L’Encyclopédie/1re édition/ORICHALQUE

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ORICHALQUE, s. m. (Littérat.) en latin orichalcum, dans Virgile, métal mixte que nous ne connoissons plus.

L’orichalque des anciens, & le laiton des modernes, sont deux choses bien différentes. L’orichalque des anciens n’a point de nom parmi nous, parce que nous n’en avons aucune connoissance. Outre l’or, l’argent, le cuivre, l’étain, le fer, le plomb, dit Lucrece, l. VI. vers 1241, qui se trouverent séparés dans les creusets de la terre, il se fit en quelques endroits de la terre un mélange de plusieurs de ces métaux ; & ce métal mixte fut estimé le plus précieux de tous. C’est pourquoi Virgile mêle l’orichalque avec l’or dans la belle cuirasse qu’il donne à Turnus.

Ipse dehinc auro squallentem, alboque orichalco
Circumdat loricam humeris. Ænéid. l. XII. v. 87.

« Il endossa une magnifique cuirasse d’or & d’orichalque blanc ». Plaute dans plusieurs endroits de ses comédies, en parle comme d’une chose de très grand prix. Pline, l. XXXIV. sect. 2. convient aussi de l’estime générale où étoit ce métal ; mais il ajoute qu’on n’en trouvoit plus de son tems.

Au défaut de la nature, on a eu recours à l’art, & on a fait une espece d’orichalque avec de l’or, du cuivre, & de la calamine. Ce mélange de l’or & de l’airain donna lieu dans la suite de l’appeller aurichalcum, mot que les copistes postérieurs qui ne connoissoient plus l’orichalque naturel, n’ont pas manqué de mettre par-tout où ils l’ont pu, dans les anciens auteurs.

Enfin, nos Métallurgistes modernes ont composé l’orichalque avec le seul mêlange de cuivre & de pierre calaminaire ; & ils ont continué de nommer ce mêlange aurichalcum, ou orichalcum. Ainsi l’orichalque des modernes est le pur laiton. Voyez Laiton.

L’électrum des anciens, outre l’ambre qu’il désigne dans Virgile. signifie dans Pline, l. XXXIII. c. iv. un mêlange d’or & d’argent, qui est cette espece d’orichalque, qui, selon Homere, brilloit à la lumiere beaucoup plus que l’argent.

Le métal dont il est question dans Ezéchiel, ch. jv. 4. sous le terme hébreu hachasmal, est l’orichalque des anciens, & non celui des modernes, quoiqu’en dise Bochard, qui a ignoré que notre laiton est d’une invention assez récente. Peut-être enfin, que le caracoli employé par les Caraïbes dans leurs ajustemens, & dont parle le pere Labat dans ses voyages, tome II. est l’orichalque des anciens ; c’est un métal des Indes qui paroît comme de l’argent, surdoré legerement avec quelque chose d’éclatant, comme s’il étoit un peu enflammé. Les Orfévres françois & anglois qui sont aux îles, ont fait quantité d’expériences, pour imiter ce métal. On dit que ceux qui en ont approché de plus près, ont mis dans leur alliage sur six parties d’argent, trois parties de cuivre rouge purifié, & une d’or. On fait des bagues, des boules, des poignées de cannes, & autres ouvrages de ce métal, qui ont une grande beauté, quoiqu’inférieur au caracoli naturel des Indiens. (D. J.)