vel hypotheca tacite contrahitur. Quæ res pignori vel hypothecæ datæ obligari non possunt. Qui potiores in pignore vel hypothecâ habeantur. Quibus modis pignus vel hypotheca solvitur. De distractione pignorum vel hypothecarum. Voyez aussi au code, liv. VIII. tit. 14. 15. 16. 17. 18. 19. 26. 28. 29. 30. & 31. la novelle 17. ch. xv. & la nov. 164. ch. j. Regusantius de pignoribus & hypothecis. Basnage & Olivier-Etienne en leurs traités des hypotheques. Loyseau en son traité du déguerpissement, liv. III. (A.)
Hypotheque conventionnelle est celle qui dérive d’un contrat ; chez les Romains, il n’y avoit d’hypotheque conventionnelle que celle qui étoit stipulée expressément ; l’hypotheque tacite étoit celle qui procédoit de la loi ; parmi nous toute convention authentique produit une hypotheque ; soit que la stipulation d’hypotheque soit expresse ou non, elle y est toûjours sousentendue. (A)
Hypotheque expresse est celle qui est stipulée nommément dans l’usage : les notaires abregent cette stipulation, & se contentent de mettre le mot obligeant avec un &c. par où l’on sousentend obligeant tous ses biens présens & à venir à l’exécution des présentes. (A)
Hypothéque générale est celle qui comprend tous les biens présens & à venir du débiteur, à la différence de l’hypotheque spéciale, qui est limitée à certains biens comme aux biens présens, & non aux biens à venir, ou qui est restrainte à certains biens nommément.
Une des principales différences entre l’hypotheque générale & la spéciale, c’est que la même chose peut être obligée généralement à plusieurs créanciers, au lieu qu’elle ne peut être hypothéquée spécialement qu’à un seul sous peine de stellionat.
L’hypotheque spéciale oblige le créancier de discuter le bien qui lui est ainsi hypothéqué avant de pouvoir s’adresser aux autres ; mais pour prévenir cette difficulté, on a coûtume de stipuler que l’hypotheque générale ne dérogera point à la spéciale, ni la spéciale à la générale. Voyez Basnage des hypotheques, chap. v. (A)
Hypotheque légale est celle qui procéde de la loi sans aucune convention expresse des parties, mais qui est fondée néanmoins sur un consentement tacite que la loi présume, donné par celui sur les biens duquel elle accorde cette hypotheque ; c’est pourquoi elle est aussi appellée en droit hypotheque tacite.
Telle est l’hypotheque que le mineur a sur les biens de son tuteur du jour que celui-ci accepte sa commission ; le tuteur a pareillement hypotheque sur les biens de son mineur pour le reliquat qui lui est dû ; en Normandie, cette hypotheque du tuteur est du jour de son institution ; à Paris & ailleurs, elle n’est que du jour de la clôture de son compte.
La loi donne aussi à la femme une hypotheque pour sa dot, tant sur les biens de son mari que sur les biens de ceux qui l’ont promise, quoique cette hypotheque n’ait point été stipulée.
L’Eglise, les hôpitaux & les communautés ont pareillement une hypotheque légale sur les biens des bénéficiers & autres administrateurs du jour de leur administration.
Celui qui commet quelque crime, contracte tacitement une hypotheque tant pour les amendes que pour les intérêts.
Le maître du navire a aussi une hypotheque tacite, & même un privilege pour son fret & pour les avaries sur les marchandises qu’il a dans son navire.
Le propriétaire acquiert de même une hypotheque pour ses loyers sur les meubles des locataires & sous-locataires.
Enfin les locataires ont une hypotheque semblable pour leur legs sur les biens du testateur. Voyez le traité des hypotheques de Basnage, chap. vj. (A)
Hypotheque nécessaire est la même que l’hypotheque légale. Voyez Basnage, traité des hypotheques, ch. vj. (A)
Hypotheque privilegiée est celle qui dérive d’une cause privilegiée, & qui donne la préférence sur les créanciers qui n’ont qu’une simple hypotheque.
Telle est l’hypotheque du baillement de fond qui est préferée à tous autres pour son payement sur le fond qu’il a vendu.
Telle est aussi l’hypotheque de celui qui est créancier pour un fait de charge.
L’ordre des privileges entr’eux ne se regle pas par leur date, mais par le plus ou moins de faveur que mérite la cause dont ils procedent ; ce qui est fondé sur la loi 32. au digeste de rebus autor. jud. possid. (A)
Hypotheque simple est opposée à hypotheque privilégiée. Voyez ci-devant Hypotheque privilegiée. (A)
Hypotheque spéciale est opposée à hypotheque générale. Voyez ci-devant Hypotheque générale.
Hypotheque staende seker est une espece singuliere d’hypotheque usitée dans la Flandre flamande, qui se donne provisionnellement pour sûreté de la dette, sans qu’il soit dû aucun droit seigneurial qu’après deux termes de trois ans chacun. Ces deux termes écoulés, la sûreté provisionnelle passe en hypotheque absolue, & il en est dû un droit seigneurial, suivant le placard du 21 Janvier 1621, qui est au second volume des placards de Flandres, fol. 443. Il est parlé de cette sûreté provisionnelle au livre des partages du Franc de Bruges, art. lxiij. & ibi Vanden-Hanc in notis. Il cite Rypæus in not. jur. belg. de reditibus, n°. 29.
On a douté si cette sûreté devoit être renouvellée au bout des trois premieres années, mais le bureau des Finances de Lille l’a ainsi décidé le 23 Juillet 1734. Voyez l’Inst. au droit belgique, part. II. tit. V. §. 9. n°. 17. (A)
Hypotheque tacite est celle qui a lieu sans convention expresse, ainsi l’hypotheque légale est une hypotheque tacite. On donne aussi ce nom à l’hypotheque résultante d’un acte authentique, lorsque l’hypotheque n’y est pas stipulée.
Voyez ci-devant Hypotheque conventionnelle, & Hypotheque légale. (A)