L’Encyclopédie/1re édition/PLACENTA
PLACENTA ou ARRIERE-FAIX, (Anat.) c’est une masse ronde & mollette que l’on trouve dans la matrice d’une femme grosse, où les anciens croyoient que le sang étoit purifié & préparé pour la nourriture du fœtus. Voyez nos Pl. d’Anat. & leur explic. Voyez aussi Fœtus.
C’est pourquoi on l’appelle encore hepar uterinum, le foie de la matrice, comme s’il faisoit l’office d’un foie dans la préparation du sang. Voyez Foie. Les modernes l’appellent placenta, c’est-à-dire, gâteau ou tourteau de la matrice, à cause qu’il a une forme de tourteau.
Quelques-uns croient que le placenta n’est qu’une masse de sang coagulé, parce qu’il se dissout quand on le presse ou quand on le lave ; & que son véritable usage consiste à servir d’oreiller aux vaisseaux ombilicaux qui posent dessus. Voyez Ombilical.
Sa figure est assez semblable à celle d’une assiette sans rebord : son diametre est de huit pouces environ, & quelquefois un pié. Il est rond & généralement concave ou convexe. Le côté concave est adhérent à l’uterus, & il est inégal, ayant différentes protubérances & différentes cavités, au moyen desquels il fait des impressions sur l’uterus, qui en fait réciproquement sur le placenta. Quoi qu’en disent quelques-uns, sa place dans l’uterus n’est pas fixe ou certaine.
Les femmes n’ont qu’un placenta, à moins qu’elles n’accouchent d’enfans jumeaux, &c. cependant, en général, le nombre des placenta répond à celui des fœtus. Dans quelques brutes, particulierement dans les vaches & dans les brebis, le nombre en est fort grand : il y en a quelquefois près d’un cent pour un seul fœtus, mais ils sont petits, & ressemblent à des glandes conglomérées d’une grosseur moyenne.
Du côté extérieur ou convexe, qui a pareillement ses protubérances, quoique recouvertes d’une membrane fort unie, sortent les vaisseaux ombilicaux, qui se distribuent en grande abondance dans toute la substance du placenta.
Il y en a même qui s’imaginent que cette partie n’est qu’un plexus de veines & d’arteres, dont les extrémités s’abouchent dans celles des vaisseaux hypogastiques, forment & entretiennent la circulation entre la mere & le fœtus ; car ce côté du placenta, qui est adhérent à la matrice, paroît n’être autre chose que les extrémités d’un nombre infini de petits filets, lesquels, dans le tems du travail, s’échapent des pores qui sont dans les côtés des vaisseaux sanguins hypogastriques, où ils s’étoient insinués, occasionnent l’écoulement des menstrues, jusqu’à ce que les parties de l’uterus se rapprochent, ou que les pores se contractent par degrés, à cause de l’élasticité naturelle des vaisseaux. Voyez Menstrue, Circulation, &c.
Les Anatomistes de l’acad. roy. des Sciences de Paris ont eu de grandes contestations sur la question de savoir si le placenta a quelque tunique extérieure, par laquelle il soit attaché à la matrice. M. Mery soutient qu’il n’y en a point, & que rien n’empêche le sang de la mere de passer de la matrice dans le placenta, & de-là au fœtus ; M. Rohault tient aussi pour cette opinion ; mais MM. Vieussens & Winslow soutiennent le contraire. Dans un autre mémoire M. Rohault tâche de faire voir que le placenta n’est pas une partie particuliere, mais seulement une portion du chorion condensé ou épaissi. Voyez Chorion.
Placenta, maladie du, (Medec.) on connoît la structure du placenta, c’est une masse presque charnue, d’une figure orbiculaire, applatie, composée de ramifications des arteres & des veines ombilicales ; le placenta n’est jamais double, si ce n’est dans les jumeaux ; il est attaché ordinairement au fond de la matrice, par une légere peau interposée, d’où part un cordon dans l’endroit où elle est couverte d’une membrane tenace, toute vasculeuse, attachée par une toile cellulaire, & par des fibres entrelacées les unes dans les autres. Le placenta est doué d’une action particuliere, qui cesse au moment de l’accouchement ; mais après cette opération, il doit être séparé de la matrice, & tiré dehors.
Si avant le tems on détache cette partie de la matrice, il en résulte un avortement inévitable, & souvent une hémorrhagie mortelle pour la mere & l’enfant, quand pour tirer le placenta il faut avoir recours à la main. Cette séparation se fait d’elle-même, lorsqu’il y a beaucoup de sang, ou qu’il coule rapidement dans les vaisseaux ; lorsqu’il arrive quelque mouvement déreglé dans la matrice, que le fœtus vient à regimber, que le cordon ombilical est court, ou que son action cesse trop tôt.
Après l’exclusion du fœtus, le placenta, qui reste adhérent à la matrice, s’en détache par les mouvemens des fibres de ce viscere, & par la force de la circulation qui y subsiste ; on favorise ce détachement par les frictions sur le ventre, & en tirant doucement le cordon ombilical ; si cette manœuvre ne réussit point, les auteurs conseillent de séparer le placenta de la matrice, en glissant doucement la main auprès du cordon ; car en le touchant trop fortement on renverseroit la matrice : mais si les vuidanges ne suivent point, il faut plutôt le laisser jusqu’à ce qu’il vienne de lui-même, en soutenant aussi le ventre.
Si le placenta est adhérent, & qu’il ait encore un mouvement vital, il faut attendre jusqu’à ce qu’il se sépare de lui-même. Quand il y a une portion séparée du placenta, ou qu’il est rompu (ce qu’on connoît par des lochies plus abondantes), il convient de favoriser sa sortie en y mettant la main. Si le placenta est retenu par le resserrement de l’ouverture de la matrice, il est plus à-propos d’attendre que la construction produite par l’irritation, vienne à cesser d’échauffer la partie par de douces fomentations, & de soutenir le ventre, que d’employer la force pour venir à-bout de l’arracher ; car dans la contraction des muscles abdominaux, le placenta sortira librement avec les grumeaux formés par le sang amassé dans cette partie. Ce sont là du moins les conseils de Deventer, homme profondément versé dans l’art des accouchemens. (D. J.)
Placenta, (Botan.) l’analogie qu’on a cru remarquer entre les animaux & les plantes a introduit ce terme en botanique, pour désigner un corps qui se trouve placé entre les semences & leur enveloppe, & qui sert à préparer leur nourriture. Ce corps est différent du cordon qui porte la nourriture à ces mêmes semences. (D. J.)