L’Encyclopédie/1re édition/LOIRE, la

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LOIRE, la, (Géogr.) grande riviere de France. Elle prend sa source dans le Vivarais au mont Gerbier-le-joux, sur les confins du Velai, coule dans le Forès, le Bourbonnois, le Nivernois, cotoie le Berry, qu’elle sépare de l’Orléanois, arrose Gien & Orléans ; ensuite se tournant vers le sud-ouest, elle passe à Beaugency, à Blois, à Tours, puis vient à Saumur, sort de l’Anjou, entre dans la Bretagne, baigne Nantes ; & élargissant son lit, qui est semé d’îles, elle se perd dans l’Océan entre le Croisic & Bourgneuf.

Un poëte anglois a peint avec élegance les ravages que cause la Loire dans ses débordemens : je vais transcrire son tableau en faveur des lecteurs sensibles à la poésie de cette langue.

When this french river raisd’ with sudden rains,
Or snows dissolvd, o’erflows the adjoi’ning plains,
The husbandmen with high rais’d banks secure
Their greedy hopes ; and this he can endure :
But if with bays, and dams, they strive to force
His channel, to a new or narrow’r course,
No longer then within his banks he dwells,
First to a torrent, then a deluge swells ;
Stronger and fiercer by restraints he roars,
And knows no bound, but makes his pow’r his shores
.

Je voudrois bien que quelque bon françois nous peignît aussi le débordement excessif des droits honteux qu’on exerce sur cette riviere, sous prétexte de maintenir sa navigation, mais en réalité pour ruiner le commerce. On compte au-moins une trentaine de divers péages qui s’y sont introduits, indépendamment desquels on paie une imposition assez bien nommée le trépas de Loire, ainsi que les droits de simple, double, triple cloison, établis anciennement pour l’entretien des fortifications de la ville d’Angers. On n’en peut guere voir de plus cheres ni de plus mauvaises, à ce qu’assure un homme éclairé.

Le droit de boëte des marchands fréquentant la Loire, a été établi solemnellement à Orléans pour le balisage & le curage de la riviere, dont on ne prend aucun soin, malgré les éloges de ce curage, par le sieur Piganiol de la Force ; mais en revanche, dit avec plus de vérité l’auteur estimable des recherches sur les finances, une petite compagnie de fermiers y fait une fortune honnête & qui mérite l’attention du conseil, soit à raison du produit, soit à raison des vexations qu’elle exerce sur le Commerce.