L’Encyclopédie/1re édition/NÉRÉIDES

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NÉRÉIDES, s. f. pl. (Mythol.) divinités marines, filles de Nérée & de Doris. Hésiode en compte cinquante, dont je suis d’autant moins obligé de transcrire ici les noms qu’Homere les rapporte un peu différemment, & qu’il n’en nomme que trente-trois. Ces noms, au reste, que ces deux poëtes donnent aux Néréides & qui sont presque tous tirés de la langue greque, conviennent fort à des divinités de la mer, puisqu’ils expriment les flots, les vagues, les tempêtes, la bonace, les rades, les îles, les ports, &c.

Faut-il donc regarder les Néréides comme des personnages métaphoriques, ainsi que leurs noms le signifient, ou comme des personnes réelles ? J’avoue que les Néréides que nomment Hésiode & Homere, ne sont la plûpart que des êtres poétiques, mais il y en a qui ont existé véritablement, telle que Carsiopée mere d’Andromede, Psammathé mere de Phoque, laquelle, selon Pausanias, étant allée dans le pays voisin du Parnasse, lui donna son nom ; ce pays, en effet, a depuis été appellé la Phocide, Thétis mere d’Achille, & quelques autres. Il faut convenir aussi qu’on a donné le nom de Néréides à des princesses qui habitoient ou dans quelques îles, ou sur les bords de la mer, ou qui se rendirent fameuses par l’établissement du commerce ou de la navigation. On le transporta ensuite non-seulement à quelques personnages poétiques, & dont l’existence n’est dûe qu’à des étymologies conformes aux qualités de leurs noms, mais aussi à certains poissons qui ont la partie supérieure du corps un peu ressemblante à celui d’une femme.

Les Néréides avoient des bois sacrés & des autels en plusieurs endroits de la Grece, sur-tout sur les bords de la mer. On leur offroit en sacrifice du lait, du miel, de l’huile, & quelquefois on leur immoloit des chevres. La néréide Dato, dit Pausanias dans ses corinthiaques, avoit un temple célebre à Gabala.

Pline, l.IX.c.v, raconte que du tems de Tibere on vit sur le rivage de la mer une néréide, & qu’un ambassadeur des Gaules avoit dit à Auguste qu’on avoit aussi trouvé dans son pays sur les bords de la mer plusieurs Néréides mortes ; mais dans les Néréides de Pline & de l’ambassadeur de Gaules à Rome, nos Naturalistes n’auroient vû que des poissons.

Les anciens monumens, de même que les médailles, s’accordent à représenter les Néréides comme de jeunes filles portées sur des dauphins ou sur des chevaux marins, tenant ordinairement d’une main le trident de Neptune, de l’autre un dauphin, & quelquefois une victoire ou une couronne. On les trouve cependant quelquefois moitié femmes & moitié poissons, conformément à ce vers d’Horace,

Definit in piscem mulier formosa supernè,

Art poét.


telles qu’on les voit sur une médaille de Marseille, ou sur quelques autres encore. (D. J.)