L’Encyclopédie/1re édition/LAUSANNE

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LAUSANNE, Lausanna ou Lausanum, (Géog.) ville de Suisse, capitale du pays de Vaud, au canton de Berne.

C’est un lieu très-ancien, puisqu’il est désigné dans l’itinéraire d’Antonin entre la colonie équestre qui est Nyon, & Urba qui est Orbe. On y voit marqué lacus lausonius, ce qui prouve que le lac Léman a porté le nom de lac de Lausanne, avant que de prendre celui de Genève. Selon quelques auteurs Valerius Aurelianus bâtit Lausanne des ruines d’Arpentine ; mais on ne sait rien de certain sur son origine.

Cette ville a eu les mêmes révolutions & les mêmes seigneurs que le pays de Vaud, jusqu’à la mort de Bertold V duc de Zéringen : elle étoit déja franche & libre ; ensuite l’évêque de Lausanne devint prince de la ville, mais avec la conservation de tous les privileges des habitans.

Les Bernois ayant conquis sur Charles II. duc de Savoie le pays de Vaud, se rendirent maîtres de Lausanne, d’où ils bannirent l’exercice de la religion romaine, donnerent à leur bailli les revenus de la manse épiscopale, & ceux de la manse du chapitre au college qu’ils établirent, & que l’on nomme académie : elle fleurit dès le commencement de son établissement, & n’a point dégénéré.

L’évêque Sébastien de Montfaucon qui tenoit alors le siege épiscopal de Lausanne, fut contraint de se retirer à Fribourg, avec le vain titre d’évêque de Lausanne & de prince de l’empire, n’ayant pour vivre que ce qu’il recevoit de Savoie. Ses successeurs qui prennent toujours les mêmes titres, sont nommés par les rois de Sardaigne qui pourvoient à leur subsistance.

On croit que le siege épiscopal de cette ville avoit été établi au commencement du vij. siecle par l’évêque Marius, appellé vulgairement saint Maire, après la destruction d’Avanches (Aventicum) où ce siége étoit auparavant.

L’église cathédrale fut dédiée par le pape Grégoire XX, l’an 1275 en présence de l’empereur Rodolphe de Habsbourg.

Les peres du concile de Bâle ayant quitté Bâle en 1449, allerent siéger à Lausanne, où ils tinrent quelques séances. La bibliotheque de l’académie de Lausanne conserve un volume manuscrit des actes de ce concile. C’est ici que Felix V céda la thiarre pontificale à Nicolas, pour se retirer au couvent de Ripailles, qu’il avoit fait bâtir auparavant dans le Chablais au bord du lac, & il y mourut hermite l’an 1452.

Le territoire de Lausanne est un pays admirablement cultivé, plein de vignes, de champs & de fruits ; tout y respire l’aisance, la joie & la liberté. La vûe à un quart de lieue de la ville, se promene sur la ville même, sur le lac Léman, sur la Savoie, & sur le pays entier jusqu’à Geneve : rien n’en borne l’étendue que les Alpes mêmes & le mont Jura.

Enfin Lausanne est bâtie à demi-lieue au-dessus du lac, sur trois collines qu’elle occupe entierement, avec les vallons qui sont entre deux ; sa situation est bien plus belle que n’étoit celle de Jérusalem. Elle est à 20 lieues S. O. de Berne, 12 N. E. de Geneve. Long. 24. 20. lat. 46. 30.

Lausanne n’est pas une des villes de Suisse où les Sciences soient le moins heureusement cultivées dans le sein du repos & de la liberté ; mais entre les savans dont elle est la patrie, je ne dois pas oublier M. Ciouzas (Jean Pierre) associé étranger de l’académie des Sciences de Paris. Il s’est fait un nom célebre dans la république des Lettres ; comme philosophe, logicien, métaphysicien, physicien & geometre. Tout le monde connoît ses ouvrages, son examen du pyrrhonisme ancien & moderne in-fol. sa logique dont il s’est fait plusieurs éditions, & dont lui même a donné un excellent abrégé ; son traité du beau, celui de l’éducation des enfans, qui est plein d’esprit & d’une ironie délicate ; enfin plusieurs morceaux sur des sujets de physique & de mathématiques. Il est mort comblé d’estime & d’années en 1748, à l’âge de 85 ans (D. J.)