L’Encyclopédie/1re édition/OCHRE

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OCHRE, s. f. (Hist. nat. Bot.) ochrus, genre de plante à fleur papilionacée ; le pistil sort du calice & devient dans la suite une silique le plus souvent cylindrique, qui renferme des semences arrondies. Ajoutez aux caracteres de ce genre, que les feuilles sont rangées une à une ou par paire, & toujours terminées par une main. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante. (I)

Ochres, (Hist. nat. Minéral.) ochræ terræ metallicæ ; c’est ainsi qu’on nomme dans l’histoire naturelle des terres colorées & métalliques, formées par la décomposition des métaux qui se vitriolisent, tels que le fer, le cuivre & le zinc ; l’on voit par-là qu’il y a différentes especes d’ochres, & elles varient considérablement pour la couleur, pour la densité & par les autres terres étrangeres avec lesquelles elles sont mêlées.

L’ochre de fer doit être regardée comme une vraie mine de fer, dont on tire ce métal en y joignant une matiere inflammable qui lui rend le phlogistique qu’il avoit perdu. On trouve de l’ochre rouge que l’on nomme quelquefois rubrica ou ochre rouge naturelle ; l’ochre jaune ; elle est quelquefois d’un jaune de safran, d’autres fois elle est d’un jaune moins vif, elle est très-fine & colore les doigts ; on l’appelle quelquefois moëlle de pierre ; l’ochre brune est d’un brun plus ou moins foncé.

Toutes les ochres varient pour la consistence, il y en a qui ont la dureté des pierres, tandis que d’autres sont très-friables & se trouvent même sous la forme d’une poudre légere. Il y a de l’ochre qui a la forme d’écailles minces ou de feuillets ; telle est celle qui forme les enveloppes, dont les étites ou pierres d’aigle sont composées.

Il sera aisé de se former une idée de la formation de l’ochre, si l’on fait attention que le vitriol, toutes les fois qu’on en fait la dissolution dans l’eau, dépose une substance terreuse jaune, qui n’est autre chose que du fer privé de son phlogistique ; cette substance terreuse est une ochre pure. De même dans le sein de la terre les pyrites martiales se décomposent peu-à-peu, se changent en vitriol, qui lui-même, par l’humidité & le contact de l’air, souffre de l’altération & dépose cette terre jaune que nous appellons ochre.

Quelques auteurs parmi lesquels on compte MM. Hill & Emanuel Mendez d’Acosta, ont distingué les ochres & en ont fait différentes classes, suivant qu’elles font ou ne font point effervescence avec les acides, c’est-à-dire, d’après les différentes terres avec lesquelles les ochres se trouvent accidentellement mêlées ; mais l’ochre pure, c’est-à-dire, la terre métallique produite par la décomposition de la pyrite vitriolique, ne fait point d’effervescence avec les acides ; quand cela lui arrive, c’est un signe que l’ochre est jointe avec quelque terre calcaire. Cependant comme l’ochre est une vraie mine de fer que l’on exploite très-souvent, il est à-propos de connoître la nature des terres avec lesquelles elle peut être mêlée, afin de savoir quel fondant il sera à-propos d’y joindre pour en tirer le fer avec profit. En effet, si l’ochre est mêlée, par exemple, avec une terre calcaire, on sent qu’il sera bon de lui joindre une terre argilleuse, parce que la terre argilleuse se vitrifie avec la terre calcaire. Voyez l’art. Fondant. Cette observation peut être utile, vû que l’ochre est la mine de fer la plus commune en France, & que l’on exploite le plus ordinairement ; en effet, les ochres font des couches souvent très-considérables, & qui s’étendent dans un très-grand espace de terrein.

La substance que les Minéralogistes appellent ochre de cuivre, est un cuivre décomposé & produit par le vitriol cuivreux. Cette ochre est ou verte ou bleue ; la premiere, s’appelle vert de montagne ; la seconde, s’appelle bleu de montagne, & toutes deux sont comprises sous le nom de chrysocolle. Voyez ces différens articles.

Comme le zinc a aussi la propriété de se vitrioliser, on compte aussi une ochre de zinc, c’est la terre ou pierre calaminaire.

L’ochre qui est produite par le fer lorsqu’elle est bien pure, s’emploie dans la peinture pour les jaunes & pour les bruns ; en faisant réverberer ces ochres sous une moufle, elles deviennent d’un rouge plus ou moins vif, suivant que l’ochre est plus ou moins mêlée avec des terres étrangeres, ou suivant que la partie ferrugineuse y domine ; en essayant les ochres de nos pays de cette maniere, on verroit que souvent on fait venir de bien loin des couleurs que l’on pourroit se procurer à beaucoup moins de frais, sur-tout si on vouloit un peu examiner la terre. Le giallolino ou jaune de Naple, n’est autre chose que de l’ochre. L’ochre de rue est une ochre d’un jaune tirant sur le rouge : la couleur qu’on appelle brun rouge, est aussi une espece d’ochre. Quant à la terre d’ombre, on la regarde plutôt comme une terre bitumineuse, que comme de l’ochre.

Dans la Médecine, l’ochre comme toutes les substances ferrugineuses, est regardée comme désiccative & comme astringente. (—)