L’Encyclopédie/1re édition/LILAC

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Daubenton ()
(Tome 9p. 530-532).
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LILAC, s. m. (Hist. nat. Bot.) genre de plante à fleur monopétale en forme d’entonnoir, partagée pour l’ordinaire en quatre parties. Il sort du calice un pistil attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur ; ce pistil devient dans la suite un fruit applati en forme de langue, qui se partage en deux parties, & qui est divisé par une cloison en deux loges remplies de semences applaties & bordées. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Lilac, (Hist. natur.) petit arbre qui nous est venu de l’Asie, & que l’on cultive en Europe pour l’agrément. Il fait une tige assez droite, prend peu de grosseur, se garnit de beaucoup de branches, & ne s’éleve au plus qu’à vingt piés. Il fait quantité de petites racines fibreuses qui s’entremêlent & s’étendent peu. Sa feuille est grande, faite en cœur, d’un verd tendre & luisant ; elle paroît de très-bonne heure au printems. Sur la fin d’Avril, ses fleurs annoncent le retour de la belle saison ; elles viennent en grosses grappes au bout des branches de l’année précédente, & il y a toujours deux grapes ensemble. Leur couleur varie selon les especes : il y a des lilacs à fleur de couleur gris de lin fort tendre ; d’autres à fleur plus foncée tirant sur le pourpre, & d’autres à fleur blanche. Toutes ces fleurs ont de la beauté & une odeur délicieuse ; elles sont remplacées par de petites gousses de la forme d’un fer de pique, qui deviennent rouges au tems de leur maturité ; elles contiennent de semences menues, oblongues, applaties, aîlées, & d’une couleur rousse. Cet arbre est très-robuste, il croît promptement, & donne bientôt des fleurs. Il se plaît à toutes les expositions, réussit dans tous les terreins, se multiplie plus que l’on ne veut, & n’exige aucune culture.

On pourroit élever le lilac de semence ou de branches couchées ; mais la voie la plus courte & la seule usitée, c’est de le multiplier par les rejettons qui viennent en quantité sur ses racines : le mois d’Octobre est le vrai tems de les transplanter, parce que les boutons de cet arbre, qui sont en séve dès le mois de Décembre, grossissent pendant l’hiver & s’ouvrent de bonne heure au printems. Plus les lilacs sont gros, mieux ils reprennent, & ils donnent d’autant plus de fleurs qu’ils se trouveront dans un terrein sec & léger, mais ils s’éleveront beaucoup moins. On en voit souvent qui sont enracinés dans les murailles, & qui s’y soutiennent à merveille. Il ne faut d’autre soin à cet arbre que de supprimer les rejettons qui viennent tous les ans sur ses racines, & qui affoiblissent la principale tige. On doit aussi avoir attention de tailler cet arbre avec ménagement, on se priveroit des fleurs en accourcissant toutes ses branches. Son bois, quoique blanc, est dur, solide & compacte, cependant on n’en fait nul usage : on ne connoît non plus aucune utilité dans les autres parties de cet arbre : on le cultive uniquement pour l’agrément.

Les lilacs sont d’un grand ornement dans les bosquets ; on en fait même des massifs entiers, qui font au printems la plus agréable décoration dans un grand jardin.

Il y a des lilacs de deux especes différentes, & chaque espece a plusieurs variétés : on les divise en grands lilacs & en lilacs de Perse.

Grands lilacs. 1°. Le lilac ordinaire. Sa fleur est d’une couleur gris de lin tendre.

2°. Le lilac à fleur pourpre. Sa fleur est plus grosse & plus fournie que celle du précédent ; l’arbre en donne une plus grande quantité : c’est le plus beau de tous les lilacs & le moins commun.

3°. Le lilac à fleur blanche. Sa fleur n’est ni si grande ni si garnie que celles des précédens, mais elle semble être argentée.

4°. Le lilac à fleur blanche & à feuille panachée de jaune.

5°. Le lilac à fleur blanche & à feuille panachée de blanc.

Ces deux variétés ne sont pas d’une grande beauté, leur aspect présente plus de langueur que d’agrément. Ceux qui veulent tout rassembler dans une collection, pourront se les procurer en les faisant greffer en écusson ou en approche sur d’autres lilacs.

C’est principalement aux grands lilacs qu’on pourra appliquer ce qui a été dit ci-dessus.

Lilacs de Perse. 6°. Le lilac de Perse à feuille de troëne. Sa fleur est d’un rouge pâle.

7°. Le lilac de Perse à fleur blanche. Sa couleur n’est pas bien tranchée, c’est un rouge si pâle qu’il incline à la blancheur : cette variété est encore très rare.

8°. Le lilac de Perse à feuille découpée ; c’est le plus beau des lilacs de Perse, par l’agrément de sa feuille qui est très-joliment découpée, & par la beauté de sa fleur qui est d’une vive couleur de pourpre fort apparente.

