L’Encyclopédie/1re édition/LYRIQUE

La bibliothèque libre.
◄  LYRE
LYRNESSE  ►

LYRIQUE, (Littér.) chose que l’on chantoit ou qu’on jouoit sur la lyre, la cithare ou la harpe des anciens.

Lyrique se dit plus particulierement des anciennes odes ou stances qui répondent à nos airs ou chansons. C’est pour cela qu’on a appellé les odes poésies lyriques, parce que quand on les chantoit, la lyre accompagnoit la voix. Voyez Ode.

Les anciens étoient grands admirateurs des vers lyriques, & ils donnoient ce nom, selon M. Barnés, à tous les vers qu’on pouvoit chanter sur la lyre. Voyez Vers.

On emploia d’abord la poësie lyrique à célébrer les louanges des dieux & des héros. Musa dedit fidibus divos puerosque deorum, dit Horace ; mais ensuite on l’introduisit pour chanter les plaisirs de la table, & ceux de l’amour : & juvenum curas & libra vina referre, dit encore le même auteur.

Ce seroit une erreur de croire avec les Grecs qu’Anacréon en ait été le premier auteur, puisqu’il paroît par l’écriture que plus de mille ans avant ce poëte, les Hébreux étoient en possession de chanter des cantiques au son des harpes, de cymbales & d’autres instrumens. Quelques auteurs ont voulu exclure de la poésie lyrique les sujets héroïques, M. Barnés a montré contre eux que le genre lyrique est susceptible de toute l’élévation & la sublimité que ces sujets exigent. Ce qu’il confirme par des exemples d’Alcée, de Stésichore & d’Horace, & enfin par un essai de sa façon qu’il a mis à la tête de son ouvrage sous le titre d’Ode triomphale au duc de Marlboroug. Il finit par l’histoire de la poésie lyrique, & par celle des anciens auteurs qui y ont excellé.

Le caractere de la poésie lyrique est la noblesse & la douceur ; la noblesse, pour les sujets héroïques ; la douceur, pour les sujets badins ou galans ; car elle embrasse ces deux genres, comme on peut voir au mot Ode.

Si la majesté doit dominer dans les vers héroïques ; la simplicité, dans les pastorales ; la tendresse, dans l’élégie ; le gracieux & le piquant, dans la satyre ; la plaisanterie, dans le comique ; le pathétique, dans la tragédie ; la pointe, dans l’épigramme : dans le lyrique, le poëte doit principalement s’appliquer à étonner l’esprit par le sublime des choses ou par celui des sentimens, ou à le flatter par la douceur & la variété des images, par l’harmonie des vers, par des descriptions & d’autres figures fleuries, ou vives & véhémentes, selon l’exigence des sujets. Voyez Ode.

La poésie lyrique a de tout tems été faite pour être chantée, & telle est celle de nos opéras, mais superieurement à toute autre, celle de Quinault, qui semble avoir connu ce genre infiniment mieux que ceux qui l’ont précédé ou suivi. Par conséquent la poésie lyrique & la musique doivent avoir entre elles un rapport intime, & fondé dans les choses mêmes qu’elles ont l’une & l’autre à exprimer. Si cela est, la musique étant une expression des sentimens du cœur par les sons inarticulés, la poésie musicale ou lyrique est l’expression des sentimens par les sons articulés, ou ce qui est la même chose par les mots.

M. de la Mothe a donné un discours sur l’ode, ou la poésie lyrique, ou parmi plusieurs réflexions ingénieuses, il y a peu de principes vrais sur la chaleur ou l’enthousiasme qui doit être comme l’ame de la poésie lyrique. Voyez Enthousiasme & Ode.