L’Encyclopédie/1re édition/LABADISTES

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LABADISTES, s. m. pl. (Théolog.) hérétiques disciples de Jean Labadie, fanatique fameux du xvij. siecle, qui après avoir été jésuite, puis carme, enfin ministre protestant à Montauban & en Hollande, fut chef de secte & mourut dans le Holstein en 1674.

L’auteur du supplément de Morery de qui nous empruntons cet article, fait cette énumération des principales erreurs que soutenoient les Labadistes. 1°. Ils croyoient que Dieu pouvoit & vouloit tromper les hommes, & qu’il les trompoit effectivement quelquefois. Ils alléguoient en faveur de cette opinion monstrueuse, divers exemples tirés de l’Ecriture-sainte, qu’ils entendoient mal, comme celui d’Achab de qui il est dit que Dieu lui envoya un esprit de mensonge pour le séduire. 2°. Ils ne regardoient pas l’Ecriture-sainte comme absolument nécessaire pour conduire les ames dans les voies du salut. Selon eux le saint-Esprit agissoit immédiatement sur elles, & leur donnoit des degrés de révélation tels qu’elles étoient en état de se décider & de se conduire par elles-mêmes. Ils permettoient cependant la lecture de l’Ecriture-sainte, mais ils vouloient que quand on la lisoit, on fût moins attentif à la lettre qu’à une prétendue inspiration intérieure du saint-Esprit dont ils se prétendoient favorisés. 3°. Ils convenoient que le baptême est un sceau de l’alliance de Dieu avec les hommes, & ils ne s’opposoient pas qu’on le conferât aux enfans naissant dans l’église ; mais ils conseilloient de le différer jusqu’à un âge avancé, puisqu’il étoit une marque qu’on étoit mort au monde & ressuscité en Dieu. 4°. Ils prétendoient que la nouvelle alliance n’admettoit que des hommes spirituels, & qu’elle mettoit l’homme dans une liberté si parfaite, qu’il n’avoit plus besoin ni de la loi ni des cérémonies, & que c’étoit un joug dont ceux de leur suite étoient délivrés. 5°. ils avançoient que Dieu n’avoit pas préféré un jour à l’autre, & qu’il étoit indifférent d’observer ou non le jour du repos, & que Jesus-Christ avoit laissé une entiere liberté de travailler ce jour-là comme le reste de la semaine, pourvu que l’on travaillât dévotement. 6°. Ils distinguoient deux églises ; l’une où le christianisme avoit dégénéré, & l’autre composée des régénérés qui avoient renoncé au monde. Ils admettoient aussi le regne de mille ans pendant lequel Jesus-Christ viendroit dominer sur la terre, & convertir véritablement les juifs, les gentils & les mauvais chrétiens. 7°. Ils n’admettoient point de présence réelle de Jesus-Christ dans l’eucharistie : selon eux ce sacrement n’étoit que la commémoration de la mort de Jesus-Christ, on l’y recevoit seulement spirituellement lorsqu’on l’y recevoit comme on le devoit. 8°. La vie contemplative étoit selon eux un état de grace & une union divine pendant cette vie, & le comble de la perfection. Ils avoient sur ce point un jargon de spiritualité que la tradition n’a point enseigné, & que les meilleurs auteurs de la vie spirituelle ont ignoré. Ils ajoutoient qu’on parvenoit à cet état par l’entiere abnégation de soi-même, la mortification des sens & de leurs objets, & par l’exercice de l’oraison mentale, pratiques excellentes & qui conduisent véritablement à la perfection, mais non pas des Labadistes. On assure qu’il y a encore des Labadistes dans le païs de Cleves, mais qu’ils y diminuent tous les jours. Voyez le dict. de Morery. (G)