Ces lilacs sont des arbrisseaux qui ne s’élevent qu’à huit ou dix piés. Ils se garnissent de beaucoup de branches qui sont fort menues ; leur feuille est infiniment plus petite que celle des grands lilacs ; leur fleur est en plus petits bouquets, mais elle a plus d’odeur, & souvent les branches en sont garnies sur toute leur longueur. Elle paroit huit jours plus tard que celle des grands lilacs, & elle dure plus longtems. Il faut aux lilacs de Perse une bonne terre, meuble, franche, un peu humide. Ils donnent rarement des rejettons au pié ; il faut les multiplier de branches couchées que l’on fait au printems, elles auront au bout d’un an des racines suffisantes pour la transplantation, qui se doit faire pour le mieux en automne. Tous les lilacs peuvent se greffer les uns sur les autres, soit en écusson, soit en approche. Les lilacs de Perse peuvent contribuer à l’ornement d’un jardin ; on en fait des buissons dans les plate-bandes. On peut aussi leur faire prendre une tige & une tête réguliere, & on peut encore en former des palissades de dix piés de hauteur : c’est peut-être la forme qui leur convient le mieux ; & lorsque ces palissades ont pris trop d’épaisseur, il n’y a qu’à forcer la taille jusqu’auprès des principales branches, & bien-tôt la palissade se regarnira de jeunes rejettons : on peut même faire cette opération au mois de Juillet sans inconvénient. Article de M. d’Aubenton.

Lilac, (Botan.) quoique le nom de lilac soit étranger, la plûpart de nos botanistes l’ont conservé ; quelques autres l’ont rendu mal-à-propos par syringa, qui est une plante d’un genre tout différent. Nos dames se sont contentées d’adoucir le nom arabe, d’écrire & de prononcer lilas, & elles l’ont emporté sur les Botanistes ; les Anglois l’appellent the pipe-trée.

La racine de cette plante est déliée, ligneuse, & rampante ; elle produit un arbrisseau qui parvient à la hauteur d’un arbre médiocre, & s’éleve à dix-huit ou vingt piés, & plus ; ses tiges sont menues, droites, rameuses, assez fermes, couvertes d’une écorce grise-verdâtre, remplies d’une moëlle blanche & fongueuse. Ses feuilles sont opposées l’une à l’autre, larges, pointues, lisses, molles, luisantes, vertes quelquefois, panachées de jaune ou de blanc, & attachées à de longues queues ; elles ont un goût un peu âcre & amer.

Ses fleurs sont petites, monopétales, ramassées en touffes, de couleur bleue, quelquefois d’un rouge bleu, d’autres fois d’un rouge foncé, & d’autres fois blanches ou argentées, selon les especes de lilacs, mais toûjours d’une odeur douce & fort agréable.

Chacune de ces fleurs est en entonnoir, ou en tuyau évasé par le haut, & découpé en quatre ou cinq parties, garni de deux ou trois étamines courtes, à sommets jaunes. Le calice est d’une seule piece, tubuleux, court, & divisé en quatre segmens ; l’ovaire est placé au centre du calice qui est dentelé.

Quand les fleurs sont passées, il leur succede des fruits comprimés, oblongs, assez semblables à une langue, ou à un fer de pique. Ils prennent une couleur rouge en mûrissant, & se partagent en deux loges, qui contiennent des semences menues, oblongues, applaties, pointues par les deux bouts, bordées d’un feuillet membraneux & comme aîlé, de couleur rousse.

Le lilac nous est venu selon Mathiole de Constantinople, & selon d’autres de l’orient. Il fleurit au mois d’Avril, & n’a point d’usage médicinal. Mais comme la mode regne encore de le cultiver dans nos jardins, à cause de la beauté de ses fleurs, il nous faut dire un mot de sa culture.

Lilac, (Agriculture.) rien n’est plus beau que le lilac, ou, pour parler comme tout le monde, le lilas en fleur, soit en buissons dans des plates-bandes de parterre, soit en allées, soit dans des quarrés de bosquets, sur-tout quand on les oppose, ou qu’on les entremêle avec goût. D’ailleurs, ils ont l’avantage d’être aisés à élever, de croître dans toutes sortes d’expositions & de terreins. Il est vrai qu’ils poussent plus vigoureusement dans des terres fortes & humides ; mais c’est dans les terres seches, qu’ils donnent le plus de fleurs ; & c’est aussi le cas de la plûpart des plantes.

Les lilas bleus, blancs, & pourpre-foncé, montent d’ordinaire à la hauteur de vingt piés, & forment l’embellissement des allées & des bosquets, lorsque dans le printems, la nature ouvre son sein pour enchanter nos regards ; ici le lilas-blanc étendant ses branches, produit à leurs extrémités des panaches de fleurettes argentines, soutenues sur de courts pédicules. Là, le lilas bleu présente de longues grappes de charmantes fleurs, dont l’air est embaumé ; mais le lilas pourpre nous plaît encore davantage, & par le nombre des fleurs qu’il donne, & par les touffes qui en sont plus pressées, & par l’attrait de leurs belles couleurs ; le mêlange de l’opposition ingénieuse de ces trois lilas ne sert que mieux à relever le lustre de chacun en particulier.

On multiplie les lilas, en couchant au mois d’Octobre ses jeunes branches dans la terre, ou bien en détachant ses rejettons, & les plantant tout de suite dans une terre legere, où on les laisse trois ou quatre ans, avant que de les transplanter à demeure.

Les lilas à feuilles de troëne, que nous nommons noblement lilas de Perse, ne montent point en arbre, & ne forment que des arbrisseaux qui ne s’élevent guere au-dessus de six ou sept piés ; mais c’est par cela même qu’ils servent à décorer tous |les lieux où sont placés les arbustes de leur taille. Ils donnent des bouquets plus longs, plus déliés que les autres lilas, & en même tems d’une odeur plus agréable.

Quoiqu’on puisse multiplier de rejettons, les lilas de Perse, le meilleur est de les multiplier de marcotes ; on peut les planter dans les plates-bandes des parterres ; on peut les tailler en buisson ou en globe posé sur une tige, en s’y prenant de bonne heure. Enfin, on peut les élever en caisse, mais c’est une chose inutile ; car ils ne sont point délicats, toute terre & toute exposition leur sont presque indifférentes.