L’Encyclopédie/1re édition/PARANYMPHE

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PARANYMPHE, (Hist. grec. & rom.) les Grecs appellent paranymphes, ceux qui selon la coutume, conduisoient l’épouse dans la maison de son mari ; ils donnoient le nom de nymphes aux épousées. Les Romains qui observoient la même cérémonie dans la conduite de l’épousée, appelloient pronubus, le conducteur, & pronuba, si c’étoit une femme qui eût cet emploi. Festus a dit, pronubæ adhibebantur nuptiis quæ semel nupserunt causa auspicii, ut singulare perseveret matrimonium. Et Isidore, liv. IX. pronuba dicta est eo quod nubentibus præest, quæque nubantem viro conjungit, ipsa est & paranympha. Cette conduite se faisoit avec des circonstances singulieres.

Je suppose les cérémonies usitées dans les fiançailles, & les sacrifices accomplis suivant la coutume ; le jour ayant cédé la place à la nuit, on se mettoit en état de conduire l’épousée chez son mari, & l’on commençoit par mettre les hardes de l’épousée dans un panier d’osier, que Festus appelle cumerum ; le porteur étoit suivi de plusieurs femmes tenant dans leurs mains une quenouille avec le lin, qu’elles mettoient sur un fuseau ; les parens, les amis, & l’époux, marchoient ensuite, suivis de trois jeunes garçons, vétus d’une robe blanche bordée de pourpre, que l’on appelloit patrini & matrini ; l’un des trois portoit un flambeau allumé, & qui étoit fait d’une branche d’épine blanche, parce que, selon le témoignage de Varron & de Festus, cette espece de bois étoit heureuse, & chassoit les enchantemens que les Romains craignoient beaucoup dans cette occasion.

Si nous en croyons Pline, liv. XVI. chap. xviij. on portoit plusieurs flambeaux, que les amis communs tâchoient d’enlever, de crainte que les mariés n’en fissent un usage de mauvais augure, & qui présageoit la mort prochaine de l’un ou l’autre.

Ce n’est pas encore tout ce que l’on pratiquoit. Pline & Virgile nous apprennent que l’épouse étant arrivée à la porte de la maison, les parens & le mari jettoient des noix aux enfans qui accouroient dans la rue.

Tibi ducitur uxor ; Sparge, marite, nuces.

C’est Virgile qui le recommande dans son éclogue huitieme, dont Servius a donné plusieurs raisons : les noix, dit-il, étoient consacrées à Jupiter ; on en jettoit aux enfans, pour marquer que le mari abandonnoit les jeux enfantins, pour s’appliquer aux affaires sérieuses. (D. J.)

Paranymphe, chez les Hébreux, étoit l’ami de l’époux, celui qui faisoit les honneurs de la noce, & qui conduisoit l’épouse chez l’époux.

Les rabbins disent que le principal devoir du paranymphe parmi les Israélites, étoit d’observer que l’époux & l’épouse ne se fissent aucune fraude dans ce qui regarde le sang qui étoit la marque de la virginité de l’épouse, & dont parle Moïse, Deuteronom. chap. xxij. 14. & 15. de peur que l’époux ne supprimât le linge où ce sang paroissoit, ou que l’épouse n’en supposât de faux. Parmi les Grecs, le paranymphe gardoit la porte du lit nuptial, & avoit soin de l’économie du repas & des autres réjouissances. Quelques-uns ont crû qu’il en étoit de même chez les Hébreux, & que l’architriclinus, dont il est parlé dans l’Evangile à l’occasion des noces de Cana, & que nous traduisons par intendant ou maître d’hôtel, n’étoit autre que le paranymphe. S. Gaudence de Bresse assure, sur la tradition des anciens, que pour l’ordinaire ce président ou ordonnateur du festin nuptial étoit pris du nombre des prêtres, afin qu’il eût soin qu’il ne s’y commît rien de contraire aux regles de la religion & à la bienséance. C’étoit lui qui régloit les fonctions des officiers, & la disposition du repas. Il est quelquefois désigné dans l’Ecriture sous le nom d’ami de l’époux, amicus sponsi, Joann. I I I. V. 29. Calmet, Dictionn. de la Bible.

Le nom de paranymphe est commun dans l’histoire bysantine, pour signifier l’officier chargé par l’empereur de conduire & remettre les princesses impériales mariées à quelque prince étranger, sur les terres ou entre les mains de leur époux, & Grégoire de Tours, liv. VI. chap. xlv. donne le nom de paranymphe au duc Bobon, qui fut chargé de conduire en Espagne la princesse Rigunthe, fille de Chilpéric I. mariée au roi des Visigoths.

Il est fait mention du paranymphe dans les capitulaires de Charlemagne, dans les lois des Lombards, & dans les euchologes des Grecs.

On donnoit le nom de paranymphes dans les écoles de théologie de Paris, à une cérémonie qui se faisoit à la fin de chaque cours de licence, & dans laquelle un orateur appellé paranymphe, après une harangue, apostrophoit par rang tous les bacheliers quelquefois par des complimens, & plus souvent par des épigrammes mordantes, auxquelles ceux-ci repliquoient par de semblables pieces. La faculté de Théologie vient tout récemment de réformer cet abus, en réduisant les paranymphes à de simples harangues.