L’Encyclopédie/1re édition/PINDARIQUE

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PINDARIQUE, adj. (Littérat.) en Poésie, se dit d’une ode à l’imitation de celle de Pindare. Voyez Ode.

Le style pindarique se distingue par la hardiesse & la sublimité des tours poétiques, par les transitions frappantes & inattendues, par des écarts, des digressions, en un mot cet enthousiasme & ce beau désordre, dont M. Despréaux a dit en parlant de l’ode :

Son style impétueux souvent marche au hasard,
Souvent un beau désordre est un effet de l’art.

Pindare, de qui le style pindarique a tiré son nom, étoit de Thebes ; il fleurissoit environ 478 ans avant Jesus-Christ, & fut contemporain d’Eschyle, d’Anacréon, & d’Eurypide. Quand Alexandre-le-Grand ruina la ville de Thebes, il voulut que la maison où ce poëte avoit demeuré fut conservée.

De tous les ouvrages de ce poëte, il ne nous reste qu’un livre d’odes faites à la louange des vainqueurs qui remportoient le prix aux jeux publics de la Grece, aussi sont-elles intitulées les olympiques, les neméenes, les pythyques, lesisthmiques. Le nom de Pindare n’est guere plus le nom d’un poëte que celui de l’enthousiasme même. Il porte avec lui l’idée de transports, d’écarts, de désordre, de digressions lyriques ; cependant il sort beaucoup moins de ses sujets qu’on ne le croit communément ; ses pensées sont nobles, sentencieuses, son style vif & impétueux, ses saillies sont hardies ; mais quoiqu’il paroisse quelquefois quitter son sujet, il ne le finit jamais sans y revenir.

Les poëmes de Pindare sont difficiles pour plusieurs raisons ; 1°. par la grandeur même des idées qu’ils renferment ; 2°. par la hardiesse de s tours ; 3°. par la nouveauté des mots qu’il a souvent fabriqués exprès pour l’endroit où il les place ; & enfin parce qu’il est rempli d’une érudition détournée, tirée de l’histoire particuliere de certaines familles & de certaines villes, qui ont eu peu de part dans les révolutions connues de l’histoire ancienne.

Les hardiesses qui regnent dans ses odes, & surtout l’irrégularité de sa cadence & de son harmonie, ont fait imaginer à quelques poëtes qu’ils avoient fait des odes pindariques, parce que leurs vers se ressentoient du même délire, mais le public n’en a pas jugé de même. Cowley est de tous les auteurs anglois celui qui a le mieux réussi à imiter Pindare.

Dans la composition d’une ode pindarique le poëte doit d’abord tracer le plan général de la piece, marquer les endroits où les saillies élégantes & les efforts d’imagination produisent un plus bel effet, & enfin voir par quelle route il pourra revenir à son sujet. Voyez Enthousiasme.